Un salarié n'ayant commis aucune faute en organisant par avance la poursuite de son activité professionnelle dans une autre société, a cependant manqué à son obligation de loyauté en transformant une démarche individuelle en une entreprise collective dans laquelle il a impliqué des salariés qui étaient directement placés sous son autorité dans la précédente entreprise. Telle est la solution d'un arrêt de la cour d'appel de Lyon rendu le 15 mars 2011 (CA Lyon, ch. soc., sect. A, 15 mars 2011, n° 09/07081
N° Lexbase : A8583HCU).
Dans cette affaire, M. Y, directeur
marketing, licencié pour faute grave par la société X, s'était engagé, dans une transaction, à respecter le caractère confidentiel des informations auxquelles il avait pu avoir accès, notamment, à ne pas proposer directement ses services, sous quelque forme que ce soit, aux entreprises ayant une activité susceptible de concurrencer la société et d'intervenir sur les clients du groupe dans le domaine des progiciels pour les sociétés et les activités visées au protocole ou toutes sociétés susceptibles de se substituer à ces dernières, ne pas débaucher de manière directe ou indirecte tout collaborateur du groupe, et ce pour une durée de deux années à compter de la signature de l'accord. Postérieurement, un document intitulé "protocole d'association" a été signé entre, d'une part, la société F., et, d'autre part, le salarié, ce dernier se portant fort pour deux salariés dans son ancienne entreprise. Peu de temps après, la société a enregistré plusieurs démissions, notamment de ces deux salariés. La société X a fait assigner la société F. devant le tribunal de commerce de Nanterre afin d'entendre juger que celle-ci s'était rendue coupable de concurrence déloyale à son encontre et ordonner de mettre un terme au contrat de travail de ses anciens salariés. Parallèlement à l'action engagée contre la société F., la société X a saisi le conseil de prud'hommes de Lyon de demandes dirigées contre son ancien directeur
marketing en remboursement de l'indemnité versée au titre de l'engagement de non sollicitation violé et en dommages-intérêts pour non-respect de l'engagement de non-sollicitation. Pour la cour d'appel, "
il ressort ainsi des pièces et des débats que si M. Y n'a pas, avant la rupture de son contrat de travail, mis en oeuvre au sens strict du terme une autre activité professionnelle, il a été la cheville ouvrière d'un projet dont la réalisation devait être considérée comme certaine le 3 mars 2005, et qui avait par conséquent dépassé le stade de l'ébauche", ce projet consistant pour plusieurs salariés de son équipe à poursuivre leur activité professionnelle au service d'une autre entreprise exerçant le même métier. Il a manqué à son obligation de loyauté en transformant une démarche individuelle en une entreprise collective dans laquelle il a impliqué des salariés qui étaient directement placés sous son autorité dans la société X.
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