Le juge ne peut, pour décliner la compétence du juge français, considérer que si les premiers contrats de travail stipulent de façon claire le chantier naval de Saint-Nazaire comme lieu d'exécution du travail, il n'en est pas de même des contrats suivants dans le cadre desquels le salarié a travaillé en différents lieux de France et d'Italie, en l'absence de volonté claire des parties sur la localisation de l'emploi du salarié, sans rechercher si la France n'était pas le lieu de travail habituel où le salarié avait accompli la majeure partie de son temps de travail pour le compte de son employeur en tenant compte de l'intégralité de la période d'activité du travailleur. Telle est la solution dégagée par la Chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 28 septembre 2016 (Cass. soc., 28 septembre 2016, n° 15-17.288, FS-P+B
N° Lexbase : A7171R4D ; voir sur ce thème Cass. soc., 27 novembre 2013, n° 12-24.880, FS-P+B
N° Lexbase : A4686KQM).
En l'espèce, un salarié portugais est embauché en France sous contrat à durée déterminée par une entreprise italienne pour effectuer des missions sur des chantiers navals en France et en Italie. A la suite de la prise d'acte de la rupture de son contrat, le salarié saisit la juridiction prud'homale française de diverses demandes à l'encontre de son employeur qui considère de son côté que cette juridiction est compétente.
La cour d'appel (CA Rennes, 30 mai 2014, n° 12/04864
N° Lexbase : A5780MPR) déclare la juridiction prud'homale française incompétente pour statuer sur les demandes en ce qui concerne sa relation de travail avec l'entreprise. Elle retient que si les premiers contrats stipulent de façon claire le chantier naval de Saint-Nazaire comme lieu d'exécution du travail, il n'en est pas de même des contrats suivants dans le cadre desquels le salarié a travaillé en différents lieux de France et d'Italie. Dès lors, en l'absence de volonté claire des parties sur la localisation de l'emploi du salarié, la cour d'appel estime que les contrats litigieux ne relèvent pas de la compétence du conseil de prud'hommes de Saint-Nazaire. Le salarié se pourvoit en cassation.
En énonçant la règle susvisée, la Haute juridiction casse et annule l'arrêt rendu par la cour d'appel. Elle vise l'article 19 du Règlement CE n° 44/2001 du 22 décembre 2000 (
N° Lexbase : L7541A8S) concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale et rappelle que ce n'est qu'en cas de périodes stables de travail dans des lieux successifs différents que le dernier lieu d'activité peut être retenu dès lors que, selon la volonté claire des parties, il a été décidé que le travailleur y exercerait de façon stable et durable ses activités. En se déterminant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard du texte susvisé (cf. l’Ouvrage "Droit du travail"
N° Lexbase : E5178EX3).
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