Une cour d'assises peut-elle "régulièrement" suppléer à la carence d'un juge d'instruction et ordonner la prise de corps qui permettait l'incarcération du requérant ? Telle est la question posée à la Cour européenne des droits de l'Homme dans un arrêt en date du 15 janvier 2009 (CEDH, 15 janvier 2009, Req. 19421/04
N° Lexbase : A4030ECA). En l'espèce, un juge d'instruction a omis, en délivrant l'ordonnance de mise en accusation et de renvoi devant la cour d'assises, de délivrer aussi l'ordonnance de prise de corps prévue par l'ancien article 181 du Code de procédure pénale. Cet oubli a conduit la chambre de l'instruction à ordonner la libération du requérant, ce dernier étant détenu sans titre. Le juge d'instruction a tenté de pallier cette difficulté en rendant une ordonnance complémentaire de prise de corps du requérant. Cette décision a, néanmoins, été censurée par la Cour de cassation, aux motifs que le juge d'instruction était dessaisi et qu'il n'avait donc plus compétence pour ordonner la prise de corps. Par la suite, la cour d'assises de l'Aude a condamné le requérant par contumace à une peine de trente ans de réclusion criminelle. Ce dernier a été incarcéré et ses demandes postérieures de mise en liberté ont été rejetées. Après épuisement des voies de recours internes, il a saisi la Cour européenne en arguant d'une violation de l'article 5 de la Convention (
N° Lexbase : L4786AQC) selon lequel "
toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales". La Cour européenne a suivi son argumentation. Elle a relevé que la décision de la cour d'assises de décerner une ordonnance de prise de corps à l'encontre du requérant ne reposait pas sur une "loi" susceptible d'être qualifiée de suffisamment accessible et précise pour éviter tout danger d'arbitraire au sens de l'article 5 de la Convention.
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