Le Quotidien du 29 mars 2022 : Voies d'exécution

[Brèves] Mesures d’exécution à l’encontre d’un État étranger : la remise à parquet de la décision par voie diplomatique ne constitue pas la preuve de la remise de l’acte à son destinataire

Réf. : Cass. civ. 2, 24 mars 2022, n° 20-17.394, FS-B N° Lexbase : A27977RZ

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[Brèves] Mesures d’exécution à l’encontre d’un État étranger : la remise à parquet de la décision par voie diplomatique ne constitue pas la preuve de la remise de l’acte à son destinataire. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/82865452-breves-mesures-dexecution-a-lencontre-dun-etat-etranger-la-remise-a-parquet-de-la-decision-par-voie-
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par Alexandra Martinez-Ohayon

le 29 Mars 2022

La deuxième chambre civile de la Cour de cassation, dans son arrêt rendu le 24 mars 2022, après avoir rappelé que des mesures d'exécution ne peuvent être mises en œuvre sur un bien appartenant à un État étranger que sur autorisation préalable du juge, et que les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu’après leur avoir été notifiés ; dans le cas où il s’agit d’une notification internationale à destination d'un État étranger, en l'absence de convention internationale applicable, les dispositions de l’article 684 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6161LTD prévoient que celle-ci doit être effectuée par la voie diplomatique ; la Cour de cassation vient préciser que la remise à parquet de la décision à signifier par la voie diplomatique ne constitue pas la preuve de la remise de l'acte à son destinataire et ne peut valoir notification.

Faits et procédure. Dans cette affaire, la cour d’appel de Beyrouth a par un arrêt rendu le 5 mars 2009 condamné l’État du Liban à verser une certaine somme aux demandeurs. La Cour de cassation libanaise a rejeté le pourvoi formé contre cet arrêt. Par jugement du 13 février 2019, le tribunal de grande instance de Paris a déclaré l’arrêt rendu par la cour d’appel libanaise exécutoire en France. Le 27 mars 2019, le jugement a été transmis à parquet pour signification par la voie diplomatique à l’État du Liban. Les demandeurs ont saisi le juge de l’exécution du tribunal judiciaire afin d’être autorisés à pratiquer une saisie-attribution des fonds détenus par l'Agence française de développement pour le compte du Liban sur le fondement de ces décisions.

Le pourvoi. Les demandeurs font grief à l’arrêt rendu le 2 juillet 2020 par la cour d’appel de Paris d’avoir rejeté leur requête tendant à être autorisés à pratiquer une saisie-attribution, à hauteur du montant dû par le Liban, sur les fonds détenus par l'Agence française de développement, appartenant au Liban et affectés au financement de prêts à destination d'entreprises privées. Les intéressés font notamment valoir que :

  • la violation de l’article 684 du Code de procédure civile du fait que la signification à parquet d'une décision d'exequatur en vue de sa remise par voie diplomatique, qui est la seule démarche que puisse entreprendre une partie en vue de la signification de cette décision à destination d'un État étranger, suffit à rendre cette décision opposable à l'État destinataire et autorise la partie notifiante à engager des mesures d'exécution à l'encontre de celui-ci ;
  • la violation par la cour d’appel de l’article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales N° Lexbase : L7558AIR et l'article 1 du premier protocole additionnel à la Convention, au motif qu'ils n'apportaient pas la preuve de la réception effective de la décision d'exequatur par l'État libanais, la cour d’appel subordonnant ainsi l'exécution de la décision en cause à la production d'une preuve dont il n'était pas contesté qu'elle leur était impossible ;
  • la violation des articles 10 N° Lexbase : L1124H4E, 730 N° Lexbase : L6937H73, 734 N° Lexbase : L7368LEM, 734-1 N° Lexbase : L7037LED, et 734-2 N° Lexbase : L7038LEE du Code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention, la cour d’appel ayant rejeté leur requête, alors qu’il lui appartenait de prescrire des diligences utiles et de donner le cas échéant commission rogatoire à toute autorité compétente aux fins de vérifier si le destinataire de l’acte en a eu connaissance, et de l’informer le cas échéant de la procédure engagée à son encontre ou de l’acte qui lui est destiné.

Solution. Énonçant la solution précitée, aux termes des dispositions de l’article L. 111-1-1 du Code des procédures civiles d’exécution N° Lexbase : L7406LBW et de l’article 503 du Code de procédure civile N° Lexbase : L6620H7C, la Cour de cassation valide le raisonnement de la cour d’appel et rejette le pourvoi. Les Hauts magistrats relèvent que le juge n’est pas tenu d’ordonner une mesure d’instruction en application de l’article 10 du Code de procédure civile, dans le cas d’espèce les requérants n’alléguaient, ni ne justifiaient de démarches entreprises auprès des autorités chargées de la notification de l'acte en vue d'obtenir la preuve de la remise. Dès lors, la cour d’appel n’a pas exigé d'eux une preuve impossible, et n'a dès lors pas porté atteinte au droit des demandeurs à l'exécution des décisions de justice, en retenant que la remise à parquet de l'acte de signification du jugement n’avait aucun effet procédural, si ce n'est de permettre l'acheminement de l'acte au ministère de la Justice aux fins de remise par la voie diplomatique. En conséquence, les requérants n'étaient pas fondés à poursuivre l'exécution forcée à l'égard de leur débiteur.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : La forme des actes de procédure, La notification des actes à l’étranger, in Procédure civile, (dir. N. E . Vergès), Lexbase N° Lexbase : E1202EU3.

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