Le Quotidien du 10 mars 2022 : Construction

[Brèves] Présomption de responsabilité de l’article 1792 du Code civil : rappel des principes de charge de la preuve

Réf. : Cass. civ. 3, 2 mars 2022, n° 21-10.753, FS-B N° Lexbase : A10457PE

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par Juliette Mel, Docteur en droit, Avocat associé, M2J Avocats, Chargée d’enseignements à l’UPEC et Paris Saclay, Responsable de la commission Marchés de Travaux, Ordre des avocats

le 14 Mars 2022

► La présomption de responsabilité de l’article 1792 du Code civil n’implique pas un renversement de la charge de la preuve ;
► le maître d’ouvrage ou l’acquéreur de l’ouvrage doit donc rapporter la preuve du préjudice subi ainsi que du lien d’imputabilité entre la mission confiée au constructeur et ce préjudice.

Ce n’est pas parce que le constructeur est présumé responsable des dommages de nature décennale que le maître d’ouvrage peut se borner à prouver l’existence de son préjudice et rien d’autre. Autrement dit, toute objective qu’elle soit, la responsabilité civile décennale des articles 1792 N° Lexbase : L1920ABQ et 1792-2 du Code civil N° Lexbase : L6349G9Z n’implique pas, per se, automatiquement la responsabilité du constructeur. À l’exigence de la preuve de la gravité du dommage s’ajoute celle de l’imputabilité. Autrement dit, le maître ou l’acquéreur de l’ouvrage, pour reprendre les termes de l’article 1792 précité, doit établir le lien entre le dommage, d’une part, et les travaux réalisés par le constructeur qu’il met en cause, d’autre part. Il doit, également, rapporter la preuve du caractère caché des désordres invoqués à la réception.

Autrement dit, il appartient au maître d’ouvrage de rapporter la preuve des conditions d’application d’engagement de la responsabilité décennale des constructeurs ainsi que l’illustre l’arrêt rapporté.

En l’espèce, un maître d’ouvrage a confié à une entreprise la construction d’un bâtiment à usage industriel. La propriété de l’immeuble a été transférée à une SCI puis donnée à bail. Le nouveau propriétaire et le locataire assignent le constructeur aux fins d’indemnisation de ses préjudices résultant de l’absence d’assurance dommages-ouvrage et décennale ainsi que de différentes malfaçons et non-conformités.

La cour d’appel de Pau, dans un arrêt rendu le 24 novembre 2020 (CA Pau, 24 novembre 2020, n° 17/03287 N° Lexbase : A4779377), condamne le constructeur qui forme un pourvoi en cassation. Il articule qu’en l’état d’une réception intervenue sans réserve, il appartient au maître d’ouvrage de rapporter la preuve de ce que le défaut de conformité qu’il allègue n’était pas apparent le jour de la réception intervenue sans réserve. La cour d’appel aurait donc inversé la charge de la preuve en affirmant qu’il incombait au constructeur d’établir que le défaut de conformité était apparent.

La Haute juridiction, par une motivation aussi développée que pédagogue, comme elle le fait maintenant dans certaines décisions, censure l’arrêt d’appel au visa de l’article 1353 du Code civil N° Lexbase : L1013KZK relatif à la charge de la preuve.

Elle rappelle qu’il incombe au maître ou à l’acquéreur de l’ouvrage qui agit sur le fondement de l’article 1792 du Code civil de rapporter la preuve que les conditions d’application de ce texte sont réunies.

La solution n’est pas nouvelle. Dans un arrêt rendu le 7 juillet 2004 (Cass. civ. 3, 7 juillet 2004, n° 03-14.166, FS-P+B N° Lexbase : A0519DDL) la Haute juridiction avait déjà eu l’occasion de rappeler que le maître d’ouvrage devait rapporter la preuve du contenu des réserves exprimées lors de la réception des ouvrages et du caractère caché des désordres dont elle demandait la garantie. La charge de cette preuve lui incombe.

Cette solution mérite d’être approuvée. Ce n’est que sur le terrain de la faute qu’aucune preuve ne sera à rapporter de la part du maître d’ouvrage en application de la présomption de responsabilité. Les autres conditions d’application de l’article 1792 du Code civil ne sont donc pas concernées.

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