La lettre juridique n°272 du 13 septembre 2007 : Droit financier

[Textes] Transposition de la Directive concernant les marchés d'instruments financiers et la réforme du règlement général de l'Autorité des marchés financiers : les marchés non réglementés

Réf. : Arrêté du 18 avril 2007, portant homologation d'une modification du règlement général de l'Autorité des marchés financiers, NOR : ECOT0751503A (N° Lexbase : L5187HXE)

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par Jean-Baptiste Lenhof, Maître de conférences à l'ENS - Cachan Antenne de Bretagne, Membre du centre de droit financier de l'Université de Paris I (Panthéon-Sorbonne)

le 07 Octobre 2010

Le dernier volet de l'étude relative à la transposition de la Directive "MIF" (Directive 2004/39 du 21 avril 2004, concernant les marchés d'instruments financiers N° Lexbase : L2056DYS (1)), dans ses aspects relatifs aux infrastructures de marché, révèle l'importance des marchés non réglementés dans la nouvelle architecture des opérations boursières. Sous le titre II du règlement général (RG) de l'Autorité des marchés financiers (AMF) , intitulé "Systèmes multilatéraux de négociation", figurent, en effet, les nouveaux mécanismes qui garantissent l'encadrement juridique des marchés organisés. Pourtant, le règlement général ne se trouve pas, dans cette partie, modifié de fond en comble, car l'existence des marchés organisés étant prise en considération par le droit, ces derniers faisaient déjà l'objet de nombreuses dispositions. La nouveauté, issue de la révision de la structure des marchés, tient davantage à la matérialisation de progrès statutaires pour ces espaces de transactions : leur fonctionnement, dans une certaine mesure, devient comparable à celui des marchés réglementés dont ils empruntent certaines des caractéristiques. Dans le cadre limité de l'étude des nouvelles infrastructures, il apparaît ainsi qu'un régime principal se dessine, largement fondé sur l'encadrement juridique des systèmes multilatéraux de négociation de droit commun (I). En exergue, le RG encadre, également, mais avec moins d'intensité, des structures plus spécifiques (II), tels les systèmes multilatéraux de négociations organisés et les internalisateurs systématiques.

I - L'évolution du statut des systèmes multilatéraux de négociation

La structure du règlement général, s'agissant des systèmes multilatéraux de négociation de droit commun, s'articule autour de deux séries de dispositions : celles qui encadrent la gestion et le gestionnaire du système (A) et celles qui ont trait à son fonctionnement (B).

A - L'encadrement de la gestion des systèmes multilatéraux

Les systèmes multilatéraux de négociation ("MTF", selon l'acronyme anglo-saxon), désormais définis par l'article L. 424-1 du Code monétaire et financier (2) comme ceux qui permettent "la rencontre, en son [leur] sein et selon des règles non discrétionnaires, de multiples intérêts acheteurs et vendeurs exprimés par des tiers sur des instruments financiers", accèdent avec la Directive "MIF" à un statut suffisamment proche de celui des marchés réglementés pour que leur encadrement soit modifié en profondeur.

Aux termes de la Directive, en effet, la gestion d'un "MTF" devient un service d'investissement, ainsi qu'en dispose, maintenant, en droit interne, l'article L. 321-1 du Code monétaire et financier. Il se trouve, donc, soumis à un agrément pour les intermédiaires et à une autorisation pour les entreprises de marché, imposant une modification du RG afin de permettre la mise en oeuvre d'un contrôle adapté à ces activités. A ce titre, le contrôle est réalisé suivant deux procédures distinctes, selon que le gestionnaire d'un "MTF" est un prestataire de services d'investissement (PSI) ou une entreprise de marché.

Dans le premier cas, le contrôle s'exerce selon les modalités prévues au nouvel article 512-2 du règlement général : l'agrément du gestionnaire relève à la fois de la compétence du Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement (CECEI) et de l'AMF. L'autorité des marchés financiers, dans ce cadre, dispose, après examen du dossier, de la faculté de transmettre ses observations éventuelles au comité (3), qui décide, en dernier ressort, de l'attribution de l'agrément. La spécificité de l'activité exige, de surcroît, deux contrôles préalables : d'une part, la vérification de la communication aux autorités de tutelle de toutes les informations utiles sur les éléments spécifiques aux "MTF" pour permettre à l'AMF de s'assurer que les moyens prévus sont adaptés aux activités envisagées et, d'autre part, l'examen de la conformité des règles du système aux dispositions législatives et réglementaires qui leur sont applicables. Enfin, obligation est faite au prestataire de services d'investissement, après la délivrance de l'agrément, de publier les règles du système sur son site.

