Le Quotidien du 6 février 2002 : Sociétés

[Jurisprudence] Le sort de la caution en cas de restructuration de la société créancière

Réf. : Cass. com., 22 janvier 2002, n° 98-15.899, FS-D (N° Lexbase : A8308AXY)

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par Laetitia Tomasini, Université Paris II

le 07 Octobre 2010

A de nombreuses reprises, la Cour de cassation a eu à se prononcer sur le sort de la caution en cas d'opération de restructuration affectant, soit la société débitrice au principal, soit la société créancière bénéficiaire de l'engagement de caution. C'est sans grande surprise que par un arrêt du 22 janvier 2002, sa Chambre commerciale vient rappeler une solution désormais classique selon laquelle, en cas d'apport partiel d'actif effectué par la société créancière, la caution reste tenue des engagements antérieurement souscrits.

En l'espèce, un engagement de caution avait été souscrit par une personne physique au profit d'une autre auprès d'une société. Cette dernière avait effectué un apport partiel d'actif à une société de crédit, qui a alors procédé à la reprise d'une saisie-arrêt sur les rémunérations de la caution, initiée par la société apporteuse, afin d'obtenir le paiement dû. La caution a contesté, devant les juridictions du fond, la validité de cette saisie-arrêt. Dans un arrêt du 5 mars 1998, la cour d'appel de Caen a validé la saisie-arrêt au profit du nouvel interlocuteur et considéré la totalité des sommes dues au jour de la décision. La caution s'est alors pourvue en cassation.

Le moyen du pourvoi soutenait que la caution, engagée certes envers la société apporteuse, n'avait pas réitéré son engagement au profit de la société bénéficiaire de l'apport partiel d'actif. Or, était intervenu un changement dans la personnalité du créancier qui ne pouvait affecter la caution sans manifestation expresse de sa part. Les sommes dues au titres du cautionnement étaient donc celles qui étaient dues au moment de la réalisation de l'apport.

La Cour de cassation ne pouvait manquer de rejeter de telles prétentions, conformément à une jurisprudence désormais bien établie en la matière. Ainsi, elle retient que la caution s'était engagée envers le créancier au remboursement d'un prêt souscrit antérieurement à l'opération d'apport. La créance, née à ce moment, s'est trouvée transmise à la société bénéficiaire de l'apport, qui pouvait alors en poursuivre la totale exécution. Il convient dès lors de revenir sur ces deux points : la nature de l'opération d'apport partiel d'actif et ses conséquences en matière de cautionnement, puis la détermination de l'antériorité des créances.

L'apport partiel d'actif est une opération de restructuration de sociétés par laquelle une société apporte à une autre une branche complète et autonome d'activité. Il y a alors transmission universelle du patrimoine attaché à cette branche à la société bénéficiaire de l'apport. Pour autant, et à la différence de ce qui se passe en cas de fusion absorption, la société apporteuse ne disparaît pas puisqu'elle ne se dessaisit que d'une partie de son patrimoine. Lorsque l'engagement de caution relève de la branche apportée, la personnalité du créancier est indéniablement modifiée, ce qui va à l'encontre de l'intuitu personae gouvernant le cautionnement (C. civ., art. 2015 N° Lexbase : L2250ABX). La jurisprudence considère, dans pareille hypothèse, que l'obligation de couverture de la caution est éteinte du fait de l'opération de restructuration, mais que son obligation de règlement est maintenue pour créances nées antérieurement, tout le problème consistant en la détermination de ces créances (Cass. com., 22 janvier 1985, JCP éd. G 1986, II, n° 20591, note Simler N° Lexbase : A3819AGK ; Cass. com., 20 janvier 1987, JCP éd. G 1987, II, n° 20844, note Germain N° Lexbase : A6495AAS ; Cass. com., 23 mars 1999, Dalloz 1999, jur., p. 699, note Grateloup N° Lexbase : A8037AGR).

L'obligation de la caution n'étant maintenue que pour les créances nées antérieurement à l'opération d'apport, restait à fixer leur date de naissance. La Cour de cassation, appelée à se prononcer sur cette question à plusieurs reprises, distingue la date de naissance de l'obligation de sa date d'exigibilité (Cass. com., 25 mars 1997, Dalloz 1998, som., p. 183 N° Lexbase : A7470AAW). Elle en déduit que concernant un prêt, comme c'est le cas en l'espèce, la date de naissance de la créance du prêteur est la date de délivrance des fonds, et non les dates des échéances des remboursements (Cass. civ. 1, 12 janvier 1999 N° Lexbase : A8848AGS ; Cass. com., 16 octobre 2001 N° Lexbase : A4766AWG, pour un commentaire de cette décision, voir N° Lexbase : N1332AAL). La caution ne peut donc arguer d'un apport partiel d'actif affectant le créancier pour se décharger de ses obligations.

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