Le Quotidien du 25 mars 2019

Le Quotidien

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Brèves] Absence d’obligation de saisine de la commission de recours amiable en cas de refus de la procédure de conciliation par la caisse

Réf. : Cass. civ. 2, 14 mars 2019, n° 18-12.620, F-P+B (N° Lexbase : A0122Y4B)

Lecture: 2 min

N8172BXX

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par Laïla Bedja

Le 20 Mars 2019

► Selon l’article L. 452-4 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L7788I3T), à défaut d'accord amiable entre la caisse et la victime ou ses ayants droit d'une part, et l'employeur d'autre part, sur l'existence de la faute inexcusable reprochée à ce dernier, ainsi que sur le montant de la majoration et des indemnités mentionnées à l'article L. 452-3 (N° Lexbase : L5302ADQ), il appartient à la juridiction de la Sécurité sociale compétente, saisie par la victime ou ses ayants droit ou par la caisse primaire d'assurance maladie, d'en décider ; il résulte de ces dispositions qu'en cas de refus de la caisse de mettre en oeuvre la procédure de conciliation, la victime n'est pas tenue, préalablement à l'instance contentieuse, de saisir la commission de recours amiable de cet organisme dans les conditions prévues par l’article R. 142-1 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L6645LM3).

 

Telle est la solution retenue par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 14 mars 2019 (Cass. civ. 2, 14 mars 2019, n° 18-12.620, F-P+B N° Lexbase : A0122Y4B).

 

Dans cette affaire, la caisse primaire d’assurance maladie a pris en charge, après avis favorable d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, le syndrome dépressif d’un salarié. A la suite de cette décision, ce dernier a saisi la juridiction de Sécurité sociale d’une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.

 

Pour déclarer cette demande irrecevable, l’arrêt (CA Paris, Pôle 6, 12ème ch., 21 décembre 2017, n° 14/11765 N° Lexbase : A6832W8K) retient qu’il résulte des dispositions des articles R. 142-18 (N° Lexbase : L6648LM8) et R. 142-1 (N° Lexbase : L6645LM3) du Code de la Sécurité sociale que le tribunal des affaires de Sécurité sociale ne peut être saisi d'une réclamation contre un organisme de Sécurité sociale qu'après que celle-ci a été soumise à une commission de recours amiable. En l’espèce, le salarié a accusé réception, le 18 juillet 2013, d’une décision de refus de conciliation opposée par la caisse, le 16 juillet 2013. Cette décision rappelait l'obligation, en cas de contestation, de saisir la commission de recours amiable dans le délai de deux mois à compter de la notification ; à défaut d'avoir contesté cette décision devant la commission de recours amiable, la décision de refus de conciliation de la caisse est devenue définitive ; l'action est donc forclose.

 

Enonçant la solution précitée, la Haute juridiction casse et annule l’arrêt rendu par la cour d’appel pour violation des articles susvisés (sur La nécessité d'une saisine préalable de la Commission de recours amiable (CRA), cf. l’Ouvrage «Droit de la protection sociale» N° Lexbase : E1315EUA).

newsid:468172

Bancaire

[Brèves] Analyse exhaustive des clauses d'indexation libellée en francs suisses dans le cadre des contrats de prêt et des obligations du banquier

Réf. : Cass. civ. 1, 13 mars 2019, n° 17-23.169, F-P+B (N° Lexbase : A0267Y4N)

Lecture: 3 min

N8154BXB

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par Gözde Lalloz

Le 20 Mars 2019

►Le caractère clair et compréhensible de la clause d'indexation libellée en francs suisses l'exclut du champ d'application des clauses abusives ;

►Doit se substituer à l'annulation de la clause prévoyant un taux d'intérêt conventionnel abusif le taux de l'intérêt légal en tant que disposition de droit national à caractère supplétif ;

►Le devoir de mise en garde et d'information du banquier sur le risque d'endettement excessif s'apprécie au jour de la souscription de l'engagement ;

►Est réputée non écrite car provoquant un déséquilibre significatif au détriment des emprunteurs la clause stipulant l’intérêt conventionnel dans un prêt, dès lors que les mentions de l'offre préalable permettaient au prêteur de décider unilatéralement et sans contrepartie de l'application d'un taux fixe ou variable et, dans cette dernière hypothèse, de l'indice de référence et de ses modalités de mise en œuvre. 

