Réf. : Ordonnance n° 2005-731 du 30 juin 2005, relative à la simplification et à l'adaptation du droit dans les domaines de la formation professionnelle et de l'emploi (N° Lexbase : L6339G9N)
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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Haute Alsace
le 07 Octobre 2010
L'ordonnance n° 2005-731 du 30 juin 2005 (N° Lexbase : L6339G9N) s'inscrit dans la continuité de la loi du 4 mai 2004 (loi n° 2004-391 du 4 mai 2004, relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social N° Lexbase : L1877DY8), en la complétant (M.A. Rotschild-Souriac, L'articulation des niveaux de la négociation, Dr. Soc. 2004, p. 579 ; J.E. Ray, Les curieux accords dits "majoritaires" de la loi du 4 mai 2004, Dr. Soc. 2004, p. 590 ; P.H. Antonmattéi, La consécration législative de la convention et de l'accord de groupe : satisfaction et interrogations, Dr. Soc. 2004, p. 601 ; G. Borenfreund, La négociation collective dans les entreprises dépourvues de délégués syndicaux, Dr. Soc. 2004, p. 606).
1.1. Achat des prestations de formation
Le pouvoir réglementaire, par l'ordonnance du 30 juin 2005, modifie l'article L. 920-1 du Code du travail (N° Lexbase : L4772DZR). On sait que les entreprises, les organismes paritaires agréés pour collecter et gérer les fonds de la formation professionnelle et les pouvoirs publics acquièrent, pour les salariés et les demandeurs d'emplois, des actions de formation auprès de prestataires sur la base d'un contrat dénommé "convention de formation" (C. trav., art. L. 920-1), conclu par les parties en amont de toute réalisation.
Or, la réalité des pratiques d'acquisition des prestations de formation ne correspond plus à ce recours aux conventions de formation. En effet, les entreprises achètent des actions modularisées dont les durées sont courtes, pour répondre aux besoins d'adaptation. Le recours à l'émission de bons de commande ou à des fiches d'inscription à un stage et à des factures acquittées est devenu le principe, et la convention formalisée, l'exception.
C'est pourquoi, dans un souci de simplification des procédures et d'adaptation du droit aux pratiques du marché de la formation, l'ordonnance du 30 juin 2005 a modifié l'article L. 920-1 du Code du travail, en prévoyant la possibilité de recourir aux bons de commande et factures comme pièces susceptibles de formaliser l'achat entre les entreprises et les organismes de formation. Ce procédé a l'avantage de permettre des achats rapides, ponctuels et renouvelables et d'éviter ainsi la lourdeur qu'impliquent nécessairement la rédaction puis la conclusion de conventions.
Selon l'ordonnance du 30 juin 2005, réécrivant l'article L. 920-1 du Code du travail, les actions de formation professionnelle, mentionnées à l'article L. 900-2 (N° Lexbase : L4630DZI), doivent être réalisées conformément à un programme préétabli qui, en fonction d'objectifs déterminés, précise les moyens pédagogiques, techniques et d'encadrement mis en oeuvre ainsi que les moyens permettant de suivre son exécution et d'en apprécier les résultats.
Les conventions et, en l'absence de convention, les bons de commande ou factures, établis pour la réalisation de ces actions, précisent leur intitulé, leur nature, leur durée, leurs effectifs, les modalités de leur déroulement et de sanction de la formation ainsi que leur prix et les contributions financières éventuelles de personnes publiques.
1.2. Fonctionnement des prestataires de formation
Le pouvoir réglementaire a réécrit l`article L. 920-6 du Code du travail (N° Lexbase : L4780DZ3) dont l'objet est de soumettre la publicité à laquelle peuvent recourir les prestataires de formation à diverses restrictions : indication obligatoire des prérequis pour suivre une formation, de la nature de celle-ci, de sa durée et de sa sanction. La publicité écrite doit comporter la mention des moyens pédagogiques, des titres et qualités des formateurs ainsi que les tarifs applicables, les modalités de règlement et les conditions financières en cas d'abandon.
Or, la surabondance de ces mentions rend très difficile toute promotion conforme de l'offre de formation. C'est pourquoi, l'ordonnance du 30 juin 2005 abroge les dispositions jusque-là en vigueur, pour instituer une protection spécifique adaptée et aisément applicable aux organismes de formation. Désormais, lorsque la publicité réalisée par un organisme de formation fait mention de la déclaration prévue à l'article L. 920-4 (N° Lexbase : L4775DZU), elle doit l'être sous la seule forme "Enregistrée sous le numéro...".
