Lexbase Fiscal n°855 du 25 février 2021 : Aides d'Etat

[Brèves] Soutien aux compagnies aériennes : conformité au droit de l’UE du moratoire sur le paiement de taxes

Réf. : Trib. UE, 17 février 2021, aff. T-259/20 (N° Lexbase : A18544H7)

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par Vincent Téchené

le 24 Février 2021

► Le moratoire sur le paiement de taxes mis en place par la France pour soutenir les compagnies aériennes, titulaires d’une licence française, dans le cadre de la pandémie de covid-19 est conforme au droit de l’Union ; 

Ce régime d’aide est approprié pour remédier aux dommages économiques provoqués par la pandémie de covid-19 et ne constitue pas une discrimination.

Faits et procédure. En mars 2020, la France a notifié à la Commission européenne une mesure d’aide sous la forme d’un moratoire sur le paiement de la taxe d’aviation civile et de la taxe de solidarité sur les billets d’avion dues sur une base mensuelle pendant la période allant de mars à décembre 2020.
Ce moratoire, qui bénéficie aux compagnies aériennes titulaires d’une licence française, consiste à reporter le paiement de ces taxes au 1er janvier 2021 et à répartir ensuite les paiements sur une période de 24 mois, à savoir jusqu’au 31 décembre 2022. Le montant exact des taxes est déterminé en fonction du nombre de passagers transportés et du nombre de vols effectués depuis un aéroport français. Par sa décision du 31 mars 2020, la Commission a qualifié le moratoire sur le paiement des taxes d’aide d’État compatible avec le marché intérieur.

La compagnie aérienne Ryanair a introduit un recours tendant à l’annulation de cette décision.

Décision inédite. Le Tribunal examine, pour la première fois, la légalité d’un régime d’aide d’État adopté en vue d’apporter une réponse aux conséquences de la pandémie de covid-19 au regard de l’article 107, paragraphe 2, sous b), du TFUE (N° Lexbase : L2404IPQ). Le Tribunal précise, en outre, l’articulation entre les règles relatives aux aides d’État et le principe de non-discrimination, en raison de la nationalité, consacré à l’article 18, paragraphe 1, du TFUE (N° Lexbase : L2484IPP), d’une part, ainsi que le principe de libre prestation des services, d’autre part.

Appréciation du Tribunal. Le Tribunal confirme, d’une part, que la pandémie de covid-19 et les mesures de restriction de transport et de confinement adoptées par la France en vue d’apporter une réponse à celle-ci constituent, dans leur ensemble, un événement extraordinaire au sens de l’article 107, paragraphe 2, sous b), du TFUE qui a causé des dommages économiques aux compagnies aériennes opérant en France. Selon le Tribunal, il n’est pas non plus contestable que l’objectif du moratoire sur le paiement des taxes est effectivement celui de remédier auxdits dommages.

Il constate, d’autre part, que la limitation du moratoire sur le paiement des taxes aux compagnies aériennes en possession d’une licence française est appropriée pour atteindre l’objectif de remédier aux dommages causés par ledit événement extraordinaire. À cet égard, le Tribunal souligne qu’en vertu du Règlement n° 1008/2008 du 24 septembre 2008 (N° Lexbase : L7127IBL), la possession d’une licence française se traduit, dans les faits, par la présence du principal établissement des compagnies aériennes sur le territoire français et par leur assujettissement à la surveillance financière et d’honorabilité des autorités françaises.

S’agissant du caractère proportionné du moratoire sur le paiement des taxes, le Tribunal souligne, en outre, que les compagnies aériennes éligibles au régime d’aide sont les plus durement touchées par les mesures de restriction de transport et de confinement adoptées par la France. L’extension dudit moratoire à des compagnies non établies en France n’aurait, en revanche, pas permis d’atteindre aussi précisément et sans risque de surcompensation l’objectif de remédier aux dommages économiques subis par les compagnies aériennes opérant en France. Au regard de ces constatations, le Tribunal confirme que l’objectif du moratoire sur le paiement des taxes satisfait aux exigences de la dérogation prévue par l’article 107, paragraphe 2, sous b), du TFUE et que les modalités d’octroi de cette aide ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif.

Ainsi, ledit régime ne constitue pas non plus une discrimination interdite au titre de l’article 18, 1er alinéa, du TFUE.

En deuxième lieu, le Tribunal examine la décision de la Commission au regard de la libre prestation des services énoncée à l’article 56 du TFUE (N° Lexbase : L2705IPU). À cet égard, le Tribunal rappelle que cette liberté fondamentale ne s’applique pas telle quelle au domaine des transports, qui est soumis à un régime juridique particulier, dont relève le Règlement n° 1008/2008. Or, ce Règlement a précisément pour objet de définir les conditions d’application, dans le secteur du transport aérien, du principe de la libre prestation des services. Cependant, Ryanair n’avait allégué aucune violation dudit Règlement.

En troisième lieu, le Tribunal rejette le moyen selon lequel la Commission aurait commis une erreur manifeste dans l’appréciation de la valeur de l’avantage attribué aux compagnies aériennes bénéficiant du moratoire sur le paiement des taxes. Il rejette, enfin, comme non-fondé le moyen tiré d’une prétendue violation de l’obligation de motivation et constate qu’il n’est pas nécessaire d’examiner le bien-fondé du moyen tiré d’une violation des droits procéduraux dérivés de l’article 108, paragraphe 2, du TFUE.

Autre décision (Suède). Dans une autre décision du 17 février 2021, le Tribunal juge identiquement que le régime de garanties de prêts mis en place par la Suède pour soutenir les compagnies aériennes titulaires d’une licence d’exploitation suédoise dans le cadre de la pandémie de covid-19 et destiné à remédier à la perturbation grave de l’économie de cet État membre est conforme au droit de l’Union (Trib. UE, 17 février 2021, aff. T-238/20 N° Lexbase : A18534H4).

 

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