 

Tels sont les principaux enseignements d'un arrêt rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 13 mars 2019 (Cass. civ. 1, 13 mars 2019, n° 17-23.169, F-P+B N° Lexbase : A0267Y4N).

 

En l'espèce, deux séries de prêts avec une clause d'indexation dont la contre-valeur était libellée en francs suisses avaient été octroyées par un établissement de crédit dont les remboursements étaient échelonnés sur plusieurs échéanciers. Face à la variation du cours de change, les emprunteurs se sont retrouvés dans l'incapacité d'honorer ces derniers et ont assigné la banque en arguant le caractère ruineux et abusif de la clause d'indexation et le manquement du banquier à son devoir de mise en garde et d'information.

 

Les emprunteurs ont formé un pourvoi en cassation reprochant notamment à l’arrêt d’appel de ne pas avoir fait droit à leurs demandes concernant la clause de remboursement en francs suisses et celles relatives au devoir de mise en garde et d’information, tandis que la banque a formé un pourvoi incident pour contester le caractère abusif de la clause stipulant l'intérêt conventionnel dans un prêt et nulle celle stipulée dans d’autres prêts.

 

Concernant la clause de remboursement en francs suisses, la Cour de cassation approuve donc l’arrêt d’appel d’avoir retenu qu’elle n’était pas abusive car elle est claire et compréhensible. Elle relève, plus spécifiquement, que cette clause figure dans une offre précisant que le risque de change est intégralement supporté par les emprunteurs, qui reconnaissent avoir été informés du risque particulier lié à ce type de financement par une notice signée par eux, laquelle mentionne que les risques, réels et cumulatifs, de taux et de change, portent sur la totalité du crédit, et contient un paragraphe sur la variabilité du cours de change qui indique que, selon l'orientation de la devise sur le marché des changes par rapport à l'euro, la perte ou le gain éventuels sont intégralement à la charge ou au profit de l'emprunteur, sauf pour celui-ci à solliciter la couverture de ce risque moyennant un coût supplémentaire. En outre, cette notice comporte un exemple chiffré décrivant de manière précise l'effet de l'appréciation de la devise sur la contre-valeur en euros du capital restant dû en francs suisses.

 

Elle rejette, par ailleurs, l’ensemble des moyens développés par les emprunteurs et la banque à l’exception d’un qui fonde la cassation de l’arrêt d’appel.

 

Elle rappelle en effet que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.  Or, pour déclarer irrecevable, en raison de sa nouveauté, la demande d'annulation de la clause d'indexation des prêts, l'arrêt retient qu'une telle demande ne tend pas aux mêmes fins que celle soumise aux premiers juges, dès lors que ceux-ci étaient saisis d'une demande d'annulation des prêts qui tendait à l'anéantissement de toutes les clauses. Dès lors pour la Haute juridiction, en statuant ainsi, alors que l'annulation de la clause sollicitée devant elle participait de l'annulation du contrat demandée en première instance, de sorte qu'elle tendait aux mêmes fins, la cour d'appel a violé l’article 565 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L6718H7X) (cf. les Ouvrages "Procédure civile" N° Lexbase : E0688EUZ) et "Droit bancaire" N° Lexbase : E2201AHY et N° Lexbase : E1015ATR).

 

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Copropriété

[Brèves] Impossibilité d’invoquer la nullité d’une assemblée générale dans son ensemble par un copropriétaire ayant voté en faveur de certaines résolutions

Réf. : Cass. civ. 3, 14 mars 2019, deux arrêts, n° 18-10.379, FS-P+B+I (N° Lexbase : A0148Y4A) et n° 18-10.382, F-D (N° Lexbase : A0117Y44)

Lecture: 2 min

N8157BXE

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 20 Mars 2019

Un copropriétaire ne peut demander l’annulation en son entier d’une assemblée générale dès lors qu’il a voté en faveur de certaines des décisions prises.

 

Voilà l’enseignement délivré par la troisième chambre civile de la Cour de cassation, aux termes de deux arrêts rendus le 14 mars 2019 (Cass. civ. 3, 14 mars 2019, deux arrêts, n° 18-10.379, FS-P+B+I N° Lexbase : A0148Y4A et n° 18-10.382, F-D N° Lexbase : A0117Y44).

