La délégation générale en matière d'hygiène et de sécurité du capitaine d'un navire ne décharge pas l'armateur de la responsabilité pénale qu'il encourt personnellement pour des actes et abstentions fautifs lui étant imputables et entretenant un lien certain de causalité avec le dommage. Telle est la solution dégagée par la Chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt rendu le 8 septembre 2015 (Cass. crim., 8 septembre 2015, n° 13-87.410, F-P+B
N° Lexbase : A9445NN7).
En l'espèce, dans la nuit du 19 novembre 2010, un navire de pêche ayant un équipage de quatre hommes a rompu, sous l'effet d'une mer forte et d'un vent violent, sa ligne de mouillage alors qu'il était à l'ancre et s'est échoué sur les brisants de la côte. Deux marins ont trouvé la mort au cours de ce naufrage. M. X, en sa qualité d'armateur, et M. Y, en sa qualité de capitaine du navire, ont été poursuivis du chef, notamment, d'homicides involontaires pour avoir omis de faire assurer une veille lors des quarts au mouillage et pour avoir omis de vérifier le bon fonctionnement des alarmes sonores ou pour ne pas les avoir activées. M. Y a été déclaré coupable et M. X a été relaxé de ce chef au motif que l'armateur ne pouvait se voir reprocher les manquements commis par le capitaine, seul responsable de la sécurité à bord par application de l'article 28 du Code disciplinaire et pénal de la marine marchande.
La cour d'appel infirme le jugement en ce qui concerne M. X et déclare celui-ci coupable d'homicides involontaires, jugeant que cet accident ne se serait pas produit si, en sa qualité d'employeur, il avait rappelé à M. Y par des consignes spécifiques, l'obligation impérative de veille en passerelle lors du mouillage à laquelle est tenue tout marin et s'il s'était enquis, en considération des moyens financiers dont il disposait, du remplacement et de la qualité de la ligne de mouillage du navire qu'il exploitait. Monsieur X s'est alors pourvu en cassation.
En énonçant la règle susvisée, la Cour de cassation juge que, procédant de son appréciation souveraine, la cour d'appel, à qui il appartenait de rechercher toute autre faute d'imprudence ou de négligence entrant dans les prévisions de l'article 221-6 du Code pénal (
N° Lexbase : L3402IQ3), a, par des motifs exempts d'insuffisance comme de contradiction, dont il résulte que le prévenu a commis une faute caractérisée et qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer, justifié sa décision (cf. l’Ouvrage "Droit du travail" N° Lexbase : E2838ETB).
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