Dans le second cas, lorsque c'est une entreprise de marché qui gère le "MTF", l'agrément du comité n'est pas exigé et la procédure relève des articles 521-3 et suivants du RG. Ces derniers prévoient la communication, par l'entreprise de marché, à l'AMF, des règles du système, du programme d'activité, des derniers comptes annuels, ainsi que des éventuels accords de "sous-traitance" et des dispositifs destinés à garantir le respect des règles du système. Ce sont, ainsi, tous les mécanismes internes de fonctionnement du marché qui sont soumis au contrôle : les conditions d'admission des membres, les catégories d'instruments financiers visées, ainsi que les conditions de négociation des instruments financiers. L'agrément étant obtenu, l'entreprise de marché est, comme pour le cas précédent, tenue de publier les règles du système sur son site (4).

Reste qu'une des améliorations sensibles que l'on doit à la Directive est d'avoir prévu l'adoption de mécanismes permettant l'encadrement et la surveillance des modifications des règles. Ce point, déjà évoqué dans les parties précédentes de cette étude à propos, notamment, des marchés réglementés (5), permet à l'AMF de s'opposer à la mise en oeuvre des modifications des règles du système. Cette faculté, accordée à l'autorité par la loi (6) ressort des dispositions de l'article 521-8 du règlement général, qui prévoit que celle-ci dispose d'un délai d'un mois pour notifier son opposition et doit, par ailleurs, informer le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement de sa décision lorsque le gestionnaire est un PSI (7).

S'agissant, enfin, pour en terminer sur les principales dispositions relatives à l'activité des gestionnaires, du retrait de l'agrément, le RG reprend, dans son article 521-10, les dispositions de l'article L. 532-6 du Code monétaire et financier. En vertu de ces dernières, l'AMF dispose de la faculté de retirer l'agrément dans quatre cas, c'est-à-dire lorsque le gestionnaire :
- n'a pas fait usage de l'autorisation dans un délai de douze mois, y renonce expressément ou si le système multilatéral de négociation n'a pas fonctionné pendant les six derniers mois ;
- a obtenu l'autorisation par de fausses déclarations ou par tout autre moyen irrégulier ;
- ne remplit plus les conditions dans lesquelles l'autorisation a été accordée ;
- a gravement et systématiquement enfreint les dispositions qui lui sont applicables.

B - L'encadrement du fonctionnement des systèmes multilatéraux de négociation

Parallèlement à ce renforcement du contrôle préalable par l'agrément, les modifications du règlement général portent sur l'encadrement du fonctionnement interne des systèmes et, plus particulièrement, sur les principes de négociation qui constituent la substance du chapitre II du titre II du règlement. Sur ce point, il convient de rappeler que le fonctionnement des "MTF" constitue, désormais, en partie, une matière régie par la loi et non par le règlement (8). En conséquence, certaines dispositions anciennes du RG disparaissent, car elles figurent, désormais, dans le Code monétaire et financier, telle l'obligation qui figurait à l'article 522-2 ancien qui imposait que les règles du système devaient garantir une formation équitable du prix.

Demeure, pourtant; de la compétence de l'AMF la mission -particulièrement importante- de surveillance des opérateurs. S'agissant de celle-ci, l'article 522-1 du RG prévoit que, lorsque les règles du système prévoient la signature d'une convention d'admission ou d'adhésion entre le gestionnaire et les émetteurs, le gestionnaire met en place les dispositifs nécessaires lui permettant de s'assurer du respect de leurs obligations contractuelles. Ainsi, le RG impose aux gestionnaires des systèmes les mêmes contraintes que celles qui s'appliquent sur les marchés réglementés, avec cette particularité, également issue des marchés réglementés, que les relations entre les acteurs du marché sont de nature contractuelle. Pour autant, les sanctions ne sont pas celles que prévoit le droit commun des contrats, puisque le même article dispose que "la convention prévoit les conséquences en cas d'inexécution de ces obligations", ouvrant ainsi la voie à la constitution d'un corps de sanctions contractuelles de nature nouvelle et dont le régime nous semble encore indéterminé.