 

Dans la première espèce, une SCI propriétaire de lots dans un immeuble soumis au statut de la copropriété, avait assigné le syndicat des copropriétaires en annulation d’une assemblée générale, en invoquant le non-respect du délai de convocation prévu à l’article 9 du décret du 17 mars 1967 ; en appel, elle avait subsidiairement sollicité l’annulation de quinze résolutions. La SCI faisait grief à l’arrêt de déclarer irrecevable la demande en annulation de l’assemblée générale, soutenant que le copropriétaire qui a été convoqué hors délai à une assemblée générale peut en demander l'annulation sans justifier d'un grief, peu important qu'il ait voté pour certaines résolutions.

 

En vain. La Haute juridiction approuve la cour d’appel d’Aix-en-Provence qui, après avoir énoncé la solution précitée, et constaté que la SCI avait voté en faveur de plusieurs résolutions lors de l’assemblée générale, sans que la mention en page trois du procès-verbal selon laquelle elle précisait que l’assemblée générale était entachée d’illégalité en raison du non-respect du délai de convocation lui ait conféré la qualité d’opposant ou de défaillant à l’ensemble des décisions prises, en avait exactement déduit que la demande était irrecevable (CA Aix-en-Provence, 19 octobre 2017, n° 16/04201 N° Lexbase : A2054WWY).

 

De même, dans la seconde espèce la Haute juridiction approuve les juges d’appel qui, ayant retenu à bon droit que les actions qui ont pour objet de contester les décisions des assemblées générales ne peuvent être introduites que par les copropriétaires opposants ou défaillants et qu'un copropriétaire ne peut demander l'annulation en son entier d'une assemblée générale alors qu'il a voté en faveur de certaines résolutions, en avaient exactement déduit que la SCI n'était recevable qu'à attaquer les résolutions contre lesquelles elle avait voté (CA Aix-en-Provence, 19 octobre 2017, n° 16/04201 N° Lexbase : A2054WWY).

newsid:468157

Famille et personnes

[Brèves] Loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice : le volet «Famille» validé dans sa quasi-totalité par le Conseil constitutionnel

Réf. : Cons. const., décision n° 2019-778 DC, du 21 mars 2019 (N° Lexbase : A5080Y4W)

Lecture: 3 min

N8200BXY

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par Anne-Lise Lonné-Clément

Le 27 Mars 2019

► Par décision rendue le 21 mars 2019, le Conseil constitutionnel a validé l’ensemble des dispositions constituant le volet «famille» de la loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, à l’exception de son article 7, ayant pour objet de confier aux organismes débiteurs des prestations familiales, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, la délivrance de titres exécutoires portant sur la modification du montant d'une contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants (Cons. const., décision n° 2019-778 DC, du 21 mars 2019 N° Lexbase : A5080Y4W ; sur le volet «procédure civile», lire N° Lexbase : N8191BXN ; et sur le volet «pénal/procédure pénale», lire N° Lexbase : N8201BXZ).

 

A propos de l’article 7 censuré, ayant donc pour objet de confier aux organismes débiteurs des prestations familiales, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, la délivrance de titres exécutoires portant sur la modification du montant d'une contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants, les Sages relèvent, en effet, que les caisses d'allocations familiales sont des personnes privées en charge d'une mission de service public. Or, les dispositions contestées leur donnent compétence pour réviser le montant des contributions à l'entretien et à l'éducation des enfants qui ont fait l'objet d'une fixation par l'autorité judiciaire ou d'une convention homologuée par elle. Si cette révision doit respecter un barème national, les caisses d'allocations familiales doivent se livrer, à cette occasion, à une appréciation de l'évolution des ressources des parents et des modalités de résidence et d'exercice du droit de visite et d'hébergement. En outre, en l'absence de production par un parent des renseignements et documents requis, elles peuvent moduler forfaitairement le montant de la contribution.

De plus, en application de l'article L. 581-2 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L2590LBK), les organismes débiteurs des prestations familiales sont tenus de verser l'allocation de soutien familial en cas de défaillance du parent débiteur de la contribution pour l'entretien et l'éducation des enfants et peuvent être ainsi intéressés à la détermination du montant des contributions.

