Le Quotidien du 11 novembre 2024 : Assurances

[Brèves] Assurance vie : éligibilité d’obligations admises aux négociations sur un marché reconnu

Réf. : Cass. civ. 2, 10 octobre 2024, n° 22-23.116, F-B N° Lexbase : A441259B

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N0874B3R

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par Stéphane Brena, Maître de conférences HDR en droit privé, Directeur de l’École de droit de la Sorbonne au Caire-IDAI, Codirecteur du master droit des assurances de la faculté de droit de l’Université de Montpellier

le 08 Novembre 2024

La Cour de cassation poursuit son œuvre d’objectivation des valeurs mobilières et actifs éligibles à l’assurance sur la vie, en décidant que lorsqu’une valeur mobilière (produits structurés assimilables à des obligations) est visée par la liste réglementaire, la preuve de sa liquidité n’a pas à être démontrée ; Tel est le cas d’obligations admises aux négociations sur un marché reconnu, lui-même défini comme un marché dont l’agrément est conforme aux exigences de la Directive (CE) n° 2004/39.

Les contrats d’assurance-vie peuvent exprimer la prestation d’assurance, due en cas de sinistre, en unités de compte (C. ass., art. L. 131-1 N° Lexbase : L7352LQD), auquel cas l’opération présente un risque de perte en capital au gré des fluctuations de la valeur des unités de compte choisies. C’est précisément une telle perte qui est à l’origine du litige tranché en l’espèce par la Cour de cassation.

Une assurée avait adhéré à un contrat d’assurance de groupe sur la vie, libellé en unités de compte (produit structuré en l’espèce), et versé plus de 143.000 euros à ce titre. Après un arbitrage, elle sollicite le rachat de son contrat, l’assureur lui versant alors un peu plus de 22.000 euros.

Souhaitant échapper à cette perte importante en capital, l’assurée assignait l’assureur en responsabilité, soutenant que les unités de compte n’étaient pas éligibles à l’assurance sur la vie au regard des dispositions de l’article R. 131-1 N° Lexbase : L0480MN4 et R. 332-2 N° Lexbase : L8607LMQ du Code des assurances. Si l’argument a été accueilli en première instance, le jugement est infirmé en appel (CA Orléans, 12 septembre 2022, n° 20/00890 N° Lexbase : A50398IH), conduisant l’assurée à se pourvoir en cassation et à soutenir que la cour d’appel avait violé l’article R. 332-2, 2°, du Code des assurances pour s’être contentée de constater que les unités de compte étaient admises aux négociations sur un marché reconnu, sans rechercher si leur liquidité, attestée par un nombre suffisant d’opérations, était caractérisée.

Conduite à répondre à la question de savoir si l’admission aux négociations sur un marché reconnu constitue une condition suffisante d’éligibilité des unités de compte à l’assurance sur la vie, la Haute juridiction répond positivement et rejette le pourvoi. Elle estime en effet que « dès lors qu’elles sont admises sur un marché reconnu, les obligations satisfont à la condition de négociabilité prévue par » l’article R. 332-2, 2°, du Code des assurances.

La condition de négociabilité n’est ainsi pas considérée comme une condition autonome de celle de l’admission aux négociations sur un marché reconnu.

En effet, l’article L. 131-1, alinéa 2, du Code des assurances prévoit que « le capital ou la rente garantis peuvent être exprimés en unités de compte constituées de valeurs mobilières ou d’actifs offrant une protection suffisante de l’épargne investie et figurant sur une liste dressée par décret en Conseil d’État ». L’article R. 131-1 du Code des assurances, établissant cette liste, procède notamment, en son 1°, par renvoi aux dispositions de l’article R. 332-2 du même Code, dont le 2° vise « les valeurs et titre assimilés […], négociés sur un marché reconnu, qui suivent […]. »

Le titre concerné doit, très clairement, être admis aux négociations sur un « marché reconnu », dont la Cour de cassation éclaire ici la notion : la bourse à laquelle étaient admis les produits structurés en cause relevait d’un « État partie à l’accord sur l’Espace économique européen dont la bourse bénéficie d’un agrément au titre d’un marché réglementé en application de la Directive 2004/39/CE » du 21 avril 2004, concernant les marchés d’instruments financiers N° Lexbase : L2056DYS. La Cour ajoute que, dès lors que cet agrément est conforme à la Directive, il s’agit bien d’un marché reconnu. En d’autres mots, la conformité de l’agrément à la Directive constitue le critère de qualification du marché reconnu.

En revanche, la Cour de cassation refuse de faire de la preuve de la liquidité des titres une condition de l’éligibilité à l’assurance-vie. Si le texte de l’article R. 332-2 ne vise pas expressément cette condition, il y est fait référence à la négociation de ces titres. Faut-il alors rapporter la preuve de cette négociation effective, à travers un nombre suffisant d’opérations ? La Haute juridiction ne le pense pas et renforce ainsi sa position tendant à faire de la liste règlementaire des valeurs mobilières et actifs éligibles à l’assurance-vie la seule boussole devant guider le juge (v. déjà pour le rejet, sur le fondement de l’article L. 131-1 du Code des assurances, de toute exigence de preuve de ce que la valeur mobilière ou l’actif offrent une protection suffisante, pourtant visée par le texte : Cass. civ. 2, 16 juillet 2020, n° 19-16.922, F-P+B+I N° Lexbase : A35563R7) dans le cadre d’une approche résolument abstraite.

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