Réf. : Cass. civ. 2, 3 juillet 2025, n° 22-23.979, FS-B+R N° Lexbase : B7773APL
Lecture: 3 min
N2637B33
Citer l'article
Créer un lien vers ce contenu
par Alexandre Autrand, doctorant, Université de Limoges, école doctorale Gouvernance des Institutions et des Organisations, Observatoire des Mutations Institutionnelles et Juridiques
le 08 Juillet 2025
La Cour de cassation revient sur sa jurisprudence au sujet de la sanction de la saisine d’une Cour d’appel territorialement incompétente (V. Cass. civ. 2, 25 novembre 2021, n° 20-13.780 N° Lexbase : A50877DR). Elle considère que la saisine d'une cour d'appel territorialement incompétente relève des exceptions d'incompétence et non des fins de non-recevoir.
Faits et procédure. Par une déclaration du 2 février 2021, M. [E] a interjeté appel, devant la Cour d’appel de Paris, d’un jugement d’un Conseil de prud’hommes, notifié le 7 janvier 2021. Le 23 mars 2021, M. [E] a formé une seconde déclaration d’appel devant la Cour d’appel de Versailles, territorialement compétente. Par une ordonnance du 7 juin 2021, un Conseiller de la mise en état de la Cour d’appel de Paris a déclaré le premier appel irrecevable. Par une ordonnance du 4 avril 2022, qui a été déférée à la Cour d’appel, un Conseiller de la mise en état de la Cour d’appel de Versailles déclare, irrecevable, le second appel. M. [E] décide d’attaquer cette décision devant la Cour de cassation.
Pourvoi/Appel. S’agissant de l’argumentation de M. [E], le moyen annexé au présent arrêt, a été relevé d’office par la Cour de cassation, sur le fondement des articles 1015 N° Lexbase : L5802L8E et 620 N° Lexbase : L6779H79 du Code de procédure civile.
Solution. La Cour de cassation procède à un revirement de sa jurisprudence. Après avoir rappelé la lettre des articles L. 311-1 N° Lexbase : L7901HNX et R. 311-3 N° Lexbase : L6510IAD du Code de l’organisation judiciaire, la Cour retrace ses précédentes décisions. Depuis 2009 (Cass. civ. 2, 9 juillet 2009, n° 06-46.220 N° Lexbase : A7198EIG), la Cour considère que lorsqu’une Cour d’appel constate que l'appel d'un jugement a été formé devant une cour dans le ressort de laquelle n'est pas située la juridiction dont émane la décision attaquée, en déduit exactement que l'appel n'est pas recevable. Ensuite, la Cour rappelle le revirement de jurisprudence opérée par sa Chambre commerciale, sur la compétence de la Cour d’appel de Paris, pour statuer sur les décisions rendues dans les litiges relatifs à l’application de l’article L. 442-6 du Code de commerce N° Lexbase : L0496LQG. Auparavant la Chambre commerciale considérait que dans ce cadre-là, la saisine d’une Cour d’appel incompétente était sanctionnée par une fin de non-recevoir (Cass. com., 9 juillet 2009, n° 06-46.220). Désormais, la Chambre commerciale considère que cette situation relève d’une exception de compétence (Cass. com., 29 janvier 2025, n° 23-15.842 N° Lexbase : A38976S7). De ce fait, la deuxième Chambre civile se demande si la règle d'ordre public relative à la compétence territoriale d'une cour d'appel, prévue à l'article R. 311-3 du Code de l'organisation judiciaire, relève des exceptions d'incompétence ou des fins de non-recevoir. Elle considère que sa jurisprudence de 2009 est une source de complexité pour les praticiens et de restrictions de l’accès au juge d’appel. Désormais, la deuxième Chambre civile considère que la saisine d'une cour d'appel territorialement incompétente n'est pas sanctionnée par une fin de non-recevoir mais relève des exceptions d'incompétence régies par les articles 75 N° Lexbase : L1411LGD à 82-1 du Code de procédure civile. Selon la Cour, ce revirement de jurisprudence tend à favoriser l'accès au juge d'appel en assouplissant le régime des sanctions tout en poursuivant l'objectif d'une bonne administration de la justice.
© Reproduction interdite, sauf autorisation écrite préalable
newsid:492637