Réf. : Projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, 19 juin 2018
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par Vincent Téchené, Rédacteur en chef de Lexbase Hebdo - édition affaires
le 27 Juin 2018
Le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises, dit projet de loi «PACTE» acronyme de «Plan d'action pour la croissance et la transformation des entreprises» a été présenté en Conseil des ministres le 18 juin 2018 et enregistré à la présidence de l’Assemblée nationale le lendemain. Son examen est prévu par le Parlement à partir de septembre 2018 selon la procédure accélérée.
Il convient d’ores et déjà de se familiariser avec ce texte aux dispositions très disparates, composé de 73 articles mais dont il est fort à parier qu’il devrait être encore plus fourni à l’issue des débats parlementaires.
Nous vous proposons donc un rapide tour d’horizon des articles de ce texte.
Article 1er : simplification des démarches des entreprises lors de leur création, de la modification de leur situation et de la cessation de leur activité
Il prévoit de substituer aux différents réseaux de CFE un guichet unique électronique devant constituer l’interface entre les organismes actuellement destinataires des informations collectées par les CFE et les entreprises, quels que soient l’activité, le lieu d’implantation et la forme juridique de ces dernières. Cette mesure s’accompagne par voie de conséquence d’une généralisation de la voie dématérialisée comme modalité d’accomplissement des formalités.
L’article prévoit une entrée en vigueur de ce nouveau dispositif au 1er janvier 2021.
Article 2 : répertoires et registres ayant pour objet de recueillir et de diffuser l’information légale concernant les entreprises
Il habilite le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi pour créer un registre dématérialisé des entreprises ayant pour objet de centraliser et de diffuser les informations les concernant. Il habilite également le Gouvernement à simplifier les obligations déclaratives des entreprises et les modalités de contrôle des informations déclarées.
Article 3 : modifications du dispositif d’inscription des journaux habilités à publier des annonces judiciaires et légales (AJL) prévu par la loi n° 55-4 du 4 janvier 1955
Il prévoit pour l’essentiel :
- l’ouverture aux services de presse en ligne au sens de l’article 1er de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 (N° Lexbase : L8952IEB) de l’habilitation à publier des AJL ;
- l’augmentation du niveau d’exigence quant à la surface consacrée aux contenus d’information pour les titres publiant des AJL ;
- la suppression des habilitations par arrondissements ;
- l’extension de la tarification au forfait des AJL.
Article 4 : suppression de l’obligation de suivre le stage de préparation à l’installation pour les artisans
Actuellement, le futur chef d’entreprise artisanale a l’obligation de suivre auprès du réseau des CMA le stage de préparation à l’installation (SPI) d’une durée de 30 heures avant de pouvoir s’immatriculer au répertoire des métiers. Les chambres de métiers ont l’obligation de réaliser le stage dans un délai d’un mois à compter de la demande. A défaut, le créateur est enregistré de droit au répertoire des métiers.
Il est donc prévu la suppression de cette obligation et d’harmoniser les dispositions relatives à ce stage sur celles prévues pour le stage d’initiation à la gestion organisé par les Chambres de commerce et d’industrie (CCI) au bénéfice des commerçants.
Article 5 : mise en œuvre d’actions collectives de communication et de promotion à caractère national en faveur de l’artisanat et des entreprises artisanales
Article 6 : modifications concernant les seuils d’effectifs
Il engage tout d’abord un processus d’harmonisation du mode de calcul des effectifs entre les différentes législations, en reprenant les principales caractéristiques de celui actuellement prévu à l’article R. 130-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L5524LEC).
Par ailleurs, il introduit une règle selon laquelle un seuil d’effectif est franchi uniquement lorsque celui-ci a été atteint pendant cinq années civiles consécutives.
Ces deux mesures sont appliquées pour les seuils de onze, vingt et cinquante salariés. Elles s’appliquent aux seuils du Code de la Sécurité sociale mais également à certains seuils figurant dans d’autres codes (Code du tourisme, Code général des collectivités territoriales) et législations.
On relèvera que :
- le nombre de seuils fixés à 20 salariés est réduit de manière substantielle ;
- certains d’entre eux sont supprimés ;
- d’autres sont relevés de 20 à 50 salariés pour que davantage d’entreprises bénéficient du taux réduit de la contribution au fonds national d’aide au logement, de l’exonération de participation à l’effort de construction et de l’absence d’obligation d’un règlement intérieur dans l’établissement. En outre, plusieurs seuils intermédiaires sont supprimés ;
- deux seuils sont relevés de 200 à 250 salariés, à savoir celui à partir duquel la mise en place d’un local syndical commun est obligatoire et celui concernant la communication aux actionnaires des rémunérations les plus élevées ;
- le seuil de l’immatriculation obligatoire au répertoire des métiers est relevé de dix à onze salariés.
