Réf. : Cass. civ. 3, 11 juillet 2024, n° 23-12.491, FS-B N° Lexbase : A44155P9
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 29 Juillet 2024
► La titularité de l’action décennale doit être prévue par le bail emphytéotique ; à défaut le droit appartient au preneur.
La question, pourtant essentielle, des bénéficiaires de l’action en responsabilité civile, n’est pas définitivement réglée par les dispositions de l’article 1792 du Code civil N° Lexbase : L1920ABQ qui mentionne le maître d’ouvrage et les acquéreurs successifs de l’ouvrage. Ces deux cas n’embrassent pas la variété des exemples pratiques, tel que le bail emphytéotique. La présente espèce est l’occasion d’y revenir.
Un maître d’ouvrage confie à une entreprise la signature et la pose de panneaux photovoltaïques. Se plaignant de dysfonctionnements affectant la centrale, le maître d’ouvrage assigne, après expertise, sur le fondement de la garantie décennale. En cours d’instance, un bail emphytéotique est conclu.
Dans un arrêt rendu le 15 décembre 2022, la cour d’appel de Rennes (CA Rennes, 15 décembre 2022, n° 22/00062 N° Lexbase : A071283R) condamne l’assureur RC décennal de l’entreprise lequel forme un pourvoi en cassation.
Il articule que l’action en garantie décennale reste attachée à la propriété de l’ouvrage. Si des droits temporaires dont dispose l’emphytéote sur l’installation qu’il a réalisée sur le bien donné à bail peuvent éventuellement lui permettre de revendiquer le bénéfice de la garantie décennale, en cas de désordre concernant cette installation, ils ne peuvent, en principe, l’autoriser à se prévaloir de cette garantie. Par exception, une stipulation expresse du bail peut consacrer à l’emphytéote la qualité de maître d’ouvrage.
Le pourvoi est rejeté. Pour la Haute juridiction, compte tenu de son objet, l’emphytéose emporte, par elle-même, dès l’entrée en jouissance de celui-ci et pendant toute la durée de celui-ci, transfert au preneur des actions en garantie décennale et en réparation des désordres donnés à bail.
Le bail emphytéotique est défini à l’article L. 451-1 du Code rural N° Lexbase : L4141AE4 comme le contrat qui confère au preneur un droit réel susceptible d’hypothèque.
Ce serait donc en vertu de ce droit réel que les prérogatives du propriétaire tréfoncier sont limitées.
Le preneur est ainsi tenu de toutes les prérogatives et charges ainsi que des réparations de toutes natures tant en ce qui concerne les constructions existantes au moment du bail que celles qui se seraient élevées en cours de bail.
Il est donc logique que, par exception, le preneur soit bénéficiaire des garanties.
La volonté est de constituer un droit réel. Encore une fois, l’action se transmet bien avec la chose, ce qui ne dénature par les dispositions de l’article 1792, précité.
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