Réf. : DGFiP, Carte des pratiques et montages abusifs, juin 2022
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par Marie-Claire Sgarra
le 08 Juillet 2022
► La DGFiP a intégré dans sa base de « Carte des pratiques et montages abusifs » un nouveau schéma de montage abusif.
Pour rappel, cette rubrique s’inscrit dans une démarche de prévention et de sécurité juridique apportée aux contribuables en les informant des risques qu’ils prendraient en mettant en place ou en conservant des montages destinés à réduire indûment l’impôt. Elle contient des exemples de montages révélés lors de contrôles fiscaux et contraires à la loi.
Le nouveau montage abusif concerne le report d’imposition abusif en cas d’apport de titres à une société contrôlée par l’apporteur (CGI, art. 150-0 B ter N° Lexbase : L6170LU3) [en ligne].
Principe
L’article 150-0 B ter du CGI prévoit, sous réserve du respect de certaines conditions, le report obligatoire d’imposition des plus-values réalisées par les particuliers lors de l’apport de leurs titres à une société qu’ils contrôlent.
Ce report d’imposition expire, en principe, notamment en cas de cession à titre onéreux des titres apportés, dans le délai de trois ans suivant l’apport.
Toutefois, il n’est pas mis fin au report d'imposition lorsque la société bénéficiaire de l’apport cède les titres apportés dans ce délai de trois ans et prend l’engagement d’investir une part significative du produit de cession (60 % pour les apports réalisés actuellement), dans un délai de deux ans suivant la date de cession, dans les emplois visés au 2° du I de l’article 150-0 B ter du CGI, notamment :
Le non-respect de la condition de réinvestissement met fin au report d'imposition au titre de l’année au cours de laquelle le délai de réinvestissement de deux ans expire.
Lorsque les titres apportés font eux-mêmes l'objet d'un apport à une société éligible au remploi, le réinvestissement est considéré comme effectif dès lors que la société apporteuse obtient, à l'issue de cet apport, le contrôle de la société bénéficiaire du nouvel apport, toutes conditions étant par ailleurs remplies
Le procédé de fraude Un particulier apporte la totalité des titres d’une société opérationnelle A qu’il détient d’une valeur totale de 10 millions d’euros à une société holding B créée ad hoc qu’il contrôle. La plus-value d’apport est placée en report d’imposition, conformément aux dispositions de l’article 150-0 B ter du CGI. Peu de temps après, la société holding B bénéficiaire de l’apport, cède au prix de 10 millions d’euros, l’intégralité des titres A à une société C, société holding nouvellement constituée par un fonds d’investissement et ayant vocation à procéder à la reprise de la société A dans le cadre d’un LBO. Dans le délai de deux ans suivant la cession, la société B investit le produit de la cession des titres à hauteur de 6 millions d’euros (60 % du produit de cession) dans une augmentation de capital de la société holding de reprise C, par compensation d’une créance représentative du prix de cession à recevoir par la société B dans le cadre d’un crédit-vendeur consenti à la société C cessionnaire. |
Le rehaussement
L’application littérale des dispositions du 2° du I de l’article 150-0 B ter du CGI conduit à ce que la souscription ainsi effectuée par la société holding B à l’augmentation de capital de la société C, constitue un remploi autorisé de 60 % du produit de la cession, permettant le maintien du report d’imposition.
Toutefois, la réalisation de ces deux actes distincts et concomitants (cession par la société B à la société C de 60 % des titres A et apport de la créance représentative du prix de cession de ces titres A à la même société C) a en réalité pour objet de décomposer artificiellement une seule et même opération (l’apport par la société B de 60 % des titres A à la société C).
Or, la société B ne contrôlant pas la société C, cet apport de titres ne peut constituer un réinvestissement éligible permettant de maintenir le report.
► Par suite, le schéma abusif vise au maintien du dispositif de report d'imposition malgré la cession de 100 % des titres A par la société B sans aucun réinvestissement éligible.
► Ce montage, qui a pour seul objet le contournement de la condition de réinvestissement du produit de cession des titres prévue par le 2° du I de l’article 150-0 B ter du CGI, et qui a permis artificiellement le maintien du report d’imposition de la plus-value d’apport, est constitutif d’un abus de droit fiscal entrant dans les prévisions de l’article L. 64 du Livre des procédures fiscales N° Lexbase : L9266LNI, sur le fondement de la fraude à la loi.
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