Article 7 : évolution de la gouvernance de l’agence Business France
Article 8 : encadrement de la durée des soldes
Il prévoit de modifier la durée des soldes. Actuellement de six semaines, la durée serait comprise entre trois et six semaines, les dates et les heures de début et de fin devant être fixées par un arrêté du ministre chargé de l’Economie.
Selon l’exposé des motifs, cet arrêté fixera la durée à 4 semaines.
Article 9 : modification des conditions de désignation des commissaires aux comptes dans les sociétés commerciales
Il introduit des seuils pour la désignation d’un commissaire aux comptes par les SA et les SCA définis en fonction du chiffre d’affaire, du total du bilan et du nombre de salariés. Un décret fixera le niveau de ces seuils et harmonisera le niveau des seuils pour les autres formes sociales au niveau des seuils européens de référence : 4 millions d’euros de bilan, 8 millions d’euros de chiffre d’affaires et 50 salariés.
Cet article introduit en outre une disposition imposant aux sociétés qui contrôlent d’autres sociétés à désigner un commissaire aux comptes, dès lors que l’ensemble formé par la société mère et ses filiales excède les seuils de désignation, indépendamment de l’obligation d’établir des comptes consolidés.
La règle spécifique aux sociétés par actions simplifiées, qui impose la désignation d’un commissaire aux comptes dès lors que la société est liée à une autre par un lien de contrôle, sera supprimée.
Article 10 : réforme de l’Ordre des experts-comptables
Article 11 : fin d’activité
Il prévoit que la radiation du régime de Sécurité sociale pour absence de chiffre d’affaires ou de recettes ou de déclaration de chiffre d’affaires ou de revenus pendant deux années consécutives emporte de plein droit radiation des fichiers, registres ou répertoires tenus par les autres administrations, personnes ou organismes destinataires des informations recueillies par les centres de formalités des entreprises, à savoir notamment les fichiers des services fiscaux, le registre du commerce et des sociétés, le répertoire des métiers et le répertoire SIRENE.
L’entrepreneur individuel pourra s’opposer à cette radiation après avoir été informé, dans un délai fixé par décret en Conseil d’Etat.
Article 12 : obligation d’un compte bancaire dédié à l’activité professionnelle pour les micro-entrepreneurs
Il est prévu que l’obligation d’un compte bancaire dédié à l’activité professionnelle ne soit générée que lorsque le micro-entrepreneur dépasse le seuil de 5 000 euros de chiffre d’affaires pendant deux années civiles consécutives.
Article 13 : modification du livre VII du Code de commerce pour adapter l’offre de services des CCI aux nouvelles exigences de leurs ressortissants et des territoires
Article 14 : rémunération du dirigeant en redressement judiciaire
Le juge-commissaire n’aura plus l’obligation de fixer la rémunération afférente aux fonctions exercées par le débiteur, s’il est une personne physique, ou par les dirigeants de la personne morale, en cas de redressement judiciaire.
Le principe sera désormais le maintien de cette rémunération, sauf décision contraire du juge-commissaire saisi sur demande de l’administrateur ou du ministère public. Dans les procédures sans administrateur judiciaire, le mandataire judiciaire pourra également saisir le juge-commissaire.
Article 15 : rétablissement professionnel et liquidation judiciaire simplifiée
Il est prévu, l’obligation pour le tribunal de s’interroger systématiquement sur l’opportunité de faire bénéficier d’un rétablissement personnel le débiteur personne physique qui répond aux conditions fixées aux articles L. 645-1 (N° Lexbase : L2745LBB) et L. 645-2 (N° Lexbase : L7249IZI) du Code de commerce et qui donne son accord.
Il est, par ailleurs, proposé de modifier les articles L. 626-27 (N° Lexbase : L7300IZE), L. 631-7 (N° Lexbase : L3100I4L), L. 631-20-1 (N° Lexbase : L3426ICU) et L. 641-1 (N° Lexbase : L4160K8L) du Code de commerce afin de rendre obligatoire l’examen des critères de cette procédure pour le tribunal, qu’il soit saisi d’une demande de résolution du plan de sauvegarde ou de redressement judiciaire, d’une demande de redressement émanant du débiteur, ou d’une demande de liquidation judiciaire émanant du débiteur, du ministère public ou d’un créancier.
