Le Quotidien du 27 septembre 2024 : Droit financier

[Brèves] Surveillance prudentielle : victoire posthume de Silvio Berlusconi devant la CJUE

Réf. : CJUE, 19 septembre 2024, aff. C-512/22 P, Fininvest c/ BCE N° Lexbase : A97575ZE

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par Perrine Cathalo

le 02 Octobre 2024

La Banque centrale européenne ne pouvait légalement s’opposer à la détention par M. Berlusconi d’une participation qualifiée dans un établissement de crédit, cette situation résultant seulement de la conservation par l’intéressé d’une participation qualifiée qu’il avait acquise antérieurement à la transposition des dispositions de droit de l’Union sur lesquelles la Banque centrale européenne s’était fondée. 

Faits et procédure. Une société holding italienne était détenue majoritairement par Silvio Berlusconi. Cette société détenait des parts sociales d’une compagnie financière cotée en bourse, qui détenait à son tour 100 % du capital d’un établissement de crédit.

En 2014, la Banque d’Italie a ordonné la cession, dans un délai de trente mois, de la participation de la holding dans la compagnie financière excédant 9,99 % et la suspension immédiate des droits de vote attachés aux actions correspondantes. L’adoption de cette mesure était motivée par le fait que M. Berlusconi avait été déclaré coupable de fraude fiscale et, par conséquent, ne remplissait plus la condition d’honorabilité à laquelle est subordonnée la détention d’une telle participation qualifiée. La décision de la Banque d’Italie a été annulée par le Conseil d’État italien le 3 mars 2016. Entretemps, en 2015, la compagnie financière a été absorbée par la banque.

À la suite de cette absorption et de l’arrêt du Conseil d’État italien, la Banque d’Italie et la Banque centrale européenne (BCE) ont considéré que M. Berlusconi et la holding avaient acquis une participation qualifiée (Règlement n° 575/2013, du 26 juin 2013 N° Lexbase : L2751IYK, art. 4, paragraphe 1, point 36) dans le capital de l’établissement de crédit. Or, le droit de l’Union (Règlement n° 575/2013, du 26 juin 2013 ; Directive n° 2013/36, du 26 juin 2013 N° Lexbase : L9454IXG) prévoit qu’une telle acquisition doit être précédée d’une notification et faire l’objet d’une évaluation par l’autorité nationale compétente, qui transmet ensuite à la BCE une proposition de décision. Il appartient ensuite à la BCE de s’opposer ou non à l’acquisition de la participation qualifiée en cause.

Saisie par la Banque d’Italie, la BCE s’est opposée à l’acquisition d’une participation qualifiée de M. Berlusconi dans la banque au motif qu’il ne satisfaisait pas au critère d’honorabilité.

Le recours de M. Berlusconi et de la holding pour faire annuler cette décision de la BCE a été rejeté par le Tribunal de l’Union européenne (Trib. UE, 11 mai 2022, aff. T-913-16, Fininvest c/ BCE N° Lexbase : A54197WM). La société et les ayants droit de M. Berlusconi ont ensuite formé des pourvois contre cet arrêt.

Décision. Le 19 septembre 2024, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) annule l’arrêt du Tribunal et la décision de la BCE.

Elle estime que le Tribunal a dénaturé les faits du litige et commis une erreur de droit en jugeant que les requérants ont acquis une participation qualifiée dans l’établissement de crédit en 2016. Cette erreur résulte de la méconnaissance de la portée de la décision de la Banque d’Italie de 2014 qui, contrairement à ce qu’a jugé le Tribunal, n’a pas eu pour conséquence de réduire la participation de la holding dans la banque, mais seulement de suspendre les droits de vote attachés aux actions soumises à une obligation de cession. Cette cession devait seulement avoir lieu par la suite, dans un délai de trente mois, par l’intermédiaire d’une fiducie chargée de la vente. À la date de l’annulation prononcée par le Conseil d’État italien, la participation litigieuse demeurait donc inchangée. La modification de la structure de détention de cette participation du fait de l’absorption de la compagnie financière par l’établissement de crédit ne modifiait pas cette analyse.

Par conséquent, M. Berlusconi ne pouvait être regardé comme ayant acquis une participation qualifiée en 2016, ce qui aurait nécessité une notification et une évaluation par les autorités compétentes. Il a seulement conservé une participation qualifiée qui avait été acquise bien antérieurement, à une date à laquelle les dispositions de droit de l’Union appliquées par la BCE n’avaient pas encore été transposées en droit italien. Ces dispositions étant dépourvues de portée rétroactive, la BCE ne pouvait pas légalement s’opposer à la détention d’une participation qualifiée dans l’établissement de crédit par M. Berlusconi.

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