La lettre juridique n°405 du 29 juillet 2010 : Fiscal général

[Evénement] QPC et contentieux fiscal

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par Anne-Lise Lonné, Rédactrice en chef de Lexbase Hebdo - édition fiscale

le 07 Octobre 2010

Entrée en vigueur le 1er mars 2010, la procédure de QPC (question prioritaire de constitutionnalité), instituée par la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 (N° Lexbase : L0289IGS) et par le décret n° 2010-148 du 16 février 2010 (N° Lexbase : L5740IGP), permet à tout justiciable de soutenir, à l'occasion d'une instance devant une juridiction administrative ou judiciaire, "qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit". Les premières statistiques, établies après quatre mois d'expérience, témoignent d'un intérêt certain des justiciables pour cette nouvelle procédure : au 5 juillet 2010, les tribunaux administratifs avaient enregistré 246 questions prioritaires de constitutionnalité et les cours administratives d'appel 111, soit un total de 357 ; quant au Conseil d'Etat, il avait été saisi de 137 QPC ; du côté des juridictions judiciaires, 238 QPC avaient été enregistrées au 11 juin 2010, dont 154 par la Cour de cassation. Et la matière fiscale apparaît comme particulièrement sujette à QPC, ressortant en tête des statistiques établies du côté des juridictions administratives. "Question prioritaire de constitutionnalité et contentieux fiscal", tel était le thème d'un colloque organisé par l'IACF (Institut des avocats conseils fiscaux) le 21 juin 2010. Présentes à cet événement, les éditions Lexbase ont choisi de revenir sur l'intervention de Daniel Gutmann, Avocat et Professeur à l'Ecole de droit de la Sorbonne (Université Paris 1), laquelle était intitulée "Le Code général des impôts au crible de la question prioritaire de constitutionnalité".

Le Professeur Gutmann n'a pas entendu se livrer à une analyse du CGI article par article, ni à l'analyse de la jurisprudence constitutionnelle existante en matière fiscale, mais a souhaité faire partager ses réflexions concernant l'introduction en droit français de cette nouvelle procédure de QPC, afin d'en évaluer la portée réelle.

De façon générale, sur la question de savoir s'il existe, dans le CGI, un "réservoir d'inconstitutionnalité", on peut considérer, selon une approche négative, que l'introduction de cette nouvelle procédure ne va pas, pour autant, révéler inconstitutionnel tout le droit français. En effet, en premier lieu, il faut rappeler que l'administration fiscale pratique, aujourd'hui, en interne un audit constitutionnel préalable des dispositions qu'elle propose de soumettre au Parlement. En deuxième lieu, le Conseil d'Etat, dans sa fonction de donneur d'avis, a pour mission d'examiner ex ante les éventuels problèmes de constitutionnalité. En troisième lieu, et de façon générale, il faut tenir compte du fait que la législation récente a donné lieu à un contrôle de constitutionnalité, sinon systématique, du moins assez fréquent. Aussi, au regard du tableau figurant sur le site du Conseil constitutionnel, on peut dénombrer environ 150 dispositions du CGI et 13 du LPF ayant déjà été soumises à un contrôle de constitutionnalité, et pour lesquelles on peut, donc, penser que la condition de recevabilité de la QPC, liée à l'absence d'examen antérieur par le Conseil constitutionnel de la disposition litigieuse, n'est pas remplie. Toutefois, le Professeur Gutmann ne prête qu'une valeur indicative à ce tableau, et estime qu'il ne doit pas pour autant décourager les éventuels requérants. En effet, on devra considérer que le Conseil ne s'est pas déjà prononcé sur une question portant sur des dispositions déjà examinées, lorsque les arguments invoqués seront nouveaux.

