Réf. : Cass. civ. 2, 13 juin 2024, quatre arrêts, n° 22-22.786, FS-B+R N° Lexbase : A78875HL, n° 22-15.721, FS-B+R N° Lexbase : A78885HM, n° 22-16.265, FS-D N° Lexbase : A52705IZ et n° 22-19.381, FS-D N° Lexbase : A52865IM
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N9645BZA
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par Laïla Bedja
Le 20 Juin 2024
► L'audiogramme mentionné au tableau n° 42 des maladies professionnelles constitue un élément du diagnostic couvert par le secret médical, de sorte qu'il n'a pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par les services administratifs de la caisse, en application de l'article R. 441-13 du Code de la Sécurité sociale.
Faits et procédure. Dans quatre affaires, la caisse primaire d’assurance maladie a pris en charge, au titre de la législation professionnelle, la maladie d'un salarié, prévue au tableau n° 42 des maladies professionnelles. L’hypoacousie de perception est une maladie professionnelle, qui nécessite que soit réalisé un test d’audiométrie dans des conditions spécifiques, et dont la retranscription graphique est communément désignée sous le terme d’« audiogramme ».
L’employeur a sollicité que soit prononcée l’inopposabilité de la décision de reconnaissance de la maladie professionnelle par la caisse au motif de l’absence de mise à disposition de cet audiogramme.
Au regard de la jurisprudence de la Cour de cassation, les cours d’appel ont toutes fait droit à cette demande et ont déclaré la décision de la caisse inopposable à l’employeur (CA Pau, 20 octobre 2022, n° 20/02954 N° Lexbase : A99648Q4). La Haute juridiction jugeait que l’audiogramme est un élément constitutif de la maladie, susceptible de faire grief, lequel échappe au secret médical, et doit donc être transmis à l’employeur sur le fondement de l’article R. 441-13 du Code de la Sécurité sociale N° Lexbase : L0576LQE, à peine d'inopposabilité de la décision de prise en charge (notamment Cass. soc., 19 octobre 1995, n° 93-12.329, inédit au bulletin N° Lexbase : A7555AYH ; Cass. civ. 2, 11 octobre 2018, n° 17-18.901, F-D N° Lexbase : A3838YGA).
La caisse a alors formé un pourvoi en cassation. La deuxième chambre civile est saisie d'un pourvoi posant la question de la conciliation entre le droit de la victime au respect du secret de ses données médicales et la mise en oeuvre, au bénéfice de l'employeur, du principe du contradictoire au cours de la procédure d'instruction au terme de laquelle la caisse primaire d'assurance maladie se prononce sur le caractère professionnel de la maladie prévue au tableau n° 42 des maladies professionnelles.
Décision. Opérant un revirement de jurisprudence, la Haute juridiction juge désormais que l'audiogramme, mentionné au tableau n° 42 des maladies professionnelles, constitue un élément du diagnostic couvert par le secret médical, de sorte qu'il n'a pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par les services administratifs de la caisse, en application de l'article R. 441-13 du Code de la Sécurité sociale.
La Cour apporte plusieurs précisions concernant son revirement. En effet, la jurisprudence antérieure soulevait des difficultés au regard des obligations déontologiques, auxquelles sont soumis les professionnels de santé. Elle a en outre jugé dans d’autres affaires concernant d’autres maladies professionnelles que des examens n’avaient pas à figurer dans les pièces du dossier constitué par les services administratifs (Cass. civ. 2, 17 janvier 2008, n° 07-13.356, FS-P+B N° Lexbase : A7803D3E : examen tomodensitométrique mentionné au tableau n° 30 B ; Cass. civ. 2, 29 mai 2019, n° 18-14.811, F-P+B+I N° Lexbase : A0979ZDM : examen d’IRM mentionné au tableau n° 57 A).
Elle ajoute que ni l'accord de la victime ni son absence d'opposition à la levée du secret médical ne peuvent résulter de la simple demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie.
Pour aller plus loin : ÉTUDE : La procédure de reconnaissance de la maladie professionnelle, L'instruction du dossier de reconnaissance de la maladie professionnelle, in Droit de la protection sociale, Lexbase N° Lexbase : E17513BH. |
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Réf. : Arrêté du 31 mai 2024 modifiant l'arrêté du 17 octobre 2016 fixant le programme et les modalités de l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocats N° Lexbase : L5630MMH
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N9609BZW
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par Marie Le Guerroué
Le 21 Juin 2024
► Un arrêté, publié au Journal officiel du 9 juin 2024, permet aux enseignants qui élaborent les sujets du CRFPA de solliciter une décharge d'activité.
