Réf. : Cass. civ. 1, 23 mai 2024, n° 22-17.127, FS-B N° Lexbase : A86175C7
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par Jérôme Casey, Avocat au barreau de Paris, Maître de conférences à l’Université de Bordeaux
le 27 Juin 2024
► Le testament olographe qui n'est pas daté de la main du testateur n'est pas valable ;
Toutefois, lorsqu'un testament olographe comporte une date dont un ou plusieurs éléments nécessaires pour la constituer ont été portés par un tiers, la nullité de celui-ci n'est pas encourue dès lors que des éléments intrinsèques à l'acte, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée et qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période, le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible.
Prive sa décision de base légale au regard des dispositions de l’article 970 du Code civil, la cour d’appel qui, pour déclarer nul le testament olographe portant la date du 26 mars 2009, retient qu'il résulte du rapport d'expertise judiciaire déposé le 1er juin 2021 que [C] [S] n'est pas l'auteure du « 9 » de la date du « 26 mars 2009 » apposée sur le testament litigieux, ce dont il résulte que celui-ci n'a pas été entièrement écrit de la main de la testatrice, et que ce vice formel suffit à en emporter la nullité, sans rechercher, comme elle y était invitée, si, en dépit de cette irrégularité, des éléments intrinsèques à l'acte, dont faisait partie la mention « 26 mars 200 » écrite de la main de la testatrice, éventuellement corroborés par des éléments extrinsèques, ne permettaient pas d'établir que le testament avait été rédigé au cours d'une période déterminée.
L’arrêt ne surprendra personne, sauf quelques juges du fond distraits. Dans un testament olographe, la date est un élément formel important, mais dont la Cour de cassation a bien précisé qu’il était relatif (v., récemment Cass. civ. 1, 22 novembre 2023, n° 21-17.524, F-B N° Lexbase : A664013C, qui admet qu’une date pré-imprimée puisse constituer un élément intrinsèque à l’acte susceptible d’être corroboré par des éléments extrinsèques permettant de dire qu’il a été rédigé au cours d’une « période déterminée » où le testateur n’était frappé d’aucune incapacité ou insanité d’esprit). Et il faut remonter à une décision de 2007 pour trouver trace, pour la première fois, de cette notion de « période » de rédaction (v., Cass. civ. 1, 10 mai 2007, n° 05-14.366, FS-P+B N° Lexbase : A1079DWU). La Cour de cassation exerce ici une influence aussi juste que souhaitable pour tempérer la rigueur de l’article 970 du Code civil N° Lexbase : L0126HPD. Il s’agit en effet de respecter la volonté du défunt, clairement exprimée, dès lors que la période d’écriture ne révèle rien d’anormal. Comme l’a très bien dit notre collègue Marc Nicod, les nullités formelles ne pouvant constituer « des fins en soi » (v., M. Nicod, obs. sous Cass. civ. 1, 22 novembre 2023, préc., Dr. fam., 2024, comm. 19). L’arrêt commenté en constitue une heureuse illustration de plus.
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