L'autre approche, positive, et qui emporte la faveur de Daniel Gutmann, est de considérer qu'il existe effectivement un "réservoir d'inconstitutionnalité" non négligeable, celui-ci tenant, d'une part, au fait qu'il existe un certain nombre de dispositions anciennes qui n'ont, de fait, jamais été soumises au contrôle de constitutionnalité, en tant qu'elles sont antérieures à 1958 (étant précisé que certaines dispositions postérieures n'ont jamais été présentées au Conseil). D'autre part, et de façon plus réelle, cette procédure doit amener, les avocats en premier lieu, à réfléchir, de façon approfondie, sur les conséquences à tirer des principes constitutionnels. Autrement dit, l'approche du Conseil constitutionnel n'est pas figée, si l'on considère que le Conseil ne peut rester indifférent à toute la demande sociale qui s'exprime à travers le contrôle de constitutionnalité. Selon le Professeur, on peut, donc, "envisager comme un développement naturel du droit et de cette procédure, le changement d'approche du Conseil constitutionnel sur un certain nombre de questions".

C'est, tout d'abord, dans le détail qu'il faut rechercher les sources d'inconstitutionnalité, c'est-à-dire dans les défauts techniques de notre système fiscal. Peut-être, ensuite, certains aspects structurels de notre système fiscal peuvent-ils donner lieu à contestation.

1. Les aspects techniques du contrôle de constitutionnalité

Si la question de l'intelligibilité de la loi fiscale, en tant qu'objectif à valeur constitutionnelle, ne va pas forcément donner lieu à QPC, dans la mesure où cela ne rentre pas dans le champ des libertés fondamentales, ces arguments peuvent servir de support à une QPC si, à l'occasion de la question, se révèle une atteinte aux droits et libertés fondamentaux.

Cette question étant écartée, il semble que les questions techniques principales se situent sur deux aspects, qui sont, d'une part, la détermination du fait générateur de l'impôt, et, d'autre part, la détermination de la méthode d'imposition.

1.1. La détermination du fait générateur de l'impôt

S'agissant de l'insuffisante définition par le législateur du fait générateur de l'impôt, autrement dit, la question de l'incompétence négative par la délégation au pouvoir réglementaire, le Conseil constitutionnel a précisé que cette question ne pouvait être soulevée dans le cadre d'une QPC (Cons. const., décision n° 2010-5 QPC, 18 juin 2010 N° Lexbase : A9571EZI).

On peut, en revanche, s'interroger sur la question de savoir si certains faits générateurs d'impôt, tels qu'ils sont aujourd'hui définis par la loi fiscale, sont incompatibles avec certains principes constitutionnels. A cet égard, on peut s'inspirer d'un exemple relevé en droit québécois, à propos de l'imposition des pensions alimentaires reçues par le parent d'un enfant qui en a la garde. Il avait été soutenu devant la Cour suprême du Canada, que le fait d'imposer les pensions alimentaires, versées pour l'éducation et l'entretien des enfants, portait atteinte au principe du respect des capacités contributives dans la mesure où la pension alimentaire devait se concevoir comme une pension versée à l'enfant, et qu'il ne pouvait donc y avoir d'imposition, à la charge du parent, sur un revenu versé à l'enfant. Si la Cour suprême a considéré qu'il n'y avait pas de problème d'inconstitutionnalité, le législateur, sous l'impulsion de la société canadienne, s'est saisi de la question et a finalement décidé d'exonérer les pensions alimentaires reçues par les parents divorcés, exclusivement dédiées à l'éducation des enfants. Selon le Professeur, si cette question s'est posée au Canada, on peut penser qu'elle pourrait être soulevée en France.

On peut, également se demander si le fait d'imposer les prestations compensatoires n'est pas contraire à la Constitution. En effet, en vertu de l'article 270 du Code civil (N° Lexbase : L2837DZ4), les prestations compensatoires ont une vocation indemnitaire. Or, les indemnités sont en principe exonérées, faute de pouvoir être considérées comme un revenu. Cela soulève donc une question sérieuse au regard du principe de capacité contributive.

C'est ainsi que le principe de capacité contributive (DDHC, art. 13 N° Lexbase : L1360A9A) apparaît comme un moyen sérieux de contrôler la détermination de l'assiette de l'impôt. Si l'on observe la pratique de certaines cours constitutionnelles étrangères (Allemagne, Italie, Espagne), on s'aperçoit que ce principe de capacité contributive a donné lieu à des développements constitutionnels extrêmement nombreux et précis.

