Le Quotidien du 23 avril 2021 : Arbitrage

[Brèves] Le juge d’appui ne peut se substituer au centre d’arbitrage dans l’application de son règlement

Réf. : TJ Paris, 16 avril 2021, n° 21/50115 (N° Lexbase : A86444PT)

Lecture: 5 min

N7281BYC

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Brèves] Le juge d’appui ne peut se substituer au centre d’arbitrage dans l’application de son règlement. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/67247091-breves-le-juge-dappui-ne-peut-se-substituer-au-centre-darbitrage-dans-lapplication-de-son-reglement
Copier

par Lalaina Chuk Hen Shun, Docteur en droit, élève avocat

le 26 Avril 2021

► En l’absence de lien de rattachement avec la France ou de risque de déni de justice, le juge d’appui français n’est pas compétent pour intervenir au soutien d’un arbitrage international ; par ailleurs, sa compétence est supplétive et subsidiaire, et il ne peut se substituer au centre d’arbitrage dans l’application de son règlement ; enfin, les litiges relatifs à la responsabilité du candidat-arbitre et à l’exécution fautive du contrat d’organisation de l’arbitrage relèvent de la compétence de la juridiction de droit commun.

Faits et procédures. Une clause compromissoire, désignant le droit britannique comme celui applicable à la procédure et Londres comme siège de l’arbitrage, avait été insérée dans un « Memorandum of understanding » conclu entre deux sociétés, A et B. Sur ce fondement, la société A avait engagé devant la Chambre de Commerce Internationale (CCI) une action à l’encontre de la société B, d’une personne physique, et de neuf autres sociétés disséminées dans six pays différents (Ile de Man, Malte, Bulgarie, Gibraltar, Luxembourg et Royaume-Uni). Après que la Cour internationale d’arbitrage de la CCI eut exclu de la procédure neuf des onze défendeurs, la société A a assigné l’institution d’arbitrage et les sociétés exclues devant le président du tribunal judiciaire de Paris aux fins de voir ordonner la poursuite de la procédure arbitrale en y incluant l’ensemble des défendeurs visés à la demande d’arbitrage. Dans la même foulée et devant le même tribunal, la société A recherche la responsabilité du candidat-arbitre, désigné par les défendeurs admis, en lui reprochant d’avoir manqué à son obligation de révélation.

Questions soulevées. Ainsi, en marge d’une procédure d’arbitrage international dont il ne ressort a priori aucun rattachement avec la France, la compétence du juge d’appui est invoquée pour que celui-ci, d’une part, intervienne dans l’administration d’un arbitrage institutionnel et, d’autre part, statue sur la question de la responsabilité civile du candidat-arbitre.

Sur la compétence du juge d’appui français dans le cadre d’un arbitrage international. Le magistrat relève que, même si des défendeurs ont été exclus de l’arbitrage, la société A conserve la possibilité de saisir la ou les juridictions étatiques compétentes pour faire valoir ses prétentions. Le juge parisien considère qu’il n’existe dès lors aucun risque de déni de justice tel que défini par la jurisprudence (Cass. civ. 1, 1er février 2005, n° 01-13.742, FS-P+B N° Lexbase : A6154DGZ) ni, par ailleurs, de lien de rattachement avec la France justifiant, en application de l’article 1505 du Code de procédure civile (N° Lexbase : L5776LT4), la compétence du président du tribunal judiciaire de Paris en tant que juge d’appui de l’arbitrage international.

Sur la compétence du juge d’appui pour ordonner à la CCI d’inclure les parties écartées par la Cour internationale d’arbitrage du centre. La société A estime, premièrement, que la convention d’arbitrage conclue avec la société B s’étend, prima facie, à l’ensemble des défendeurs visés à la demande d’arbitrage, deuxièmement, que la Cour de la CCI a par conséquent méconnu son règlement d’arbitrage en excluant neuf d’entre eux, et, enfin, qu’il convient d’ordonner d’inclure ces derniers à l’arbitrage. Toutefois, le juge d’appui rappelle qu’il ne lui appartient pas de se prononcer sur l’existence, la validité ou la portée de la clause compromissoire. Il s’appuie notamment sur la jurisprudence de la Cour de cassation (Cass. civ. 1, 13 décembre 2017, n° 16-22.131, FS-P+B N° Lexbase : A1196W8S) pour affirmer qu’il « ne saurait, sans excéder ses pouvoirs, se substituer au centre d’arbitrage dans l’application de son règlement ». Il rajoute que le litige relatif à l’exécution fautive du contrat d’organisation de l’arbitrage par l’institution relève de la compétence de la juridiction de droit commun et non de celle du juge d’appui. 

Sur la compétence du juge d’appui pour connaître de la question de la responsabilité du candidat-arbitre. Comme à l’occasion d’une précédente décision relative à la responsabilité de l’arbitre (TJ Paris, PEC, 31 mars 2021, n° 19/00795 N° Lexbase : A94534M3), le juge parisien opère une distinction entre l’organisation juridictionnelle de l’arbitrage et l’exécution du contrat d’arbitre. Il considère que la première peut relever de sa compétence mais que la seconde, notamment en ce qui concerne l’action en responsabilité pour manquement à l’obligation de révélation, relève de la compétence des juridictions de droit commun.

Ainsi, le juge d’appui près le tribunal judiciaire de Paris se déclare incompétent tant pour ordonner d’inclure à la procédure arbitrale les parties exclues par la Cour de la CCI, que pour statuer sur la responsabilité du candidat-arbitre.

Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L’arbitrage, Le tribunal arbitral, in Procédure civile, (dir. E. Vergès), Lexbase (N° Lexbase : E7334ETS).

 

newsid:477281

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.