Réf. : CJUE, 2 septembre 2021, aff. C-741/19, République de Moldavie c/ Komstroy LLC (N° Lexbase : A233443T)
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par Lalaina Chuk Hen Shun
le 16 Septembre 2021
► Le mécanisme d’arbitrage, prévu par le traité sur la charte de l’énergie, n’est pas applicable aux différends opposant un État membre à un investisseur d’un autre État membre au sujet d’un investissement réalisé dans le premier État.
Faits et procédures. Dans le cadre de l’exécution d’une série de contrats relatifs à la production et la vente d’électricité à destination de la Moldavie, une entreprise publique moldave ne s’est acquittée que partiellement de ses obligations financières à l’égard d’un distributeur ukrainien. Ce dernier a successivement saisi, en vain, les juridictions moldaves puis ukrainiennes afin d’obtenir le paiement de sa créance. Reprochant à la République de Moldavie d’avoir eu, dans ce contexte, des comportements contraires à ses obligations découlant du traité sur la charte de l'énergie (TCE), le distributeur ukrainien a engagé une procédure d’arbitrage devant un tribunal arbitral qui a condamné l’État moldave par une sentence rendue à Paris le 25 octobre 2013. La cour d’appel de Paris a par la suite, au motif que le tribunal s’était déclaré à tort compétent, annulé la sentence par un arrêt du 12 avril 2016 (CA Paris, 1, 1, 12 avril 2016, n° 13/22531 N° Lexbase : A5214RC4), lui-même cassé par la Cour de cassation (Cass. civ. 1, 28 mars 2018, n° 16-16.568, F-D N° Lexbase : A8680XIC) sur pourvoi formé par la société Komstroy, venant aux droits du distributeur ukrainien.
Questions préjudicielles. C’est dans ce contexte que la cour d’appel de renvoi saisit la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de questions préjudicielles relatives, notamment, à la qualité d’investisseur ou non de Komstroy au sens de l’article 1er, point 6, du TCE (en ligne).
Réponse de la CJUE. Le juge européen décide qu’un simple contrat de fourniture d’électricité constitue une opération commerciale qui ne saurait, en tant que telle, constituer un investissement au sens du TCE, et cela indépendamment de la question de savoir si un apport est nécessaire afin qu’une opération donnée constitue un investissement.
Par ailleurs et surtout, l’arrêt du 2 septembre 2021 s’inscrit dans le prolongement de l’arrêt Achmea (CJUE, 6 mars 2018, aff. C-284/16, Achmea BV N° Lexbase : A0668XGT) et de l’accord du 29 mai 2020 ayant éteint les clauses d’arbitrage incluses dans les traités bilatéraux d’investissements (TBI) entre États membres de l’Union Européenne (JOUE L169, en ligne). De la même manière que la CJUE avait considéré que de telles clauses étaient contraires au droit de l’Union en ce qu’elles portent atteinte à l’autonomie de ce droit, le juge européen considère également que le TCE doit être interprété en ce sens que son article 26 (para. 2, (c)), prévoyant une procédure d’arbitrage, « n’est pas applicable aux différends opposant un État membre à un investisseur d’un autre État membre au sujet d’un investissement réalisé par ce dernier dans le premier État membre ».
Solution. Ainsi, outre qu'elle précise la notion d'« investisseur » au sens du TCE, la CJUE étend logiquement la solution retenue dans l'affaire Achmea aux arbitrages intra-UE fondés sur ce traité.
Pour aller plus loin : v. L. Chuk Hen Shun, ÉTUDE : L’arbitrage, Autres modes d'expression du consentement, in Procédure civile, (dir. E. Vergès), Lexbase (N° Lexbase : E30144YB). |
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