Les juridictions de l'Etat membre d'origine conservent leur compétence lorsque l'enfant, après avoir été enlevé illicitement, a été ramené sur le territoire de ce pays par le parent en fraude des droits duquel cet enlèvement a eu lieu. Telle est la solution qui se dégage d'un arrêt rendu le 5 mars 2014 par la première chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 1, 5 mars 2014, n° 12-24.780, FS-P+B+I
N° Lexbase : A1829MGT). En l'espèce, alors que l'enfant avait été enlevé par la mère, en Belgique, le père, qui avait obtenu l'autorité parentale exclusive, après avoir formé, en août 2011, une demande de retour de l'enfant, avait pris l'initiative de la ramener en France le 22 octobre 2011. Parallèlement, la mère avait, le 27 juillet 2011, assigné le père en référé, devant une juridiction belge, en attribution de l'exercice exclusif de l'autorité parentale, ce qui avait été accordé par une ordonnance du 22 novembre 2011. Sur appel formé par la mère le 11 août 2011, la juridiction d'appel française avait retenu sa compétence sur le fondement de l'article 10 du Règlement (CE) n° 2201/2003 du 27 novembre 2003, dit "Bruxelles II bis" (
N° Lexbase : L0159DYK). La mère faisait alors valoir que la règle de compétence dérogatoire prévue par l'article 10 du Règlement précité, en cas d'enlèvement d'enfant, devait être écartée si le parent qui l'invoque a enlevé l'enfant sur le territoire de l'Etat membre où il avait été déplacé illicitement par l'autre parent. Aussi, selon la requérante, dès lors que la cour d'appel avait constaté la soustraction de l'enfant par M. X, profitant d'une rencontre organisée par les conseils des parties à Anvers le 22 octobre 2011, comportement qu'elle avait qualifié de regrettable, relevant que ce dernier avait privé brutalement l'enfant de sa mère qui l'allaitait, et sans se prononcer sur l'incidence de l'enlèvement, sur le territoire belge, de l'enfant par M. X, la cour d'appel avait violé la disposition susvisée. Mais l'argument est écarté par la Haute juridiction qui énonce la solution précitée après avoir rappelé qu'il résulte de la jurisprudence de la CJUE que le Règlement "Bruxelles II bis" visant à dissuader les enlèvements d'enfants entre Etats membres et, en cas d'enlèvement, à obtenir que le retour de l'enfant soit effectué sans délai, l'enlèvement illicite d'un enfant est exclusif, sauf circonstances particulières limitativement énumérées à l'article 10 du Règlement, d'un transfert de compétence des juridictions de l'Etat membre dans lequel l'enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement à celles de l'Etat membre dans lequel l'enfant a été emmené. Dès lors, c'est à bon droit, en l'absence de caractérisation des circonstances particulières susvisées, lesquelles n'étaient même pas alléguées, que la cour d'appel, après avoir constaté l'existence d'un déplacement illicite de l'enfant en Belgique, avait retenu sa compétence en tant que juridiction de l'Etat membre d'origine.
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