La lettre juridique n°409 du 23 septembre 2010 : Contrats administratifs

[Doctrine] Chronique de droit interne des contrats publics - Septembre 2010

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par François Brenet, Professeur de droit public à l'Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis

le 28 Décembre 2011

Lexbase Hebdo - édition publique vous propose, cette semaine, de retrouver la chronique d'actualité de droit interne des contrats publics, rédigée par François Brenet, Professeur de droit public à l'Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis et Directeur scientifique de Lexbase Hebdo - édition publique. Au sommaire de cette chronique, tout d'abord, un arrêt rendu le 23 juillet 2010 par le Conseil d'Etat aux termes duquel l'urgence qui s'attache à la réalisation du projet envisagé est au nombre des motifs d'intérêt général pouvant justifier la passation d'un contrat de partenariat (CE 2° et 7° s-s-r., 23 juillet 2010, n° 326544 et n° 326545, publié au Recueil Lebon). Ensuite, un arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Bordeaux, le 1er juillet 2010, énonce que l'annulation d'un acte détachable d'un contrat administratif ne se traduit pas obligatoirement par une remise en cause systématique et catégorique du contrat administratif auquel il se rattache (CAA Bordeaux, 4ème ch., 1er juillet 2010, n° 08BX01968, inédit au recueil Lebon). Enfin, dans la troisième décision ici commentée, la cour administrative d'appel de Paris, faisant application de la célèbre jurisprudence "Commune de Béziers", dit pour droit que la violation des obligations de publicité et de mise en concurrence est de nature à justifier la nullité de la convention concernée (CAA Paris, 6ème ch., 2 juillet 2010, n° 07PA02268, inédit au recueil Lebon).
  • Contrat de partenariat : l'épilogue de l'affaire du collège de Villemandeur (CE 2° et 7° s-s-r., 23 juillet 2010, n° 326544 et n° 326545, publié au Recueil Lebon N° Lexbase : A9939E4U)

Nul doute que l'arrêt rendu le 23 juillet 2010 par le Conseil d'Etat concernant la technique du contrat de partenariat pour la construction et la maintenance du collège de Villemandeur, à la suite du recours du conseil général du Loiret, ne manquera pas d'attirer l'attention. Il faut dire qu'il constitue l'épilogue d'un feuilleton judiciaire dont les deux précédents épisodes ont soufflé le chaud et le froid sur le contrat de partenariat (1), contrat dont l'on sait qu'il n'a pas connu le succès escompté, comme n'a pas manqué de le rappeler M. Nicolas Boulouis dans ses conclusions (que nous remercions pour leur aimable communication).

En 2006, le département du Loiret avait fait figure de précurseur en décidant d'utiliser le "nouveau" contrat de partenariat crée par l'ordonnance du 17 juin 2004 (ordonnance n° 2004-559, relative au contrat de partenariat N° Lexbase : L2584DZQ), afin de faire construire et entretenir un nouveau collège. Cette décision faisait suite à un appel d'offres qui avait été déclaré infructueux. Non contents de ce choix, M. X et le syndicat national des entreprises du second oeuvre du bâtiment avaient porté le fer devant le tribunal administratif d'Orléans, qui par un jugement du 29 avril 2008 avait annulé la délibération du 14 avril 2006 par laquelle la commission permanente du conseil général du Loiret avait attribué le contrat à la société X. Ce jugement avait fait grand bruit, car sa lecture est intervenue au moment même où les parlementaires étaient en train de débattre du texte de la future loi du 28 juillet 2008, relative aux contrats de partenariat (loi n° 2008-735 du 28 juillet 2008 N° Lexbase : L7307IAU), laquelle visait clairement à faciliter le recours à ce type de contrats en établissant une présomption d'urgence sectorielle (qui ne l'était assurément pas, comme le Conseil constitutionnel le jugera par la suite (2)), et en établissant une nouvelle hypothèse de recours au contrat de partenariat reposant sur le bilan avantageux. Les juges orléanais ont, en effet, considéré que l'urgence du projet n'était pas constituée et que le département du Loiret ne pouvait donc pas légalement utiliser la formule alternative du contrat de partenariat. Saisie en appel, la cour administrative d'appel a annulé le premier jugement en considérant que l'urgence du projet était belle et bien caractérisée. L'arrêt du Conseil d'Etat valide cette dernière solution et ne présente du point de vue de l'affaire du collège de Villemandeur qu'un intérêt limité puisque ledit établissement a bien été construit et a accueilli ses premiers élèves à la rentrée 2007. Il reste que la décision du 23 juillet 2010 apporte un certain nombre de précisions qui ne manqueront pas de servir de curseur aux juges du fond qui, à l'avenir, pourraient être saisis de contentieux portant sur les conditions d'éligibilité d'un projet au contrat de partenariat.

