Le Quotidien du 14 avril 2025 : Fiscalité du patrimoine

[Observations] Limitation de la force probante de l’acte notarié : une dette fondée sur de simples dé-clarations peut être écartée par l’administration fiscale

Réf. : Cass. com., 12 mars 2025, n° 23-21.706, F-B N° Lexbase : A524064T

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N2008B3R

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par Adèle Chikouche, Avocate, Droit des affaires

le 03 Avril 2025

La Cour de cassation, dans son arrêt du 12 mars 2025, apporte une précision notable en matière de fiscalité successorale et de force probante des actes notariés. Elle juge qu’une dette mentionnée dans un acte notarié, mais reposant uniquement sur les déclarations des parties, ne bénéficie pas de la protection attachée aux dettes constatées par acte authentique au sens de l’article L. 20, alinéa 4, du Livre des procédures fiscales (LPF).

Cette décision intervient dans un contentieux opposant une héritière à l’administration fiscale concernant la prise en compte d’une dette de deux millions d’euros inscrite au passif successoral en vertu d’une convention de quasi-usufruit. L’administration contestait la validité de cette dette, estimant qu’elle résultait de la vente d’un bien commun et devait être réduite de moitié. L’héritière soutenait, quant à elle, que la dette étant constatée dans un acte notarié, l’administration ne pouvait l’écarter sans saisir le juge.

La Cour de cassation tranche en faveur de l’administration fiscale, confirmant ainsi une lecture restrictive de la portée de l’acte notarié lorsqu’il repose uniquement sur des déclarations non vérifiées.

En effet, l’arrêt rappelle que, conformément à l’article L. 20, alinéa 4, LPF N° Lexbase : L8747G8H, toute dette constatée par acte authentique et non échue au jour de l’ouverture de la succession ne peut être écartée par l’administration fiscale qu’à la condition que celle-ci obtienne une décision de justice attestant de son inexistence. Toutefois, la Haute juridiction distingue ici deux situations : 

D’abord, si l’acte authentique constate directement la dette dans le cadre des fonctions de l’officier public, il bénéficie d’une force probante renforcée, opposable à l’administration. 

En revanche, si l’acte notarié ne fait que relater les déclarations des parties sans que le notaire n’ait personnellement constaté la réalité de la dette, alors celle-ci peut être remise en cause sans intervention du juge.

Dans l’affaire jugée, la dette litigieuse résultait d’une convention de quasi-usufruit signée devant notaire, mentionnant que les sommes concernées provenaient de la vente d’un bien propre du défunt. Or, l’administration fiscale a démontré que ce bien était en réalité commun, et a donc réduit de moitié la dette inscrite au passif successoral. La Cour de cassation valide cette démarche, considérant que l’administration pouvait écarter cette dette sans passer par le juge, dès lors qu’elle reposait uniquement sur une déclaration des parties et non sur une constatation matérielle du notaire.

Trois enseignements principaux se dégagent de l’arrêt commenté : 

1. La valeur probante d’un acte notarié est limitée aux faits personnellement constatés par le notaire. Une simple mention dans un acte ne suffit pas à établir l’existence d’une dette opposable à l’administration fiscale. 

2. Cette décision facilite le travail des services fiscaux en leur permettant d’écarter certaines dettes successorales sans avoir à engager une procédure judiciaire préalable, dès lors qu’ils peuvent rapporter la preuve contraire aux affirmations contenues dans l’acte notarié. 

3. Cet arrêt incite les contribuables et leurs conseils à renforcer la preuve des dettes successorales, en veillant à ce qu’elles soient effectivement constatées par l’officier public, et non simplement mentionnées dans un acte. Une vigilance accrue sera donc requise dans la rédaction des conventions de quasi-usufruit ou autres actes constatant des dettes successorales. 

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