La lettre juridique n°843 du 12 novembre 2020 : Filiation

[Brèves] Adoption, par le conjoint du père, de l’enfant né par GPA à l’étranger : quid en l'absence de lien de filiation maternel ?

Réf. : Cass. civ. 1, 4 novembre 2020, deux arrêts, n° 19-50.042 (N° Lexbase : A418333C), et n° 19-15.739 (N° Lexbase : A418433D), FS-P+B+I

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 13 Novembre 2020

► Dans le cadre d’une demande d’adoption de l’enfant né par GPA à l’étranger par le conjoint du père, en l'absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l'enfant, le droit français n'interdit pas le prononcé de l'adoption : 1° lorsque le droit étranger autorise la convention de gestation pour autrui ; 2° et que l'acte de naissance de l'enfant, qui ne fait mention que d'un parent, a été dressé conformément à la législation étrangère, en l'absence de tout élément de fraude.

Ces arrêts rendus le 4 novembre 2020 viennent apporter une nouvelle précision, dans le contentieux de la reconnaissance en France des liens de filiation des enfants nés de GPA à l’étranger et plus précisément dans le cadre d’une demande d’adoption de l’enfant né par GPA à l’étranger par le conjoint du père, dans l’hypothèse particulière de l'absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l'enfant.

Deux affaires similaires. Dans les deux affaires, deux enfants étaient nés à l’étranger (en Inde dans la première affaire, et au Mexique dans la seconde), d’un père de nationalité française, ayant eu recours à une convention de gestation pour autrui. La transcription de l'acte de naissance établi à l'étranger ne mentionnait que le nom du père, en l’absence d’indication de la filiation maternelle ; L’époux du père avait formé une demande d'adoption plénière de l'enfant de son conjoint.

Deux décisions de la cour d’appel de Paris en sens contraire. Les affaires s’étaient poursuivies devant la cour d’appel de Paris qui s’était prononcée en sens contraire, les conseillers parisiens accueillant la demande d’adoption plénière par le conjoint du père dans la première affaire ; et rejetant la demande dans la seconde.

Dans la première affaire, les juges parisiens avaient retenu que le droit français n'interdit pas le prononcé de l'adoption par l'époux du père de l'enfant né à l'étranger de cette procréation lorsque le droit étranger autorise la convention de gestation pour autrui et que l'acte de naissance de l'enfant, qui ne fait mention que d'un parent, a été dressé conformément à la législation étrangère, en l'absence de tout élément de fraude. Ils avaient alors accueilli la demande d’adoption plénière, après avoir analysé que l'acte de naissance de l'enfant, qui mentionnait le père sans faire mention de la gestatrice, avait été établi conformément aux dispositions de la législation indienne et qu'il ne saurait donc être reproché au requérant un détournement ou une fraude.

Dans la seconde affaire, la cour d’appel de Paris avait au contraire rejeté la demande, au motif que rien ne permettait d'appréhender les modalités selon lesquelles la femme ayant accouché de l’enfant aurait renoncé de manière définitive à l'établissement de la filiation maternelle et qu'il en était de même du consentement de cette femme à l'adoption de l'enfant, par le mari du père. Les juges parisiens avaient estimé que, dans ces conditions, il ne pouvait être conclu que l'adoption sollicitée, exclusivement en la forme plénière et avec les effets définitifs qui s'attachaient à cette dernière, soit conforme à l'intérêt de l'enfant, qui ne pouvait s'apprécier qu'au vu d'éléments biographiques suffisants.

Décisions de la Cour de cassation. Saisie d’un pourvoi dans le cadre de chacune des deux affaires (pourvoi du procureur de la République dans la première affaire, du père et de son conjoint dans la seconde affaire), la Cour de cassation va se prononcer, pour chacune, en faveur des requérants à l’adoption.

La Haute juridiction rappelle, avant tout, que le recours à la gestation pour autrui à l'étranger ne fait pas, en lui-même, obstacle au prononcé de l'adoption, par l'époux du père, de l'enfant né de cette procréation, si les conditions légales de l'adoption sont réunies et si elle est conforme à l'intérêt de l'enfant (cf. Cass. civ. 1, 5 juillet 2017, n° 16-16.455, FS-P+B+R+I N° Lexbase : A7471WLB ; cf. Adeline Gouttenoire, extrait de La GPA devant la Cour de cassation : dernier acte, article paru dans Lexbase, éd. priv., n° 708 N° Lexbase : N9619BW8).

Dans ce prolongement, la Cour de cassation, dans ses arrêts du 4 novembre 2020, vient édicter une nouvelle règle s’agissant de l'adoption, par l'époux du père, de l'enfant né d’une GPA à l’étranger, dans la situation de l'absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l'enfant.

Elle approuve alors la règle énoncée par la cour d’appel dans la première affaire, selon laquelle le droit français n'interdit pas, dans ce cas, le prononcé de l'adoption par l'époux du père de l'enfant né à l'étranger de cette procréation, sous deux conditions :

  • que le droit étranger autorise la convention de gestation pour autrui ;
  • et que l'acte de naissance de l'enfant, qui ne fait mention que d'un parent, ait été dressé conformément à la législation étrangère, en l'absence de tout élément de fraude.

Dans cette affaire, elle s’en remet alors à l’analyse détaillée à laquelle avait procédé la cour d’appel qui, de ses constatations et énonciations, avait exactement que déduit l'acte de naissance de l'enfant avait été régulièrement dressé en application de la loi indienne (laquelle permettait bien le recours à la gestation pour autrui lors de la conception de l’enfant et de sa naissance) et qu'en l'absence de filiation maternelle établie en Inde, l'adoption était légalement possible.

Dans la seconde affaire, en revanche, la Haute juridiction censure la décision, reprochant à la cour de ne pas avoir recherché, comme il le lui était demandé, si les documents produits, et notamment l'autorisation donnée le 10 décembre 2015, par la direction générale du registre civil, à l'officier de l'état civil de la commune mexicaine afin qu'il établisse l'acte de naissance de l'enfant, ne démontraient pas que cet acte de naissance, comportant le seul nom du père, était conforme à la loi mexicaine, de sorte qu'en l'absence de lien de filiation établi avec la femme ayant donné naissance à l'enfant, l'adoption plénière était juridiquement possible.

Pour aller plus loin : cf. ETUDE : La gestation ou maternité pour autrui, in La filiation (dir. A. Gouttenoire), Lexbase (N° Lexbase : E4415EY8).

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