La lettre juridique n°936 du 23 février 2023 : Droit pénal spécial

[Jurisprudence] Adam (toujours) plus fort qu’Eve : quand un sein est un sexe ! (saison 4)

Réf. : CEDH, 13 octobre 2022, Req. 22636/19, Bouton c/ France N° Lexbase : A74738N4 ; Cass. crim., 16 février 2022, n° 21-82.392, F-D N° Lexbase : A75177NQ ; Cass. crim., 15 juin 2022, n° 21-82.392, F-D N° Lexbase : A7261773

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N4404BZ7

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par le Dr Nicolas Catelan, Maitre de conférences à l’Université Paris Cité, CEDAG – EA 1516

le 22 Février 2023

Mots clés : exhibition sexuelle • liberté d’expression • CEDH • Femen • principe de légalité • liberté de religion • égalité • interprétation • contrôle de proportionnalité

L’année 2022 a vu la Cour européenne condamner la France en raison du prononcé d’une peine d’un mois d’emprisonnement avec sursis à l’encontre d’une Femen ayant exprimé une opinion politique pro-avortement en dévoilant sa poitrine dans l’église de la Madeleine.

La Cour de cassation a quant à elle refusé de renvoyer une QPC au Conseil constitutionnel nonobstant les lourdes défectuosités de l’article 222-32 du Code pénal N° Lexbase : L2629L47  Elle a ainsi pu confirmer la condamnation de Femen ayant agi lors des commémorations du centenaire de l’armistice de la 1ère Guerre mondiale.


 

Saison 4 (2022). Alors que pendant des décennies le délit d’exhibition sexuelle a peu retenu l’attention de la Cour de cassation et de la doctrine, il a fallu moins de cinq ans pour qu’un mouvement tel que celui des Femen fasse imploser une incrimination ne comportant aucune définition du comportement prohibé. L’histoire est connue : les Femen sont un groupement informel de femmes désirant faire passer des messages politiques en usant de leur corps. La particularité de leur mouvement tient au fait que leurs performances se réalisent seins nus, les Femen s’étant aperçues, chose étrange, que leur corps dévoilé attirait d’avantage l’attention qu’une simple parole politique. Évidemment, ce constat en dit long sur les relents nauséabonds de notre société qui peine à donner crédit à la parole politique des femmes si leur corps ne sert de vecteur. Les expériences détestables vécues par certaines femmes politiques au sein même du cœur parlementaire en témoignent [1] : la France est loin d’être sortie de sa torpeur paternaliste qui enferme les femmes pour, pense- t-on, les protéger de leur vulnérabilité [2].

Las… de nombreux procureurs ont vu dans les incursions spectaculaires des Femen contre un ordre établi l’occasion de les poursuivre entre autres du chef d’exhibition sexuelle. Une de ces affaires avait ainsi amené une Femen a être prévenue d’avoir, seins nus, dégradé une statue de Vladimir Poutine au musée Grévin afin de dénoncer le « dictateur » lors d’un de ses déplacements politiques en France. L’histoire a évidemment donné raison à cette Femen qui, ce jour-là, a eu plus de courage que tous les gouvernants s’étant succédés pour serrer la main du grand démocrate.

On sait toutefois que la Cour de cassation n’a jamais varié d’un iota au moment de dire si le fait pour une femme, et la seule femme d’ailleurs, de montrer sa poitrine pouvait consommer le délit d’exhibition sexuelle. La réponse a constamment été positive [3]. Tout au plus affirme-t-elle qu’un contrôle de proportionnalité peut permettre à la prévenue d’échapper à la condamnation au nom d’une éventuelle atteinte disproportionnée à la liberté d’expression [4]. Contrôle qui n’empêchait pas des Femen d’être sanctionnées pour une performance au sein de l’Église de la Madeleine [5] ou encore lors des manifestations du centenaire de l’armistice de 1918 [6]. C’est dire que ce contrôle est tout sauf la panacée au moment de se pencher sur leur responsabilité.

Disproportion vaut condamnation. L’arrêt rendu le 13 octobre 2022 par la Cour européenne des droits de l’Homme [7] (CEDH), et condamnant la France, revient ainsi sur l’affaire dite « de l’Église de la Madeleine ». Et la leçon infligée à la France ne doit surprendre. La Cour de cassation avait, en 2019, cautionné la motivation de la cour d’appel, cette dernière ayant, selon la Chambre criminelle, examiné « la proportionnalité de l’atteinte portée à la liberté d’expression de la Femen à la lueur du droit pour autrui, reconnu par l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme, de ne pas être troublé dans la pratique de sa religion ». Nous avions à l’époque exprimé les plus grands doutes à l’endroit de la motivation développée par les juges du fond, ceux-ci ayant, sous couvert d’exhibition sexuelle, condamné la requérante au nom d’un blasphème assez mal dissimulé dans leur décision [8]. Cela n’a pas échappé à la CEDH qui, au nom de la liberté d’expression, estime que la condamnation à une peine d’emprisonnement, fût-elle assortie du sursis, est disproportionnée. La Cour note pourtant que les juges du fond ont bien mobilisé la grille d’analyse conventionnelle quant au contrôle de proportionnalité. Le résultat, purement artificiel, ne convainc toutefois pas les juges européens selon lesquels « les motifs retenus par les juridictions internes ne suffisent pas à ce qu’elle regarde la peine infligée à la requérante, compte tenu de sa nature ainsi que de sa lourdeur et de la gravité de ses effets, comme proportionnée aux buts légitimes poursuivis.

67.  Dans ces conditions, la Cour estime que l’ingérence dans la liberté d’expression de la requérante que constitue la peine d’emprisonnement avec sursis qui a été prononcée à son encontre n’était pas « nécessaire dans une société démocratique ».

