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le 30 Juin 2025
Mots-clés : contrat de travail • indemnités • impôt sur le revenu
Les sommes acquises au terme d’un contrat de travail sont, en principe, soumises à l’impôt sur le revenu. Olivier Janoray, Avocat, Arsène Taxand, nous apporte son éclairage sur cette question*.
Lexbase : Pouvez-vous nous rappeler les grandes catégories d’indemnités de fin de contrat ?
Olivier Janoray : Il existe une kyrielle d’indemnités pouvant être versées en fin de contrat, en fonction notamment des clauses prévues dans le contrat de travail, de la fonction de la personne concernée (salarié, dirigeant) et/ou du contexte du départ.
Les indemnités peuvent être réparties en trois grandes familles.
Les indemnités actées au moment de la rupture :
Les indemnités négociées avec le salarié :
Les indemnités décidées par le juge, par exemple celle sanctionnant un licenciement nul pour motif discriminatoire.
Lexbase : Quelles sont les indemnités imposables et les indemnités exonérées ?
Olivier Janoray : Certaines indemnités sont systématiquement imposables, comme par exemple l’indemnité de non-concurrence. Au contraire, les indemnités accordées en raison du défaut de respect de la procédure de licenciement, du licenciement sans cause réelle et sérieuse ou du licenciement nul pour motif discriminatoire peuvent, en principe, être exonérées.
Certains types d’indemnités peuvent par ailleurs se cumuler, ce qui peut ajouter à la complexité de leur traitement fiscal et social. Par exemple, l’exonération liée à une indemnité versée à l’occasion de la cessation forcée d’un mandat social bénéficie d’un plafond qui lui est propre (c.-à-d., trois fois le plafond annuel de la Sécurité sociale pour 2025, soit 141 300 euros pour 2025) qui peut, si certaines conditions sont remplies, se cumuler avec l’exonération liée aux indemnités perçues par le dirigeant dans le cadre de la rupture de son contrat de travail (si celui-ci est par ailleurs salarié).
Le calcul de la rémunération de référence, qui sert au calcul de nombreux seuils d’exonération, est particulièrement piégeux. Les éléments de rémunération à prendre en compte varient fortement, notamment en fonction du type d’indemnités ou des secteurs d’activité. D’une manière générale, compte tenu des nombreuses règles applicables, une analyse au cas par cas est souvent indispensable.
Ceci est particulièrement vrai s’agissant des indemnités qualifiées de « transactionnelles », dont le régime fiscal dépend de la qualification juridique des sommes allouées aux termes de la transaction. Un soin particulier doit alors être attaché à la rédaction des clauses du protocole afin que les sommes bénéficiant en principe d’une exonération spécifique ne soient pas requalifiées par l’administration fiscale ou le juge de l’impôt en indemnités imposables. À noter, ces indemnités « transactionnelles » font systématiquement l’objet d’une analyse approfondie par l’URSSAF lors du contrôle de la société. L’URSSAF n’hésite pas, en cas de redressement portant sur une indemnité très importante, à transmettre l’information à l’Administration fiscale.
À noter également, du fait de plafonds et seuils différents, une indemnité non imposable peut se retrouver pour tout ou partie soumise à charges sociales.
Lexbase : Quelles sont les règles fiscales applicables à une indemnité de licenciement ?
Olivier Janoray : Les indemnités de licenciement stricto sensu (hors licenciement économique) bénéficient d’une exonération partielle, à hauteur du plus élevé des trois montants suivants : le montant de l’indemnité de licenciement prévue par la convention collective (ou à défaut par la loi), ou la moitié de l’indemnité de licenciement perçue, ou enfin deux fois la rémunération annuelle brute perçue par le salarié au cours de l’année civile précédent la rupture de son contrat de travail. La fraction exonérée en application des deux dernières limites ne peut toutefois pas excéder six fois le plafond annuel de la Sécurité sociale (soit 282 600 euros pour les indemnités perçues en 2025).
Les indemnités de licenciement versées dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi ne sont pas soumises aux plafonds mentionnés ci-dessus et sont exonérées en totalité.
Là encore il convient de souligner la forte disparité avec le traitement social. Du fait notamment d’un seuil d’exonération limité en tout état de cause à deux fois le plafond annuel de la Sécurité sociale (soit 94 200 euros), une indemnité non imposable est souvent chargée.
Lexbase : Quelles sont les règles fiscales applicables à une indemnité de rupture conventionnelle, y a-t-il des spécificités fiscales ?
Olivier Janoray : Dans la très grande majorité des cas, les indemnités versées à l’occasion de la rupture conventionnelle homologuée du contrat de travail d’un salarié sont exonérées dans les mêmes conditions que les indemnités de licenciement stricto sensu (cf. plafond global à six fois le plafond annuel de la Sécurité sociale).
Lexbase : Comment ces indemnités doivent-elles être déclarées dans la déclaration de revenus ?
Olivier Janoray : Les indemnités qui sont exonérées ne doivent en principe pas être reportées dans la déclaration de revenus (ou extournées de la déclaration si ces dernières ont été déclarées par l’employeur dans le cadre du prélèvement à la source).
Pour les indemnités totalement ou partiellement imposables, seule la fraction imposable doit apparaître dans le feuillet n° 2042 (le plus souvent dans les cases 1AJ à 1DJ).
Lexbase : Y a-t-il des erreurs fréquentes à éviter lors de la déclaration fiscale de ces indemnités ?
Olivier Janoray : Il est nécessaire de bien s’assurer d’une part, que l’on remplit toutes les conditions d’exonération en fonction de sa situation et, d’autre part, être précautionneux sur la ventilation à effectuer entre les montants exonérés (extournées de la déclaration) et les montants imposables.
Enfin, il faut anticiper la question du prélèvement à la source de l’impôt sur le revenu. Il convient, si le contexte le permet, de se rapprocher de son employeur afin que le montant exonéré ne soit pas soumis au prélèvement à la source (à charge pour l’employeur de s’assurer que les conditions d’exonération sont bien remplies). Dans le cas contraire, en fonction des montants en jeu, les sommes ayant subi le prélèvement à la source mais extournées directement sur la déclaration de revenus peuvent inciter l’administration fiscale à effectuer un contrôle sur pièces avant de procéder au remboursement de l’impôt sur le revenu.
*Propos recueillis par Marie-Claire Sgarra, Rédactrice en chef de Lexbase Fiscal et Yann Le Foll, Rédacteur en chef de Lexbase Public
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