La lettre juridique n°166 du 5 mai 2005 : Concurrence

[Jurisprudence] Bulletin d'actualités en droit de la concurrence n° 20 : panorama de la jurisprudence communautaire (deuxième partie) - Freshfields Bruckhaus Deringer

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N8376AKG

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par Freshfields Bruckhaus Deringer Paris

le 07 Octobre 2010

Tous les deux mois, le cabinet Freshfields Bruckhaus Deringer, en partenariat avec les éditions Lexbase, sélectionne l'essentiel de la jurisprudence communautaire en droit de la concurrence. Sont ainsi à relever de nombreuses décisions de la Commission en matière de concentrations et d'aides d'Etat, ainsi quelques arrêts incontournables en la matière, rendus par le Tribunal de première instance des Communautés européennes (cf. première partie N° Lexbase : N3664AIK ; et troisième partie N° Lexbase : N8376AKG).
II - Décisions de la Commission européenne en matière de pratiques anticoncurrentielles
  • Le 19 janvier 2005, la Commission a adopté sa première décision d'engagements conformément au nouveau règlement n° 1/2003 (N° Lexbase : L9655A84) dans l'affaire de vente centralisée des droits médiatiques sur le championnat allemand de football (23)

Pour mémoire, la Fédération allemande de football (24) avait présenté le 25 août 1998, conformément aux articles 2 et 4 du règlement n° 17/62 (25), une demande d 'attestation négative ou, à défaut, d'exemption individuelle en vertu de l'article 81§3 du Traité CE pour la vente centralisée des droits de télédiffusion et radiodiffusion et de toutes autres techniques d'exploitation des matchs de première et deuxième divisions du championnat allemand de football.

Après que l'Association de la ligue et la Fédération allemande de football lui avaient présenté une modification du système de vente centralisée initialement notifié , la Commission avait annoncé son intention d'adopter une position favorable envers le système de vente combinée mis en place par la Fédération allemande de football et avait donc invité les tiers intéressés à lui faire connaître leurs observations (26).

Les points de vue exprimés par les tiers intéressés ont amené la Commission à demander à l'Association de la ligue d'apporter de nouvelles modifications à son système de vente, ce qu'elle a fait. Les engagements pris par l'Association de la ligue ont alors fait l'objet d'une nouvelle publication par la Commission conformément à l 'article 27, paragraphe 4 du nouveau règlement pour remarque de tiers (27).

Avec l'entrée en vigueur, le 1er mai 2004, du nouveau règlement n° 1/2003 (28), la procédure en cause a été poursuivie dans un cadre juridique modifié. En effet, le système de notification et d'exemption ayant été abandonné, la notification présentée en 1998 est devenue caduque. La nouvelle procédure vise désormais à rendre juridiquement contraignants les engagements pris par l'Association de la ligue conformément à l 'article 9 du nouveau règlement.

Dans son évaluation préliminaire, la Commission avait considéré que le système de vente centralisée des droits médiatiques des matchs de première et deuxième divisions soulevait des préoccupations au regard de l'article 81§1 du Traité CE sur les marchés de l'acquisition de programmes en amont et de l'exploitation des droits médiatiques en aval de l'acquisition de programmes et sur les marchés émergents en amont et en aval dans le secteur des nouveaux médias.

La Commission avait, notamment, relevé que seule l'Association de la ligue fixait le prix ainsi que la nature et la portée de l'exploitation desdits droits et que l'accord sur la vente centralisée et la revente en commun empêchait les clubs de traiter d'une manière indépendante avec les chaînes de télévision et de radio et /ou les agences spécialisées dans les droits sportifs, ainsi que d'exploiter leurs droits d'une manière indépendante. En outre, la Commission avait estimé que la vente centralisée desdits droits pourrait avoir des effets préjudiciables sur les marchés de la télévision et du secteur des nouveaux médias en cause en aval.

Au terme de la procédure, la Commission a considéré que les engagements offerts par l'Association de la ligue permettraient de remédier aux préoccupations soulevées lors de son évaluation préliminaire.

