Dans un arrêt rendu le 30 novembre 2009, le Conseil d'Etat a décidé que l'inscription d'un détenu au répertoire des détenus particulièrement signalés, prévue à l'article D. 276-1 du Code de procédure pénale (
N° Lexbase : L1203ACK), était un acte susceptible d'un recours pour excès de pouvoir (CE 9° et 10° s-s-r., 30 novembre 2009, n° 318589, Garde des Sceaux, ministre de la Justice c/ M. Kehli
N° Lexbase : A3335EP9). En l'espèce, M. K. a été condamné, d'une part, le 19 octobre 1999, à un an d'emprisonnement par la cour d'appel de Paris et, d'autre part, le 15 février 2002, à dix ans de réclusion criminelle par la cour d'assises de Paris. Il a été incarcéré du 19 décembre 1998 au 15 septembre 2006, date à laquelle il a bénéficié d'une mesure de libération conditionnelle. Par décision du 11 décembre 2003, le ministre de la Justice l'a inscrit sur le fichier des détenus particulièrement signalés compte tenu de sa mise en cause dans un projet d'évasion. La mesure a fait l'objet d'une décision de mainlevée le 29 septembre 2005. Par arrêt du 22 mai 2008, la cour administrative d'appel de Paris, saisie par M. K., a annulé l'ordonnance du président de la septième section du tribunal administratif de Paris rejetant sa demande d'annulation de la décision du ministre de la Justice du 11 décembre 2003 ainsi que cette décision. Le ministre de la Justice s'est alors pourvu en cassation contre cet arrêt. Le Conseil d'Etat a, d'abord, déclaré que la décision d'inscrire un détenu sur le répertoire des détenus particulièrement signalés en vue de la mise en oeuvre des mesures de sécurité adaptées avait pour effet d'intensifier de la part des personnels pénitentiaires et des autorités amenées à le prendre en charge les mesures particulières de surveillance, de précaution et de contrôle à son égard. Il a ajouté que ce dispositif était de nature à affecter tant sa vie quotidienne par les fouilles, vérifications des correspondances ou inspections fréquentes dont il faisait l'objet, que les conditions de sa détention en orientant notamment les choix du lieu de détention, l'accès aux différentes activités, les modalités d'escorte en cas de sortie de l'établissement. Dès lors, une décision d'inscription sur le répertoire des détenus particulièrement signalés devait être regardée, par ses effets concrets, comme faisant grief et comme telle susceptible de recours pour excès de pouvoir. Le Conseil d'Etat en a conclu qu'une telle décision constituait un acte faisant grief et non une mesure d'ordre intérieur, de sorte que les juges du fond n'avaient pas commis d'erreur de droit. Il a donc rejeté le pourvoi formé par le ministre de la Justice.
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