Le mouvement de déplacement de l'encadrement juridique des systèmes multilatéraux, du RG de l'AMF vers le Code monétaire et financier, est, par ailleurs, constitutif d'un renforcement des garanties offertes aux acteurs boursiers. Ceci explique que, le contrôle a priori étant renforcé, la surveillance en temps réel du fonctionnement des marchés par le biais d'obligations d'informations s'en trouve corrélativement allégée. L'article 522-3 du RG, qui prévoyait ainsi une obligation de communication continue au profit des participants aux systèmes quant aux intérêts à l'achat et à la vente et quant aux cours et à la quantité enregistrée pour chaque transaction, est donc abrogé. Le principe qui s'impose, désormais, est de laisser aux systèmes le soin de fixer le niveau d'information nécessaire pour que ses participants puissent négocier de façon ordonnée, la fixation des mécanismes d'information devant être déterminée par les règles du système.

Il est, en revanche, une autre matière relative à l'information des investisseurs qui se trouve plus largement encadrée par le règlement général : celle des obligations de transparence pré et post-négociation. Ces obligations, largement détaillées dans la première partie de cette étude, se trouvent, ici, transposées aux articles 522-2 à 522-5 nouveaux du RG. Ces articles sont structurés sur le fondement de la distinction imposée par l'article L. 424-7 du Code monétaire et financier, qui considère séparément l'information relative aux actions admises aux négociations sur un marché réglementé des autres instruments financiers, qu'ils soient, ou non, admis sur ces mêmes marchés.

Les articles 522-2 et 522-3 disposent, de la sorte (le premier pour les négociations, le second pour les transactions), que, pour les actions admises aux négociations sur un marché réglementé, le gestionnaire du système publie les informations sur les intérêts à l'achat et à la vente, dans les conditions et selon les modalités prévues par le Règlement (CE) n° 1287/2006 (Règlement n° 1287/2006 du 10 août 2006, portant mesures d'exécution de la Directive 2004/39 en ce qui concerne les obligations des entreprises d'investissement en matière d'enregistrement, le compte rendu des transactions, la transparence du marché, l'admission des instruments financiers à la négociation et la définition de termes aux fins de ladite Directive N° Lexbase : L7472HKX). Dans les deux cas, l'AMF peut exempter le gestionnaire de la production de cette information, et, notamment, pour les transactions portant sur des tailles élevées par rapport à la taille normale de marché, dans les conditions et selon les modalités prévues par le règlement précité. En tout état de cause, les conditions dans lesquelles cette publication est différée sont, alors, précisées dans les règles du système.

Là s'arrête, en l'espèce, la transposition de la Directive. En effet, cette dernière ne dispose qu'à propos des règles de transparence applicables aux actions admises à la négociation sur un marché réglementé, laissant les Etats membres libres de légiférer, ou non, sur les autres instruments financiers. Or, le législateur a choisi de permettre à l'AMF d'établir de telles règles, par voie réglementaire, d'abord, relativement à la transparence pré-négociation (C. mon. fin., art. L. 424-7) et, ensuite, quant à la transparence post-négociation (C. mon. fin., art. L. 424-8). Le règlement général dispose, donc, en l'espèce, dans ses articles 522-4 et 522-5 (9), s'agissant respectivement des obligations pré et post-négociation, que le gestionnaire du système rend publique une information sur les intérêts à l'achat et à la vente pertinente au regard des caractéristiques de l'instrument financier négocié. Ce terme de "pertinent", sur l'analyse duquel nous ne reviendrons pas (10), devra, sans doute, faire ultérieurement l'objet de précisions supplémentaires de la part de l'AMF.