68.  Dès lors, il y a eu violation de l’article 10 de la Convention ».

Caléidoscope : épisodes 1, 2 et 3. Cette condamnation discrédite la posture française (I.) qui, en fait d’exhibition sexuelle, a ici cherché à protéger la foi des croyants. La position française confine surtout à une véritable imposture (II.) comme le confirment les deux décisions rendues par la Cour de cassation en 2022 dans l’affaire du centenaire de l’armistice de 1918 [9]. L’exhibition sexuelle est un outil servant ici à régir le corps des femmes : la répression empêche le second sexe de perturber l’ordre établi au moyen de son enveloppe charnelle.

I. La posture

Épisode 3. La condamnation de la France repose sur un raisonnement à double détente : la prévenue a été concrètement retenue dans les liens de la prévention en raison de l’offense portée à la foi des chrétiens et non en raison de son exhibition (A.) ; et la peine privative de liberté est ici disproportionnée au regard de la liberté d’expression (B.).

A. Une action blasphématoire

 « (L)es juridictions internes n’avaient pas, eu égard à l’objet de l’incrimination en cause, à procéder à la mise en balance entre la liberté d’expression revendiquée par la requérante et le droit à la liberté de conscience et de religion protégé par l’article 9 de la Convention » (§ 60).

Atteinte prévisible et nécessaire. Lorsque la CEDH est confrontée à une requête fondée sur une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression, elle opère un contrôle portant sur l’existence d’un texte légal, le but légitime de la restriction ainsi que sa nécessité dans une société démocratique. La prévisibilité légale ne faisait aucun doute. La jurisprudence est ici acquise : l’exhibition par une femme de ses seins consomme le délit d’exhibition sexuelle. Sans revenir sur la pertinence de cette analyse, la Cour estime que « la requérante pouvait raisonnablement s’attendre à ce que ce comportement entraîne pour elle des conséquences pénales » (§ 39). La question relative à la légitimité de l’atteinte ne retient pas plus longtemps la Cour puisqu’il s’agit ici d’assurer « la protection de la morale et des droits d’autrui, la défense de l’ordre et la prévention des infractions pénales » (§ 41). La nécessité de l’atteinte a évidemment soulevé des interrogations et des doutes bien plus substantiels.

Nécessité dans une société démocratique. La Cour observe dès l’entame de son raisonnement que la condamnation de la requérante était fondée sur la caractérisation du délit d’exhibition sexuelle. Selon le Gouvernement, elle ne visait pas à sanctionner ses idées et opinions critiques sur la doctrine de l’Église catholique (§ 47). Certes. La Cour estime surtout que l’action de la requérante, constitue une « performance » entrant dans le champ d’application de l’article 10 N° Lexbase : L4743AQQ (§ 48). La requérante a en effet cherché à « véhiculer, dans un lieu de culte symbolique, un message relatif à un débat public et sociétal portant sur le positionnement de l’Église catholique sur une question sensible et controversée, à savoir le droit des femmes à disposer librement de leur corps, y compris celui de recourir à l’avortement ». Même si cette action était « susceptible d’offenser des convictions personnelles intimes relevant de la morale voire de la religion compte tenu du lieu choisi pour réaliser la performance », « la liberté d’expression de la requérante devait bénéficier d’un niveau suffisant de protection, allant de pair avec une marge d’appréciation des autorités nationales atténuée dès lors que le contenu de son message relevait d’un sujet d’intérêt général » (§ 49). La Cour refuse alors de se prononcer sur les éléments constitutifs du délit d’exhibition sexuelle car il ne lui appartient pas de déterminer s’il faut tenir compte des « mobiles » [10] de la personne poursuivie. Cela incombe, subsidiarité oblige, aux autorités nationales, notamment aux tribunaux. Il n’en demeure pas moins que, outre la qualification, la légitimité de la condamnation interroge. De sorte que placer le débat sur le terrain exclusif de la sanction empêche la Cour de se prononcer sur le bien-fondé de la condamnation au regard de la liberté d’expression. On peut le regretter.

Prison et liberté d’expression : principe de retenue. Si la commission d’une infraction dans une Église peut justifier une condamnation, la Cour se dit ici « frappée de la sévérité de la sanction que les juridictions internes ont infligée à l’intéressée sans pour autant exposer en quoi une peine d’emprisonnement s’imposait pour garantir la protection de l’ordre public, de la morale et des droits d’autrui dans les circonstances de l’espèce » (§ 51) : « la peine d’un mois d’emprisonnement avec sursis fixée à l’encontre de la requérante est une peine privative de liberté susceptible d’être ramenée à exécution en cas de nouvelle condamnation et qui a été inscrite à son casier judiciaire. À la gravité de la sanction pénale prononcée s’est ajouté le montant relativement élevé de la somme mise à la charge de la requérante au titre des intérêts civils » (§ 52). Or, selon la Cour, une peine de prison infligée dans le cadre d’un débat politique ou d’intérêt général n’est compatible avec la liberté d’expression garantie par l’article 10 de la Convention N° Lexbase : L4743AQQ que dans des circonstances exceptionnelles, notamment lorsque d’autres droits fondamentaux ont été gravement atteints, comme dans l’hypothèse, par exemple, de la diffusion d’un discours de haine ou d’incitation à la violence (§ 53). Cette précision est d’importance. La Cour l’a récemment rappelé dans une affaire relative à l’apologie du terrorisme [11]. Apparaît ici une réelle tendance : les abus de la liberté d’expression se marient mal, en principe, avec la prison.