Par ailleurs, la procédure de liquidation simplifiée est modifiée afin de permettre un traitement rapide et simplifié des procédures de liquidation ouvertes à l’encontre des plus petits débiteurs. Il développe le recours à cette procédure en la rendant, par principe, obligatoire pour les petites et moyennes entreprises employant cinq salariés au maximum et réalisant moins de 750 000 euros de chiffre d’affaires.
Article 16 : habilitation du Gouvernement à réformer par voie d’ordonnance le droit des sûretés
L’article 16 comprend une habilitation du Gouvernement à réformer par voie d’ordonnance le droit des sûretés dans un délai de 24 mois à compter de la publication de la loi. L’objectif affiché est ici de «simplifier le droit des sûretés et renforcer son efficacité, tout en assurant un équilibre entre les intérêts des créanciers, titulaires ou non de sûretés, et ceux des débiteurs et des garants».
Le périmètre de la réforme envisagée est des plus larges puisqu’il comprend : le cautionnement, les privilèges, le gage de meubles corporels, les sûretés mobilières spéciales, la publicité des sûretés mobilières, le nantissement de créance, la réserve de propriété, la cession de créance à titre de garantie, la fiducie-sûretés, les sûretés réelles immobilières. Il est également prévu de «simplifier, clarifier et moderniser les règles relatives aux sûretés et aux créanciers titulaires de sûretés [dans le cadre d’une procédure collective]».
C’est donc la quasi-totalité du droit des sûretés qui devrait être réformé.
Article 17 : publicité du privilège du Trésor
Il prévoit, d’une part, de fixer des dates fixes de publicité du privilège du Trésor au dernier jour de chaque semestre civil afin d’en accroître la lisibilité pour les tiers, les débiteurs et les créanciers et de simplifier les modalités de la publicité du privilège du Trésor.
Il ajoute, d’autre part, une nouvelle exception à la publicité du privilège du Trésor : en cas de dépôt par le redevable d’une réclamation d’assiette régulière, assortie d’une demande de sursis de paiement.
Article 18 : délais devant être pris en compte par le comptable public pour émettre son titre définitif sans entraver l’action du mandataire ou du liquidateur judiciaire et sans rallonger les délais de la procédure collective en cours
Il est ainsi prévu un délai maximum de 12 mois en cas d’établissement de l’impôt uniquement pour les procédures de redressement et de sauvegarde, ou la date butoir du dépôt par le mandataire de son compte rendu de fin de mission dans le cas d’une procédure de contrôle ou de rectification de l’impôt. Dans le cadre des liquidations judiciaires ainsi que des liquidations judiciaires simplifiées, le délai de droit commun, prévu par l’article L. 624-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L7294IZ8), s’applique.
Article 19 : clauses de solidarité stipulées dans les contrats de baux
Il est ici proposé de modifier l’article L. 642-7 du Code de commerce (N° Lexbase : L7333IZM) afin de réputer non écrite, en plan de cession, toute clause d’un contrat de bail imposant au cessionnaire des dispositions solidaires avec le cédant.
Article 20 : réforme de l’épargne retraite
Le I de l’article 20 introduit, dans la partie du Code monétaire et financier dédiée aux produits d’épargne, un chapitre consacré au plan d’épargne retraite, en vue de préciser la définition et les règles communes applicables aux produits.
Le II modifie l’article L. 137-16 du Code de la sécurité sociale (N° Lexbase : L1940KGX) afin de généraliser le taux de forfait social réduit (16 % au lieu de 20 %) que la loi «Macron» (loi n° n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques N° Lexbase : L4876KEC) avait introduit pour l’épargne salariale versée dans un PERCO dont les fonds sont investis à hauteur de 7 % minimum en titres de petites et moyennes entreprises et d’entreprises de taille intermédiaire. Il s’agit de tirer les conséquences de la réforme de l’épargne retraite en appliquant ce taux de forfait social réduit aux sommes versées par l’employeur qui sont affectées à tout plan d’épargne retraite d’entreprise prévoyant que l’encours en gestion pilotée est investi par défaut, c’est-à-dire en l’absence de choix différent de l’épargnant, à hauteur de 10 % en titres éligibles au PEA-PME. Un décret précisera les conditions de sécurisation progressive de cette épargne.