En substance, les principaux engagements pris par l'Association de la ligue sont les suivants :

- Les droits médiatiques sur les matchs de première et deuxième divisions du championnat allemand de football seront cédés en plusieurs lots par une procédure transparente et non discriminatoire, pour une durée n'excédant pas trois saisons. Ils ne pourront être vendus d'une manière qui permette à l'exploitant de concevoir un produit présentant l'intégralité des matchs de première et/ou deuxième divisions (interdiction du groupage ). Il est à noter que ces engagements permettront à l'Association de la ligue de continuer de commercialiser les droits de radiodiffusion et de télédiffusion d'une manière centralisée sous la marque de la Ligue.

- Il est prévu que les clubs pourront vendre individuellement à des chaînes de télévision à accès libre en vue d'une diffusion unique dans l'EEE les droits de leurs matchs à domicile vingt-quatre heures après la rencontre.

- Par ailleurs, les clubs pourront exploiter sans limites, après la fin d'un match , les droits des rencontres à domicile par une diffusion radiophonique gratuite.

- De plus, les clubs pourront vendre à un opérateur de téléphonie mobile le droit de couvrir leurs matchs à domicile par téléphonie mobile dans l'EEE.

- Enfin, à compter du 1er juillet 2006, les clubs pourront rendre compte de façon totalement illimitée des matchs joués à domicile ou à l'extérieur sur leur propre site Internet ou sur le site de tiers.

Les engagements ainsi offerts par l'Association de la ligue devraient introduire une concurrence dans la commercialisation des droits du Championnat allemand de football entre la ligue et les clubs et permettre aux clubs de développer de nouveaux services , notamment dans le domaine des nouveaux médias.

  • La Commission a obtenu des améliorations aux contrats de fourniture de gaz conclu entre OMV et Gazprom

La société pétrolière et gazière autrichienne, OMV et le producteur de gaz russe , Gazprom, ont conclu des contrats de fourniture de gaz qui comprenaient des clauses contraires, selon la Commission, à l'article 81 du Traité CE. Toutefois, après avoir constaté l'élimination des restrictions figurant dans ces contrats et les engagements pris par la société OMV, la Commission européenne a décidé de clore son enquête.

En effet, les entreprises Gazprom et OMV ont accepté de supprimer les restrictions territoriales et clauses de destination contenues dans leurs contrats de fourniture de gaz. OMV peut désormais revendre, en dehors de l'Autriche, le gaz acheté auprès de Gazprom. Par ailleurs, Gazprom est autorisé à vendre du gaz à d'autres clients autrichiens sans avoir l'obligation de l'offrir au préalable à OMV.

La Commission s'est également satisfaite des engagements pris par l'entreprise OMV, en tant qu'actionnaire du gazoduc TAG (29), d'une part pour promouvoir l'augmentation de la capacité du gazoduc, qui transporte le gaz russe à travers l'Autriche vers l'Italie, et d'autre part pour améliorer l'accès des tiers au gazoduc.

Il convient de souligner qu'en 2003, la société pétrolière et gazière italienne , ENI, l'autre actionnaire du gazoduc TAG, avait pris envers la Commission des engagements analogues.

  • La Commission a infligé des amendes d'un montant total de 217 millions d'euros au cartel de l'acide monochloracétique (30)

Le 19 janvier dernier, la Commission a infligé à Akzo Nobel, Atofina et Hoechst des amendes pour des montants respectifs de 84, 58 et 74 millions d'euros pour avoir mis en oeuvre une entente illégale sur le marché de l'acide monochloracétique (AMCA ), un intermédiaire chimique entrant dans la fabrication de différents produits. L 'enquête de la Commission avait été ouverte à la suite des informations portées à son attention par l'une des parties à l'entente, l'entreprise suisse Clariant, en échange de l'immunité prévue par le programme de clémence. Akzo et Atofina, qui ont également participé au programme de clémence, ont obtenu des réductions de 40 % et 25 %.

De 1984 à 1999 les trois sociétés concernées, qui contrôlaient ensemble plus de 90 % du marché de l'AMCA dans l'EEE, se sont régulièrement rencontrées pour s'attribuer des quotas en volume, se répartir les clients, convenir d'augmentations de prix, échanger des informations sur les volumes de vente et les prix et convenir d'un mécanisme de compensation permettant d'assurer la mise en oeuvre des accords collusifs.