Il reste que l'Autorité des marchés financiers ne se trouve pas, en principe, désarmée au plan juridique au cas où le gestionnaire de système en viendrait à interpréter de façon restrictive les obligations qui lui incombent. L'encadrement des systèmes passe, en effet, comme pour les marchés réglementés, par la mise en place de règles de bonne conduite, la réalisation d'opérations étant par ailleurs subordonnée, pour les personnes physiques, à l'obtention d'une carte professionnelle (RG AMF, art. 523-1 et s.).

C'est ainsi que l'article 522-8 du règlement général renvoie expressément à l'exigence d'une information qualitativement adaptée. Il prévoit, en effet, que le gestionnaire du système fournit, "s'il y a lieu, des informations suffisantes au public ou s'assure qu'il existe un accès à de telles informations pour permettre aux utilisateurs de se forger un jugement en matière d'investissement, compte tenu à la fois de la nature des utilisateurs et des types d'instruments financiers négociés". Cette contrainte, directement issue de la Directive, et non transposée par le législateur, se trouve, par ailleurs, renforcée par celle qui figure à l'article 522-9 du RG, qui dispose que le gestionnaire établit et maintient une politique de gestion des conflits d'intérêts spécifique à l'activité de gestion du système.

On renverra, pour mémoire, afin d'achever ce volet dédié à l'encadrement des systèmes, à la matérialisation du mécanisme d'adhésion aux marchés dans le règlement général puisque, en application de l'article L. 424-6 du Code monétaire et financier (11), l'AMF a décidé de recourir au principe de la conclusion d'une convention d'admission passée entre le gestionnaire et chaque membre du marché. Ce principe se trouve matérialisé à l'article 523-4 du RG (12), qui dispose que cette convention prévoit deux séries d'engagements. Elle établit, d'une part, l'obligation pour le membre de respecter en permanence les règles du système et leurs dispositions d'application, de répondre à toute demande d'information du gestionnaire, de se soumettre aux contrôles diligentés par ce dernier et, à la demande du gestionnaire, de régulariser sa situation. Elle stipule, d'autre part, l'engagement du gestionnaire de prendre, en cas de mauvaise exécution ou d'inexécution de la convention d'admission, des mesures qui peuvent aller jusqu'à la suspension du membre ou la résiliation de la convention.

II - L'encadrement des structures spécifiques

C'est à partir de ce régime de base que d'autres dispositions vont venir encadrer les structures boursières spécifiques que sont les systèmes multilatéraux de négociations organisés (A) et les internalisateurs systématiques (B).

A - L'encadrement spécifique des systèmes multilatéraux de négociations organisés

L'existence de systèmes multilatéraux de négociations organisés n'est pas véritablement le fruit de la transposition de la Directive, puisque cette catégorie de systèmes était déjà régie par l'article 525-1 de l'ancien RG. Ces derniers, après la réforme, font simplement l'objet d'une définition plus précise qu'auparavant et se voient adjoindre le terme d'"organisés" pour les distinguer des systèmes multilatéraux stricto sensu.

Selon les nouvelles dispositions du règlement général sont, donc, des systèmes multilatéraux de négociation organisés les systèmes multilatéraux de négociation :
- dont les règles d'organisation sont approuvées par l'AMF à leur demande ;
- qui se soumettent aux dispositions du livre VI relatives aux abus de marché ;
- qui prévoient un mécanisme de garantie de cours lorsque les instruments financiers admis sur ces systèmes sont des actions ou des instruments financiers donnant directement ou indirectement accès au capital.

Pour les autres dispositions, l'article 525-2 du RG renvoie simplement au régime de droit commun des systèmes, dont les dispositions communes s'appliquent aux systèmes multilatéraux de négociation organisés. On peut donc voir, dans les systèmes organisés, des structures très proches de celles des marchés réglementés, dans le sens où sont institués des mécanismes protecteurs des investisseurs, destinés à les protéger contre les effets néfastes des prises de participation.

Ainsi, l'article 525-6 du RG prévoit-il que les règles des systèmes multilatéraux de négociation organisés comportent des procédures à mettre en oeuvre en cas de prise de contrôle des émetteurs. En outre, la convention d'adhésion au système doit définir, selon l'article 525-7 du règlement général, les obligations relatives aux procédures à mettre en oeuvre en cas de prise de contrôle de l'émetteur.

