Lorsqu'un travailleur exerce ses activités dans plusieurs Etats membres, c'est la loi du pays où il exerce l'essentiel de ses obligations professionnelles qui s'applique pour trancher un litige portant sur le contrat de travail. Tel est le sens d'un arrêt rendu, le 15 mars 2011, par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE, 15 mars 2011, aff. C-29/10
N° Lexbase : A8956G9L).
Dans cette affaire, par un contrat de travail signé à Luxembourg le 16 octobre 1998, M. X, domicilié en Allemagne, a été embauché comme chauffeur international par la société Y. Ce contrat contient une clause attribuant la compétence exclusive aux juridictions luxembourgeoises. Par courrier du 13 mars 2001, le directeur de la société Y a résilié le contrat de travail de M. X, délégué du personnel, avec effet au 15 mai 2001. Après avoir saisi la justice allemande qui s'est déclarée territorialement incompétente, M. X a assigné, en 2002, la société devant le tribunal du travail de Luxembourg. Il a soutenu que si le droit luxembourgeois était certes applicable au contrat de travail, il ne devait pas être privé, en vertu de la Convention de Rome du 19 juin 1980 (
N° Lexbase : L6798BHA), de la protection au titre de l'application des dispositions impératives de la loi allemande qui interdit le licenciement des délégués du personnel, en l'absence de choix des parties. Le tribunal du travail a considéré que le litige était soumis uniquement au droit luxembourgeois. La cour d'appel de Luxembourg a décidé de surseoir à statuer et de demander à la CJUE si, lorsqu'un travailleur accomplit son travail dans plusieurs pays, mais retourne systématiquement dans l'un d'entre eux, il faut considérer que la loi de ce pays a vocation à s'appliquer comme étant "
la loi du pays où le travailleur accomplit habituellement son travail" au sens de la Convention de Rome. Pour la CJUE, lorsqu'il exerce ses activités dans plus d'un Etat contractant, la convention doit être lue comme garantissant l'applicabilité du premier critère qui renvoie à la loi de l'Etat dans lequel le travailleur, dans l'exécution du contrat, s'acquitte de l'essentiel de ses obligations à l'égard de son employeur et ainsi à la loi du lieu dans lequel le travailleur exerce effectivement ses activités professionnelles et, en l'absence d'un centre d'affaire, à la loi du lieu où celui-ci accomplit la majeure partie de ses activités. Ainsi, l'article 6 de la Convention de Rome "
doit être interprété en ce sens que, dans l'hypothèse où le travailleur exerce ses activités dans plus d'un Etat contractant, le pays dans lequel le travailleur, accomplit habituellement son travail au sens de cette disposition est celui où ou à partir duquel, compte tenu de l'ensemble des éléments qui caractérisent ladite activité, le travailleur s'acquitte de l'essentiel de ses obligations à l'égard de son employeur" (sur la compétence du conseil de prud'hommes, cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E3731ETD).
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