Sur la méthode de raisonnement, il faut savoir que le contrôle de la loi au nom du principe du respect des capacités contributives ne peut pas s'opérer de façon anarchique. Dans une décision récente au sujet de l'introduction de la CVAE (Cons. const., 29 décembre 2009, décision n° 2009-599 DC, loi de finances pour 2010 N° Lexbase : A9026EPY), le Conseil constitutionnel dit très clairement que c'est au législateur qu'il appartient "de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées les facultés contributives". Et de préciser que "le Conseil constitutionnel n'a pas un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement". Il en conclut qu'il ne saurait contrôler que des erreurs manifestes d'appréciation par le législateur des capacités contributives.

Cela étant précisé, on peut relever une première série de situations dans lesquelles on peut contester un impôt, en raison de l'absence de revenu y donnant lieu.

Par exemple, l'article 158, 7 du CGI (N° Lexbase : L0074IKX) prévoit que les revenus d'un non-adhérent à un centre de gestion agrées sont imposés sur la base de 125 % de son revenu net. Indépendamment du principe d'égalité devant l'impôt (au regard duquel ces dispositions ont été jugées conformes à la Constitution : Cons. const., 23 juillet 2010, décision n° 2010-16 QPC, M. P. Exbrayat N° Lexbase : A9194E4B), on peut se demander si l'imposition de 125 % du revenu gagné, n'est pas assise en partie sur un revenu fictif, et n'est pas alors contraire au principe du respect des capacités contributives.

L'appréhension fiscale du contrat d'échange amène également à s'interroger au regard de ce même principe. L'échange donne lieu à imposition, aussi bien en matière de droits de mutation qu'en matière d'impôt sur le revenu à travers l'imposition des plus-values. Même si l'on considère qu'il existe des dispositifs de sursis et de report d'imposition, lorsque ceux-ci ne s'appliquent pas, force est de constater qu'au moment de l'échange, le contribuable ne dispose pas d'une assiette liquide sur laquelle il puisse acquitter cet impôt.

Une deuxième série d'exemples apparaît à propos des présomptions en matière fiscale.

En matière de fiscalité successorale, la loi prévoit qu'une personne peut être présumée propriétaire d'un bien dans certaines circonstances (CGI, art. 751 N° Lexbase : L5296H9Z). Le principe du respect des capacités contributives est respecté dans la mesure où les présomptions sont réfragables, c'est-à-dire si l'on peut démontrer qu'il n'y a pas en réalité de fait générateur de l'impôt que la loi présume. Mais, selon Daniel Gutmann, si la présomption est irréfragable, cela pose un vrai problème.

De même, le fait d'asseoir l'impôt sur des assiettes déterminées par voie de forfait ou par voie de valeurs locatives peut apparaître litigieux au regard du respect des capacités contributives.

Enfin, en troisième lieu, on peut se demander si ce principe du respect des capacités contributives n'entraîne pas nécessairement une imposition d'un revenu net. S'il s'agit d'un principe posé par le CGI, il peut être soutenu que le code ne le respecte pas dans certains cas.

Par exemple, s'agissant du système de "tunnelisation" des déficits, c'est-à-dire de report en avant des déficits, si l'article 156 du CGI (N° Lexbase : L5248IMC) a pour objet de faire obstacle à des montages par lesquels un certain nombre de déficits plus ou moins douteux peuvent être imputés sur le revenu global, on peut s'interroger sur la constitutionnalité de l'établissement d'une règle générale de "tunnelisation des déficits", applicable, en particulier, aux déficits non professionnels des BIC ou des BNC.

De même, à propos du dispositif de sous-capitalisation des sociétés prévu à l'article 212 du CGI (N° Lexbase : L2658HNR), la décote de 5 % applicable à la fraction d'intérêts non déductibles au titre d'une année lors du report en avant, pose problème au regard du principe d'imposition du revenu net des sociétés, qui devrait s'appliquer non seulement en année N, mais également en N+1, N+2. Selon le Professeur, si l'on admet le principe du report en avant, il devrait pouvoir être intégral.