En l’espèce, la juridiction strasbourgeoise rappelle que la requérante n’a eu aucun comportement injurieux ou haineux. Aussi choquante que fût l’action de la femen, « eu égard à la nudité qu’elle a imposée dans un lieu public, comportement sanctionnable en vertu du droit pénal interne », elle « avait pour seul objectif de contribuer, par une performance délibérément provocante, au débat public sur les droits des femmes, plus spécifiquement sur le droit à l’avortement ». Et la Cour de mentionner que le casier judiciaire de la prévenue était vierge et qu’elle était socialement et professionnellement intégrée. Il en résulte que la référence dans la décision d’appel à « la personnalité de l’auteur » pour justifier la peine ne renvoyait en réalité « à aucun élément précis et défavorable ni ne justifiait le choix de ne pas retenir une peine non privative de liberté » (§ 53). Quand on sait à quel point la Cour de cassation se fait le chantre de la motivation de l’emprisonnement, on peut être surpris que la Cour de Strasbourg, soit en mesure de reprocher aux juges du fond une motivation superficielle. Cela n’a en réalité rien d’étonnant tant le contrôle opéré par la Chambre criminelle est formel et ne s’attelle pas à vérifier la pertinence des arguments mobilisés par les juges du second degré. On sait donc gré à la CEDH de rappeler que la prison n’est pas une sanction banale, fût-elle courte et accompagnée du sursis. Et la Cour de réitérer son « principe de retenue » [12] : « les juridictions internes ont fait le choix d’une peine d’emprisonnement qui, même assortie d’un sursis, ne peut être considérée comme la peine la plus modérée exigée par la jurisprudence de la Cour quand est en jeu la liberté d’expression de la personne sanctionnée […], domaine dans lequel, comme il a été rappelé précédemment […], l’usage de la voie pénale ne doit être choisi qu’avec retenue par les instances nationales » (§ 54).

Justification : quelle conciliation ? Reste alors à vérifier si la peine infligée était malgré tout justifiée ; cela conduit la Cour à examiner, de manière fort « pédagogique » [13], la pertinence et la suffisance des motifs développés par les juridictions internes (§ 55). Or la Cour observe que le contrôle de proportionnalité, en l’espèce, amenait à ménager un juste équilibre entre les intérêts de l’individu et l’intérêt général (§ 56). La Cour a raison de le rappeler : l’infliction d’une peine se fait au nom de l’intérêt général et la question ici est de savoir si cela est proportionné à l’aune de la liberté d’expression de la prévenue. Il ne s’agit donc pas de mettre en balance « deux libertés également protégées par la Convention » (§ 57). Les juridictions françaises ont cependant invoqué, en première instance comme en appel, la proportionnalité de l’ingérence au nom du « besoin social impérieux de protéger autrui de la vue dans un lieu de culte, d’une action exécutée à moitié dénudée que d’aucuns peuvent considérer comme choquante ». La cour d’appel a également jugé que « ce que la prévenue estim[ait] comme étant sa liberté d’expression a[vait] eu pour effet de porter gravement atteinte à la liberté de penser d’autrui comme de la liberté religieuse en général ». La Cour de cassation a par la suite confirmé cette analyse en fondant le rejet du pourvoi de la requérante sur la nécessité de concilier deux libertés protégées par la Convention, à savoir la liberté d’expression, d’une part, et la liberté de conscience et de religion protégée par l’article 9 N° Lexbase : L4799AQS, d’autre part (décrite en l’espèce comme étant le droit « de ne pas être troublé dans la pratique de sa religion »). Ce faisant le juge pénal français a fondé la légitimité de la répression sur l’intérêt des croyants présents dans l’Église. Et c’est là, évidemment que le bât blesse [14] : l’intérêt de certains n’est pas assimilable à l’intérêt général, le droit ne saurait donner crédit à une telle perspective.

La sanction pénale a été officiellement infligée à la requérante en répression du délit d’exhibition sexuelle, pour avoir dénudé sa poitrine dans un lieu public. Il ne s’agissait pas de punir une atteinte à la liberté de conscience et de religion. Et la Cour de formuler un reproche imparable : « si les circonstances de lieu ainsi que les symboles auxquels la requérante avait eu recours devaient être nécessairement pris en compte, pour l’appréciation des intérêts divergents en jeu, en tant qu’éléments de contexte, les juridictions internes n’avaient pas, eu égard à l’objet de l’incrimination en cause, à procéder à la mise en balance entre la liberté d’expression revendiquée par la requérante et le droit à la liberté de conscience et de religion protégé par l’article 9 de la Convention ». Comme le relève la juge ŠIMÁČKOVÁ dans son opinion concordante : « L’objectif réel de la sanction de la requérante pour agression sexuelle était de la punir pour avoir exhibé sa poitrine nue à l’église et pour avoir ainsi offensé la congrégation, c’est-à-dire dans un objectif autre que celui prévu par la loi ». Et la juge de marteler : « En matière d’accusations pénales, il faut appeler les choses par leur vrai nom et ne pas cacher un objectif sous un autre » (§ 6). Cette observation est vraie ici comme dans tous les contentieux relatifs aux Femen. Les poursuites ne servent pas à punir car un individu a été choqué par la vue des seins d’une femme mais bien car la performance globale perturbe l’ordre normal des choses. La poitrine incriminée est l’arbre pénal qui cache fort mal les réelles intentions conservatrices de ceux qui réprouvent, poursuivent et condamnent ces comportements. Or, en matière d’exhibition sexuelle, c’est la bien la nudité qui est en jeu et le droit pour un individu de se servir de son corps pour exprimer une opinion. Il ne s’agit pas de savoir, en l’espèce, si l’action perturbe la foi des croyants.

Ce recadrage du débat amène logiquement la Cour à condamner la France, l’infliction de la peine d’emprisonnement étant jugée disproportionnée.

