La lettre juridique n°377 du 7 janvier 2010 : Droit international public

[Questions à...] Promouvoir le droit continental : questions à Christian Connor, avocat associé du cabinet LMT Avocats et président de la section internationale de l'ACE (Avocats conseils d'entreprises)

Lecture: 3 min

N7178BMS

Citer l'article

Créer un lien vers ce contenu

[Questions à...] Promouvoir le droit continental : questions à Christian Connor, avocat associé du cabinet LMT Avocats et président de la section internationale de l'ACE (Avocats conseils d'entreprises). Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/article-juridique/3212327-questions-a-promouvoir-le-droit-continental-questions-a-b-christian-connor-avocat-associe-du-cabinet
Copier

par Anne-Laure Blouet Patin, Directrice de la rédaction

le 07 Octobre 2010

La prédominance du droit anglo-américain, common law, dans les échanges économiques internationaux constitue un véritable handicap à la performance des entreprises françaises dans leurs activités à l'international, notamment les plus petites d'entre-elles, sur des marchés aujourd'hui mondialisés. Face à ce constat, une réaction devait s'imposer. Lors du colloque organisé pour le bicentenaire du Code civil à la Sorbonne en mars 2004, le Président Jacques Chirac avait rappelé la nécessité d'assurer un meilleur positionnement du système juridique français hors de nos frontières, et avait mis en lumière toute la portée internationale du Code civil. Et c'est ainsi que la France s'est dotée, le 1er mars 2006, de sa fondation pour le droit continental ayant pour ambitieuse mission d'instaurer un système juridique mondial plus équilibré en valorisant les actions de rayonnement international du droit continental au service des acteurs du droit et des entreprises engagées dans la mondialisation des échanges. Mais d'autres acteurs oeuvrent aussi pour la promotion de ce droit continental. Lexbase Hebdo - édition privée générale a rencontré l'un d'eux, Maître Christian Connor, avocat associé du cabinet LMT Avocats et président de la section internationale de l'ACE (Avocats conseils d'entreprises), qui tire la sonnette d'alarme et nous rappelle les enjeux d'une telle promotion. Lexbase : Aujourd'hui, quelle place occupe le droit continental dans le monde des affaires ?

Christian Connor : Le droit est un vecteur d'intégration pour les entreprises qui souhaitent s'implanter dans certains pays. Elles ont besoin d'un environnement culturel proche. Le droit est la porte d'entrée, la clé indispensable pour que les entreprises soient présentes dans ces pays là. La prise de conscience a été faite avec les rapports Doing Business de la Banque mondiale. Le rapport Doing Business publie, depuis 2006, un classement des 181 pays en fonction de la facilité à entreprendre. En 2006, la France était au 44ème rang -entre la Jamaïque et les Kiribati- ; en 2009, elle récupère péniblement quelques places en prenant le 32ème rang. Les pays de common law prennent le haut du classement (Singapour, Nouvelle-Zélande et Etats-Unis occupant les trois premières places). Nicolas Tenzer (1) indiquait, à l'occasion d'une conférence qu'il tenait à l'Ecole militaire, le 12 octobre 2009, que certains cabinets anglo-saxons avaient mobilisé plus de cinq mille collaborateurs sur la zone Asie afin de suivre d'une manière permanente les appels d'offre, tant ceux portant sur des réformes de droit dans un certain nombre de pays en voie de modernisation qu'en matière de grand contrats, notamment d'infrastructure. Il est évident qu'avec une telle force de frappe, les cabinets en question sont en bien meilleure posture pour précéder et accompagner les entreprises du monde de la common law dans ces pays à fort potentiel de développement. Cette situation nous amène à faire un constat. Il est fondamental et urgent que nous mutualisions nos forces et nos équipes au sein des différents cabinets et plus largement avec les autres professionnels du droit pour répondre d'une seule voix à ces sollicitations que nous sommes incapables de satisfaire efficacement.

Lexbase : Face à la généralisation de la common law, comment réagir pour rester compétitif ?

