Le Quotidien du 20 juin 2024 : Droit des étrangers

[Brèves] Reconnaissance de l’adhésion au principe d’égalité femmes-hommes prépondérant dans un pays de l’Union européenne comme motif d’appartenance à un groupe social

Réf. : CJUE, 11 juin 2024, aff. C-646/21, K N° Lexbase : A13065HT

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N9668BZ4

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[Brèves] Reconnaissance de l’adhésion au principe d’égalité femmes-hommes prépondérant dans un pays de l’Union européenne comme motif d’appartenance à un groupe social. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/108777477-breves-reconnaissance-de-ladhesion-au-principe-degalite-femmeshommes-preponderant-dans-un-pays-de-lu
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par Yann Le Foll

le 20 Juin 2024

► En fonction des conditions qui prévalent dans le pays d’origine, peuvent être considérées comme appartenant à « un certain groupe social », en tant que « motif de persécution » susceptible de conduire à la reconnaissance du statut de réfugié, les femmes ressortissantes de ce pays, y compris mineures, qui partagent comme caractéristique commune leur identification effective à la valeur fondamentale de l’égalité entre les femmes et les hommes, intervenue au cours de leur séjour dans un État membre.

Faits. K. et L, les requérantes au principal, sont deux sœurs de nationalité iraquienne, nées respectivement en 2003 et en 2005. Elles sont arrivées aux Pays-Bas au cours de l’année 2015, accompagnées de leurs parents et de leur tante. Elles y séjournent depuis lors sans interruption.

Le 7 novembre 2015, leurs parents ont introduit des demandes d’asile en leur nom et au nom de K. et de L., qui ont été rejetées le 17 février 2017. Ces décisions de rejet sont devenues définitives au cours de l’année 2018.

Elles ont introduit des demandes ultérieures, au sens de l’article 2, sous q), de la Directive (UE) n° 2013/32, du 26 juin 2013, relative à des procédures communes pour l'octroi et le retrait de la protection internationale N° Lexbase : L9263IXD, lesquelles ont été rejetées, comme manifestement infondées.

Position CJUE. L’article 10, paragraphe 1, de la Directive (UE) n° 2011/95, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d'une protection internationale N° Lexbase : L8922IRU énumère, pour chacun des cinq motifs de persécution susceptibles de conduire, conformément à l’article 2, sous d), de cette Directive, à la reconnaissance du statut de réfugié, des éléments dont les États membres doivent tenir compte.

S’agissant, en particulier, du motif de « l’appartenance à un certain groupe social », il ressort de cet article 10, paragraphe 1, sous d), premier alinéa, qu’un groupe est considéré comme un « certain groupe social » lorsque deux conditions cumulatives sont remplies.

D’une part, les personnes susceptibles d’y appartenir doivent partager au moins l’un des trois traits d’identification, qui sont une « caractéristique innée », une « histoire commune qui ne peut être modifiée », ou alors une « caractéristique ou une croyance à ce point essentielle pour l’identité ou la conscience qu’il ne devrait pas être exigé d’une personne qu’elle y renonce ».

En l’espèce, la circonstance que de jeunes femmes ressortissantes de pays tiers ont séjourné dans un État membre d’accueil, pendant une phase de leur vie au cours de laquelle l’identité d’une personne se forge, et que, au cours de ce séjour, elles se sont identifiées effectivement à la valeur fondamentale de l’égalité entre les femmes et les hommes est susceptible de constituer « une histoire commune qui ne peut être modifiée », au sens de l’article 10, paragraphe 1, sous d), premier alinéa, premier tiret, de la Directive (UE) n° 2011/95.

D’autre part, ce groupe doit avoir son « identité propre » dans le pays d’origine « parce qu’il est perçu comme étant différent par la société environnante » (CJUE, 16 janvier 2024, aff. C-621/21, WS N° Lexbase : A16832E3).

Cette seconde condition à laquelle satisfont également des femmes partageant une caractéristique commune supplémentaire, telle que l’identification effective à la valeur fondamentale de l’égalité entre les femmes et les hommes, lorsque les normes sociales, morales ou juridiques ayant cours dans leur pays d’origine ont pour conséquence que ces femmes, en raison de cette caractéristique commune, sont également perçues comme étant différentes par la société environnante (CJUE, 16 janvier 2024, aff. C-621/21, WS, préc.).

Dans ce contexte, il convient de préciser qu’il appartient aux autorités compétentes de l’État membre concerné de déterminer quelle société environnante est pertinente pour apprécier l’existence de ce groupe social. Cette société peut coïncider avec l’ensemble du pays tiers d’origine du demandeur de protection internationale ou être plus circonscrite, par exemple à une partie du territoire ou de la population de ce pays tiers (CJUE, 16 janvier 2024, aff. C-621/21, WS, préc.).

Il s’ensuit que les femmes, y compris mineures, qui partagent comme caractéristique commune l’identification effective à la valeur fondamentale de l’égalité entre les femmes et les hommes, intervenue au cours de leur séjour dans un État membre, peuvent, en fonction des conditions qui prévalent dans le pays d’origine, être considérées comme appartenant à un « certain groupe social », au sens de l’article 10, paragraphe 1, sous d), de la Directive (UE) n° 2011/95 et doivent ainsi pouvoir bénéficier du statut de réfugié.

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