B. Une atteinte disproportionnée

Prétérition in favorem. La Cour relève que même si le débat s’était posé en termes d’atteinte aux convictions des croyants, les juges ont étrangement écarté des éléments de contexte jouant en faveur de la prévenue : la requérante avait agi en dehors de tout exercice du culte puisqu’aucune messe n’était en cours au moment des faits. Si une chorale répétait dans l’église, la requérante n'était toutefois pas à portée de vue. Au surplus, l’action s’était déroulée de manière brève, sans déclamation des slogans affichés sur son corps et l’intéressée avait quitté l’église dès que cela lui avait été demandé (§ 62).

Contrôle à opérer. La Cour se permet alors de formuler le problème de droit tel qu’il aurait dû l’être par les juges français, i.e la mise en balance des intérêts divergents que sont d’une part, le droit de la requérante de communiquer au public ses idées sur les droits devant être reconnus aux femmes, dont celui de disposer de leur corps, et, d’autre part, le droit d’autrui au respect de la morale et de l’ordre public. Selon les juges strasbourgeois « cet examen ne pouvait être valablement effectué par les juridictions internes qu’au moyen d’une analyse de l’ensemble des éléments en litige portant sur le contexte dans lequel se situait l’action litigieuse ainsi que sur les mobiles de la requérante » (§ 63). Il est évident que les juridictions internes, et plus particulièrement la cour d’appel, se sont bornées à examiner la question de la nudité de la poitrine dans un lieu de culte, et ce « isolément de la performance globale dans laquelle elle s’inscrivait sans prendre en considération, dans la balance des intérêts en présence, le sens donné à son comportement par la requérante ». Les juridictions internes ont ainsi refusé de tenir compte de la signification des inscriptions figurant sur le corps de la requérante, où se trouvait une référence au manifeste pro-avortement de 1971 dit « manifeste des 343 salopes » [15]. N’ont pas été prises en considération les explications fournies par la requérante quant au sens donné à leur nudité par les militantes des Femen, auxquelles elle appartenait, dont la poitrine dénudée sert d’« étendard politique » ni sur le lieu de son action, à savoir un lieu de culte notoirement connu du public, choisi dans le but de favoriser la médiatisation de cette action (§ 64). Les juges internes se sont ainsi concentrés sur le choc (légitime) ressenti par les personnes présentes sans donner assez d’importance à l’acte et à sa signification. Aussi une conclusion s’impose : « les motifs adoptés par les juridictions internes ne sont pas de nature à lui permettre de considérer qu’en l’espèce, elles ont procédé à la mise en balance entre les intérêts en présence de manière adéquate et conformément aux critères dégagés par sa jurisprudence » (§ 65).

Dès lors, les motifs retenus par les juridictions internes ne permettent pas à la juridiction strasbourgeoise de regarder « la peine infligée à la requérante, compte tenu de sa nature ainsi que de sa lourdeur et de la gravité de ses effets, comme proportionnée aux buts légitimes poursuivis » (§ 66) : « l’ingérence dans la liberté d’expression de la requérante que constitue la peine d’emprisonnement avec sursis qui a été prononcée à son encontre n’était pas « nécessaire dans une société démocratique » (§ 67). Il y a donc bel et bien eu violation de l’article 10 de la Convention (§ 68).

Comme le relève Yves Mayaud : « Modération, retenue, telle est la proportionnalité à respecter lorsque la liberté d'expression est en cause, et l'ingérence ne peut que ressortir affaiblie d'une sanction qui s'en éloigne » [16]. Cette condamnation n’est cependant pas aussi franche qu’elle aurait pu l’être nonobstant « l’apport décisif » [17] relatif au principe de retenue. Reprocher à la France la peine prononcée et sa motivation ne revient pas à estimer qu’une relaxe s’impose nécessairement en cas d’action politique effectuée seins nus. L’incrimination des faits et leur sanction demeurent possibles. Cette « demi-mesure » [18] invite toutefois à revenir sur la position des juges français qui, par l’intermédiaire de la Cour de cassation, ont en 2022 :

- refusé de renvoyer une QPC au Conseil constitutionnel,

- et estimé que le contrôle de proportionnalité désormais mis en place ne s’opposait pas à la condamnation pour exhibition sexuelle d’une femen ayant agi seins nus pendant les commémorations du centenaire de l’armistice de 1918…

II. L’imposture

Épisodes 1 et 2. La condamnation de la France n’aurait jamais eu lieu si les juges français ne s’entêtaient pas à estimer que la simple divulgation de la poitrine d’une femme consommait ipso jure le délit d’exhibition sexuelle. Nonobstant les critiques formulées [19], la Cour de cassation a maintenu son interprétation [20] (B) tout en refusant de renvoyer une fort légitime QPC au Conseil constitutionnel [21] (A). L’imposture est ici flagrante tant le raisonnement mobilisé est spécieux et impropre à convaincre.

A. Une discrimination « constitutionnelle »

Contexte. Le 11 novembre 2018, des militantes du mouvement dit Femen, ont été interpellées après avoir franchi une barrière de sécurité à l'approche de la délégation de nombreux chefs d'État se rendant à la cérémonie de commémoration du centenaire de l'armistice de la Première Guerre mondiale. Elles avaient dénudé leurs poitrines, sur lesquelles étaient inscrits les slogans « Hypocrisy party », « Gangsta party » et « Fake peacemakers », et ont expliqué qu'elles entendaient ainsi manifester leur opposition à l'invitation de ces chefs d'État au forum de Paris sur la Paix. La cour d'appel de Paris, le 7 avril 2021, condamne deux prévenues pour exhibition sexuelle, à un mois d'emprisonnement avec sursis [22], et une troisième, pour exhibition sexuelle, faux et usage de faux, à deux mois d'emprisonnement avec sursis, tout en ordonnant une mesure de confiscation.