Mais cet enregistrement ne vaut pas agrément de l'Etat. La publicité ne doit pas faire état du caractère imputable des dépenses afférentes aux actions dont elle assure la promotion sur l'obligation de participer au financement de la formation professionnelle, édictée par l'article L. 950-1 (N° Lexbase : L4751DZY). La publicité ne doit comporter aucune mention de nature à induire en erreur sur les conditions d'accès aux formations proposées, leurs contenus, leurs sanctions ou leurs modalités de financement.
Enfin, l'article L. 920-7 (N° Lexbase : L4781DZ4) interdisait le démarchage pour le compte d'un dispensateur de formation lorsqu'il est rémunéré par des commissions. Or, 42 % des organismes de formation sont des personnes morales à but lucratif (SA, SARL). Le démarchage est, selon le pouvoir réglementaire, un facteur de développement intégré à la politique commerciale de ces structures. Son interdiction paraît aujourd'hui antinomique avec les règles élémentaires qui gouvernent le commerce. Aussi, le pouvoir réglementaire a abrogé l'article L. 920-7 du Code du travail (N° Lexbase : L4781DZ4).
1.3. Contrôle et sanctions
La loi n° 2004-391 du 4 mai 2004 relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social avait modifié en profondeur le régime du contrôle des formations dispensées aux salariés. L'ordonnance du 30 juin 2005 entend adapter et harmoniser les procédures de contrôle et les sanctions applicables en matière de formation professionnelle.
Ainsi, la loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale (N° Lexbase : L1304AW9) a introduit les actions permettant de faire valider les acquis de l'expérience (VAE, dans le champ de la formation professionnelle continue, C. trav., art. L. 900-1, dernier alinéa N° Lexbase : L4629DZH). En conséquence, le champ du contrôle a été modifié de telle façon que les organismes qui assistent les candidats à la VAE soient soumis au contrôle de l'Etat . Le vocable "assistent" ne couvre pas toute l'amplitude de l'action de validation des acquis de l'expérience, dans la mesure où celle-ci est constituée d'un accompagnement et de l'acte de validation proprement dit. Cette ambiguïté est levée par une modification technique. L'article L. 991-4 est ainsi modifié en profondeur par l'ordonnance du 30 juin 2005.
L'article L. 991-2 du Code du travail (N° Lexbase : L4816DZE) confère à l'administration la possibilité de cibler son contrôle sur l'exécution d'une convention passée par l'Etat avec un organisme dispensateur de formation et en prévoit la sanction et la résiliation. Ce type de contrôle débouche souvent sur une extension du contrôle à toute l'activité de l'organisme. De fait, le contrôle de convention se confond avec le contrôle d'activité prévu à l'article L. 991-1 .
Par mesure de simplification des procédures, pour améliorer la célérité de l'action publique et alléger les contraintes que font peser les opérations de contrôle sur les entreprises, les organismes collecteurs et les dispensateurs de formation (mobilisation sur plusieurs jours de dirigeants, de responsables de formation, de comptables, etc.), l'ordonnance du 30 juin 2005 (art. 3-2°) introduit la faculté de mener des contrôles ciblés portant sur une partie d'activité, une catégorie de dépenses, un type particulier d'actions.
2. Politique contractuelle de l'Etat
2.1. Politique contractuelle de l`Etat, au titre du livre III (Emploi)
La politique contractuelle entre l'Etat et les partenaires sociaux repose sur des textes de 1984 qui décrivent les engagements de développement de la formation comme une possibilité, pour les entreprises, de s'acquitter de tout ou partie de l'obligation légale de formation des salariés.
Or, ces dispositifs ont sensiblement évolué, au cours des années, vers la contractualisation de politiques de développement des compétences avec les branches professionnelles et les entreprises, dans une logique d'anticipation et de prévention des mutations économiques. Ils contribuent aux politiques de l'emploi et se situent dans le champ des responsabilités de l'Etat en visant l'anticipation, la prévention des crises et le renforcement du dialogue social.
L'ordonnance du 30 juin 2005 entend clarifier cette politique contractuelle et définir les engagements de développement de l'emploi et des compétences qui se substitueront aux actuels engagements de développement de la formation et contrats d'études prospectives. Ces dispositifs de la politique de l'emploi constituent à la fois le cadre d'une approche globale du dialogue avec les partenaires sociaux en matière d'anticipation et le point d'articulation avec les interventions de l'Etat en matière d'anticipation et d'accompagnement des mutations économiques, sociales et démographiques. C'est pourquoi, assez logiquement, les dispositions relatives à la politique contractuelle entre l'Etat et les partenaires sociaux sont ainsi transférées du livre IX (Formation professionnelle) du Code du travail au livre III (Emploi).
En application de l'ordonnance du 30 juin 2005, l'Etat peut apporter une aide technique et financière à des organisations professionnelles de branche ou à des organisations interprofessionnelles par le moyen de conventions, dénommées "engagements de développement de l'emploi et des compétences", qui ont pour objet d'anticiper et d'accompagner l'évolution des emplois et des qualifications des actifs occupés. Ces engagements sont annuels ou pluriannuels.