Christian Connor : Il faut arriver à parler d'une seule voix. Aujourd'hui tout le monde est d'accord sur l'objectif final mais personne ne s'entend sur les moyens à mettre en oeuvre. La priorité doit donc être au-dessus de tout corporatisme. Et cela passe par une union des professionnels du droit avec le soutien indispensable des industriels. Prenons l'exemple de nos voisins allemands qui viennent de publier un document intitulé Law made in Germany en réponse à un document publié par la Law society vantant les mérites du droit anglo-saxon et de la place de Londres comme "seule place de droit". Toutes les professions sont unies, les professions juridiques, les chambres de commerce et d'industrie, les associations d'avocats, les barreaux... ainsi elles ont su apporter une réponse appropriée à cette attaque frontale du monde anglo-saxon

Lexbase : Quel est le rôle de l'ACE dans ce "combat" ?

Christian Connor : Comme je l'ai souligné dans mon allocution d'ouverture du 17ème congrès de l'ACE à Toulouse le 5 novembre dernier, la défense du droit continental et  de notre système juridique reste notre priorité. Il y va de la compétitivité de nos entreprises à l'international. Il y va de la présence de nos cabinets dans le monde pour accompagner nos entrepreneurs à l'export.

Aujourd'hui deux constats s'imposent :

- le bassin Méditerranéen est toujours et largement une région de droit continental, il importe qu'il le reste ;

- notre pays est trop largement absent des grands appels d'offre à l'international. Nos concurrents anglo-saxons sont partout présents, et en force. Il est donc fondamental que nous mutualisions nos forces et à cette fin, avec le soutien actif de Nicolas Tenzer, de l'IDEFIE (initiative pour le développement de l'expertise française à l'international et en Europe) qu'il a crée et de l'Institut français d'experts juridiques internationaux (IFEJI), l'ACE a, au sein de la section internationale, organisé un groupe de travail spécialement dédié à cette importante question et tout sera mis en oeuvre pour que cette initiative soit suivie d'actions concrètes permettant enfin de réunir les acteurs conscients de l'importance de l'enjeu et ainsi se donner la possibilité d'une véritable percée tant en France même qu'au niveau mondial.

Pour formaliser l'importance de cette question une motion en ce sens a été votée lors du congrès de l'ACE, appelant l'Etat et les organisations professionnelles concernées à agir ensemble afin que la France puisse, à l'instar d'autres pays, valoriser les mérites du droit continental, notamment du droit français et de ses praticiens. L'ACE revendique également pour les avocats français davantage de moyens pour exporter le droit continental, en termes de fiscalité et de structures.


(1) Auteur de Quand la France disparaît du monde, Grasset, 2008.

newsid:377178

Utilisation des cookies sur Lexbase

Notre site utilise des cookies à des fins statistiques, communicatives et commerciales. Vous pouvez paramétrer chaque cookie de façon individuelle, accepter l'ensemble des cookies ou n'accepter que les cookies fonctionnels.

En savoir plus

Parcours utilisateur

Lexbase, via la solution Salesforce, utilisée uniquement pour des besoins internes, peut être amené à suivre une partie du parcours utilisateur afin d’améliorer l’expérience utilisateur et l’éventuelle relation commerciale. Il s’agit d’information uniquement dédiée à l’usage de Lexbase et elles ne sont communiquées à aucun tiers, autre que Salesforce qui s’est engagée à ne pas utiliser lesdites données.

Réseaux sociaux

Nous intégrons à Lexbase.fr du contenu créé par Lexbase et diffusé via la plateforme de streaming Youtube. Ces intégrations impliquent des cookies de navigation lorsque l’utilisateur souhaite accéder à la vidéo. En les acceptant, les vidéos éditoriales de Lexbase vous seront accessibles.

Données analytiques

Nous attachons la plus grande importance au confort d'utilisation de notre site. Des informations essentielles fournies par Google Tag Manager comme le temps de lecture d'une revue, la facilité d'accès aux textes de loi ou encore la robustesse de nos readers nous permettent d'améliorer quotidiennement votre expérience utilisateur. Ces données sont exclusivement à usage interne.