Le IV de l’article habilite le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance et dans un délai de 12 mois à compter de la promulgation de la loi, des mesures d’harmonisation de l’ensemble des produits, des mesures spécifiques aux produits collectifs, des mesures spécifiques aux produits individuels, des mesures propres aux produits assurantiels ainsi que toutes les mesures de coordination nécessaires.
Article 21 : contribution de l’assurance-vie au financement de l’économie tout en offrant à l’épargnant
Le I de l’article met en œuvre un produit simplifié par la mutualisation des valeurs de rachat au sein de la communauté des assurés, avant répartition de la provision collective de diversification différée, tout en conservant le principe fondamental du produit que constitue la garantie à échéance. La valeur de rachat avant échéance correspondra dans le cas général à une quote-part des actifs du canton, ce qui permet d’assouplir l’allocation des actifs pour l’assureur, qui aura la possibilité de gérer les contrats eurocroissance dans leurs anciens et nouveaux formats au sein d’une même provision comptable.
Le II de l’article clarifie en premier lieu les modalités de paiement en titres en cas de rachat ou de dénouement du contrat pour inciter à l’investissement sur les supports non côtés et prévoit notamment une présomption d’acceptation par le bénéficiaire de cette modalité de paiement du contrat lorsqu’elle est retenue par le souscripteur.
L’article 21 ouvre également la possibilité pour des particuliers d’investir dans des fonds professionnels dans le respect de conditions liées à leur patrimoine, à leurs connaissances ou à leur expérience en matière financière. Les supports d’investissements concernés et les règles d’investissement seront précisés par décret en Conseil d’Etat.
Il est en fin précisé que le versement de la prime d’un contrat d’assurance-vie peut être fait uniquement en numéraire, et non par apport en titres.
Les III, IV, V sont enfin des mesures de coordination. Elles prévoient notamment la neutralité fiscale pour l’assuré de la transformation de son ancien contrat eurocroissance dans un contrat répondant aux nouvelles caractéristiques.
Article 22 : simplification de l’accès des entreprises aux marchés financiers
Il est d’abord prévu un rehaussement du seuil d’établissement du prospectus. Cette mesure est rendue nécessaire par l’entrée en vigueur complète, à compter du 21 juillet 2019, des dispositions du Règlement 2017/1129 du 14 juin 2017 (N° Lexbase : L0645LGY), dit «Prospectus 3». Toutefois, dès le 21 juillet 2018, les Etats membres peuvent fixer le seuil de soumission à un prospectus européen pour les offres de titres comprises entre 1 et 8 millions d’euros, aucun prospectus ne pouvant être imposé en-deçà d’un million d’euros et le recours au prospectus étant obligatoire au-delà de 8 millions d’euros.
Le seuil d’exemption de prospectus serait fixé à 8 millions d’euros, soit le montant le plus élevé permis par le Règlement européen. Par ailleurs est proposée la suppression de la condition relative à la majorité du capital de l’émetteur, qui détermine le seuil actuel de prospectus (entre 100 000 euros et 5 millions d’euros) et le plafond des offres de financement participatif qui lui est lié (entre 1 million et 2,5 millions d’euros).
Il est prévu de créer, pour les offres «directes» de titres non cotés d’un montant inférieur à 8 millions d’euros, un document d’information analogue au document d’information réglementaire synthétique ou «DIRS» utilisé pour les offres de financement participatif.
Il est ensuite prévu un abaissement du seuil de retrait obligatoire de 95 % aujourd’hui à 90 %.
Il est également prévu d’améliorer l’accessibilité du droit des sociétés. Les mesures envisagées font suite à des débats anciens et sont inspirées du rapport du Haut comité juridique de place (HCJP) du 8 janvier 2018 proposant d’améliorer la lisibilité du droit français des sociétés, en ce qui concerne les sociétés cotées. Il est donc proposé de consacrer une division spécifique du Code de commerce aux sociétés cotées et à transférer dans le Code monétaire et financier certaines dispositions issues de la législation européenne relative aux marchés financiers. Le projet de loi habilite le Gouvernement à légiférer par voie d’ordonnance sur ce point.
De même, le Gouvernement est habilité à reformer le droit français des offres au public de titres financiers afin de procéder à une clarification du droit rendue nécessaire par le Règlement européen avant le 21 juillet 2019.
Il est proposé de procéder, par voie d’ordonnance, à la «désurtransposition» de différentes mesures relatives aux conditions de vente de produits et de services financiers lors de toute prise de contact non sollicitée afin de mettre notre droit en conformité avec le droit européen.