Le premier enseignement que l'on doit tirer de l'arrêt du Conseil d'Etat est relatif à la notion d'urgence. C'est, en effet, cette dernière qui avait divisé les juges nantais et orléanais et la réponse du juge de cassation était donc attendue. Sans remonter trop loin dans l'historique du contrat de partenariat, l'on se souvient que cette condition est née de la décision du Conseil constitutionnel du 26 juin 2003 (3). Parce qu'il déroge au droit commun de la commande publique, le contrat de partenariat ne peut être conclu que lorsqu'un motif d'intérêt général le justifie, motif qui peut constituer précisément en l'urgence qu'il peut y avoir, "en raison de circonstances particulières ou locales, à rattraper un retard préjudiciable". Comme il y était tenu, le Gouvernement a repris la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel dans le texte de l'ordonnance du 17 juin 2004. Dans sa version initiale, applicable au litige dont avait à connaître le Conseil d'Etat, ladite ordonnance se contentait d'exiger que le projet "présente un caractère d'urgence". Malgré cet énoncé épuré, il n'a jamais fait aucun doute que cette condition d'urgence devait être interprétée et appliquée à la lumière des précisions formulées par le juge constitutionnel. C'est ce que le Conseil d'Etat avait déjà jugé dans son arrêt du 29 octobre 2004 (4), et c'est ce qu'il confirme dans la présente espèce en jugeant que, "sous réserve qu'elle résulte objectivement, dans un secteur ou une zone géographique déterminés de la nécessité de rattraper un retard particulièrement grave, préjudiciable à l'intérêt général, affectant la réalisation d'équipements collectifs ou l'exercice d'une mission de service public, qu'elles qu'en soient les causes, l'urgence qui s'attache à la réalisation du projet envisagé est au nombre des motifs d'intérêt général pouvant justifier la passation d'un contrat de partenariat".

Mais par cette formule, la Haute juridiction fait bien davantage que de confirmer sa jurisprudence antérieure. Elle règle, en effet, une question non résolue jusque là et résidant précisément dans le point de savoir si le retard à rattraper peut être le fait de la collectivité publique. Autrement dit, une personne publique peut-elle légalement se fonder sur l'urgence à rattraper un retard lorsqu'il apparaît, en réalité, qu'elle en est à l'origine, soit parce qu'elle n'a jamais pris les décisions qui s'imposaient (décision de ne pas construire un nouveau collège afin de faire face à l'augmentation prévisible du nombre d'élèves et au mauvais état des collèges existants), soit parce qu'elle a pris une mauvaise décision (décision de construire un collège dans une zone où sa présence n'était pas une priorité, par exemple) ? Le Conseil indique clairement, dans le présent arrêt, que l'urgence peut être constituée alors même qu'elle est la conséquence de l'impéritie de la personne publique et qu'il n'appartient aucunement, au juge administratif, de s'interroger sur les causes du retard.