B - L'encadrement des internalisateurs systématiques

Encadrée par les dispositions du titre III du nouveau RG, la définition de l'activité d'internalisateur -sur laquelle nous ne reviendrons pas (13)- se trouve, une nouvelle fois, proposée, dans les mêmes termes que ceux de la Directive et du Code monétaire et financier, mais enrichie en l'occurrence de deux mentions. D'une part, l'article 531-1 du RG, qui propose la définition de l'internalisateur, impose à ce dernier, au surplus, d'informer l'AMF dès qu'il se livre à cette activité sur une action déterminée, en précisant l'identifiant du ou des instruments financiers concernés. La raison de l'adjonction de cette mention tient à la nécessité devant laquelle se trouve l'AMF, en application de l'article 21 du Règlement européen n° 1287/2006, d'établir la liste des internalisateurs systématiques, aux fins de transmission au CESR pour publication. Cette même contrainte a imposé l'ajout, d'autre part, de la mention, toujours dans l'article 531-1, de l'obligation d'informer l'AMF de la cessation de son activité d'internalisateur.

Il apparaît, de la sorte, que l'encadrement de cette activité demeure, pour le moins, limité, l'information de l'AMF n'étant requise qu'à des fins statistiques. Cet aspect diffus du contrôle s'accroît d'autant plus que, conformément aux prescriptions de la Directive, l'article 531-2 prévoit que les règles relatives à la publication des prix ne s'appliquent pas aux internalisateurs qui n'effectuent que des transactions supérieures à la taille standard de marché, définie à l'article 23 du Règlement n ° 1287/2006 du 10 août 2006.

Cette obligation figure dans les dispositions du chapitre II du titre III qui impose, ainsi, à l'internalisateur de publier, en vertu de l'article 532-2, "son ou ses prix et volumes de façon régulière et continue pendant les heures normales de négociation". Il est prévu, toutefois, aux termes du même texte, la faculté d'actualiser son ou ses prix et quantités proposés à tout moment et de retirer son ou ses prix et quantités proposés, en cas de conditions de marché exceptionnelles. C'est, en revanche, pour tous les internalisateurs, même ceux ne réalisant que des transactions supérieures à la taille standard de marché, que s'imposent les dispositions de la section 2, relatives aux modalités d'établissement de prix. Cette section comprend, d'ailleurs, un seul article (532-3), qui dispose qu' "un internalisateur systématique peut décider de la taille ou des tailles de transaction pour lesquelles il établit un prix. Le ou les prix affichés par les internalisateurs systématiques reflètent les conditions de marché prévalant pour cette action déterminée conformément à l'article 24 du Règlement (CE) n° 1287/2006 du 10 août 2006".

Ainsi, les principes d'encadrement sont réduits à la contrainte de l'affichage systématique, ainsi que la publication des transactions, prévue à l'article 534-1, consacrant le statut particulier de ces structures, sur lesquelles la logique de protection de l'investisseur est différente de celle qui préside au fonctionnement des marchés financiers traditionnels. En définitive, ce sont surtout les modalités d'exécution des ordres, telles qu'elles ressortent du chapitre III, qui ont fait l'objet du plus fort encadrement réglementaire, encore que la substance dudit chapitre fasse peser bien peu de contraintes sur les internalisateurs.

S'agissant des investisseurs particuliers, le règlement général leur impose, en effet, aux termes de l'article 533-1, d'exécuter les ordres aux prix affichés au moment de leur réception, mais, pour les professionnels, l'article 533-2 prévoit de nombreuses exceptions. C'est ainsi que, pour ces professionnels, il sera possible d'exécuter les ordres à un meilleur prix que celui affiché, à la condition que l'usage d'une telle dérogation soit justifié, que le prix s'inscrive dans une fourchette rendue publique et proche des conditions du marché et que l'ordre soit d'une taille supérieure à la taille normalement demandée par un client non professionnel, telle que fixée à l'article 26 du Règlement n° 1287/2006 du 10 août 2006. En outre, toujours pour les clients professionnels, l'ordre pourra être exécuté à un prix différent du prix affiché dans deux hypothèses : d'abord, lorsqu'il porte sur un panier d'instruments financiers et, conformément à l'article 25 du Règlement n° 1287/ 2006 du 10 août 2006, ne représente qu'une seule transaction ; ensuite, lorsque l'ordre n'est ni un ordre visant à l'exécution d'une transaction sur actions au prix prévalant sur le marché ni un ordre à cours limité, conformément à l'article 25 susvisé.