Épisode 1 : questions. À l'occasion des pourvois formés contre l'arrêt d’appel, les trois prévenues ont présenté, par mémoire spécial, une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :

« Les dispositions de l'article 222-32 du Code pénal portent-elles atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit et plus exactement :

- aux articles 5, 8 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, 34 de la Constitution ainsi qu'aux principes de légalité de la loi, de clarté de la loi, de prévisibilité juridique et de sécurité juridique en ce qu'elles ne définissent pas de façon claire et précise les éléments constitutifs de l'infraction, notamment la notion d'« exhibition sexuelle » ?

- au principe de nécessité et de proportionnalité des peines garanti par l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 en ce qu'elles permettent la répression pénale de la simple nudité des torses féminins dans tout lieu accessible aux regards du public ?

- au principe d'égalité qui découle des articles 1er, 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, du principe d'égalité homme femme, consacré par le troisième alinéa du préambule de la Constitution du 4 octobre 1946 et du principe de non-discrimination, en ce qu'elles incriminent la nudité des torses féminins, mais pas celle des torses masculins ? ».

Pertinence. Difficile de nier que le délit d’exhibition sexuelle n’est pas défini légalement. La CEDH l’a elle-même constaté dans sa décision « Bouton c/ France » : « La notion d’exhibition sexuelle n’est pas définie par l’article 222-32 du Code pénal » (§ 15). Naguère, et non jadis, la Cour de cassation a elle-même accepté de renvoyer une QPC portant sur le harcèlement sexuel, alors défini par la loi comme une agression aux fins d’obtenir des faveurs de nature sexuelle. La question fut renvoyée car « la définition du harcèlement sexuel pourrait être considérée comme insuffisamment claire et précise, dès lors que le législateur s'est abstenu de définir le ou les actes qui doivent être regardés, au sens de cette qualification, comme constitutifs de harcèlement sexuel » [23]. La Cour a également renvoyé au Conseil le texte incriminant spécifiquement le revenge porn car, entre autres, le « texte ne précise pas ce qu'il convient d'entendre par paroles ou images à caractère sexuel » [24]. La définition de l’exhibition sexuelle par référence à… une exhibition sexuelle pose les mêmes problèmes : l’absence d’éléments constitutifs clairs et précis est indéniable. Les travaux parlementaires ne permettent même pas de combler le vide notionnel de l’article 222-32 du Code pénal N° Lexbase : L2629L47 [25].

Enfin, nous avions précédemment exposé que la jurisprudence de la Cour de cassation créait une rupture d’égalité entre les femmes et les hommes [26]. Alors que l’exhibition sexuelle d’un homme n’est possible que s’il dévoile son appendice sexuel, le délit s’étend chez la femme à ses seins bien qu’ils ne soient pas un organe sexuel.

La réponse apportée par la Cour de cassation aux légitimes interrogations des prévenues est pour le moins décevante.

Aporie. La Chambre criminelle refuse de renvoyer au Conseil la QPC à tiroirs au motif qu’elle ne présente pas un caractère sérieux (§ 4) :

- « En premier lieu, l'article 222-32 du Code pénal est rédigé en termes suffisamment clairs et précis pour permettre son interprétation, qui relève de l'office du juge pénal, sous le contrôle de la Cour de cassation, sans risque d'arbitraire (§5).

- En deuxième lieu, les peines prévues par la disposition critiquée, que le juge a le pouvoir de moduler en fonction de la situation soumise à son appréciation, ont été considérées comme nécessaires par le législateur pour assurer la préservation de l'ordre public, et n'apparaissent pas manifestement disproportionnées par rapport au but recherché (§ 6).

  • En troisième lieu, le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, et l'article 222-32 du Code pénal s'applique à la fois aux hommes et aux femmes, même si leurs différences anatomiques et les représentations qui y sont associées conduisent à donner un contenu différent à la notion d'exhibition ».

Analyse. Nous ne reviendrons pas sur le premier argument qui, consistant à nier l’évidence, ne peut valablement être apprécié sur un plan strictement scientifique, seule grille d’analyse qui sied à un commentaire académique. Le second argument doit évidemment être apprécié au regard de la jurisprudence « Bouton c. France ».

Le dernier argument mérite toute notre attention car la Cour tente ici de donner un tour juridique à une allégation qui est fausse. Elle affirme en effet que le législateur peut régler de façon différente des situations différentes et déroger à l'égalité pour des raisons d'intérêt général. Or rien dans l’article 222-32 N° Lexbase : L2629L47 ne permet de discriminer les hommes et les femmes quant à leur poitrine. Le texte ne présente aucune distinction de ce type, et pour cause, puisqu’il ne définit pas le délit réprimé. La loi impose simplement de punir l’exhibition sexuelle sans expliquer quel comportement relève du délit : hommes et femmes sont logés à la même enseigne. C’est la Cour, et elle seule, qui discrimine les hommes et les femmes par son interprétation de la loi : le fait que le délit soit étendu à la poitrine des femmes est une construction purement prétorienne. La Chambre criminelle distingue donc là où la loi ne distingue pas. Dans une décision très remarquée la Cour a pourtant mobilisé le principe « Ubi lex non distinguit, nec nos distinguere debemus » pour refuser de censurer une cour d’appel [27].  La réponse à la QPC atteste que cette maxime est le principe le plus relatif qui soit, utilisé en pure opportunité quand il plait à la Cour de le mobiliser [28]. Ita est.