Par conséquent, et alors même que les décisions de révision prises par les caisses pourraient faire l'objet d'un recours devant le juge aux affaires familiales, le législateur a autorisé une personne privée en charge d'un service public à modifier des décisions judiciaires sans assortir ce pouvoir de garanties suffisantes au regard des exigences d'impartialité découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789 (N° Lexbase : L1363A9D). C’est ainsi que le Conseil constitutionnel déclare l'article 7 contraire à la Constitution.

 

En revanche, ont été validés :

- les paragraphes I et II de l'article 6, modifiant respectivement les articles 317 (N° Lexbase : L3822IRY) et 46 (N° Lexbase : L2819ABZ) du Code civil, prévoyant que certains actes de notoriété sont désormais délivrés par un notaire, et non plus par un juge du tribunal d'instance ;

- les articles 9, 10, 12, 29 et 30 43, en matière de protection juridique des majeurs (le paragraphe I de l'article 9 étendant le champ des actes de gestion des biens de la personne protégée que le tuteur peut prendre, sans autorisation préalable du juge ; l’article 10 modifiant les conditions d'exercice de la liberté matrimoniale par les majeurs protégés ; l'article 12 modifiant l'article 26 de la loi n° 2015-177 du 16 février 2015 (N° Lexbase : L9386I7R) sur les conditions de renouvellement des mesures de tutelle et de curatelles ; l'article 29 modifiant certaines dispositions du régime de l'habilitation familiale ; l'article 30 modifiant les modalités d'inventaire du patrimoine et de contrôle des comptes de gestion des personnes protégées) ;

- et l’article 31, modifiant les règles régissant l'exécution des décisions judiciaires en matière d'autorité parentale (en particulier, son paragraphe I modifie l'article 373-2 du Code civil N° Lexbase : L2905AB9, relatif à l'exercice de l'autorité parentale par les parents séparés, qui prévoit notamment que chacun des père et mère doit maintenir des relations personnelles avec l'enfant et respecter les liens de celui-ci avec l'autre parent ; un troisième alinéa y est ajouté, prévoyant que, à cette fin, le procureur de la République peut requérir le concours de la force publique pour faire exécuter une décision du juge aux affaires familiales, une convention de divorce par consentement mutuel ou une convention homologuée fixant les modalités d'exercice de l'autorité parentale).

newsid:468200

Fiscalité des entreprises

[Brèves] Précisions sur les crédits d’impôt en faveur de certaines entreprises ayant conclu un accord d’intéressement

Réf. : CE 3° et 8° ch.-r., 13 mars 2019, n° 417536, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6904Y34)

Lecture: 1 min

N8110BXN

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par Marie-Claire Sgarra

Le 20 Mars 2019

Les dispositions de l’article 244 quater T du Code général des impôts (N° Lexbase : L5903KWK) ont créé un dispositif fiscal destiné à inciter les entreprises à conclure des accords d’intéressement ou à modifier des accords existants dans un sens plus favorable aux salariés ;

►Il résulte de ces dispositions que le crédit d’impôt intéressement, qui est calculé au titre des sommes attribuées aux bénéficiaires de l’accord d’intéressement signé durant cette période, bénéficie aux entreprises pendant la période triennale de l’accord ;

►Ces dispositions étaient de nature à laisser espérer leur application sur l’ensemble de la période triennale pour laquelle est conclu un accord d’intéressement.

 

Telle est la solution retenue par le Conseil d’Etat dans un arrêt du 13 mars 2019 (CE 3° et 8° ch.-r., 13 mars 2019, n° 417536, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6904Y34).

 

Par suite, en jugeant qu’en excluant du bénéfice du crédit d’impôt les entreprises de plus de 250 salariés pour 2011 et 2012, le législateur n’avait pas privé la société au litige d’une espérance légitime d’en bénéficier jusqu’au terme de la période triennale de l’accord d’intéressement applicable à compter du 1er janvier 2010 et signé en mai de cette année aux motifs que le dispositif de l’article 244 quater T ne comportait aucune indication de durée et que le crédit d’impôt ne pouvait être imputé sur un exercice autre que celui au titre duquel étaient versées les primes d’intéressement, alors qu’ainsi qu’il a été dit, ce régime fiscal était lié à la durée d’application du contrat d’intéressement, la cour a donné aux faits de l’espèce une qualification juridique erronée.

newsid:468110

Justice

[Brèves] Loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice : le Conseil constitutionnel valide presqu’entièrement les dispositions relatives à la procédure civile