Cette différence de traitement entre les clients professionnels et les particuliers traduit le souci de protection des petits investisseurs mais permet, paradoxalement, de souligner la latitude dont disposent les internalisateurs vis-à-vis de leurs clients ou de leurs ordres importants. Semblablement, l'aménagement des règles d'établissement de prix permet, en vertu de l'article 533-3, à l'internalisateur d'exécuter un ordre, même si ce dernier ne répond pas aux critères de taille qu'il avait préalablement déterminés (14). Le RG ouvre, d'ailleurs, la voie à la spécialisation des internalisateurs dans le traitement des ordres des professionnels, puisqu'il prévoit, suivant en cela la Directive, que soit définie une "politique commerciale" lui permettant de sélectionner, selon les termes de l'article 531-3, "les clients avec lesquels il négocie", à la condition de disposer, pour ce faire, de règles claires, sa politique étant définie, selon le texte, "de façon objective et non discriminatoire".

En conclusion, la transposition de la Directive, alors qu'elle était destinée à parachever l'évolution des marchés européens, apparaît ouvrir de nombreuses perspectives et non constituer le seul achèvement d'un cycle de réformes. Le bouleversement des structures de marché, en particulier, ouvre de nouvelles perspectives en matière d'innovation, accroissant potentiellement l'offre de nouvelles catégories de services aux investisseurs.


