Réf. : Cass. soc., 2 octobre 2024, n° 23-19.326, FS-B N° Lexbase : A778557H
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par Sephora Boussour, Avocate, COSMO Avocats
le 15 Octobre 2024
► Les accords de modulation du temps de travail, conclus avant la loi n° 2008-789, du 20 août 2008, restent en vigueur, à condition que l’accord collectif d’entreprise ou de branche qui met en place ce dispositif respecte les conditions de validité en vigueur avant la promulgation de cette loi.
Fonctionnement de la modulation. La modulation est une modalité d’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine. Elle permet de faire varier la durée de travail sur tout ou partie de l'année, sans pouvoir excéder 1607 heures de travail par an (journée de solidarité incluse).
Une telle répartition a pour objet de permettre aux entreprises de faire face aux variations d'activité. Ainsi, les heures effectuées pendant les périodes « hautes » d’activité compensent les périodes « basses » d’activité.
Notons enfin que la modulation du temps de travail ne peut être mise en œuvre qu’en présence d’un accord collectif d’entreprise ou de branche.
Dispositif de sécurisation des accords. La loi n° 2008-789, du 20 août 2008, portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail N° Lexbase : L7392IAZ, a mis en place un cadre légal unique d’aménagement du temps de travail plurihebdomadaire.
Depuis le 22 août 2008, les entreprises et les acteurs de la négociation au niveau de la branche ne peuvent plus conclure d’accord collectif relatif au cycle de travail, à la modulation de la durée du travail et à la réduction du temps de travail sous forme de RTT.
Toutefois, les accords collectifs conclus portant sur les anciens aménagements du temps de travail, avant le 21 août 2008, restent en vigueur, sans limitation de durée (loi n° 2008-789, du 20 août 2008, art. 20, V).
Les entreprises concernées peuvent donc continuer à appliquer ces accords, y compris aux salariés embauchés postérieurement à la mise en place du dispositif, sauf clause contraire du contrat de travail (Cass. soc., 17 novembre 2021, n° 19-25.149, FS-B N° Lexbase : A94647B7).
Enjeux. Pour appliquer un accord collectif de modulation du temps de travail, encore faut-il qu’il remplisse les conditions de validité en vigueur avant la loi du 20 août 2008 précitée (Cass. soc., 17 décembre 2014, n° 13-19.834, FS-P+B N° Lexbase : A2756M8L).
À ce titre, les anciens accords de modulation doivent préciser (C. trav., art L. 3122-11 N° Lexbase : L6848K9I, L. 3122-13 N° Lexbase : L6846K9G et L. 3122-14 N° Lexbase : L6845K9E, anciens) :
Si l’une de ces mentions est manquante, l’accord de modulation est inopposable.
Faits et procédure. Dans cet arrêt, le salarié relève que l’accord collectif national du 23 décembre 1981, mettant en place au niveau de la branche la modulation du temps de travail, ne comporte pas deux des mentions obligatoires :
Il en déduit que seule la durée du travail légale lui est applicable par défaut, soit 35 heures par semaine et non plus 1 607 heures par an. Il sollicite notamment des rappels de salaire :
Pour la cour d’appel d’Angers, l’absence de ces deux mentions n’est pas suffisante pour remettre en cause l’application dudit accord. Elle relève également que le salarié ne justifie d’aucun préjudice (CA Angers, 6 avril 2023, n° 21/00098 N° Lexbase : A88329NG).
Solution. La Chambre sociale de la Cour de cassation censure le raisonnement de la cour d’appel, et rappelle les dispositions de la loi du 20 août 2008 et des articles L. 3122-11 et suivants du Code du travail : en l’absence desdites mentions dans l’accord collectif de branche, les stipulations conventionnelles ne sont plus en vigueur depuis le 22 août 2008.
L’accord national du 23 décembre 1981, dans sa rédaction issue de l'avenant n° 12 du 29 mars 2000 (agriculture), est inopposable, et le salarié est fondé à solliciter des rappels de salaire.
Portée. Notons que cette décision intervient dans la continuité des arrêts précédents, la Cour ayant déjà jugé que « lorsque l’accord de modulation ne comporte pas de programme indicatif de répartition de la durée du travail, cet accord est inopposable au salarié, qui peut prétendre au paiement d’heures supplémentaires sur la base de la durée légale de travail » (Cass. soc., 24 mai 2023, n° 21-24.350, F-D N° Lexbase : A95949WA ; Cass. soc., 13 janvier 2016, n° 14-13.709, F-D N° Lexbase : A9406N3R et Cass. soc., 12 mars 2008, n° 06-45.274, F-D N° Lexbase : A3998D79).
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : L’aménagement du temps de travail, Les dispositions supplétives en matière d'aménagement du temps de travail sur une période de référence supérieure à la semaine, in Droit du travail, Lexbase N° Lexbase : E0955GAM. |
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