Sociologie ? Paternalisme ! Quant aux « différences anatomiques » et aux « représentations » « associées », qui conduisent à « donner un contenu différent à la notion d'exhibition », nul doute qu’il s’agit ici d’un hommage appuyé à la libre recherche scientifique chère à François Geny [29]. Ces précisions renvoient, on l’imagine, à des travaux sociologiques ou anthropologiques. On peut cependant s’interroger : la Cour a-t-elle parfaitement compris, au cours de ses riches lectures [30], ce que signifient la construction sociale du corps féminin [31], ses injonctions [32], le rapport entre corps et genre [33] et à quel point tout ceci est le produit de la domination masculine [34] ? La Cour a-t-elle saisi à quel point, dans certains espaces, la gêne se renverse puisqu’elle n’est plus gêne du corps nu mais gêne de ne plus pouvoir le dénuder [35] ? Si l’on se réjouit que l’argument sociologique pénètre l’argumentaire de la Cour, il serait appréciable de connaître sur quelles études reposent les « représentations » ici mobilisées [36]. Une telle information permettrait (peut-être) de comprendre pourquoi la Cour désire aggraver la stigmatisation du corps féminin dans l’espace public et consolider la discrimination à l’encontre des femmes au moyen du droit pénal. On ne dira jamais assez que le postulat d’une apparence anatomique différente « par nature » entre les corps masculins et féminins constitue un des plus puissants principes de légitimation des inégalités entre les sexes et de la domination masculine [37].

B. Un délit genré

Une erreur de raisonnement : la réciprocité agression/exhibition sexuelles. Même si la Cour de cassation se garde de l’exprimer clairement, on se doute que l’objectif consiste à protéger les femmes. Le paternalisme, qui nécessite de les rabaisser pour mieux justifier l’intervention charitable, est inexorablement à l’œuvre ici. Le raisonnement implicite est à l’évidence le suivant : ne pas reconnaître que les seins de la femme sont naturellement sexuels empêcherait de condamner tout attouchement non consenti visant cette zone du corps féminin. L’argument ne saurait convaincre. Si un homme venait à être caressé contre sa volonté au niveau de la poitrine, devrait-on repousser toute qualification pénale ?

La réciprocité imposerait en outre de réprimer l’exposition de toute partie du corps qui, si elle était touchée, permettrait une condamnation au titre de l’agression sexuelle. La Cour de cassation n’a-t-elle pas estimé qu’il pouvait y avoir agression sexuelle lorsque la cuisse [38] ou le mollet [39] était touché ? N’y-a-t-il pas agression sexuelle lorsqu’est imposé un baiser à autrui [40] ? S’il existait réellement une réciprocité entre les deux délits, alors serait retenue l’exhibition sexuelle lorsque sont révélés en public un mollet, une cuisse, ou encore une bouche [41]… À l’évidence, il n’existe aucune réciprocité automatique entre les deux délits de sorte que ne pas retenir le délit d’exhibition sexuelle lorsqu’une femme décide d’exposer sa poitrine n’offrirait pas aux hommes [42] le droit de toucher ladite poitrine. Ce qui est visible n’est pas pour autant touchable, sauf à rendre les plages ou les piscines particulièrement dangereuses. Tout est question de contexte comme se plaît à le rappeler la Cour de cassation en matière d’agression sexuelle [43].

Épisode 2. Tous les arguments mobilisés (implicites comme explicites) au soutien de la jurisprudence de la Cour de cassation sont déceptifs. Dans cette même affaire du centenaire, la Chambre criminelle a d’ailleurs confirmé la condamnation des Femen prononcée par la cour d’appel de Paris. Cette dernière a ainsi estimé que « la contestation des prévenues quant à l'intention sexuelle de leur acte est indifférente, dès lors que la seule réalisation volontaire de l'acte suffit à caractériser l'élément intentionnel » (§ 11). La proportionnalité de cette condamnation[44] est au surplus validée motif pris que la juridiction du second degré :

« 21. […] a constaté que le comportement des prévenues a causé un trouble à l'ordre public en raison de leur irruption au cours d'une cérémonie patriotique devant se dérouler dans le calme et la dignité.

22. […] a relevé que si ce trouble n'a duré que peu de temps, c'est uniquement en raison de l'intervention rapide des forces de l'ordre, alors que les prévenues s'étaient concertées pour échapper à cette intervention » [45].

Droit, science et justice. On pourrait, derechef, démontrer l’inanité de la solution retenue, tant quant à la qualification [46] qu’en ce qui concerne le contrôle de proportionnalité exercé par les juges [47]. Nous nous contenterons d’interroger la scientificité du droit en général et du droit pénal en particulier à l’aune de cette construction prétorienne. L’incohérence de la solution ne l’empêche pas, en effet, de faire jurisprudence par répétition et constance. On le sait, « le droit est la plus puissante des écoles de l'imagination. Jamais poète n'a interprété la nature aussi librement qu'un juriste la réalité » [48]. Jean Giraudoux raillait ici la contingence des raisonnements et solutions juridiques. Le principe de légalité a certes été inventé pour rendre à l’ensemble un minimum de sécurité et de prévisibilité. Le résultat ne pouvait être parfait car la légalité criminelle reconnaît au juge la possibilité d’interpréter les normes [49]. La loi a beau affirmer que cette opération doit se faire de manière « stricte », que faire si le juge ultime décide de dépasser la lettre et l’esprit d’un texte ? Le législateur pourra toujours intervenir pour rappeler les évidences. Et la Cour de cassation d’en tirer sans doute la conclusion suivante : « si la loi ne me corrige pas alors ai-je sans doute raison »…

En attendant, inutile de pousser des cris d’orfraie lorsque les femmes décident de s’exprimer et de porter leurs actions dans d’autres agoras que les enceintes judiciaires. Les cours et tribunaux n’ont pas le monopole du juste, et vu le sort réservé à cette vertu quand la féminité est au cœur des débats, ne craignons pas d’affirmer qu’il est des espaces où la place et la parole des femmes sont infiniment mieux mises en valeur.

