Réf. : Cons. const., décision n° 2024-1091/1092/1093 QPC, du 28 mai 2024 N° Lexbase : A67745DA
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N9520BZM
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par Yann Le Foll
le 06 Juin 2024
► L’exclusion des étrangers en situation irrégulière du bénéfice de l’aide juridictionnelle est contraire au principe d’égalité devant la justice et doit être déclarée contrairs à la Constitution.
Rappel. Selon l’article 2 de la loi n° 91-647, du 10 juillet 1991, relative à l’aide juridique N° Lexbase : L8607BBE, les personnes physiques dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits en justice peuvent bénéficier d’une aide juridictionnelle.
En application de son article 3, sont admises au bénéfice de cette aide les personnes de nationalité française et les ressortissants des États membres de l’Union européenne.
Les dispositions contestées de cet article (les mots « et régulièrement » figurant à son deuxième alinéa) prévoient que, sauf dans certains cas, les autres personnes de nationalité étrangère résidant habituellement en France ne peuvent être admises au bénéfice de l’aide juridictionnelle que si, en outre, elles y résident régulièrement.
Position Cons. const. Ces dispositions instaurent ainsi une différence de traitement entre les étrangers selon qu’ils se trouvent ou non en situation régulière en France.
Si le législateur peut prendre des dispositions spécifiques à l’égard des étrangers, en tenant compte notamment de la régularité de leur séjour, c’est à la condition de respecter les droits et libertés garantis par la Constitution reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République et, en particulier, pour se conformer au principe d’égalité devant la justice (reconnu de valeur constitutionnelle par la décision n° 75-56 DC, du 23 juillet 1975 N° Lexbase : A7914AC4, d’assurer des garanties égales à tous les justiciables.
Il résulte des trois derniers alinéas de l’article 3 de la loi n° 91-647, du 10 juillet 1991, que les étrangers ne résidant pas régulièrement en France peuvent bénéficier, par dérogation, de l’aide juridictionnelle lorsqu’ils sont mineurs, qu’ils sont mis en cause ou parties civiles dans une procédure pénale, ou font l’objet de certaines mesures prévues par l’article 515-9 du Code civil N° Lexbase : L2997LUK ou par le Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, ainsi que, à titre exceptionnel, lorsque leur situation apparaît particulièrement digne d’intérêt au regard de l’objet du litige ou des charges prévisibles du procès.
Or, en privant dans tous les autres cas les étrangers ne résidant pas régulièrement en France du bénéfice de l’aide juridictionnelle pour faire valoir en justice les droits que la loi leur reconnaît, les dispositions contestées n’assurent pas à ces derniers des garanties égales à celles dont disposent les autres justiciables.
Décision. Dès lors, ces dispositions méconnaissent le principe d’égalité devant la justice et doivent être déclarées contraires à la Constitution à compter du 31 mai 2024.
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