Dès lors que la mise à pied à tort d'un représentant du personnel ou d'un délégué syndical, conservatoire ou disciplinaire, dans l'attente d'autorisation de son licenciement, n'a pas pour effet de suspendre l'exécution de son mandat, le délit d'entrave n'est pas constitué. Le harcèlement moral suppose l'existence d'agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail du travailleur, susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. Telle est la décision dégagée par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 8 avril 2014 (Cass. crim., 8 avril 2014, n° 12-85.800, FS-P+B+I
N° Lexbase : A7638MIQ).
Un délégué syndical et membre suppléant du comité d'entreprise avait été mis à pied à titre conservatoire à deux reprises, et avait fait l'objet d'une demande d'autorisation de licenciement qui avait été rejetée. A la suite d'un procès verbal dressé par l'inspection du travail, M. X avait été poursuivi pour entraves aux fonctions de délégué syndical et au fonctionnement du comité d'entreprise en raison des mises à pied injustifiées du salarié, en l'absence de faute grave ainsi que pour harcèlement moral.
Le tribunal ayant relaxé le prévenu, le salarié avait interjeté appel (CA Nancy, 29 juin 2011, n° 11/01747
N° Lexbase : A1834IHE) et avait obtenu gain de cause, la cour considérant que les mises à pied étaient injustifiées. Elle considérait, en outre, le harcèlement moral caractérisé à l'égard du salarié, relevant que l'allégation de harcèlement moral imputé à tort au salarié revêtait un caractère infamant, la mise en cause de ses compétences professionnelles, un caractère vexatoire, et la suppression de son ordinateur de travail, un caractère injustifié, ayant pour but de dégrader irrémédiablement ses conditions de travail, ce qui avait contraint le salarié à subir plusieurs arrêts de travail consécutifs avant de connaître un épisode dépressif sévère et durable attesté par un certificat médical.
Le prévenu s'était alors pourvu en cassation.
La Haute juridiction fait droit à sa demande, relevant que, dès lors que la mise à pied du salarié n'avait pas pour effet de suspendre l'exécution de son mandat, la cour d'appel ne pouvait déduire que les mises à pied conservatoires non justifiées par une faute grave constituaient une entrave à l'exercice de ses fonctions de délégué syndical et au fonctionnement du comité d'entreprise dont il était membre. Elle ajoute également, rappelant les principes sus-visés, que la cour d'appel qui n'a pas justifié en quoi les agissements de M. X à l'égard du salarié, étaient susceptibles de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, n'a pas caractérisé les agissements de harcèlement moral (cf. l’Ouvrage "Droit du travail"
N° Lexbase : E9546ESD et N° Lexbase : E4543EXK).
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable