La lettre juridique n°718 du 9 novembre 2017 : Avocats/Procédure

[Jurisprudence] Recours en matière d'expropriation : admission de la déclaration d'appel via le RPVA

Réf. : Cass. civ. 2, 19 octobre 2017, n° 16-24.234, F-P+B (N° Lexbase : A4653WWA)

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N1034BXL

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par Thierry Vallat, Avocat au barreau de Paris

le 09 Novembre 2017

La transmission par voie électronique des déclarations d'appel peut toujours réserver bien des surprises. Il arrive, en effet, que le recours au RPVA, ce "réseau privé virtuel avocat", qui constitue désormais la voie privilégiée pour communiquer les pièces et actes de procédures, rencontre des ratés et met en difficulté l'avocat qui se voit par exemple refuser un de ses envois pour raison technique et peut dès lors se retrouver hors délais, et donc irrecevable. Tel était le cas dans cette affaire d'expropriation pour cause d'utilité publique tranchée par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans son arrêt du 19 octobre 2017.
  • Quels étaient les faits ?

Un avocat veut interjeter appel d'un jugement du 2 mai 2015, signifié le 20 mai 2015, fixant la valeur de parcelles, suite à l'exercice d'un droit de préemption.

Insatisfait de cette décision, il entreprend de régulariser son recours par la voie électronique via le RPVA.

La déclaration d appel doit être faite, en matière d'expropriation publique, dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement, puis l'appelant dispose d'un délai de trois mois à compter de cette déclaration d'appel pour produire mémoire et pièces.

Notre avocat appelant formalise donc sa déclaration d'appel par message électronique le 16 juin 2015.

Il se trouve donc bien dans le délai de l'article R. 311-24 du Code de l'expropriation (N° Lexbase : L4296LG9).

Mais voilà que son acte est rejeté le jour même par le facétieux système RPVA qui lui renvoie un message d'erreur ainsi libellé "sans le message structuré, votre enregistrement ne peut aboutir" !

L'avocat finit donc par envoyer une recommandée avec accusé de réception au greffe de la cour d'appel de Rennes le 25 juin 2015, réitérant sa déclaration d'appel.

Mais c'est cette dernière date que va retenir la cour d appel de Rennes dans son arrêt du 22 juillet 2016 (CA Rennes, 22 juillet 2016, n° 15/05251 N° Lexbase : A7539RXI) pour le déclarer irrecevable en son recours, envoyé selon elle après expiration du délai d'un mois.

Un pourvoi en cassation est donc formé qui aboutit à l'arrêt rendu le 19 octobre 2017.

La deuxième chambre civile valide la déclaration d'appel en déclarant : 'la régularité de la transmission par la voie électronique d'une déclaration d'appel formée contre un jugement rendu en matière d'expropriation s'apprécie au regard des seules dispositions des articles 748-1 (N° Lexbase : L0378IG4) et suivants du Code de procédure civile et de l'arrêté pris en application de ces articles le 5 mai 2010 [arrêté du 5 mai 2010 relatif à la communication par voie électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel N° Lexbase : L3316IKZ]''

  • Les seules exigences des articles 748-1 et suivants du Code de procédure civile

L'article 748-1 du Code de procédure civile dispose que 'les envois, remises et notifications des actes de procédure, des pièces, des avertissements ou convocations, des rapports, des procès-verbaux, ainsi que des copies et expéditions revêtues de la formule exécutoire des décisions juridictionnelles peuvent être effectuées par voie électronique dans les conditions et selon les modalités visées par le présent titre et sans préjudice des dispositions spéciales imposant l'usage de ce mode de communication''

Un arrêt du 10 novembre 2016 (Cass. civ. 2, 10 novembre 2016, n° 14-25.631, FS -P+B N° Lexbase : A9119SGT et lire N° Lexbase : N5211BWW) avait eu l'occasion de préciser qu'il résultait de la combinaison de cet article 748-1 avec les articles 748-3 ([LXB=L5857ICW ]) et 748-6 (N° Lexbase : L8588IAC), ainsi que de l'article 1er de l'arrêté du 5 mai 2010, qu'en matière d'expropriation pour cause d'utilité publique, la déclaration d'appel, les actes de constitution et les pièces qui leur sont associées peuvent être valablement adressées au greffe de la chambre de l'expropriation par la voie électronique par le biais du RPVA.

On peut donc certainement procéder par le RPVA à la déclaration d'appel d'un jugement en matière d'expropriation. Mais encore faut-il que ce recours soit valablement envoyé par voie électronique.

Or, tel n'avait pas été le cas dans notre affaire nantaise. En effet, aussitôt après son envoi, le système du RPVA refusait la démarche et faisait parvenir un message d'erreur à l'avocat appelant

Et c'est là que la cour d'appel croit pouvoir déceler la cause de l'irrecevabilité de l'appel en se basant non pas sur le seul message d'erreur, mais sur sa conformité avec un protocole mis en place avec le barreau de Nantes et l'article 5 de la convention passée avec ce barreau selon laquelle 'lorsqu'une déclaration d'appel est incorrecte et refusée par l'application électronique il est envoyé à l'expéditeur un accusé de réception négatif [...]. L'acte rejeté n'est pas pris en compte, n'est pas traité et ne reçoit aucun numéro de DA ni de RG''.

Ainsi, la déclaration d'appel avait été refusée par le RPVA sur le fondement de ce protocole particulier mis en place localement qui avait généré un message d'erreur et conduit la cour d'appel à la déclarer irrégulière de ce fait.

C'est ce raisonnement que sanctionne la Cour de cassation qui nous rappelle en conséquence que seules les dispositions des articles 748-1 et suivants et l'arrêté de 2010, à l'exclusion de toutes autres, peuvent amener une cour d'appel à prononcer l'irrégularité d'un recours via la voie électronique comme hors délais, peu important d'autres dispositions qui seraient prévues, par ailleurs, à ce sujet.

Le débat sur l'appel interjeté par RPVA dans les procédures sans représentation obligatoire semble ainsi clos, mais l'avocat appelant n'en sera pas tranquille pour autant.

Rappelons en effet que la Cour de cassation a jugé que les écritures (conclusions ou mémoires), notifiées par le RPVA devant la chambre de l'expropriation, étaient, elles, irrecevables (Cass. civ. 2, 10 novembre 2016, n° 15-25.431, FS-P+B [LXB=A8985SGU ] et lire N° Lexbase : N5212BWX), car l'article 1er de l'arrêté du Garde des sceaux du 5 mai 2010, relatif à la communication électronique dans la procédure sans représentation obligatoire devant les cours d'appel, s'il valide l'emploi de procédés techniques garantissant la fiabilité de l'identification des parties, l'intégrité des documents, ainsi que la confidentialité et la conservation des échanges et permettant la date certaine des transmissions, ne fixe une telle garantie que pour l'envoi par un auxiliaire de justice de la déclaration d'appel, de l'acte de constitution et des pièces qui leur sont associées, à l'exclusion des écritures des parties !

On le voit, beaucoup de chausse-trappes pour l'appelant avec cette voie électronique et la nécessité pour l'avocat de procéder avec les plus extrêmes circonspection et attention lorsqu'il va régulariser ses actes via le RPVA, afin d'éviter irrecevabilité ou déchéance d'appel.

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