Réf. : Cass. civ. 3, 7 septembre 2022, n° 21-20.576, FS-B N° Lexbase : A24638HP
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N2580BZL
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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats
le 14 Septembre 2022
► Les contrats d’entreprise ne dérogent pas à l’application de l’article 4 du Code de procédure civile à l’occasion d’un procès ;
► Il ne peut y avoir une réduction du prix si ce sont des dommages et intérêts qui sont sollicités.
Selon les termes de l’article 4 du Code de procédure civile N° Lexbase : L1113H4Y, l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Lié par celles-ci, le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé. Il doit donc répondre à chacune des demandes, principales et reconventionnelles, avant de se prononcer sur les conséquences économiques du litige. L’arrêt rapporté rappelle que ce principe est applicable aux contrats d’entreprise.
En l’espèce, un maître d’ouvrage confie à une entreprise la réalisation d’une piscine. Le procès-verbal de réception, bien que daté, n’est pas signé par le maître d’ouvrage. Se plaignant du non-paiement du solde des travaux, l’entreprise assigne le maître d’ouvrage qui demande, reconventionnellement, la réparation de son préjudice.
La cour d’appel de Poitiers, dans un arrêt du 8 juin 2021 (CA Poitiers, 8 juin 2021, n° 19/02216 N° Lexbase : A58384UR), condamne le maître d’ouvrage à payer une partie des factures dues à l’entreprise. L’arrêt retient que le bassin réalisé est bien celui convenu, à l’exception de l’escalier qu’il ne comporte pas. Les conseillers considèrent que le défaut de réalisation de l’escalier entraîne une moins-value, appréciée à 250 euros. Ils procèdent donc à une réduction du solde du prix à hauteur de ce montant.
Le maître d’ouvrage forme un pourvoi en cassation. Il est invoqué à l’appui du pourvoi qu’en opérant une réduction du solde du prix de vente alors que le maître d’ouvrage demandait dans ses conclusions d’appel la réparation des conséquences de l’inexécution à titre principal et, à titre subsidiaire, l’exécution forcée de l’obligation, la Cour a modifié l’objet du litige.
La Haute juridiction suit le pourvoi et censure au visa de l’article 4 précité. Le maître d’ouvrage demandait, non pas la réduction du prix mais des dommages et intérêts en réparation des conséquences de l’inexécution du contrat.
La solution n’est pas nouvelle mais il est rare de la voir appliquée dans le domaine de la construction si bien que l’affaire mérite une mise en lumière. L’objet du litige, déterminé par les parties, ne peut être modifié par le juge (pour un exemple récent, Cass. civ. 1, 7 septembre 2022, n° 21-16.254, F-B N° Lexbase : A18908HH).
Fixées par l’acte introductif d’instance et les conclusions en défense, les prétentions des parties permettent de faire connaître au juge les avantages auxquels prétendent les plaideurs (pour exemple s’agissant de conclusions d’appel : Cass. civ. 2, 3 février 2022, n° 20-11.842 N° Lexbase : A39417MW).
Le juge doit se prononcer sur cela, ni plus ni moins (Cass. civ. 3, 19 mars 2020, n° 18-25.334, F-D N° Lexbase : A49643K3). La Cour de cassation reste ainsi vigilante sur les modifications opérées par les juges du fond (pour exemple encore : Cass. civ. 3, 22 mars 2018, n° 17-11.050, F-D N° Lexbase : A8034XHZ).
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