Enfin, le Conseil précise l'articulation entre les conditions relatives à l'urgence du projet et à son caractère avantageux. Comme cela a déjà été souligné, l'affaire du collège de Villemandeur tombait sous le coup des dispositions de l'ordonnance du 17 juin 2004 avant sa modification par la loi du 28 juillet 2008. C'est dire qu'il fallait respecter deux conditions cumulatives pour conclure un contrat de partenariat, la première tenant au caractère urgent ou complexe du projet (ces deux conditions étant alternatives), et la seconde tenant à la réalisation d'une évaluation préalable exposant les motifs ayant conduit la personne publique à opter pour le contrat de partenariat par rapport à d'autres contrats de la commande publique et exposant la condition d'éligibilité retenue (urgence ou complexité). La loi du 28 juillet 2008 a modifié cet agencement en faisant glisser la seconde au même rang que la première, de telle sorte qu'il suffit désormais d'apporter la preuve, toujours en réalisant une évaluation préalable, du caractère urgent, complexe ou avantageux du projet pour prétendre recourir au contrat de partenariat. La question qui se posait, en l'espèce, était celle de savoir s'il appartenait à la collectivité publique désireuse de conclure un contrat de partenariat d'apporter la preuve de l'urgence du projet et de son bilan avantageux par rapport aux autres contrats de la commande publique. Comme le relevait M. Nicolas Boulouis, la question n'a plus de sens depuis l'intervention de la loi du 28 juillet 2008, puisqu'il suffit désormais de satisfaire à l'une ou à l'autre pour justifier de l'éligibilité d'un projet. Il n'en demeure pas moins qu'elle présente un intérêt car elle renseigne sur la portée juridique de l'évaluation préalable. Faut-il considérer que l'évaluation préalable se résume à une exigence formelle dont l'objet est simplement de faire état des motifs du choix opéré ou, au contraire, une condition de fond imposant de démontrer, et non plus seulement de présenter, les avantages du recours au contrat de partenariat ? Le Conseil d'Etat opte clairement pour la première solution en n'exigeant pas de la cour administrative d'appel qu'elle prenne soin de vérifier le gain de temps procuré par le contrat de partenariat par rapport aux autres contrats de la commande publique.

  • La théorie des actes détachables et ses conséquences : une application de la jurisprudence "IRD" (CAA Bordeaux, 4ème ch., 1er juillet 2010, n° 08BX01968, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A1321E8G)

Le contentieux des contrats administratifs connait une période de mutation sans précédent et il est aujourd'hui difficile, pour ne pas dire impossible, de déterminer l'ampleur des changements à intervenir, et encore moins de dire quand le balancier va s'immobiliser. Dans ce flot continuel d'instabilité, il est, cependant, possible d'identifier quelques lignes de force dont l'une d'entre elles est la volonté très nette du juge administratif de concilier, autant que faire ce peut, les exigences du principe de légalité avec celles de la sécurité juridique.

C'est ce qu'illustre, après bien d'autres décisions, l'arrêt rendu par la cour administrative d'appel de Bordeaux le 1er juillet 2010. Celui-ci témoigne de ce que si, l'annulation d'un acte détachable d'un contrat administratif n'a plus nécessairement un effet platonique comme le dénonçait Romieu en 1905, elle ne se traduit pas non plus par une remise en cause systématique et catégorique du contrat administratif auquel il se rattache. C'est au terme d'une sorte de bilan coûts-avantages que le juge administratif détermine les conséquences à tirer de l'annulation d'un acte détachable et il ne s'interdit donc pas, soit de remettre en cause le contrat, soit, au contraire, de le valider. Dans l'affaire jugée par la cour administrative d'appel de Bordeaux, un conseil syndical avait confié la gestion du service public de la distribution d'eau à la société X et autorisé son président à signer la convention afférente. Seulement, le président du syndicat avait omis d'exposer au syndicat les motifs l'ayant conduit à retenir ladite société. Il avait, ainsi, clairement violé les dispositions de l'article L. 1411-5 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L3849HWH), lequel dispose que "l'autorité habilitée à signer la convention engage librement toute discussion utile avec une ou des entreprises ayant présenté une offre. Elle saisit l'assemblée délibérante du choix de l'entreprise auquel elle a procédé. Elle lui transmet le rapport de la commission présentant, notamment, la liste des entreprises admises à présenter une offre et l'analyse des propositions de celles-ci, ainsi que les motifs du choix de la candidate et l'économie générale du contrat".

Malgré cette illégalité, le syndicat n'avait pas jugé bon de résilier la convention dont il était évident qu'elle était entachée de nullité, compte tenu de l'importance du vice identifié et de la nature de l'acte concerné. Un concurrent, dont l'offre n'avait pas été retenue, a alors saisi le tribunal administratif de Pau afin qu'il prononce l'annulation de la délibération et qu'il enjoigne au syndicat de résilier la convention, ou à défaut, de saisir le juge du contrat pour qu'il constate la nullité de cette convention. Curieusement, cette demande a été rejetée par les juges palois et la cour administrative d'appel de Bordeaux annule ce jugement au motif, logique, de la violation de l'article L. 1411-5 du Code général des collectivités territoriales. Le requérant avait pris soin d'assortir sa demande d'annulation de la délibération du conseil syndical d'une demande d'injonction au titre de l'article L. 911-1 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L3329ALU), lequel énonce que "lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution".

