L'usage d'une force excessive par des gardiens de prison constitue de mauvais traitements. Telle est la substance d'un arrêt de la CEDH, rendu le 28 avril 2015 (CEDH, 28 avril 2015, Req. 54999/10 et 10609/11,
disponible en anglais). En l'espèce, à l'occasion d'une fouille effectuée en raison du transfert imminent de M. M. dans une unité disciplinaire, plusieurs gardiens entrèrent dans la cellule de ce dernier et se saisirent de lui pour le menotter et le frapper à coups de matraque et à coup de poing. M. N., qui avait tenté de s'interposer, reçut également des coups de poing et de pied. M. M. refusa par la suite de voir un médecin alors que M. N. fut examiné par un médecin légiste, qui releva que l'intéressé présentait des ecchymoses à la cuisse gauche et autour des yeux. Selon le Gouvernement, les gardiens de prison durent avoir recours à la force pour venir à bout de la résistance des requérants à leur entrée dans la cellule et notamment de M. N. qui aurait agressé et insulté l'un des gardiens. La saisine du procureur par les mères des requérants a conduit à l'ouverture d'une enquête. Sur la base d'auditions, le procureur rejeta les plaintes concluant que les gardiens avaient dû avoir recours à la force pour venir à bout de la résistance des requérants et avaient donc agi dans les limites de leurs pouvoirs. Toutefois, à l'issue d'une procédure disciplinaire qui s'ensuivit, trois gardiens furent jugés coupables d'abus de pouvoir pour avoir fait usage d'une force excessive pendant l'incident et se virent infliger une amende. Les requérants introduisirent également une action en réparation devant les tribunaux civils et se virent finalement accorder 1 500 euros pour dommage moral ; la Cour suprême estimant que les gardiens ne pouvaient justifier un tel recours à la force par la résistance des requérants et que leurs actes avaient porté atteinte à la dignité humaine. Invoquant l'article 3 de la CESDH (
N° Lexbase : L4764AQI) (interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants et l'article 13 (
N° Lexbase : L4746AQT) (droit à un recours effectif), les requérants se plaignaient d'avoir été maltraités par des gardiens de prison et soutenaient que l'enquête ultérieure sur leurs griefs avait été dénuée d'effectivité. La Cour jugeant inutile d'examiner le grief des requérants selon lequel il n'y aurait pas eu d'enquête effective, retient cependant la violation de l'article 3 de la CESDH précité (cf. l’Ouvrage "Droit pénal spécial"
N° Lexbase : E4904EXW).
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