Article 23 : mesures destinées à poursuivre le renforcement de l’attractivité de la place financière
Cet article prévoit, d’abord, la mise en place d’une mesure de dispense temporaire d’affiliation au régime obligatoire de retraite pour les salariés qui seraient relocalisés à l’avenir en France, pour faciliter les mobilités professionnelles. Cette dispense serait accordée pour une durée de trois ans (renouvelable une fois) et couvrirait l’affiliation au régime de retraite obligatoire de base et complémentaire. Cette mesure serait subordonnée à la double condition :
- de ne pas avoir été affilié en France au cours des cinq dernières années ;
- et d’être déjà affilié à un régime d’assurance.
Il sera fixé par décret un seuil de versement au régime d’assurance vieillesse pris en remplacement de l’affiliation à l’assurance vieille de base et complémentaire.
L’article vise également à rendre possible la récupération des bonus des preneurs de risques travaillant au sein des établissements de crédit, sociétés de gestion de portefeuille et entreprises d’investissement, et à exclure les bonus récupérables du calcul de l’indemnité de licenciement et de l’indemnité accordé par le juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul.
Il propose, par ailleurs, une adaptation du régime des succursales d’entreprises d’investissement de pays tiers.
Cet article met également en conformité le cadre législatif français au regard des textes européens concernant les dispositifs de cantonnement des actifs illiquides, possibles dans des circonstances exceptionnelles, lorsque la cession de certains actifs d’un organisme de placement collectif ne serait pas conforme à l’intérêt des porteurs de parts ou actionnaires.
Article 24 : cadre juridique de l’exploitation des données de connexion par l’AMF au cours de ses enquêtes
Le Conseil constitutionnel (Cons. const., 21 juillet 2017, n° 2017-646/647 QPC N° Lexbase : A3325WNH ; lire N° Lexbase : N9605BWN) a censuré le premier alinéa de l’article L. 621-10 du Code monétaire et financier (N° Lexbase : L7283IZR) permettant à l’Autorité des marchés financiers de se faire communiquer les données conservées et traitées par les opérateurs de télécommunications.
L’article 24 du projet de loi prévoit :
- de soumettre les demandes d’accès aux données de connexion à l’autorisation préalable d’un contrôleur des données de connexion, entité administrative indépendante qui en apprécierait le bien-fondé :
- de limiter le recours à ces données aux manquements les plus graves (les abus de marché) ;
- de limiter leur conservation dans le temps et d’interdire leur utilisation à d’autres fins.
Article 25 : mesures relatives aux infrastructures de marché
Il transpose en droit français le considérant 7 de la Directive 98/26 (N° Lexbase : L9966AUN ; dite Directive «Finalité») à l’article L. 330-1 du Code monétaire et financier afin de faire bénéficier certains systèmes de paiement spécifiques et systémiques établis dans un pays tiers des protections apportées par cette Directive.
Il introduit également une optionalité dans l’obligation d’obtenir le statut d’établissement de crédit pour une chambre de compensation.
Il élargit enfin sous certaines conditions la liste des entités pouvant participer à une chambre de compensation et à un système de règlement interbancaire et de règlement livraison d’instruments financiers.
Article 26 : création d’un régime pour les ICO
Cet article entend permettre à l’AMF de délivrer un visa aux acteurs qui souhaiteraient émettre des jetons destinés notamment au marché français pour le financement d’un projet ou d’une activité, sous réserve qu’ils respectent certaines règles de nature à éviter des abus manifestes et à informer et protéger l’investisseur.
L’AMF se verrait ainsi confier le soin d’examiner les documents élaborés par les émetteurs de jetons en amont de leur offre («white paper»). Elle pourrait en outre exiger que les émetteurs se dotent d’un statut de personne morale établie ou immatriculée en France, mettent en place un mécanisme de séquestre des fonds recueillis, ou tout outil d’effet équivalent, et un dispositif d’identification et de connaissance du client.
Les acteurs ainsi labellisés figureraient sur une «liste blanche», sur laquelle l’AMF communiquerait auprès du grand public, qui identifierait les acteurs qui respectent ces règles et leur fournirait un gage important de respectabilité auprès des souscripteurs.
Les jetons présentant les caractéristiques d’un titre financier resteraient néanmoins soumis au régime de l’offre au public de titres financiers.