Ils déterminent :
- le champ de l'accord (branches professionnelles ou territoires) ;
- son objet (étude prospective, diagnostic sectoriel ou territorial, actions de développement des compétences) ;
- la durée d'application de l'accord ;
- les objectifs à atteindre au terme de l'exécution de l'accord au regard, notamment, de la prévention des risques d'inadaptation à l'emploi et du maintien dans l'emploi des salariés en seconde partie de carrière ;
- les moyens techniques et financiers de mise en oeuvre ;
- les modalités de suivi et de contrôle en cours d'exécution et au terme de l'engagement .
La loi du 4 mai 2004 avait inséré, au chapitre II du titre II du livre III du Code du travail, une section 2 ter, intitulée "Aides de l'Etat au développement de l'emploi et des compétences". Afin d'assurer le remplacement d'un ou plusieurs salariés en formation, dans les entreprises de moins de 50 salariés, le législateur, dans le cadre de la loi du 4 mai 2004, a prévu que l'Etat accorde aux employeurs une aide calculée sur la base du Smic pour chaque personne recrutée dans ce but ou mise à leur disposition par des entreprises de travail temporaire ou des groupements d'employeurs (définis au chapitre VII du titre II du livre Ier) (C. trav., art. L. 322-9 N° Lexbase : L4675DZ8).
Ce dispositif s'inspire des conventions de coopération, instituées par accord du 8 juin 1994 (loi n° 95-116, 4 février 1995 portant diverses dispositions d'ordre social, art. 92 N° Lexbase : L3000AIX). Ces conventions de coopération étaient conclues localement entre organisateurs d'actions de reclassement (employeurs, groupements d'employeurs, organismes...) et Assédic, services de l'ANPE et DDTEFP. L'adhésion, une fois validée par l'Assédic, permettait de leur verser une aide payée mensuellement. L'adhésion est l'acte par lequel un employeur accepte d'embaucher un allocataire du régime d'assurance chômage pour aider à son reclassement. L'employeur adhérent s'engageait à recruter un allocataire par contrat de travail à durée indéterminée ou à durée déterminée (C. trav., art. L. 122-2-1 N° Lexbase : L5458AC7) et devait avoir la volonté de maintenir, dans la mesure du possible, l'emploi de la personne recrutée au-delà de la période couverte par l'aide au reclassement. Les sommes perçues par le salarié pendant la période de reclassement ne pouvaient être inférieures à l'allocation nette qu'il aurait perçue s'il avait continué à être indemnisé par le régime d'assurance chômage, et même si l'engagement avait lieu à temps partiel. Seuls les allocataires admis à l'allocation unique dégressive depuis 8 mois et indemnisés au moment de leur embauche par l'assurance chômage pouvaient être embauchés dans le cadre d'une convention de coopération.
Les conventions de coopération sont devenues, depuis la convention d'assurance chômage du 1er janvier 2001, l'aide dégressive à l'employeur.
2.2. Politique contractuelle de l`Etat, au titre du livre IX (Formation professionnelle)
L'aide financière de l'Etat porte sur les formations dispensées au titre du Livre IX du Code du travail. Cette contribution financière de l'Etat porte sur les dépenses de fonctionnement des stages ainsi que sur les dépenses de construction ou d'équipement des centres. Le pouvoir réglementaire passe, en application de l'article L. 920-1 (N° Lexbase : L4772DZR), des conventions, qui tiennent compte des publics accueillis, des objectifs poursuivis et des résultats obtenus, notamment en matière d'insertion professionnelle.
Lorsque ces conventions concernent des centres de formation gérés par une ou plusieurs entreprises, elles font, avant leur conclusion, l'objet d'une consultation du (ou des) comité(s) d'entreprise. L'Etat participe, en outre, aux dépenses de rémunération des stagiaires de la formation professionnelle (C. trav., art. L. 941-1 N° Lexbase : L1726GUH ; loi n° 91-1 du 3 janvier 1991, tendant au développement de l'emploi par la formation dans les entreprises, l'aide à l'insertion sociale et professionnelle et l'aménagement du temps de travail, pour l'application du troisième plan pour l'emploi, art. 4 I N° Lexbase : L0093BIB ; loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle, art. 73 N° Lexbase : L7486AI4 ; loi n° 2004-391 du 4 mai 2004, relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au dialogue social, art. 1 N° Lexbase : L1877DY8 ; loi n° 2004-809 du 13 août 2004, relative aux libertés et responsabilités locales, art. 8 IV, art. 14 II N° Lexbase : L0835GT4).
Ces dispositions n'ont pas été modifiées par l'ordonnance du 30 juin 2005.
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