L'absence de faute de celui qui a payé ne constitue pas une condition de mise en oeuvre de l'action en répétition de l'indu, sauf à déduire, le cas échéant, de la somme répétée, les dommages-intérêts destinés à réparer le préjudice résultant pour l'
accipiens de la faute commise par le
solvens. Tel est le principe dégagé par la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 17 février 2010 (Cass. civ. 1, 17 février 2010, n° 08-19.789, F-P+B
N° Lexbase : A0386ES4), rendu au visa de l'article 1377 du Code civil (
N° Lexbase : L1483ABK). En l'espèce, M. E. a souscrit, en 1979, auprès de la société AGF, un contrat d'assurance "épargne sécurité" prévoyant le versement d'un capital à l'assuré lui-même ou, en cas de décès, à son conjoint. Par la suite, M. E. a divorcé en 1984, s'est remarié en 1986, et est décédé en 1991. Son ex-épouse, qui avait réglé le paiement des primes afférentes à ce contrat depuis la séparation du couple, a sollicité le paiement du capital auprès de la société AGF, qui a refusé, au motif que celle-ci avait perdu la qualité de conjoint à la date du décès de l'assuré. L'ex-épouse a alors assigné la compagnie AGF en paiement de ce capital. Cette dernière a appelé en intervention forcée la veuve du souscripteur. En appel, l'ex-épouse a sollicité la condamnation
in solidum de la société AGF et de Mme E. à lui restituer le montant des primes versées. Par un arrêt du 17 juin 2008, la cour d'appel de Pau a rejeté sa demande au motif que le paiement fait par erreur par une personne qui n'est pas débitrice n'ouvrait pas droit à répétition lorsque l'
accipiens n'a reçu que ce que lui devait son débiteur et que le
solvens a payé sans prendre les précautions nécessitées par une prudence élémentaire (en ce sens, v. Cass. com., 23 avril 1976, n° 75-11.339
N° Lexbase : A6886CIU). Les juges du fond ont déclaré qu'en poursuivant spontanément le paiement des cotisations afférentes à un contrat d'assurance dont elle n'était ni titulaire, ni bénéficiaire nommément désignée, sans vérifier les conséquences du divorce sur ses droits éventuels ni aviser l'assureur du divorce, l'ex-épouse avait commis une négligence certaine et manifeste de nature à la priver de tout droit à répétition des sommes perçues par la société AGF au titre de ce contrat. Or, en statuant ainsi, la cour d'appel de Pau a violé l'article 1377 du Code civil. Son arrêt est donc cassé et les parties renvoyées devant la même juridiction autrement composée (lire les obs. de V. Nicolas
N° Lexbase : N4666BN7).
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