Réf. : CJUE, 12 mars 2019, aff. C-221/17 (N° Lexbase : A5830Y3C)
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N8068BX4
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par Anne-Lise Lonné-Clément
le 13 Mars 2019
► Le droit de l’Union ne s’oppose pas à la perte de la nationalité d’un Etat membre et, par conséquent, de la citoyenneté de l’Union, en cas d’interruption durable du lien effectif entre la personne concernée et cet Etat membre ;
► toutefois, le principe de proportionnalité exige qu’un examen individuel porte sur les conséquences de cette perte pour les personnes concernées au regard du droit de l’Union.
Tel est l’enseignement délivré par la Cour de justice de l’Union européenne, aux termes d’un arrêt rendu le 12 mars 2019.
Dans cette affaire, des citoyennes néerlandaises possédant une seconde nationalité d’un Etat non-UE avaient saisi les juridictions néerlandaises à la suite du refus du ministère des Affaires étrangères d’examiner leurs demandes de renouvellement de passeport national. Le refus du ministère était fondé sur la loi sur la nationalité néerlandaise, qui prévoit qu’une personne majeure perd cette nationalité si elle possède également une nationalité étrangère et si elle a eu, au cours de sa majorité, sa résidence principale pendant une période ininterrompue de dix ans en dehors des Pays-Bas et de l’Union européenne. Toutefois, ce délai de dix ans est interrompu si l’intéressé a sa résidence principale aux Pays-Bas ou dans l’Union européenne pendant une période d’au moins un an. De même, il y a interruption du délai si l’intéressé requiert la délivrance d’une déclaration relative à la possession de la nationalité néerlandaise, d’un document de voyage (passeport) ou d’une carte d’identité néerlandaise. Un nouveau délai de dix ans commence à courir à compter de la délivrance de l’une de ces pièces. En outre, une personne mineure perd, en principe, la nationalité néerlandaise si son père ou sa mère perd cette nationalité. Saisi de ces litiges, le Raad van State (Conseil d’Etat, Pays-Bas) s’interrogeait sur la marge d’appréciation dont disposent les Etats membres pour fixer les conditions de perte de la nationalité et pose une question à ce sujet à la Cour de justice. Il demandait en particulier si la perte de plein droit de la nationalité néerlandaise, qui a pour effet d’entraîner également la perte de la citoyenneté de l’Union, était compatible avec le droit de l’Union.
La CJUE répond positivement à la question en disant pour droit que l’article 20 TFUE, lu à la lumière des articles 7 et 24 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une législation d’un Etat membre, telle que celle en cause au principal, qui prévoit, sous certaines conditions, la perte de plein droit de la nationalité de cet Etat membre, entraînant, s’agissant des personnes n’ayant pas également la nationalité d’un autre Etat membre, la perte de leur statut de citoyen de l’Union européenne et des droits qui y sont attachés, pour autant que les autorités nationales compétentes, y compris, le cas échéant, les juridictions nationales, sont en mesure d’examiner, de manière incidente, les conséquences de cette perte de nationalité et, éventuellement, de faire recouvrer ex tunc la nationalité aux personnes concernées, à l’occasion de la demande, par celles-ci, d’un document de voyage ou de tout autre document attestant de leur nationalité. Et d’ajouter que, dans le cadre de cet examen, ces autorités et juridictions doivent vérifier si la perte de la nationalité de l’Etat membre concerné, qui emporte celle du statut de citoyen de l’Union, respecte le principe de proportionnalité en ce qui concerne les conséquences qu’elle comporte sur la situation de chaque personne concernée et, le cas échéant, sur celle des membres de sa famille au regard du droit de l’Union.
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