À l'article 3 de l'arrêté du 17 octobre 2016 susvisé, il est désormais ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les professeurs des universités et maîtres de conférences et personnels assimilés, membres de la commission nationale mentionnée à l'article 51-1 du décret du 27 novembre 1991 susvisé, peuvent solliciter une décharge d'activité auprès du ministre chargé de l'enseignement supérieur. »
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Réf. : Cass. civ. 3, 6 juin 2024, n° 22-23.557, F-D N° Lexbase : A00055HN
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N9665BZY
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J AVOCATS, Chargée d’enseignements à l’UPEC, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
Le 20 Juin 2024
► La réception tacite peut être présumée mais doit toujours être caractérisée par la volonté du maître de recevoir l’ouvrage.
Cet arrêt illustre à merveille le pouvoir créateur de la jurisprudence rendue en droit de la construction. Il traite, d’un côté, de la présomption – instaurée par la jurisprudence – de réception tacite et, de l’autre, du recours sur le fondement des troubles anormaux du voisinage, auparavant d’origine jurisprudentielle.
En l’espèce, des maîtres d’ouvrage ont confié à un maître d’œuvre la construction de leur maison. Les travaux sont confiés à différents constructeurs. Ils sont assignés par leur voisin qui leur reproche des décaissements sur leur terrain. Dans un arrêt rendu le 24 août 2022, la cour d’appel de Lyon constate la réception tacite de l’ouvrage et considère que les désordres relèvent de la responsabilité civile décennale. Ils forment un pourvoi en cassation aux motifs qu’ils ont refusé à deux reprises de réceptionner, ce qui rend impossible la caractérisation d’une volonté non-équivoque de recevoir l’ouvrage.
La Haute juridiction rappelle les conditions de la réception tacite.
La prise de possession de l’ouvrage et le paiement d’une partie substantielle du coût des travaux caractérisent la volonté non-équivoque du maître d’ouvrage de recevoir l’ouvrage en son entier.
Afin de simplifier la preuve de la volonté non-équivoque du maître d’ouvrage de recevoir l’ouvrage, la jurisprudence a instauré une présomption de réception tacite en cas de prise de possession de l’ouvrage doublée du paiement des travaux. C’est ainsi que, depuis une jurisprudence amorcée le 24 novembre 2016 (Cass. civ. 3, 24 novembre 2016, n° 15-25.415, FS-P+B N° Lexbase : A3460SLQ), clairement confirmée en 2019 (Cass. civ. 3, 30 janvier 2019, n° 18-10.197, FS-P+B+I N° Lexbase : A5083YUS ; Cass. civ. 3, 18 avril 2019, n° 18-13.734, FS-P+B+I N° Lexbase : A3818Y9B), la réception tacite est présumée lorsqu’il y a paiement intégral du prix et prise de possession. La Haute juridiction y tient. Elle a déjà eu l’occasion d’y revenir (Cass. civ. 3, 5 mars 2020, n° 19-13.024, FS-D N° Lexbase : A54163IG, nos obs. La volonté du maître d’ouvrage de ne pas recevoir l’ouvrage : obstacle à la réception tacite, Lexbase Droit privé, avril 2020, n° 819 N° Lexbase : N2886BYK) et de réitérer il y a peu (Cass. civ. 3, 18 mars 2021, n° 19-24.537, F-D N° Lexbase : A89024LB).
En revanche, dès lors que le maître d’ouvrage refuse de réceptionner, cela fait obstacle à la caractérisation de la réception tacite.
La solution n’est pas surprenante. La réception tacite est conditionnée par la volonté du maître d’ouvrage de recevoir ou non les travaux (Cass. civ. 3, 23 septembre 2020, n° 19-19.969, F-D N° Lexbase : A06363WH). Autrement dit, lorsque le maître d’ouvrage manifeste sa volonté non-équivoque de ne pas recevoir l’ouvrage, il n’est pas possible de caractériser la réception tacite.
La solution mérite d’être approuvée.
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newsid:489665
Réf. : CE, 2e-7e ch. réunies, 13 juin 2024, n° 478041, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A94085HW
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N9669BZ7
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par Yann Le Foll
Le 20 Juin 2024
► Une séparation de corps est susceptible de constituer un changement des circonstances ayant justifié la reconnaissance de la qualité de réfugié, dès lors que, selon l'article 299 du Code civil, la séparation de corps « met fin au devoir de cohabitation » entre les époux, et donc à la communauté de vie entre ces derniers.
Textes. Il résulte de l'article L. 511-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile N° Lexbase : L3398LZU que l'OFPRA cesse de reconnaître la qualité de réfugié et met fin, par voie de conséquence, au statut de réfugié d'une personne dans les cas énumérés à cet article, notamment lorsque, conformément au 5 de la section C de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951, sur le statut des réfugiés N° Lexbase : L6810BHP, les circonstances à la suite desquelles cette personne a été reconnue réfugiée ont cessé d'exister, de sorte qu'elle ne peut plus continuer à refuser de se réclamer de la protection du pays dont elle a la nationalité.
