Réf. : Cass. civ. 3, 26 octobre 2023, n° 21-24.231, FS-B N° Lexbase : A42791P8
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par Anne-Lise Lonné-Clément
le 13 Novembre 2023
► L'action en nullité d'un bail formée sur le fondement de l'article L. 331-6 du Code rural et de la pêche maritime se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire de l'action a connu ou aurait dû connaître qu'était expiré le délai imparti, dans la mise en demeure prévue par l'article L. 331-7 de ce code, au preneur contrevenant au contrôle des structures pour régulariser sa situation.
Selon l'article L. 331-6 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L6546HHW, si le preneur est tenu d'obtenir une autorisation d'exploiter en application de l'article L. 331-2 du même code N° Lexbase : L6544HHT, la validité du bail est subordonnée à l'octroi de cette autorisation. Le refus définitif de l'autorisation ou le fait de ne pas avoir présenté la demande d'autorisation exigée en application de cet article dans le délai imparti par l'autorité administrative en application du premier alinéa de l'article L. 331-7 de ce code N° Lexbase : L9580HD8 emporte la nullité du bail que le préfet du département dans lequel se trouve le bien objet du bail, le bailleur ou la société d'aménagement foncier et d'établissement rural, lorsqu'elle exerce son droit de préemption, peut faire prononcer par le tribunal paritaire des baux ruraux.
Selon l'article L. 331-7 du même code N° Lexbase : L9580HD8, lorsqu'elle constate qu'un fonds est exploité contrairement aux règles du contrôle des structures, l'autorité administrative met l'intéressé en demeure de régulariser sa situation dans un délai qu'elle détermine et qui ne saurait être inférieur à un mois. La mise en demeure prescrit à l'intéressé soit de présenter une demande d'autorisation, soit, si une décision de refus d'autorisation est intervenue, de cesser l'exploitation des terres concernées.
La Cour de cassation juge, en application de ces deux derniers textes, que l'exercice de l'action en nullité du bail rural, ouverte par l'article L. 331-6 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L6546HHW, suppose, dans tous les cas, que le locataire contrevenant au contrôle des structures ait été mis en demeure et que le délai imparti soit expiré (Cass. civ. 3, 31 octobre 2007, n° 06-19.350, FS-P+B N° Lexbase : A2394DZP ; Cass. civ. 3, 12 décembre 2012, n° 11-24.384, FS-P+B N° Lexbase : A1129IZT).
La question du délai de prescription de l’action en nullité, et plus particulièrement de son point de départ, n’avait encore jamais été soumise à la Haute juridiction.
C’est chose faite avec l’arrêt rendu le 26 octobre 2023, dans lequel la Cour suprême, après avoir rappelé qu’aux termes de l'article 2224 du Code civil, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, vient préciser, qu’il résulte de l’ensemble de ces dispositions que l'action en nullité d'un bail formée sur le fondement de l'article L. 331-6 précité se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire de l'action a connu ou aurait dû connaître qu'était expiré le délai imparti au locataire, dans la mise en demeure prévue par l'article L. 331-7 précité, pour régulariser sa situation.
Cette précision inédite est d’importance dans un domaine où le contentieux est abondant :
Or, selon la Cour de cassation, ni l’une ni l’autre de ces dates ne constituait le point de départ du délai.
Par un motif de pur droit ainsi substitué à ceux critiqués, la Cour de cassation relève que l'arrêt constatait que la demande en justice datait du 2 avril 2019 et la mise en demeure, qui avait nécessairement précédé la date à compter de laquelle le bailleur avait eu connaissance de l'expiration du délai qu'elle impartissait, du 17 décembre 2019. L'action en nullité était donc loin d’être prescrite en l’espèce.
Le délai d’exercice de l’action en nullité pour défaut d'obtention d'une autorisation d'exploiter est désormais bien encadré :
Pour aller plus loin : v. ÉTUDE : Caractéristiques du contrat de bail rural et du fermage, spéc. Nullité du bail rural en cas de défaut d'obtention d'une autorisation d'exploiter, in Droit rural (dir. Ch. Lebel), Lexbase N° Lexbase : E8943E94. À noter que le présent arrêt fera l'objet d'un commentaire approfondi par Christine Lebel, à paraître prochainement dans la revue Lexbase Droit privé. |
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