 

[1] Cécile Duflot en robe sifflée par les députés à l'Assemblée, INA, 19 juillet 2012 [en ligne].

[2] V. Scotus, Frontiero v. Richardson, 411 U.S. 677 (1973). Dans cette décision le juge Brennan reconnaissait que les discriminations de genre étaient classiquement justifiées par un « paternalisme romantique qui, concrètement met les femmes, non sur un piédestal, mais dans une cage ».

[3] Cass. crim., 10 janvier 2018, n° 17-80.816, F-D N° Lexbase : A1903XAQ ; Cass. crim., 9 janvier 2019, n° 17-81.618, FS-P+B N° Lexbase : A9843YSD ; Cass. crim., 26 février 2020, n° 19-81.827, FS-P+B+I N° Lexbase : A39993G9 ; Cass. crim., 15 juin 2022, n° 21-82.392, F-D N° Lexbase : A7261773.

[4] Cass. crim., 26 février 2020, n° 19-81.827, FS-P+B+I N° Lexbase : A39993G9.

[5] Cass. crim., 9 janv. 2019, n° 17-81.618 , FS-P+B N° Lexbase : A9843YSD.

[6] Cass. crim., 15 juin 2022, n° 21-82.392, F-D N° Lexbase : A7261773.

[7] CEDH, 13 octobre 2022, Req. 22636/19, Bouton c/ France N° Lexbase : A74738N4.

[8] Adam (toujours) plus fort qu’Eve : quand un sein est un sexe ! (saison 2), Lexbase Pénal, février 2019 N° Lexbase : N7700BXH.

[9] Cass. crim., 16 février 2022, n° 21-82.392, F-D N° Lexbase : A75177NQ ; Cass. crim., 15 juin 2022, n° 21-82.392, F-D N° Lexbase : A7261773.

[10] Il est vrai que, de règle, les mobiles n’intègrent pas le champ intentionnel d’une infraction. Au demeurant, lorsque l’exhibition porte sur une zone non sexuelle par nature, comme les seins, comment entrer en voie de condamnation sans s’intéresser à l’intention du prévenu ? L’exhibition n’étant pas par nature sexuelle lorsqu’une poitrine est dévoilée, comment s’assurer que le comportement est sexuel ? Il ne s’agit pas de s’intéresser au mobile mais bien de découvrir l’intention réelle de la personne poursuivie puisque le geste accompli ne saurait, per se, induire une connotation sexuelle. Il en irait évidemment autrement si la zone dévoilée était sexuelle par nature (organes génitaux).

[11] CEDH, 2 septembre 2021, Req. 46883/15, Z.B. c/ France  N° Lexbase : A151143D, spé. § 67. V. également CEDH, 5e sect., 23 juin 2022, Req. 28000/19, Rouillan c/ France N° Lexbase : A198278W : v. J.-P. Marguénaud, Vers une interdiction de sanctionner les abus de la liberté d'expression par une peine privative de liberté ?, RSC, 2022. 689.

[12] V. déjà CEDH, 23 avril 1992,  Req. 2/1991/254/325, Castells c/ Espagne, § 46 N° Lexbase : A6511AW3. B. Danlos, La liberté d'expression devant la Cour européenne des droits de l'Homme », Cah. just., 2015/3 (n° 3), p. 439 à 447 [en ligne].

[13] F. Merloz, Peine de prison pour exhibition sexuelle d'une Femen : la CEDH condamne la France pour violation de la liberté d'expression, Dalloz actualité,19 octobre 2022 [en ligne].

[14] En ce sens, J.-C. Saint-Pau, Disproportion de la condamnation pénale d'une femen pour exhibition sexuelle, JCP G, 50-52, 19 décembre 2022, act. 1455. V. Contra, Ph. Conte, Dr. pén., n° 12, Décembre 2022, comm. 193.

[15] 5 avril 1971 : le manifeste des 343, INA, 4 avril 2011 [en ligne].

[16] Y. Mayaud, De la liberté d'expression par exhibition sexuelle ? Une voie ouverte, mais sous condition d'ingérence contrôlée..., RSC, 2022, p. 83.

[17] J.-C. Saint-Pau, Disproportion de la condamnation pénale d'une femen pour exhibition sexuelle, JCP G, 50-52, 19 décembre 2022, act. 1455. Commentaire par

[18] X. Pin, Légitimation des infractions expressives : neutralisation de l'incrimination ou atténuation de la peine ? c'est selon.., RSC, 2022, p. 817 .

[19] Minoritaires au demeurant. L’ordre est un puissant facteur de conservation et de dogmatique juridiques. Il est en revanche incapable d’appréhender le mouvement et l’incertitude qui caractérisent les sociétés humaines. V. ainsi G. Balandier, Le désordre, éloge du mouvement, Fayard, 1988.

[20] Cass. crim., 15 juin 2022, n° 21-82.392, F-D N° Lexbase : A7261773.

[21] Cass. crim., 16 février 2022, n° 21-82.392, F-D N° Lexbase : A75177NQ.

[22] Ce qui devrait entraîner la condamnation de la France, en application de la jurisprudence « Bouton C. France », si les Femen venaient à saisir la Cour européenne. V. L. Saenko, Activisme Femen et CEDH : la liberté d'expression à tout prix, AJ pénal, 2022, p.581.

[23] Cass. crim., 29 février 2012, n° 11-85.377, QPC, F-D N° Lexbase : A9053IDN.

[24] Cass. crim., 23 juin 2021, n° 21-80.682, F-D, § 5 N° Lexbase : A40394XU.

[25] V. ainsi Adam (toujours) plus fort qu'Ève : quand un sein est un sexe !, Lexbase Pénal, février 2018 N° Lexbase : N2680BXK.

