Le Quotidien du 13 mai 2019 : Droit financier

[Brèves] Compatibilité du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats prévu par l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada (CETA)

Réf. : CJUE, 30 avril 2019, avis 1/17 (N° Lexbase : A4791ZAP)

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[Brèves] Compatibilité du mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats prévu par l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada (CETA). Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/51233751-breves-compatibilite-du-mecanisme-de-reglement-des-differends-entre-investisseurs-et-etats-prevu-par
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par Vincent Téchené

le 07 Mai 2019

► Le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats prévu par l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada (CETA) est compatible avec le droit de l’Union.

Tel est le sens d’un avis rendu par la CJUE le 30 avril 2019 (CJUE, 30 avril 2019, avis 1/17 N° Lexbase : A4791ZAP).

 

Le volet du CETA consacré aux investissements a notamment pour objet de mettre en place un mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats. Dans ce cadre, il est prévu de créer un tribunal et un tribunal d’appel ainsi que, à plus long terme, un tribunal multilatéral des investissements. Est ainsi prévu l’établissement d’un système juridictionnel des investissements (Investment Court System, ICS). Le 7 septembre 2017, la Belgique a demandé l’avis de la CJUE au sujet de la compatibilité de ce mécanisme de règlement des différends avec le droit primaire de l’Union.

 

Dans son avis, la Cour souligne que le droit de l’Union ne s’oppose ni à la création d’un tribunal, d’un tribunal d’appel ni, ultérieurement, d’un tribunal multilatéral des investissements, ni à ce que le CETA leur confère la compétence pour interpréter et appliquer les dispositions de l’accord à l’aune des règles et principes de droit international applicables entre les parties au CETA. En revanche, ces tribunaux étant en dehors du système juridictionnel de l’Union, ils ne sauraient être habilités à interpréter ou à appliquer des dispositions du droit de l’Union autres que celles du CETA ou à rendre des décisions qui puissent avoir pour effet d’empêcher les institutions de l’Union de fonctionner conformément au cadre constitutionnel de celle-ci.

 

En l’occurrence, la Cour estime que le CETA ne confère aux tribunaux envisagés aucune compétence d’interprétation ou d’application du droit de l’Union autre que celle portant sur les dispositions de cet accord. Dans ce cadre, la Cour souligne notamment que l’accord confère à l’Union le pouvoir de déterminer, lorsqu’un investisseur canadien cherche à contester des mesures adoptées par un Etat membre et/ou par l’Union, si la question doit, eu égard aux règles de répartition des compétences entre l’Union et ses Etats membres, être portée contre cet Etat membre ou contre l’Union. La compétence exclusive de la Cour pour statuer sur la répartition des compétences entre l’Union et ses Etats membres est ainsi préservée.

 

La Cour relève, par ailleurs, que le CETA contient des clauses privant lesdits tribunaux de toute compétence pour remettre en cause les choix démocratiquement opérés au sein d’une partie à cet accord en matière, notamment, de niveau de protection de l’ordre public, de la sécurité publique, de la moralité publique, de la santé et de la vie des personnes et des animaux ou de préservation de l’innocuité alimentaire, des végétaux, de l’environnement, du bien-être au travail, de la sécurité des produits, des consommateurs ou encore de droits fondamentaux. Par conséquent, cet accord ne porte pas atteinte à l’autonomie de l’ordre juridique de l’Union.

 

Quant à la compatibilité du mécanisme envisagé avec le principe général d’égalité de traitement, la Cour relève que, si le CETA vise à conférer aux investisseurs canadiens qui investissent dans l’Union une voie spécifique d’action contre des mesures de l’Union, leur situation n’est toutefois pas comparable à celle des investisseurs des Etats membres qui investissent dans l’Union.

 

La Cour conclut également que le CETA ne porte pas atteinte à l’effectivité du droit de l’Union au seul motif qu’une sentence adoptée par le tribunal institué par cet accord pourrait avoir pour effet, dans des circonstances exceptionnelles, de neutraliser une amende pour infraction au droit de la concurrence infligée par la Commission ou par une autorité de la concurrence d’un Etat membre. En effet, le droit de l’Union permet lui-même l’annulation de l’amende lorsque celle-ci est entachée d’un vice correspondant à celui que le tribunal du CETA pourrait constater.

 

Pour ce qui est de la compatibilité du mécanisme de règlement de différends avec le droit d’accès à un tribunal indépendant, la Cour constate que l’accord vise à rendre le tribunal du CETA accessible à toute entreprise et à toute personne physique canadienne qui investit dans l’Union ainsi qu’à toute entreprise et à toute personne physique d’un État membre de l’Union qui investit au Canada. Toutefois, en l’absence d’un régime visant à assurer l’accessibilité financière du tribunal et du tribunal d’appel aux personnes physiques et aux petites et moyennes entreprises (PME), le mécanisme risquerait, en pratique, d’être accessible aux seuls investisseurs qui disposent d’importantes ressources financières. Or, la Cour estime que les engagements pris par la Commission et le Conseil, pour assurer l’accessibilité des tribunaux envisagés aux PME suffisent, dans le cadre de cette procédure d’avis, pour conclure que le CETA est compatible avec l’exigence d’accessibilité. En effet, ces engagements conditionnent l'approbation de cet accord par l'Union.

Enfin, la Cour conclut que le CETA contient des garanties suffisantes pour assurer l’indépendance des membres des tribunaux envisagés.

 

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