Réf. : Cons. const., décisions du 21 mars 2019, n° 2019-778 DC (N° Lexbase : A5079Y4U) et n° 2019-779 DC (N° Lexbase : A5080Y4W)

Lecture: 3 min

N8191BXN

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par Aziber Seïd Algadi

Le 27 Mars 2019

  • D’une part, l'article 3 de la loi de programmation et de réforme de la justice, visant à développer les modes de règlement alternatifs des différends, en subordonnant à une tentative de règlement amiable préalable la recevabilité de certaines demandes en matière civile, est conforme à la Constitution. En effet, le législateur a prévu que la condition de recevabilité nouvellement instaurée n'est pas opposable lorsque l'absence de recours à l'un des modes de résolution amiable est justifiée par un motif légitime. Au titre d'un tel motif, il a expressément prévu l'indisponibilité de conciliateurs de justice dans un délai raisonnable.


Le législateur, qui a entendu réduire le nombre des litiges soumis au juge, a poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de bonne administration de la justice. Il a toutefois assorti la validation de cet article d'une réserve d'interprétation selon laquelle, s'agissant d'une condition de recevabilité d'un recours contentieux, il appartiendra au pouvoir réglementaire de définir la notion de «motif légitime» et de préciser le «délai raisonnable» d'indisponibilité du conciliateur de justice à partir duquel le justiciable est recevable à saisir la juridiction, notamment dans le cas où le litige présente un caractère urgent.

 

  • D’autre part, la plupart des dispositions de l'article 33, modifiant les règles de publicité des décisions de justice, en matière administrative et judiciaire, est conforme à la Constitution. En prévoyant que les données d'identité des magistrats et des membres du greffe figurant dans les décisions de justice mises à disposition du public par voie électronique ne peuvent faire l'objet d'une réutilisation ayant pour objet ou pour effet d'évaluer, d'analyser, de comparer ou de prédire leurs pratiques professionnelles réelles ou supposées, le législateur a entendu éviter qu'une telle réutilisation permette, par des traitements de données à caractère personnel, de réaliser un profilage des professionnels de justice à partir des décisions rendues, pouvant conduire à des pressions ou des stratégies de choix de juridiction de nature à altérer le fonctionnement de la justice. Ces dispositions n'instaurent ainsi aucune distinction injustifiée entre les justiciables et ne portent pas d'atteinte contraire au droit à une procédure juste et équitable garantissant l'équilibre des droits des parties.


Aussi, il est déduit des articles 6 (N° Lexbase : L1370A9M) et 16 (N° Lexbase : L1363A9D) de la Déclaration de 1789 un principe de publicité des audiences devant les juridictions civiles et administratives. Il est loisible au législateur d'apporter à ce principe des limitations liées à des exigences constitutionnelles, justifiées par l'intérêt général ou tenant à la nature de l'instance ou aux spécificités de la procédure, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi. Par ailleurs, le législateur a prévu, en matière gracieuse et dans les matières relatives à l'état et à la capacité des personnes ou intéressant la vie privée déterminées par décret, que les débats ont lieu en chambre du conseil et que les jugements ne sont pas prononcés publiquement, sans que le juge ne dispose d'un pouvoir d'appréciation sur l'un ou l'autre de ces points ; il n'en résulte, compte tenu de la nature des matières en cause ou des enjeux particuliers qu'elles présentent au regard de l'intimité et de la vie privée des personnes, aucune méconnaissance du principe de publicité des audiences ni d'aucune autre exigence constitutionnelle.

 

  • Toutefois, le 2° du paragraphe V de l'article 33, selon lequel, lorsque les débats ont eu lieu en chambre du conseil pour des motifs tenant à un risque d'atteinte à l'intimité de la vie privée, à une demande de toutes les parties ou à des désordres de nature à troubler la sérénité de la justice, les tiers sont privés de plein droit de la communication de l'intégralité du jugement, dont la copie est alors limitée au dispositif, est censuré. En raison de sa généralité et de son caractère obligatoire, cette restriction apportée par les dispositions contestées n'est pas limitée aux cas où elle serait justifiée, notamment, par la protection du droit au respect de la vie privée. Dès lors, ces dispositions méconnaissent les exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration de 1789.

