Réf. : T. com. Créteil, 13 mars 2018, aff. n° 2018R00051 (N° Lexbase : A9052XI4)
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par Vincent Téchené
le 11 Avril 2018
N’a violé manifestement aucune règle de droit et ne constitue dès lors pas l'existence d'un trouble manifestement illicite, le fait pour une société de mettre à disposition des travailleurs contre rémunération par le biais d'une plateforme numérique permettant de mettre à la disposition d'entreprises utilisatrices des personnes effectuant des missions temporaires dans les domaines de l'hôtellerie et de la restauration, en employant ces travailleurs sous le statut d’auto-entrepreneurs. Tel est le sens d’une ordonnance de référé du tribunal de commerce de Créteil du 13 mars 2018 (T. com. Créteil, 13 mars 2018, aff. n° 2018R00051 N° Lexbase : A9052XI4).
En l’espèce, des sociétés de travail temporaire spécialisées dans le domaine de l'hôtellerie restauration, soutenait que la plateforme numérique en question fausse le jeu de la concurrence en s'affranchissant des conditions spécifiques qui régissent les sociétés de travail temporaire, notamment que les travailleurs sous le statut d'auto-entrepreneur sont en fait de faux indépendants, puisqu'on leur impose ce statut.
Le tribunal rejette donc cette demande. Il rappelle que l'activité de plateforme n'est pas illicite en soi, et ce d'autant moins, que leur développement est souhaité par la Commission européenne aux termes de la Directive 2000/31 (N° Lexbase : L8018AUI) et que le fait pour un indépendant d'accepter une mission, même de très courte durée, n'a pas non plus de caractère illégal.
Il apparaît, en outre, que le législateur a tenu compte de l'évolution du marché du travail, en réglementant progressivement les obligations sociales des plateformes et les droits qui en découlent pour les indépendants, notamment par les articles L. 7342-1 (N° Lexbase : L6768K9K) et suivants du Code du travail. Ces articles créent un nouveau titre, relatif au statut social de certains travailleurs utilisant une ou plusieurs plateformes lorsque leur indépendance est faible à l'égard de la plateforme, sans qu'ils se trouvent pour autant dans une situation de subordination juridique. Le tribunal relève, également, que la CJUE, dans un cas similaire, a retenu que la mise en relation d'indépendants avec des donneurs d'ordre ne «se résumait pas à un service d'intermédiation», mais «faisait partie intégrante d'un service global» et qu'il était possible pour les Etats membres de réglementer une telle activité. Ainsi, au vu de cette jurisprudence, l'activité de plateforme litigieuse peut être considérée comme un service global et spécifique, qui pourrait donc être réglementé ou soumis à autorisation préalable. Le tribunal conclut donc à l'absence de violation manifeste d'une règle de droit, qui interdirait à la plateforme de recruter des travailleurs sous le statut d'auto-entrepreneur, aux conditions actuelles, pour exercer son activité spécifique de plateforme de mise en relation dans le secteur hôtellerie restauration.
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