(1) J.-B. Lenhof, L'ordonnance du 12 avril 2007 : nouvelle articulation des marchés financiers, Lexbase Hebdo n° 259 du 10 mai 2007 - édition privée générale (N° Lexbase : N0514BBN) ; L'ordonnance du 12 avril 2007 : les acteurs des marchés, Lexbase Hebdo n° 264 du 14 juin 2007 - édition privée générale (N° Lexbase : N3878BBA) ; et Transposition de la Directive concernant les marchés d'instruments financiers et la réforme du règlement général de l'Autorité des marchés financiers : les marchés réglementés, Lexbase Hebdo n° 269 du 19 juillet 2007 - édition privée générale (N° Lexbase : N9314BBL).
(2) C. mon. fin., art. L. 424-1 (ordonnance nº 2007-544 du 12 avril 2007, art. 3 N° Lexbase : L9551HUB, en vigueur le 1er novembre 2007 N° Lexbase : L9551HUB) : "un système multilatéral de négociation est un système qui, sans avoir la qualité de marché réglementé, assure la rencontre, en son sein et selon des règles non discrétionnaires, de multiples intérêts acheteurs et vendeurs exprimés par des tiers sur des instruments financiers, de manière à conclure des transactions sur ces instruments. Il peut être géré par un prestataire de services d'investissement agréé pour fournir le service d'investissement mentionné au 8 de l'article L. 321-1 ou, dans les conditions fixées par le règlement général de l'Autorité des marchés financiers, par une entreprise de marché autorisée à cet effet par cette autorité. Le III de l'article L. 421-11 est applicable aux entreprises de marché gérant un système multilatéral de négociation".
(3) C. mon. fin., art. R. 532-1.
(4) RG AMF, art. 521-3 : "en vue d'être autorisée à gérer un système multilatéral de négociation, l'entreprise de marché transmet à l'AMF un dossier comprenant les éléments suivants :
1° Les règles de fonctionnement du système mentionnées à l'article 521-4 ;
2° Un programme d'activité, mentionnant notamment le type d'opérations envisagées par l'entreprise de marché, la structure de son organisation ainsi que, au regard de l'activité envisagée, les moyens humains et matériels mis en oeuvre, notamment les caractéristiques du système de négociation, du dispositif de règlement et de livraison des instruments financiers qui y seront négociés et, le cas échéant, des mécanismes de compensation des transactions effectuées au sein du système ;
3° Les derniers comptes annuels, s'ils existent, et les moyens financiers dont dispose l'entreprise de marché au regard de l'activité envisagée ;
4° Le cas échéant, les accords de sous-traitance portant sur la gestion du système ;
5° Le dispositif mis en oeuvre pour assurer le contrôle du respect des règles du système par ses membres
".
RG AMF, art. 521-4 : "Les règles de fonctionnement du système fixent :
1° Les conditions d'admission des membres. Lorsqu'un membre du marché est établi en dehors d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen, son admission est subordonnée à l'existence d'un accord de coopération et d'échange d'informations entre l'AMF et l'autorité de contrôle compétente de son pays d'origine ;
2° La ou les catégories d'instruments financiers négociables sur le système ;
3° Les conditions devant être réunies par les émetteurs préalablement à la négociation de leurs instruments financiers dans le cadre du système, et, le cas échéant, les diligences qui leur incombent ;
4° Les conditions de négociation des instruments financiers sur le système, notamment :
a) Les modalités de rencontre des intérêts à l'achat et à la vente et les dates et heures d'ouverture des négociations ;
b) Les informations communiquées aux membres ;
c) Les informations rendues publiques concernant les intérêts à l'achat et à la vente ainsi que les transactions réalisées ;
d) Les procédures de suspension des négociations ;
e) Les délais et conditions de dénouement des transactions ;
5° Le cas échéant, les obligations applicables en matière d'information financière périodique et permanente des émetteurs dont les instruments financiers sont négociables sur le système ;
6° Les responsabilités encourues par les membres en cas de non-respect des règles du système
".
RG AMF, art. 521-5 : "lorsque les personnes dirigeant un marché réglementé sont les mêmes que celles gérant le système multilatéral de négociation pour lequel l'autorisation est demandée, ces personnes sont réputées jouir d'une honorabilité et d'une expérience suffisantes pour garantir la gestion saine et prudente du système multilatéral de négociation".
RG AMF, art. 521-6 : "l'AMF vérifie que les documents ou informations mentionnés aux articles 521-3 et 521-4 sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires applicables, notamment que l'entreprise de marché dispose des moyens et d'une organisation adaptés au regard de l'activité envisagée. L'AMF sollicite l'avis de la Commission bancaire sur l'organisation, les moyens humains, techniques et matériels ainsi que les ressources financières dont dispose l'entreprise de marché. L'AMF peut demander au gestionnaire du syst,ème toutes informations complémentaires qu'elle juge utiles. Elle peut exiger les modifications des règles ou les adaptations des moyens nécessaires pour assurer la conformité du système aux dispositions du présent titre. L'AMF se prononce sur la demande d'autorisation dans un délai de trois mois à compter de la réception du dossier ou, le cas échéant, des informations complémentaires qu'elle a demandées".
RG AMF, art. 521-7 : "après la délivrance de l'autorisation, l'entreprise de marché publie les règles du système sur son site. Elle laisse également la possibilité à toute personne de consulter, à son siège social, les règles du système et d'en prendre ou de s'en faire adresser copie à ses frais".