 

Telles sont les principales solutions, concernant le volet «procédure civile», retenues par le Conseil constitutionnel, dans un arrêt du 21 mars 2019 (Cons. const., 21 mars 2019, n° 2019-778 DC N° Lexbase : A5080Y4W ; sur le volet «famille», cf. N° Lexbase : N8200BXY ; sur le volet «pénal», cf. N° Lexbase : N8201BXZ).

newsid:468191

Marchés publics

[Brèves] Appréciation du prix anormalement bas d'une offre au regard de son prix global

Réf. : CE 2° et 7° ch.-r., 13 mars 2019, n° 425191, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A6923Y3S)

Lecture: 1 min

N8144BXW

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par Yann Le Foll

Le 20 Mars 2019

La circonstance que le prix de l’une des prestations paraisse anormalement bas n’est pas suffisant pour qualifier l’offre entière d’anormalement basse et la rejeter pour ce motif. Telle est la solution dégagée par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 13 mars 2019 (CE 2° et 7° ch.-r., 13 mars 2019, n° 425191, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A6923Y3S).

 

 

Il résulte des dispositions de l'article 53 de l'ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015, relative aux marchés publics (N° Lexbase : L9077KBS), et de l'article 60 du décret n° 2016-360 du 25 mars 2016, relatif aux marchés publics (N° Lexbase : L3006K7H), que l'existence d'un prix paraissant anormalement bas au sein de l'offre d'un candidat, pour l'une seulement des prestations faisant l'objet du marché, n'implique pas, à elle seule, le rejet de son offre comme anormalement basse, y compris lorsque cette prestation fait l'objet d'un mode de rémunération différent ou d'une sous-pondération spécifique au sein du critère du prix.

 

Or, le prix anormalement bas d'une offre s'apprécie en effet au regard de son prix global. Il s'ensuit que le juge des référés du tribunal administratif de Dijon a commis une erreur de droit en se fondant, pour juger que la communauté d'agglomération n'avait pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en rejetant l'offre de la société requérante comme anormalement basse, sur le seul motif que celle-ci proposait de ne pas facturer les prestations de collecte supplémentaire des ordures ménagères produites par certains gros producteurs (cf. l’Ouvrage "Marchés publics" N° Lexbase : E2080EQ4). 

newsid:468144

Procédure pénale

[Brèves] Loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice : les dispositions pénales partiellement censurées par le Conseil constitutionnel

Réf. : Cons. const., décisions du 21 mars 2019, n° 2019-778 DC (N° Lexbase : A5079Y4U) et n° 2019-779 DC (N° Lexbase : A5080Y4W)

Lecture: 4 min

N8201BXZ

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par June Perot

Le 27 Mars 2019

► Aux termes d’une décision qui restera probablement historique par sa longueur (395 paragraphes), le Conseil constitutionnel a censuré partiellement, avec réserves, certaines dispositions pénales de la loi de programmation 2018-2022 pour la justice (Cons. const., décisions du 21 mars 2019, n° 2019-778 DC N° Lexbase : A5080Y4W et n° 2019-779 DC N° Lexbase : A5080Y4W ; sur le volet «procédure civile», lire N° Lexbase : N8191BXN ; et sur le volet «famille», lire N° Lexbase : N8200BXY).

 

Après des mois de discussions, mobilisations, grèves et manifestations, et plusieurs navettes parlementaires, le contenu de la loi de programmation de la justice 2018-2022 est enfin fixé. La loi dont était saisi le Conseil constitutionnel comptait dans sa version définitive 109 articles, alors que le projet de loi initial en comportait 56. Outre la procédure d'adoption de la loi, 57 des articles étaient contestés par les auteurs des quatre recours. Le Conseil a lui-même indiqué dans sa décision qu’il s’agissait de «la plus longue jamais rendue».

 

