Le Quotidien du 8 avril 2022 : Procédure pénale/Enquête

[Brèves] Enquête préliminaire, criminalité et délinquance organisée : précisions sur les prérogatives des enquêteurs

Réf. : Cass. crim., 6 avril 2022, n° 21-84.092, F-B N° Lexbase : A32227S7

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N1074BZS

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[Brèves] Enquête préliminaire, criminalité et délinquance organisée : précisions sur les prérogatives des enquêteurs. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/83378108-breves-enquete-preliminaire-criminalite-et-delinquance-organisee-precisions-sur-les-prerogatives-des
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par Adélaïde Léon

le 27 Avril 2022

Dans le cadre d’une enquête préliminaire, la saisie, par les enquêteurs, dans le but de rechercher les auteurs d’une infraction, d’un objet découvert abandonné sur la voie publique ou dans un conteneur collectif d’ordures ménagères ne constitue pas une atteinte à la vie privée, au sens de l’article 8 de la CESDH, nécessitant une autorisation judiciaire préalable à l’exploitation de son contenu ;

La réalisation de photographie de manière discontinue dans un lieu public ne peut être assimilée à la mise en place d’un dispositif de captation et d’enregistrement continu d’images de personnes se trouvant dans un lieu privé, laquelle requiert l’autorisation préalable et le contrôle d’un juge ;

Aucune disposition législative n’impose une désignation nominative par le juge d’instruction ou le procureur de la République, de OPJ ou l’APJ chargé de la mise en place des dispositifs techniques de l’article 706-96 du Code de procédure pénale dont l’utilisation a été autorisée par le JLD.

Rappel des faits. Après avoir reçu un renseignement portant sur un trafic de stupéfiants, la police a ouvert une enquête préliminaire à l’issue de laquelle sept personnes ont été poursuivies devant le tribunal correctionnel selon la procédure de la comparution immédiate.

Condamné en première instance par le tribunal qui a rejeté ses exceptions de nullités visant la procédure, l’un des prévenus a relevé appel du jugement. Le ministère public a quant à lui formé appel incident.

En cause d’appel. La cour d’appel a rejeté les exceptions de nullité soulevées par le prévenu tirées de :

  • l’irrégularité de la fouille d’un sac poubelle à l’intérieur duquel un ticket de recharge téléphonique avait permis d’identifier les auteurs du trafic. Les juges d’appel ont estimé que l’atteinte ainsi portée à la vie privée de l’intéressé était restée modérée et proportionnée au but recherché, consistant dans la recherche de preuves susceptibles de démanteler un trafic de stupéfiants ;
  • l’irrégularité des procès-verbaux de surveillance exploitant un dispositif de captation et d’enregistrement d’images sur la voie publique. Les juges d’appel ont considéré que les photographies et leur exploitation, réalisées de manière discontinue dans un lieu public, ne constituent pas un recueil systématique de données mais s’assimilent à la surveillance des actes et déplacements d’individus dans un lieu public en utilisant un système de prise de vue sans enregistrement de données et ne constituaient pas, en soi, une ingérence dans la vie privée ;
  • l’irrégularité de la mise en place du dispositif de sonorisation et de captation d’images dans des lieux privés. Selon la cour d’appel, le recours à ces techniques spéciales d’enquête était conforme à l’autorisation préalable du juge des libertés et de la détention et les dispositifs techniques avaient été installés par deux OPJ appartenant au service requis par le procureur de la République pour procéder à l’enquête dans le cadre de laquelle il a été recouru à ces techniques d’investigation.

La cour d’appel a, pour association de malfaiteurs et infractions à la législation sur les stupéfiants, en récidive, condamné le prévenu à quatre ans d’emprisonnement et a ordonné une mesure de confiscation.

L’intéressé a formé un pourvoi contre l’arrêt d’appel.

Moyens du pourvoi. Il était fait grief à la cour d’appel de n’avoir par déclarée irrégulière la fouille du sac poubelle laquelle a été réalisée hors de tout contrôle d’un juge alors qu’elle constituait une mesure d’ingérence dans la vie privée nécessitant l’autorisation préalable d’un magistrat.

Le demandeur reprochait également à la cour d’appel de n’avoir pas accueilli la demande de nullité concernant les procès-verbaux de surveillance alors que le dispositif visé avait été mis en place sur une durée de près de trois mois, sans autorisation préalable d’un juge.

Enfin, le prévenu critiquait l’arrêt attaqué en ce qu’il a rejeté l’exception de nullité tirée de l’irrégularité de la mise en place du dispositif de sonorisation et de captation d’images dans des lieux privés alors que celle-ci était irrégulière en ce qu’elle avait été réalisée par un agent non qualifié et non spécialement requis par le procureur de la République.

Décision. La Chambre criminelle rejette le pourvoi.

S’agissant de la fouille du sac poubelle. La Chambre criminelle affirme que la saisie, par les enquêteurs, dans le but de rechercher les auteurs d’une infraction, d’un objet découvert abandonné sur la voie publique ou dans un conteneur collectif d’ordures ménagères ne constitue pas une atteinte à la vie privée, au sens de l’article 8 de la CESDH N° Lexbase : L4798AQR, nécessitant une autorisation judiciaire préalable à l’exploitation de son contenu.

S’agissant du dispositif de surveillance de la voie publique. La Cour considère que la réalisation de photographie de manière discontinue dans un lieu public ne peut être assimilée à la mise en place d’un dispositif de captation et d’enregistrement continu d’images de personnes se trouvant dans un lieu privé, qui requiert l’autorisation préalable et le contrôle d’un juge.

S’agissant enfin de la mise en place du dispositif de sonorisation et de captation d’images dans des lieux privés. La Chambre criminelle rappelle que la cour d’appel a relevé qu’il avait été recouru à ces techniques spéciales d’enquête conformément à une autorisation préalable du JLD et qu’ils ont été installés par des OPJ appartenant au service requis par le procureur de la République.

La Haute juridiction souligne par ailleurs qu’aucune disposition législative n’impose une désignation nominative par le juge d’instruction ou le procureur de la République, de OPJ ou l’APJ chargé de la mise en place des dispositifs techniques de l’article 706-96 du Code de procédure pénale N° Lexbase : L7418LPG dont l’utilisation a été autorisée par le JLD.

Pour aller plus loin : v. J.-B. Perrier, ÉTUDE : La procédure dérogatoire applicable à la criminalité et à la délinquance organisées et aux crimes, in Procédure pénale, Lexbase {"IOhtml_internalLink": {"_href": {"nodeid": 53810262, "corpus": "encyclopedia"}, "_target": "_blank", "_class": "color-encyclopedia", "_title": "ETUDE : La proc\u00e9dure d\u00e9rogatoire applicable \u00e0 la criminalit\u00e9 et \u00e0 la d\u00e9linquance organis\u00e9es et aux crimes", "_name": null, "_innerText": "N\u00b0\u00a0Lexbase\u00a0: E5380ZPX"}}.

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