(5) J.-B. Lenhof, L'ordonnance du 12 avril 2007 : nouvelle articulation des marchés financiers et Transposition de la Directive concernant les marchés d'instruments financiers et la réforme du règlement général de l'Autorité des marchés financiers : les marchés réglementés, préc..
(6) C. mon. fin., art. L. 421-2, al. 2.
(7) RG AMF, art. 521-8 : "le gestionnaire du système transmet à l'AMF les modifications apportées aux règles du système au moins un mois avant la date prévue pour leur mise en application.
Lorsqu'elle considère que ces modifications ne sont pas compatibles avec le statut de système multilatéral de négociation, l'AMF s'oppose à leur mise en application dans un délai d'un mois. L'AMF informe le Comité des établissements de crédit et des entreprises d'investissement de sa décision d'opposition, lorsque le gestionnaire du système est un prestataire de services d'investissement
.
(8) Cf. J.-B. Lenhof, L'ordonnance du 12 avril 2007 : nouvelle articulation des marchés financiers, et L'ordonnance du 12 avril 2007 : les acteurs des marchés, préc..
(9) RG AMF, art. 522-4 : "pour les instruments financiers autres que les actions admises à la négociation sur un marché réglementé, négociés dans le cadre du système, le gestionnaire du système rend publique une information sur les intérêts à l'achat et à la vente pertinent au regard des caractéristiques de l'instrument financier négocié, en particulier son admission ou non à la négociation sur un marché réglementé, son mode de négociation sur le système, le nombre et la nature des membres du système et des investisseurs finaux détenteurs de l'instrument financier".
RG AMF, art. 522-5 : "pour les transactions portant sur les instruments financiers autres que les actions admises à la négociation sur un marché réglementé, négociés dans le cadre du système, le gestionnaire du système rend publique une information pertinente au regard des caractéristiques de l'instrument financier négocié, en particulier son admission ou non à la négociation sur un marché réglementé, son mode de négociation sur le système, le nombre et la nature des membres du système et des investisseurs finaux détenteurs de l'instrument financier".
(10) Cf. J.-B. Lenhof, L'ordonnance du 12 avril 2007 : nouvelle articulation des marchés financiers, préc..
(11) C. mon. fin., art. L. 424-6 : "les règles du système multilatéral de négociation fixent les conditions d'admission des membres du système, de façon transparente et sur la base de critères objectifs. Les dispositions des deuxième à sixième alinéas de l'article L. 421-17 sont applicables aux membres des systèmes multilatéraux de négociation. A la demande de l'Autorité des marchés financiers, la personne qui gère un système multilatéral de négociation lui communique la liste des membres de celui-ci".
(12) RG AMF, art 523-4 : "Le gestionnaire du système veille au respect des règles du système par ses membres. Il met en place à cet effet des moyens et des procédures appropriés. Il conclut avec chacun des membres une convention d'admission prévoyant notamment :
1° L'obligation pour le membre de respecter en permanence les règles du système et leurs dispositions d'application, de répondre à toute demande d'information du gestionnaire, de se soumettre aux contrôles diligentés par ce dernier et, à la demande du gestionnaire, de régulariser sa situation ;
2° L'engagement du gestionnaire de prendre, en cas de mauvaise exécution ou d'inexécution de la convention d'admission, des mesures qui peuvent aller jusqu'à la suspension du membre ou la résiliation de la convention
".
(13) Cf. J.-B. Lenhof, L'ordonnance du 12 avril 2007 : les acteurs des marchés, préc..
(14) RG AMF, art. 533-3 : "I - Lorsqu'un internalisateur systématique qui n'établit un prix que pour une seule taille d'ordre ou dont la cotation la plus élevée est inférieure à la taille standard de marché reçoit un ordre dont la taille est supérieure à la taille pour laquelle il a établi son prix mais est inférieure à la taille standard de marché, il peut exécuter la partie de l'ordre qui dépasse la taille pour laquelle il a établi son prix, dans la mesure où il l'exécute au prix établi, sauf exceptions prévues à l'article 533-2.
Pour une action déterminée, chaque cotation s'entend d'un ou de plusieurs prix fermes acheteurs et/ou vendeurs, et d'une taille ou de plusieurs tailles inférieures ou égales à la taille standard de marché pour la catégorie d'actions à laquelle l'action appartient.
II - Lorsqu'un internalisateur systématique établit un prix pour différentes tailles d'ordres et reçoit un ordre qui se situe entre ces tailles, il l'exécute à l'un des prix établis, conformément aux dispositions de l'article L. 533-19 du Code monétaire et financier sauf exceptions prévues à l'article 533-2
".
RG AMF, art. 533-4 : "Afin de limiter le risque d'être exposé à des transactions multiples avec un même client, un internalisateur systématique peut restreindre, d'une manière non discriminatoire, le nombre de transactions du même client qu'il s'engage à effectuer aux conditions publiées, lorsque, conformément aux conditions mentionnées à l'article 25 du Règlement (CE) n° 1287 /2006 du 10 août 2006, il ne peut les exécuter sans s'exposer à un risque excessif. Un internalisateur systématique peut restreindre d'une manière non discriminatoire et conformément aux dispositions de l'article L. 533-19 du Code monétaire et financier, le nombre total ou le montant des transactions simultanées avec des clients différents lorsque ce nombre ou ce montant dépasse considérablement la norme prévue à l'article 24 du règlement susvisé".

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