Le Conseil a validé diverses mesures de réforme de la procédure pénale, dont notamment celles figurant à l’article 69 créant un parquet national antiterroriste (PNAT ; à ce sujet lire, N. Catelan, Vers un Procureur (national) anti-terroriste, Lexbase Pénal, avril 2018 N° Lexbase : N3721BX4), l'article 74 modifiant les conditions du prononcé des peines d'emprisonnement ferme, l'article 93 habilitant le Gouvernement à réformer par voie d'ordonnance la justice pénale des mineurs, l’article 44 modifiant les conditions dans lesquelles il peut être recouru, dans le cadre d’une enquête ou d’une information judiciaire, à la géolocalisation, l’article 48 qui supprime le principe selon lequel le gardé à vue doit être présenté devant le procureur de la République avant que celui-ci autorise la prolongation de la garde à vue, l’article 53 qui permet, sur autorisation du procureur de la République, la poursuite de certains actes d’enquête postérieurement à l’ouverture d’une information judiciaire (avec réserve)… Le Conseil constitutionnel a également assorti d’une réserve d’interprétation la validation des dispositions de l’article 58 qui étend le champ d’application de l’amende forfaitaire délictuelle. Cette dernière ne devra pas s’appliquer à des délits punis d’une peine d’emprisonnement supérieure à 3 ans, pour un montant ne dépassant pas le plafond des amendes contraventionnelles.

 

Par ailleurs, sont notamment censurés :

 

  • L’article 44 : qui modifie les conditions dans lesquelles il peut être recouru, dans le cadre d'une enquête ou d'une information judiciaire, à des interceptions de correspondances émises par la voie de communications électroniques. Le Conseil constitutionnel relève que le législateur a autorisé le recours à des mesures d'interception de correspondances émises par voie de communications électroniques pour des infractions ne présentant pas nécessairement un caractère de particulière gravité et complexité, sans assortir ce recours des garanties permettant un contrôle suffisant par le juge du maintien du caractère nécessaire et proportionné de ces mesures durant leur déroulé. Le législateur n'a donc pas opéré une conciliation équilibrée entre l'objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d'infractions et le droit au respect de la vie privée et le secret des correspondances.

 

  • L’article 46 : qui autorise le recours à des techniques spéciales d'enquête, dans le cadre d'une enquête de flagrance ou préliminaire, pour tout crime, et non pour les seules infractions relevant de la criminalité et de la délinquance organisées. S'agissant de techniques présentant un caractère particulièrement intrusif, le Conseil constitutionnel relève que, si le juge des libertés et de la détention peut ordonner à tout moment leur interruption, les dispositions contestées ne prévoyaient pas qu'il puisse accéder à l'ensemble des éléments de la procédure. Ainsi, alors que son autorisation est donnée pour une durée d'un mois, le juge n'a pas accès aux procès-verbaux réalisés dans le cadre de l'enquête en cours autres que ceux dressés en exécution de sa décision et il n'est pas informé du déroulé de l'enquête en ce qui concerne les investigations autres que les actes accomplis en exécution de sa décision. Par ce motif notamment, le Conseil juge que le législateur n'a pas opéré une conciliation équilibrée entre, d'un côté, l'objectif de recherche des auteurs d'infractions et, de l'autre, le droit au respect de la vie privée, le secret des correspondances et l'inviolabilité du domicile.

 

  • L’article 54 : qui supprime l’obligation de l'accord de l'intéressé pour le recours à des moyens de télécommunication audiovisuelle s'agissant des débats relatifs à la prolongation d'une mesure de détention provisoire. Tout en relevant que le législateur a entendu contribuer à la bonne administration de la justice et au bon usage des deniers publics, en évitant les difficultés et les coûts occasionnés par l'extraction de la personne placée en détention provisoire, le Conseil constitutionnel relève que le recours à des moyens de télécommunication audiovisuelle peut ainsi être imposé à l'intéressé lorsqu'il doit être entendu en vue de la prolongation de sa détention, y compris lorsque ce recours n'est pas justifié par des risques graves de troubles à l'ordre public ou d'évasion. Dès lors, eu égard à l'importance de la garantie qui s'attache à la présentation physique de l'intéressé devant le magistrat ou la juridiction dans le cadre d'une procédure de détention provisoire et en l'état des conditions dans lesquelles s'exerce un tel recours à ces moyens de télécommunication, le Conseil juge que les dispositions contestées portent une atteinte excessive aux droits de la défense.

 

  • L’article 49 : qui porte le délai initial de l’enquête de flagrance à 16 jours. Le Conseil a relevé que compte tenu des pouvoirs attribués aux enquêteurs en flagrance, lesquels ne sont justifiés que par la proximité avec la commission de l'infraction, le législateur n'a, en adoptant les dispositions contestées, pas prévu des garanties légales de nature à assurer une conciliation équilibrée entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d'infractions et, d'autre part, le droit au respect de la vie privée et l'inviolabilité du domicile.

 

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