La lettre juridique n°240 du 14 décembre 2006 : Éditorial

46, année éristique ?

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N3140A98

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par Fabien Girard de Barros, Directeur de la rédaction

le 27 Mars 2014


Force est de constater que les velléités de privatisation de Gaz de France à la hussarde, prêtées au Gouvernement, ont subi l'estocade. La course contre la montre orchestrée pour préparer la fusion entre l'opérateur historique et le groupe Suez s'est peu ou prou achevée par une victoire à la Pyrrhus des partisans de la privatisation, à la lecture de la décision du Conseil constitutionnel rendue le 30 novembre 2006. Certes, les Sages de la rue Montpensier ont donné leur feu vert à la privatisation de Gaz de France, validant ainsi l'article 39 de la toute récente loi relative au secteur de l'énergie, mais en repoussent l'efficience au 1er juillet 2007, date d'entrée en vigueur de la libéralisation complète du marché de l'énergie imposée par l'Union européenne... soit après des échéances électorales décisives. Pourtant, les opposants à cette privatisation invoquaient, notamment et fondamentalement, les dispositions du Préambule de 1946, inscrites à la Constitution de 1958, selon lesquelles "tout bien, toute entreprise dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité". "L'arme absolue" du Préambule de 1946, servant de fondement aux droits sociaux les plus contestés ces dernières années, aurait pu, une nouvelle fois, faire mouche. Mais, c'était, toutefois, sans reconnaître, d'une part, que la libéralisation du secteur était déjà en marche et nécessitait, aux termes des canons européens, à court ou moyen terme, une privatisation ; et, d'autre part, que la France avait récemment pratiqué l'exercice de la privatisation d'un service public (France Télécom, en l'occurrence), faisant en sorte que l'opérateur téléphonique conserve ses missions historiques. Aussi, le Conseil précise que l'ouverture progressive du secteur de la fourniture de gaz à la concurrence faisait que Gaz de France ne pouvait plus être regardé comme un monopole de fait ou comme un service public national dont la privatisation pourrait être écartée sur les fondements du Préambule de 1946. Il prend soin de rappeler que le principe de la continuité du service public n'a pas été méconnu, à partir du moment où la loi impose tant à Gaz de France qu'aux autres opérateurs intervenant sur le marché en cause diverses obligations concernant "la continuité et la sécurité d'approvisionnement en énergie". Les neuf Sages soulignent, enfin, qu'en cas de circonstances exceptionnelles, les autorités compétentes de l'Etat pourront, en tant que de besoin, procéder, dans le cadre de leurs pouvoirs de police administrative ou en vertu des dispositions du Code de la défense, à toute réquisition de personnes, de biens et de services. Les filets de sécurité de la continuité du service public de la fourniture de gaz semblent donc bien tendus. Mais attention, "A la fin quand il vit/Que l'autre touchait presque au bout de la carrière,/Il partit comme un trait ; mais les élans qu'il fit/Furent vains : la Tortue arriva la première" (Jean de La Fontaine, Le Lièvre et la Tortue) ; si les faire-parts de "mariage" peuvent officiellement être envoyés, il reste, après les élections, aux époux à prononcer leurs voeux. Afin de décrypter la décision du Conseil constitutionnel sur la loi relative au secteur de l'énergie, les éditions juridiques Lexbase vous invitent à lire l'analyse de André-Paul Weber, Professeur d'économie, Ancien rapporteur au Conseil de la concurrence, La privatisation de Gaz de France et la double leçon de droit administrée par le Conseil Constitutionnel.

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