La cour administrative d'appel de Bordeaux fait application de la désormais célèbre jurisprudence "Institut Recherche pour le Développement" ("IRD") du 10 décembre 2003 (5), aux termes de laquelle "l'annulation d'un acte détachable d'un contrat n'implique pas nécessairement la nullité dudit contrat [...] qu'il appartient au juge de l'exécution, saisi d'une demande d'un tiers d'enjoindre à une partie au contrat de saisir le juge compétent afin d'en constater la nullité, de prendre en compte la nature de l'acte annulé, ainsi que le vice dont il est entaché et de vérifier que la nullité du contrat ne portera pas, si elle est constatée, une atteinte excessive à l'intérêt général". Plus précisément, l'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux reprend l'analyse en trois temps dégagée par le Conseil d'Etat. L'illégalité constatée (le défaut d'information) est en elle-même d'une gravité importante (premier temps), elle affecte un acte essentiel (la délibération autorisant l'exécutif à signer le contrat) et donc les conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement (deuxième temps).

Enfin, et c'était la nouveauté introduite par l'arrêt "IRD" (troisième temps), les juges examinent si la remise en cause de la convention est de nature à porter une atteinte excessive à l'intérêt général. En l'espèce, il est jugé que la résiliation n'est pas susceptible d'imposer au syndicat une charge indemnitaire insupportable, de même qu'il ne lui est pas impossible de prendre les mesures transitoires lui permettant de préserver la continuité du service public durant la période nécessaire à la passation d'un nouveau contrat d'affermage. Au total, la cour administrative d'appel de Bordeaux enjoint au syndicat, soit d'obtenir la résolution amiable du contrat initialement conclu, soit, à défaut, de saisir le juge du contrat dans un délai de trois mois, afin qu'il constate la nullité du contrat.

  • Une application de la jurisprudence "Commune de Béziers" : la méconnaissance des obligations de publicité et de mise en concurrence justifie la nullité du contrat (CAA Paris, 6ème ch., 2 juillet 2010, n° 07PA02268, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A1974E8M)

Dans le prolongement de la jurisprudence "Tropic" (6), qui avait autorisé les concurrents évincés à saisir le juge du contrat d'une action en contestation de validité du contrat et lui avait octroyé des pouvoirs conséquents, le Conseil d'Etat a doté, par son arrêt "Commune de Béziers" (7), le juge de plein contentieux, saisi par les parties, de pouvoirs étendus permettant d'en faire le juge d'un litige contractuel et non plus seulement d'un contrat. La liaison qui était automatiquement faite entre la découverte d'une irrégularité et le constat de la nullité du contrat était, ainsi, définitivement abandonnée au nom de la réalité contractuelle et de la sécurité juridique qui veulent que toute irrégularité ne se traduise pas nécessairement par l'anéantissement rétroactif du contrat. Mais cette jurisprudence "Commune de Béziers" a aussi laissé un certain nombre de questions en suspens. C'est donc aux juges du fond qu'il revient d'y répondre, en attendant que le cheminement naturel du contentieux ne donne l'occasion au Conseil d'Etat de fixer sa position.

De l'arrêt "Commune de Béziers", il ressort que l'annulation ou l'illégalité du contrat ne peuvent être prononcées qu'en cas d'irrégularités tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité tenant, notamment, aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement. Cette irrégularité peut être invoquée par une partie comme elle peut être soulevée d'office par le juge. L'arrêt offre, ensuite, une alternative à deux branches dont l'une est ouverte. La première branche se rapporte à l'hypothèse du contrat dont le contenu est illicite. Sont ici visés les contrats dépourvus de cause ou dotés d'une cause illicite, de même que les contrats portant sur un objet illicite (contrat comportant délégation d'une mission de police administrative, par exemple), ou encore contenant des stipulations contraires à la réglementation ou à l'ordre public (contrat comportant une clause par laquelle l'administration renonce à exercer son pouvoir de résiliation unilatérale pour motif d'intérêt général, notamment). La seconde branche de l'alternative se rapporte à l'hypothèse dans laquelle le contrat est entaché d'un vice d'une particulière gravité relatif "notamment" aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement. Sont, évidemment, concernés tous les contrats affectés d'un vice du consentement (dol, violence, erreur) ou encore les contrats conclus par une autorité incompétente (contrat conclu par un maire sans l'autorisation préalable de son conseil municipal).

