Réf. : CEDH, 8 juillet 2019, Req. 54012/10 (N° Lexbase : A4325ZIZ)
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par June Perot
le 10 Juillet 2019
► L’annulation par le parquet d’une ordonnance devenue définitive, infligeant une sanction administrative pour refus d’une personne de se soumettre à un prélèvement biologique lors d’un contrôle routier de police, constitue une réouverture de la procédure et une répétition des poursuites qui contrevient au principe Ne bis in idem.
Telle est la position adoptée par la Cour européenne des droits de l’Homme dans un arrêt rendu le 8 juillet 2019 (CEDH, 8 juillet 2019, Req. 54012/10 N° Lexbase : A4325ZIZ).
Les faits de l’espèce concernaient un ressortissant roumain arrêté par la police au volant d’un véhicule dans le cadre d’un contrôle préventif. Un test d’alcoolémie s’était révélé positif et le conducteur avait été invité à se rendre à l’hôpital pour effectuer un prélèvement de preuves biologiques. Le conducteur avait toutefois refusé ce prélèvement. Le parquet avait alors entamé des poursuites pénales à son encontre pour avoir refusé de se soumettre au prélèvement de preuves biologiques. Le parquet a cependant décidé de clôturer les poursuites, estimant que les faits n’atteignaient pas le degré de gravité d’une infraction. Le parquet lui a toutefois infligé une amende administrative d’un montant d’environ 250 euros. L’intéressé n’a pas fait appel et a payé l’amende. Cependant, le parquet hiérarchiquement supérieur décida d’infirmer d’office l’ordonnance, estimant qu’une sanction administrative n’était pas justifiée compte tenu, entre autres, du degré de danger social général et concret associé aux faits. Ensuite, le dossier fut renvoyé au parquet en vue de la poursuite de l’enquête pénale. Le conducteur a été renvoyé en jugement et condamné à une peine d’emprisonnement d’un an avec sursis pour avoir refusé de se soumettre à un prélèvement de preuves biologiques. Son appel a été rejeté. Le procureur en chef a demandé à l’administration financière de procéder au remboursement de l’amende versée.
L’intéressé a saisi la CEDH, se plaignant d’avoir été poursuivi et condamné deux fois pour la même infraction et estimant que la réouverture des poursuites contre lui n’était pas conforme aux critères énoncés par l’article 4 du Protocole n° 7 (N° Lexbase : L4679LAK).
Pour conclure à la violation du principe Ne bis in idem, la Cour rappelle que tel qu’il est libellé, le premier paragraphe de l’article 4 du Protocole n° 7 énonce les trois composantes du principe Ne bis in idem : les deux procédures doivent être de nature «pénale», elles doivent viser les mêmes faits et il doit s’agir d’une répétition des poursuites. Elle examine successivement chacune de ces composantes.
Deux procédures de nature pénale. La Cour conclut que les deux procédures -à savoir celle ayant abouti à l’ordonnance (amende administrative) et celle ayant abouti à l’arrêt de la cour d’appel (condamnation à un an d’emprisonnement avec sursis)- revêtent un caractère pénal.
Deux procédures visant les mêmes faits. La Cour relève que les deux décisions portent sur les mêmes faits et accusations, à savoir le refus de se soumettre à un prélèvement dans le cadre d’un contrôle routier.
Une répétition de poursuites. La Cour relève que l’ordonnance était devenue définitive au sens de la Convention et qu’en conséquence, son annulation par le parquet hiérarchiquement supérieur et la réouverture de la procédure constituent une répétition des poursuites.
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