[26] Adam (toujours) plus fort qu’Ève : quand un sein est un sexe ! (saison 2), Lexbase Pénal, février 2019, N° Lexbase : N7700BXH. V. également B. Beignier, Droit de la presse et des médias – Chronique, JCP G, n° 47, 19 novembre 2018, doctr. 1222, § 8.

[27] Cass. crim., 14 avril 2021, n° 20-80.135, F-D N° Lexbase : A25434PU : J.-C. Saint-Pau, Trouble mental, usage de stupéfiants et irresponsabilité pénale : la raison et l’émotion, Lexbase Pénal, mai 2021 N° Lexbase : N7512BYU. V. également S. Fucini, L’abolition du discernement par le fait de l’agent : l’actio libera in causa, une alternative à l’irresponsabilité pénale ?, Lexbase Pénal, juillet 2021 N° Lexbase : N8287BYL ; Ch. Dubois, Affaire Halimi : un arrêt stupéfiant, Cah. just., 2021, pp. 417-431.

[28] En ce sens v. A. Thouement, Les maximes d'interprétation, dir. D. Mainguy, thèse Montpellier, déc. 2020, p. 266 et 459.

[29] V. Méthode d'interprétation et sources en droit privé positif - Essai critique, LGDJ, Coll. Anthologie du droit, 2016. Sur cet ouvrage voir la pénétrante étude de Xavier Magnon : Commentaire sous La méthode de la libre recherche scientifique de F. Gény. Les grands discours de la culture juridique, 2017, HAL Open Science [en ligne].

[30] Seules aptes à légitimer le recours aux représentations associées aux différences anatomiques entre hommes et femmes.

[31] V. Ch. Détrez, La construction sociale du corps féminin, Labrys : études féministes/estudos feministas, 2003, n° 4, HAL SHS, halshs-00425857.

[32] V. R. Ghigi, Le corps féminin entre science et culpabilisation, Travail, genre et sociétés, 2004/2, n° 12, pp. 55 à 75 [en ligne].

[33] M.-C. Garcia, M. Fraysse et P. Bataille, Le corps sexué au prisme du genre. Nouvelles problématiques, SociologieS, 2022 [en ligne].

[34] P. Bourdieu, La domination masculine, Points, 2014. Ouvrage qui nécessite une certaine distance : v. C. Bessière, Sur la domination masculine, un pionnier contesté, Le 1 Hebdo, n° 405, 13 juillet 2022.

[35] J. C. Kaufmann, Corps de femmes, regards d'hommes : sociologie des seins nus, Paris, Nathan, Essais & recherches, 1995.

[36] Car nul ne peut concevoir que les « représentations » auxquelles la Cour de cassation fait référence soient sans fondement scientifique. Le droit impose, on le sait, rigueur et méthode. Approximations, clichés et stéréotypes messiéent à la science juridique.

[37] A. Bohuon, Le Test de féminité dans les compétitions sportives. Une histoire classée X ?, Donnemarie-Dontilly, 2012,  Éditions iXe.

[38] Cass. crim., 11 mai 2010, n° 09-84.011, F-D N° Lexbase : A0241EZX.

[39] Cass. crim., 3 mars 2021, n° 20-82.3998, FS-P+B+I N° Lexbase : A59494I8.

[40] Cass. crim., 6 janvier 2010, n° 09-82.942, F-D N° Lexbase : A6197ERX.

[41] Rappelons que si l’incrimination de la poitrine féminine reposait sur son caractère sexuel secondaire alors faudrait-il incriminer chez l’homme… l’exposition de la barbe, du tissu adipeux ventral ou encore de la pomme d’Adam. Les femmes devraient quant à elles cacher, outre leur poitrine, leurs cheveux ! V. Adam (toujours) plus fort qu'Ève : quand un sein est un sexe ! (saison 3), Lexbase Pénal, février 2020 N° Lexbase : N2385BYY.

[42] Ou à d’autres femmes.

[43] V. ainsi Cass. crim. 3 mars 2021, n° 20-82.399 , FS-P+B+I, spé. § 10 N° Lexbase : A59494I8.

[44] Sur la nature de ce contrôle v. P. Rousseau, Infraction justifiée ou répression injustifiée : une possible dualité de mécanismes de légitimation, Dr. pén., 2022, Étude 8 ; X. Pin, Légitimation des infractions expressives : neutralisation de l'incrimination ou atténuation de la peine ? c'est selon..., RSC, 2022, p. 817 ; E. Dreyer, La Convention européenne des droits de l'homme comme cause d'irresponsabilité pénale ?, D., 2023, p. 124.

[45] Cass. crim., 15 juin 2022, n° 21-82.392, F-D N° Lexbase : A7261773.

[46] Car « la poitrine féminine n’est pas un sexe » ! : E. Raschel, Liberté d'expression : condamnation de la France pour disproportion de la peine infligée à une militante Femen, Gaz. Pal., 13 décembre 2022, n° GPL443o8.

[47] Sur son caractère illusoire, v. Adam (toujours) plus fort qu'Ève : quand un sein est un sexe ! (saison 3), precit N° Lexbase : N2385BYY. Au-delà, le fait que les Femen aient été condamnées à des peines d’emprisonnement avec sursis expose la France à une condamnation quasi certaine par la Cour européenne : en ce sens v. E. Raschel, ibidem.

[48] J. Giraudoux, La Guerre de Troie n’aura pas lieu, Librio, 2022.

[49] Ce qui constitue une contradiction herméneutique. Sur cette notion v. Cachez cette faute que je ne saurais voir, D., 2022. 736, 14 avril 2022 ; Mythologie de la légalité : champ de l'interdiction de gérer, Gaz. Pal., n° 31, p. 54, n° 425z8. V. également A. Mendras, Les magistrats administratifs à la recherche d'une nouvelle identité, AJDA, 2021. 2444.

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