1.2. La méthode d'imposition

S'agissant de la méthode d'imposition, on peut se concentrer sur le principe d'égalité, lequel suppose l'obligation de traiter identiquement les contribuables qui se trouvent dans la même situation.

Ce principe amène donc à s'interroger sur le problème de l'identité des situations et leur comparabilité.

On peut, ainsi, discuter la question de savoir si, à propos du régime d'imputation des pertes constatées en cas d'annulation de titres à l'occasion d'une liquidation, il est normal de traiter distinctement la situation d'une liquidation judiciaire (pour laquelle l'imputation est admise) et celle d'une liquidation non judiciaire (pour laquelle l'imputation n'est pas permise) (CGI, art. 150-0 D N° Lexbase : L0087IKG). Il en est de même s'agissant de la restitution de droits d'enregistrement perçus à la suite de l'annulation d'un contrat ayant donné lieu à un versement, pour laquelle l'article 1961 (N° Lexbase : L4941HMX) opère une distinction entre les situations judiciaires et non judiciaires.

Un autre exemple de discussion concerne la réintégration d'une quote-part de frais et charges dans le régime de l'intégration fiscale (CGI, art. 216 N° Lexbase : L3998HLN). Cette quote-part se comprend comme la réintégration des frais exposés par une société holding à raison de la gestion des participations qu'elle détient dans ses filiales. Or, dans le cadre d'une holding opérationnelle, il n'est pas permis de réintégrer les frais afférents exclusivement à la gestion des titres de participation, alors que cela est possible dans le cadre d'une holding pure. On peut se demander si ce traitement différencié de situations identiques n'est pas source d'un contentieux à valeur constitutionnelle.

Par ailleurs, on sait qu'il est possible de déroger au principe d'égalité dès lors qu'il existe des motifs d'intérêt général. L'établissement de règles dérogatoires doivent alors être justifiées au regard des objectifs poursuivis sachant que le législateur doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels.

A l'heure actuelle, il semble que certaines règles ne respectent pas ces conditions. Il en est ainsi, notamment, dans le cas d'une règle incitative qui ne joue pas son rôle. Il apparaît, par exemple, que l'option pour le prélèvement libératoire sur les dividendes peut parfois se retourner contre l'intérêt du contribuable concerné, dès lors que l'option est irrévocable. Dans une décision du 29 décembre 2005 (Cons. const., décision n° 2005-530 DC, du 29 décembre 2005, loi de finances pour 2006 N° Lexbase : A1204DMK), le Conseil constitutionnel rappelle que, en matière fiscale, la loi, lorsqu'elle atteint un niveau de complexité tel qu'elle devient inintelligible pour le citoyen, est contraire à la Constitution, en particulier lorsque "lorsqu['elle] invite le contribuable [...] à opérer des arbitrages et qu'elle conditionne la charge finale de l'impôt aux choix éclairés de l'intéressé ; [...] au regard du principe d'égalité devant l'impôt, la justification des dispositions fiscales incitatives est liée à la possibilité effective, pour le contribuable, d'évaluer avec un degré de prévisibilité raisonnable le montant de son impôt selon les diverses options qui lui sont ouvertes". Or, dans le cas de l'option pour le prélèvement libératoire sur les dividendes, on ne peut pas toujours évaluer avec une prévisibilité raisonnable. En effet, lorsque les dividendes sont reçus en début d'année, il n'est pas possible de connaître l'ensemble de ses revenus au titre de l'année écoulée.

Au-delà de ces questions techniques, on peut aussi tenter de détecter des défauts plus structurels.

2. La QPC peut-elle dévoiler des problèmes structurels de notre système ?

On peut également s'interroger sur la constitutionnalité de certains éléments structurels en droit fiscal français, lesquels peuvent être regroupés en deux catégories : les sujets de l'imposition et les dispositifs répressifs.

2.1. Les sujets de l'imposition

Tout d'abord, la notion de foyer fiscal peut être sujette à discussion. Le foyer fiscal a d'ailleurs été considéré comme inconstitutionnel dans certains pays (en particulier en Italie et en Allemagne). Si le Conseil constitutionnel a validé l'imposition de l'ISF au niveau du foyer fiscal en précisant qu'il s'agissait d'une règle traditionnelle en droit fiscal français, la question doit rester ouverte.