Se pose ici la question de savoir si les irrégularités relatives à la procédure de choix du cocontractant entrent dans cette catégorie. Faut-il considérer qu'une irrégularité relative à la mise en concurrence préalable à l'attribution d'un contrat administratif est de nature à justifier la remise en cause du contrat ? L'arrêt "Commune de Béziers" ne répondait pas à cette interrogation majeure, alors que le Rapporteur public, M. Emmanuel Glaser, lui avait proposé de considérer que de telles irrégularités n'entraient pas, quelle que soient leur gravité, dans la liste de celles pouvant justifier l'annulation ou la déclaration d'illégalité du contrat. Au soutien de cette proposition, le Rapporteur public soutenait que ces règles procédurales visaient, avant tout, à protéger les droits des tiers et qu'il n'était pas normal de permettre à une partie d'exciper de l'illégalité du contrat en raison de la méconnaissance des règles de passation à l'occasion d'un litige relatif à son exécution pour échapper à ses obligations contractuelles. Il n'était pas certain, cependant, que le Conseil d'Etat ait complètement fait sienne cette proposition. L'utilisation de l'adverbe "notamment" ("irrégularité [...] tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement [...]") montre qu'il avait peut-être entendu ne pas trancher la question de façon définitive.

Dans l'arrêt d'espèce du 2 juillet 2010, la cour administrative d'appel de Paris apporte un début de réponse en indiquant clairement que la violation des obligations de publicité et de mise en concurrence (violation qui découlait, en l'espèce, de la requalification d'un bail emphytéotique en marché public) est de nature à justifier la nullité de la convention concernée. Il va de soi que cet arrêt n'a pas vocation à fixer l'état du droit et qu'il faut attendre, pour cela, une prise de position du Conseil d'Etat. En attendant, l'on ne peut qu'y souscrire car une illégalité aussi grave que la méconnaissance des obligations de publicité et de mise en concurrence doit de toute évidence justifier une remise en cause radicale du contrat, sauf si un motif d'intérêt général s'y oppose (8).


(1) TA Orléans, 29 avril 2008, n° 0604132 (N° Lexbase : A8857D8K), AJDA, 2008, p.1203, note J.-D. Dreyfus, BJCP 2008, p. 199, concl. G. Borot, obs. P. Terneyre, Contrats Marchés publ., 2008, comm. 123, note G. Eckert, Dr. adm. 2008, comm. 92, note F. Melleray, JCP éd. A, 2008, 2171, note G. Terrien et V. Cochi ; CAA Nantes, 4ème ch., 23 janvier 2009, n° 08NT01579 (N° Lexbase : A2817EDP), AJDA, 2009, p. 779, note J.-D. Dreyfus, BJCP, 2009, p. 158, obs. R. Vandermeren, Contrats Marchés publ., 2009, comm. 80.
(2) Cons. const., décision n° 2008-567 DC du 24 juillet 2008 (N° Lexbase : A7893D99).
(3) Cons. const., décision n° 2003-473 DC du 26 juin 2003 (N° Lexbase : A9631C89).
(4) CE, Sect., 29 octobre 2004, n° 269814 (N° Lexbase : A6635DD4), Rec. CE, p. 393, concl. D. Casas, AJDA, 2004, p. 2383, chron. C. Landais et F. Lénica.
(5) CE 5° et 7° s-s-r., 10 décembre 2003, n° 248950 (N° Lexbase : A4046DA4).
(6) CE, Ass, 16 juillet 2007, n° 291545 (N° Lexbase : A4715DXW), Rec. CE, p.360, concl. D. Casas, AJDA, 2007, p. 1577, chron. C. Landais et F. Lénica, GAJA, n° 117 (et les références citées).
(7) CE, Ass, 28 décembre 2009, n° 304802 (N° Lexbase : A0493EQC), AJDA, 2010, p. 142, chron. S.-J. Liéber et D. Botteghi, Contrats Marchés publ., 2010, repère 2, F. Llorens et P. Soler Couteaux, comm. 85, JCP éd. A, 2010, 2072, comm. F. Linditch.
(8) CE 5° et 7° s-s-r., 10 décembre 2003, n° 248950, préc..

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