Cette décision marque la détermination de la Commission à sévir contre les sociétés qui concluent des ententes illégales : ainsi, les amendes infligées à Atofina et Hoechst ont été fortement majorées étant donné que ces deux sociétés avaient déjà été sanctionnées par le passé pour des comportements similaires. En commentant la décision, la Commissaire chargée de la concurrence, Neelie Kroes a donc souligné "la lutte contre les ententes est une de mes premières priorités, et les sociétés qui concluent des ententes se verront infliger de lourdes amendes. En cas de violation répétée des règles antitrust de l'UE, les amendes seront systématiquement majorées à titre dissuasif".

III - Décisions de la Commission européenne en matière d'aides d'Etat

  • La Commission européenne a décidé d'autoriser une aide à la restructuration au profit de la division Fret de la SNCF (31)

La Commission européenne a approuvé, le 2 mars 2005, le volet financier du plan de restructuration global destiné à permettre le retour à la viabilité de la division Fret de la SNCF, qui depuis des années était sujet à des graves difficultés financières . Ce plan de restructuration vise à réorganiser la production, à améliorer la productivité et à réviser la politique commerciale de l'opérateur en question. A ce titre, il organise l'apport en capital ayant pour objet la restructuration de la situation financière de Fret SNCF.

La recapitalisation de la division Fret de 1,5 milliards d'euros sera financée , d'une part, par la SNCF, sous forme de cessions d'actifs à hauteur de 700 millions d'euros et, d'autre part, par l'Etat à hauteur de 800 millions d'euros.

La compatibilité de l'aide a été analysée, par la Commission, au regard des critères annoncés dans la Communication portant lignes directrices pour les aides à la restructuration (32).

En premier lieu, la Commission a constaté que le plan en question permettrait de rétablir dans un délai raisonnable (fin 2006) la viabilité à long terme de Fret SNCF et qu'il était limité aux besoins stricts de la restructuration de l'entreprise.

En deuxième lieu, dans le but de prévenir des distorsions de concurrence indues , la Commission a exigé du Gouvernement français que celui-ci s'engage de prendre des mesures de contrepartie destinées à atténuer les conséquences défavorables de l'aide pour les concurrents.

L'essentiel des contreparties aurait trait à :- la réduction du volume de trafic de Fret SNCF pendant la période de restructuration ;- l'ouverture à la concurrence anticipée du marché français du fret ferroviaire ;- la réalisation de la recapitalisation en quatre tranches, dont plusieurs sont conditionnelles : première tranche : l'Etat français et la SNCF verseraient à parts égales 500 millions d'euro ; deuxième tranche : le versement de la deuxième tranche de 500 millions d'euros dépendrait du respect de l'engagement d'ouverture anticipée des liaisons internationales de fret ferroviaire ; troisième tranche : le financement à hauteur de 400 millions d'euros serait conditionné à la libéralisation préalable du marché de transport national de marchandises par chemin de fer. En effet, les autorités françaises se sont engagées à ouvrir complètement à la concurrence le fret ferroviaire national le 31 mars 2006 (33) ; quatrième tranche : la dernière tranche, qui s'élèverait à 100 millions d'euros, serait versée par l'Etat français.

En outre, et conformément au principe de "l'aide unique" ("one time, last time ") (34) énoncé dans les lignes directrices précitées, le groupe SNCF dans son ensemble , et non pas la seule division fret, ne pourra bénéficier de nouveau soutien public financier à la restructuration pendant une période de 10 ans tant que les deux activités n'auraient pas été complètement séparées sur le plan juridique (35).

Il est intéressant de noter que la décision de la Commission a été rendue dans l'optique de la libéralisation totale du fret ferroviaire et surtout au regard de l'objectif communautaire de revitaliser le développement du transport par rail, qui n'a cessé de perdre du terrain par rapport au transport par route.

La publication de la décision de la Commission européenne est, bien sur, particulièrement attendue pour la lecture attentive de la grille d'analyse de l'aide en cause qu'elle a appliqué, notamment en ce qui concerne la possibilité d'accorder une aide à la restructuration à une branche spécifique d'une entreprise exerçant des activités plus larges.

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