Il est également intéressant de s'interroger sur les cas de solidarité fiscale à la lumière du principe de capacité contributive. Dans un certain nombre de cas pour lesquels une personne est déclarée solidairement responsable du paiement de l'impôt par la loi, celle-ci peut contester le fait de supporter la charge d'un impôt qui n'est pas le sien. La solution va dépendre de la possibilité, pour cette personne, de se retourner contre le contribuable pour lui demander le règlement de la dette fiscale. Lorsque tel n'est pas le cas, il peut y avoir matière à réflexion.

Par ailleurs, on peut se demander si la distinction des catégories de revenus (BIC, BNC, BA, traitements et salaires etc.), est toujours opportune. Si l'on prend l'exemple des règles applicables en cas de retrait d'actifs, on remarque, dans le cas d'un entrepreneur individuel qui a affecté un bien à son patrimoine professionnel, que le retour de ce bien dans le patrimoine privé est considéré comme un retrait effectif qui engendre une imposition de la plus-value professionnelle. En matière de BIC, le principe de liberté d'affectation étant absolu, ce qui implique que, lorsque le bien reste inscrit à l'actif du patrimoine professionnel, peu important qu'il cesse d'être utilisé à des fins professionnelles, il n'est pas considéré comme un retrait d'actif. En matière de BNC, le Conseil d'Etat estime, sur le fondement de l'article 99 du CGI (N° Lexbase : L2034HLW), qu'alors même que le bien reste inscrit sur le registre des immobilisations, il retourne dans le patrimoine privé du simple fait qu'il cesse d'être utilisé à des fins professionnelles. On peut se demander si la distinction a lieu d'être entre les BIC et les BNC. Si le Conseil constitutionnel, dans une décision du 29 décembre 1983 (Cons. const., décision n°83-164 DC du 29 décembre 1983 N° Lexbase : A8074ACZ) a estimé, au sujet d'une loi qui abaissait la limite des recettes donnant lieu à l'application du forfait pour les professions agricoles que "le principe d'égalité n'interdit pas au législateur de tenir compte de la nature particulière de l'activité des diverses catégories de travailleurs indépendants pour édicter les règles fiscales qui leur sont applicables ; qu'ainsi peuvent différer selon les catégories professionnelles les règles relatives au forfait", on peut toutefois se reposer la question de l'opportunité d'opérer une distinction dans le cas particulier du retrait d'actif.

2.2. Les dispositifs répressifs en matière fiscale

Le Professeur Gutmann a, enfin, soulevé la question de la constitutionnalité de certains dispositifs répressifs en matière fiscale.

Si l'existence de l'abus de droit constitue en soi, pour certains, un problème de constitutionnalité, on peut, sans aller aussi loin, s'interroger sur la conformité à la Constitution d'un dispositif qui soumet à pénalités les opérations recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs (LPF, art. L. 64 N° Lexbase : L4668ICU). On atteint, selon Daniel Gutmann, "un degré d'imprévisibilité de l'application de la théorie qui paraît difficilement compatible avec les principes fondamentaux applicables en matière pénale". Le Conseil d'Etat, dans la décision a d'ailleurs estimé que le principe de rétroactivité de la loi pénale plus douce s'appliquait à la pénalité de 40 % prévue par l'article L. 64 du LPF (CE 3° et 8° s-s-r., 27 juillet 2009, n° 295358 N° Lexbase : A1236EKY). Partant de là, on peut penser qu'il pourrait également admettre que le principe de légalité des délits et des peines soit applicable dans le cadre de cet article, et notamment prévoir l'exigence d'une clarté renforcée des faits générateurs des pénalités fiscales. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle, en Allemagne et en Italie, il n'existe pas de pénalité spécifique pour des situations d'abus de droit par but exclusivement fiscal.

Enfin, on peut s'interroger au regard du principe de l'indépendance des procédures fiscale et pénale. On peut légitimement se demander si le principe de nécessité des peines s'accommode du fait que l'on puisse être pénalement réprimé pour fraude fiscale en l'absence de condamnation par le juge fiscal.

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