Aux termes de l'article 299 du Code civil N° Lexbase : L2707ABU : « La séparation de corps ne dissout pas le mariage mais elle met fin au devoir de cohabitation ».
Faits. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) qu’une ressortissante russe d'origine tchétchène, a obtenu le statut de réfugié en 2014 en application du principe de l'unité de la famille, ce statut ayant été octroyé à son mari.
À la suite de la séparation de corps prononcée par le tribunal de grande instance de Strasbourg le 1er avril 2019, le directeur général de l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a, par une décision du 22 décembre 2021, mis fin au statut de réfugié de l’intéressée en application de l'article L. 511-8 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par une décision du 6 juin 2023, contre laquelle l'Office se pourvoit en cassation, la CNDA l'a rétablie dans ce statut.
CNDA. Pour annuler la décision de l'OFPRA de mettre fin au statut de réfugié, la CNDA a jugé qu'une séparation de corps n'était pas susceptible de constituer un changement des circonstances ayant justifié la reconnaissance de cette qualité, alors même que, selon les dispositions de l'article 299 du Code civil, la séparation de corps « met fin au devoir de cohabitation » entre les époux, et donc à la communauté de vie entre ces derniers,
Décision CE. Énonçant le principe précité, la Haute juridiction dit que la CNDA a commis une erreur de droit.
Rappel. Le divorce d'une personne ayant obtenu la qualité de réfugié au titre de l'unité de la famille à raison du statut dont bénéficie son ancien conjoint constitue également un changement dans les circonstances ayant justifié la reconnaissance de la qualité de réfugié (CE, 2e-7e ch. réunies, 29 novembre 2019, n° 421523, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A0448Z4D).
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Réf. : CAA Nantes, 2 mai 2024, n° 23NT00563 N° Lexbase : A08385AB
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N9622BZE
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par Maxime Loriot, Notaire Stagiaire – Doctorant en droit international privé à l’Université Panthéon-Sorbonne
Le 20 Juin 2024
► Par une décision en date du 2 mai 2024, la cour administrative d’appel de Nantes était amenée à trancher un litige relatif à la notion de créances acquises, dans le cas d'une prestation achevée à la clôture de l'exercice mais assortie d'une condition suspensive.
En droit, l’article 38, 2 bis du Code général des impôts N° Lexbase : L5626MAM prévoit que les produits entrant dans la définition du bénéfice net imposable sont ceux correspondant aux biens livrés ou aux prestations achevées au cours de l’exercice.
Ce principe est corroboré par la jurisprudence traditionnelle du Conseil d’État qui estime que la créance détenue par l'entreprise est rattachée à l’exercice au cours duquel elle est devenue certaine dans son principe, comme dans son montant (CE 9e s.-sect. réunies, 18 juin 1965, n° 63878 N° Lexbase : A2365B84). Toutefois, en cas d’insertion d’une condition suspensive, la créance doit être rattachée à l’exercice au cours duquel la condition est accomplie (CE 3e et 8e s.-sect. réunies, 24 septembre 2003, n° 237115 N° Lexbase : A6060C9C).
Dans le cas d’espèce, une société spécialisée dans les travaux de charpente et d'isolation a effectué des prestations d'isolation des combles pour des particuliers en situation précaire dans le cadre des dispositions relatives aux certificats d'économie d'énergie et du programme « isolation des combles à 1 euro ».
En application du contrat tripartite, pour être rémunérée, l’entreprise devait attendre que l’opération soit agréée par un service de l’État, à savoir le Pôle national des certificats d’économies d’énergie.
Cette société a fait l'objet d'une vérification comptable portant sur la période du 1er novembre 2015 au 31 décembre 2017. Des suites de ce contrôle comptable, l'Administration a procédé à une réintégration dans le résultat imposable de la société au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2017 au motif que la société n'aurait pas comptabilisé les créances acquises correspondant à des factures relatives à des chantiers réalisés.
La société a contesté le montant des créances acquises au titre de l'exercice clos en 2017 et sollicité la décharge des impositions correspondantes.
La cour administrative d’appel de Nantes estime que la réalisation de prestations achevées et facturées à la date de clôture de l'exercice mais assorties d'une condition suspensive ne permet pas de tenir les créances pour acquises.
Les juges d’appel considèrent en effet que la condition préalable au paiement constituait une condition suspensive au sens de l’article 1304 du Code civil N° Lexbase : L0955KZE, disposant que « la condition est suspensive lorsque son accomplissement rend l’obligation pure et simple », condition non satisfaite à la clôture de l’exercice puisque l’agrément avait été obtenu au cours d’un exercice postérieur à celui de la réalisation des travaux.
En conséquence, les créances acquises par une société se rattachent aux résultats de l'exercice au cours duquel elles sont devenues certaines dans leur principe mais également dans leur montant, et ce quelle que soit la date de leur recouvrement.
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