L'exigence de sanctions effectives, proportionnées et dissuasives prévue par l'article 23 de la Directive 2008/48 du 23 avril 2008 (
N° Lexbase : L8978H3W), en cas de manquements des prêteurs aux obligations énoncées par la Directive, s'oppose-t-elle à l'existence de règles permettant au prêteur, sanctionné de la déchéance de son droit aux intérêts tel que le prévoit la législation française (C. com., art. L. 311-48
N° Lexbase : L9552IMQ), de bénéficier, après le prononcé de la sanction, d'intérêts exigibles de plein droit à un taux légal majoré de cinq points deux mois après une décision de justice exécutoire, sur les sommes restant dues par le consommateur ? Telle était la question préjudicielle que le tribunal d'instance d'Orléans (TI Orléans, 30 novembre 2012, n° 11-12-001679
N° Lexbase : A2584MH8) a posée à la CJUE et à laquelle cette dernière répond dans un arrêt du 27 mars 2014 (CJUE, 27 mars 2014, aff. C-565/12
N° Lexbase : A9833MHN). La Cour rappelle que, conformément à la Directive 2008/48, le prêteur est tenu, avant toute relation contractuelle, de vérifier la solvabilité de l'emprunteur afin de protéger effectivement les consommateurs de tout octroi irresponsable de contrats de crédit (C. consom., art. L. 311-9
N° Lexbase : L5256IXX), à charge pour les Etats membres de prévoir des mesures effectives, proportionnées et dissuasives pour sanctionner tout manquement à cette obligation. La Cour examine donc si la rigueur de la sanction prévue par la réglementation française (à savoir la déchéance du droit aux intérêts conventionnels) est en adéquation avec la gravité de la violation qu'elle réprime et, en particulier, si elle comporte un effet réellement dissuasif. A cet égard, elle déclare que, dans le cas où le capital restant est immédiatement exigible en raison de la défaillance de l'emprunteur, la juridiction de renvoi doit comparer les montants que le prêteur aurait perçus dans l'hypothèse où il aurait respecté son obligation d'évaluation précontractuelle avec ceux qu'il percevrait en application de la sanction précitée. Si la juridiction de renvoi devait constater que l'application de la sanction est susceptible de conférer un bénéfice au prêteur, il en découlerait que le régime de sanction en cause n'assurerait pas un effet réellement dissuasif. Par ailleurs, la Cour précise que la sanction en cause ne saurait être considérée comme réellement dissuasive si les montants susceptibles d'être perçus par le prêteur à la suite de l'application de la sanction ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier en cas de respect de son obligation. Si la sanction de la déchéance des intérêts se trouvait affaiblie voire purement et simplement annihilée, la sanction ne présenterait pas un caractère véritablement dissuasif en violation des dispositions de la Directive 2008/48 (cf. l’Ouvrage "Droit bancaire" N° Lexbase : E5866ETG et N° Lexbase : E0588AHA).
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