Article 27 : élargissement des instruments éligibles au PEA-PME
Cet article permettrait d’introduire dans les PEA-PME, en plus des titres de capital (ou donnant accès au capital) des PME-ETI , les autres titres proposés sur les plateformes de financement participatifs, tels que les titres participatifs, les obligations à taux fixe et les minibons.
Article 28 : émission d’actions de préférence
L’article prévoit :
- d’autoriser la création d’actions de préférence à droit de vote multiple et d’assouplir la création d’actions de préférence à droit de vote double en supprimant l’obligation pour celles-ci d’être entièrement libérées et de justifier d’une inscription nominative depuis au moins deux ans ;
- d’étendre la possibilité de retirer le droit préférentiel s’applique de souscription à toutes les actions de préférence comportant des droits financiers limités ;
- de préciser que la procédure des avantages particuliers s’applique non seulement aux actionnaires existants, mais aussi aux personnes qui le deviennent au moment de la souscription ;
Article 29 : dispositif Entreprise solidaire d’utilité sociale («ESUS»)
Cet article prévoit trois séries d’amélioration du dispositif :
- en faciliter l’accès, notamment dans le champ de la transition écologique, de la promotion culturelle ou de la solidarité internationale ;
- simplifier les modalités d’appréciation de l’impact des activités d’utilité sociale sur le modèle économique des entreprises candidates à l’agrément ;
- supprimer l’obligation d’inscrire dans les statuts des entreprises candidates à l’agrément l’encadrement des écarts de rémunération et harmoniser à l’ensemble des entreprises éligibles à l’application de cet encadrement.
Articles 30 à 39 : modernisation de la gouvernance de la Caisse des dépôts et consignation
Article 40 : création d’une demande provisoire de brevet et à la modernisation du certificat d’utilité
Cet article crée une demande provisoire de brevet. Le déposant pourra ainsi se prévaloir d’une date de priorité et détailler ultérieurement ses revendications, dans un délai maximum d’un an. Il pourra également choisir d’abandonner sa demande au terme du délai.
Il est également prévu un alignement de la protection qu’offre le certificat d’utilité sur celle des titres analogues en vigueur en Allemagne ou en Chine, ainsi qu’en permettant sa transformation en demande de brevet d’invention.
Par ailleurs l’INPI serait désignée pour l’apposition de la formule exécutoire requise dans le cadre de l’exécution forcée des décisions de l’EUIPO fixant le montant des frais relatifs aux actions en nullité ou recours formés contre les dessins et modèles communautaires.
Article 41 : chercheurs entrepreneurs
Article 42 : création d’une procédure d’opposition aux brevets d’invention
En France, la nullité d’un brevet d’invention délivré par l’INPI ne peut être prononcée que dans le cadre d’une procédure judiciaire.
Le brevet français est par ailleurs critiqué en ce qu’il n’offre pas un même niveau de sécurité juridique que d’autres brevets étrangers, au motif notamment que l’INPI ne peut rejeter une demande de brevet pour défaut d’activité inventive.
L’article habilite le Gouvernement à créer, par voie d’ordonnance, un droit d’opposition aux brevets d’invention délivrés par l’Institut national de la propriété industrielle (INPI). Ce droit permettra à toute personne de demander à l’INPI, dans un certain délai, la révocation d’un brevet délivré.
Article 43 : véhicules autonomes
Article 44 à 50 : dispositions relatives à la société Aéroports de Paris
Article 51 : privatisation de la Française des Jeux (FDJ)
Article 52 : allègement de la contrainte de détention portant sur le capital de GRTgaz
Article 53 : fonctionnement de l’EPIC Bpifrance
Article 54 : fonctionnement du conseil d’administration de La Poste
Article 55 : renforcement du régime des investissements étrangers en France
Lorsqu’ils sont de nature à porter atteinte à l’ordre public, à la sécurité publique ou aux intérêts de la défense nationale, les investissements étrangers sont soumis à une autorisation préalable du ministre chargé de l’Economie.
Cet article renforce d’abord ses pouvoirs en complétant son pouvoir d’injonction. En outre, le ministre aura également la possibilité de suspendre les droits de vote de l’investisseur, de désigner un mandataire chargé de veiller à la protection des intérêts nationaux ou d’empêcher l’investisseur de disposer des actifs ou de percevoir des dividendes. Il confère, par ailleurs, au ministre le pouvoir de sanctionner pécuniairement quatre manquements : la réalisation d’une opération sans autorisation préalable ; l’obtention d’une autorisation préalable par fraude ; le manquement aux conditions ; le non-respect d’une injonction.
Article 56 : réforme du dispositif de l’action spécifique
Cet article modifie l’article 31-1 de l’ordonnance n° 2014-948 du 20 août 2014, relative à la gouvernance et aux opérations sur le capital des sociétés à participation publique (N° Lexbase : L0763I4Z). Les mécanismes d’actions spécifiques ou «golden shares» permettent, en l’état actuel de la législation, à l’Etat de conserver un contrôle sur les actifs sensibles des entreprises dont l’Etat se désengage, dans des secteurs stratégiquement sensibles.
L’article 56 du projet de loi permet à l’Etat d’en créer en dehors des cas de cession de participation. Il précise aussi les droits associés à ces actions.
Article 57 : diffusion des dispositifs d’épargne salariale
Le I de cet article supprime le forfait social pour les entreprises de moins de 50 salariés sur les versements issus des primes d’intéressement et de participation ainsi que sur les abondements des employeurs. Par ailleurs, il supprime également le forfait social pour les entreprises de 50 à 250 salariés qui disposent ou concluent un accord d’intéressement. En outre, afin d’encourager l’actionnariat salarié, le forfait social est diminué de moitié (10 %) sur l’abondement employeur sur les fonds d’actionnariat salarié.
Le II de l’article 57 simplifie la mise en place d’accord de participation et d’intéressement. Il permet au partenaire du chef d’entreprise lié par un PACS, s’il a le statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé, de bénéficier effectivement d’un versement au titre de l’intéressement, de la participation et de l’épargne salariale, au même titre que le partenaire du chef d’entreprise lié par le mariage. Par ailleurs, il aligne le mode de calcul du seuil de cinquante salariés pour l’assujettissement à la participation sur celui utilisé dans le Code de la sécurité sociale afin de clarifier et simplifier la compréhension des règles par les entreprises. En vue de faciliter le franchissement de ce seuil, il introduit un délai de 5 ans pour mettre en place la participation.
Enfin, le III de l’article vise à développer la mise en place d’accord de participation et d’intéressement en encourageant les branches à négocier un dispositif d’intéressement, de participation ou de plan d’épargne salariale au profit des entreprises de la branche, en particulier des plus petites, qui pourront opter pour l’application directe de l’accord ainsi négocié.
Article 58 : développement et appropriation des plans d’épargne salariale
Le I de l’article 58 lève la condition de disposer d’un PEE pour mettre en place un PERCO.
Le II harmonise la présentation des relevés annuels de situation établis par les teneurs de compte transmis aux salariés afin d’accroître la transparence et la portabilité des droits acquis dans le cadre de l’épargne salariale. Les mentions devant figurer au sein du relevé annuel de situation seront précisées par décret.
Article 59 : actionnariat salarié dans les entreprises privées
Cet article encourage le développement de l’actionnariat salarié, en assouplissant les modalités d’offre d’actions aux salariés dans les sociétés par actions simplifiées, en permettant l’abondement unilatéral de l’employeur sur les fonds d’actionnariat salarié.
Article 60 : développement de l’actionnariat salarié des sociétés à capitaux publics
Article 61 : consécration de la notion d’«intérêt social»
Cet article vise, d’une part, à consacrer la notion jurisprudentielle d’intérêt social au sein de l’article 1833 du Code civil (N° Lexbase : L2004ABT) dont un nouvel alinéa disposerait que «la société est gérée dans son intérêt social et en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité». Il s’agit bien là d’une simple consécration, le texte ne prévoyant aucune définition légale de l’intérêt social.
De même, l’article 1835 serait modifié pour prévoir que «les statuts peuvent préciser la raison d’être dont la société entend se doter dans la réalisation de son activité». Ici encore, le projet de loi ne précise pas ce qu’il faut entendre par la raison d’être une société. Le rapport «l’entreprise, objet d’intérêt collectif» réalisé par Jean-Dominique Senard et Nicole Notat indique que la notion de raison d’être peut être définie «comme l’expression de ce qui est indispensable pour remplir l’objet social». A la manière «d’une devise pour un Etat, la raison d’être pour une entreprise est une indication, qui mérite d’être explicitée, sans pour autant que des effets juridiques précis y soient attachés».
Les articles L. 225-35 (N° Lexbase : L5906AIL) et L. 225-64 (N° Lexbase : L5935AIN) du Code de commerce serait modifiés pour confier le soin aux conseil d’administration et aux directoires de déterminer les orientations de l’activité de la société conformément à son intérêt social et en prenant en considération ses enjeux sociaux et environnementaux. Il prend également en considération la raison d’être de la société, lorsque celle-ci est définie dans les statuts.
Article 62 : nombre de administrateurs salariés dans les conseils d’administration ou de surveillance
Cet article vise à renforcer le nombre des administrateurs salariés dans les conseils d’administration ou de surveillance des sociétés de plus de 1 000 salariés en France ou 5 000 salariés en France et à l’étranger. Le nombre d’administrateurs salariés au sein du conseil serait porté à deux à partir de 8 administrateurs non-salariés, alors que la loi ne prévoit actuellement la présence de deux administrateurs salariés que lorsqu’il y a plus de douze administrateurs non-salariés.
Article 63 : transposition de la Directive 2014/55 du 16 avril 2014, sur la facturation électronique dans le cadre des marchés publics (N° Lexbase : L1238I3A)
Article 64 : habilitation du Gouvernement pour transposer le projet de Directive «insolvabilité»
Le projet de Directive dite «insolvabilité» publié par la Commission porte sur trois thèmes principaux : les cadres de restructuration préventive, la seconde chance des entrepreneurs et les mesures destinées à améliorer l’efficacité des procédures de restructuration et d’insolvabilité. Il est proposé de solliciter une habilitation autorisant le Gouvernement à prendre les mesures législatives nécessaires pour rendre compatibles les dispositions du livre VI du Code de commerce avec le droit de l’Union européenne, ainsi que les mesures de mise en cohérence qui en résultent. L’adoption de la Directive n’est pourtant envisagée qu’au premier semestre de l’année 2019.
Article 65 : habilitation du Gouvernement à transposer par voie d’ordonnance la Directive 2014/50 du 16 avril 2014 relative aux prescriptions minimales visant à accroître la mobilité des travailleurs entre les états membres en améliorant l’acquisition et la préservation des droits à pension complémentaire (N° Lexbase : L0905I3W)
Article 66 : transposition de la Directive 2017/828 du 17 mai 2017 (N° Lexbase : L7431LEX) en vue de promouvoir l’engagement à long terme des actionnaires.
Les I et II de l’article permettent de transposer directement la partie législative des articles 3 octies, nonies et decies de la Directive, relatifs à la politique d’engagement actionnarial, à la transparence des investisseurs institutionnels et des gestionnaires d’actifs, ainsi que l’article 3 undecies, relatif à la transparence des conseillers en vote. Le III assure la transposition de l’article 9 quater de la directive, qui est relatif aux «transactions avec les parties liées», ainsi qu’une partie du chapitre I bis de la Directive, emportant l’ajustement de la procédure d’identification des actionnaires et permettant de faire évoluer le régime de l’intermédiaire inscrit.
Le IV de l’article introduit des habilitations à légiférer par ordonnance permettant de procéder à la transposition de la Directive.
Article 67 : transposition de la Directive (UE) 2016/2341 du 14 décembre 2016, concernant les activités et la surveillance des institutions de retraite professionnelle (N° Lexbase : L9699LBT)
Article 68 : transposition des dispositions de nature législative de la Directive 2017/2399 du 12 décembre 2017, modifiant la Directive 2014/59/UE en ce qui concerne le rang des instruments de dette non garantie dans la hiérarchie en cas d’insolvabilité N° Lexbase : L7248LHW)
Article 69 : transposition du paquet «Marques»
L’article habilite le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance, d’une part, les mesures relevant du domaine de la loi nécessaires à la transposition de Directive 2015/2436 du 16 décembre 2015 (N° Lexbase : L6109KW8), ainsi que les mesures nécessaires pour assurer la compatibilité de la législation nationale (notamment du Code de la propriété intellectuelle) au Règlement sur la marque de l’Union européenne (Règlement 2015/2424 du 16 décembre 2015 (N° Lexbase : L3614KWR), qui est entré en vigueur le 1er octobre 2017, et d’autre part, les mesures d’adaptation de la législation nationale (du Code de la propriété intellectuelle et d’autres législations) liées à cette transposition et à l’application du Règlement.
Article 70 : possibilité de procéder à une réévaluation comptable des immobilisations corporelles des grands ports maritimes relevant de l’Etat et des ports autonomes de Paris et de Strasbourg
Article 71 : ratification de 23 ordonnances
Articles 72 et 73 : application avec adaptation, dans les collectivités soumises au principe de spécialité législative, des modifications des dispositions du Code monétaire et financier et du Code de commerce, introduites par le projet de loi
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