Le Quotidien du 24 octobre 2023 : Droit rural

[Brèves] Bail rural : attention, la mise à disposition d’une société peut cacher une cession prohibée du droit au bail…

Réf. : Cass. civ. 3, 12 octobre 2023, deux arrêts, n° 21-20.212 N° Lexbase : A29441LM, et n° 21-22.101 N° Lexbase : A29471LQ, FS-B

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par Anne-Lise Lonné-Clément

le 23 Octobre 2023

► Le preneur ou, en cas de cotitularité, tous les preneurs, qui, après avoir mis le bien loué à la disposition d'une société, ne participent plus aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de l'exploitation, abandonnent la jouissance du bien loué à cette société et procèdent ainsi à une cession prohibée du droit au bail à son profit ; il en résulte que, dans ce cas, le bailleur peut solliciter la résiliation du bail sur le fondement de l'article L. 411-31, II, 1°, du Code rural et de la pêche maritime, sans être tenu de démontrer un préjudice.

Conditions de la mise à disposition d’une société. L’article L. 411-37 du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L4462I4Z prévoit la possibilité, pour le preneur à bail rural, de mettre les terres louées à la disposition de la société à objet principalement agricole dont il est associé. Cette possibilité offerte au preneur est soumise à un certain nombre de conditions, notamment celle d’en aviser le bailleur. Parmi les autres conditions, figure celle de continuer à se consacrer à l'exploitation de ces biens, en participant sur les lieux aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de l'exploitation (C. rur., art. L. 411-37, III). Le texte précise que cette condition est posée sous peine de résiliation.

En l’espèce, dans les deux affaires, il était établi que le preneur avait cessé de continuer à se consacrer à l’exploitation des terres qu’il avait mises à disposition de la société dont il était associé. La cour d’appel avait néanmoins débouté le bailleur de sa demande de résiliation judiciaire du bail, dès lors que celui-ci n’établissait pas l’existence d’un préjudice. La cour relevait en effet, qu’ « en application de l'article L. 411-31 II du Code rural et de la pêche maritime N° Lexbase : L8924IWG, le bailleur peut demander la résiliation du bail pour toute contravention aux obligations dont le preneur est tenu en application des articles L. 411-37, L. 411-39 N° Lexbase : L4782I4U, L. 411-39-1 N° Lexbase : L7820K9I si elle est de nature à porter préjudice au bailleur ».

Question. La question soulevée était alors de savoir si le manquement constitué par la cessation de participation à l’exploitation par le preneur ayant mis les terres louées à la disposition de la société ne cachait pas finalement une cession prohibée du droit au bail au profit de la société.

Enjeu. L’enjeu était alors le droit pour le bailleur de résilier le bail sans nécessité de démontrer l’existence d’un préjudice. En effet, comme le relève la Cour de cassation, selon l’article L. 411-31, II, 1° et 3° toujours du même code, le bailleur peut demander la résiliation du bail s'il justifie soit d'une contravention aux dispositions de l'article L. 411-35 N° Lexbase : L4458I4U, soit, si elle est de nature à porter préjudice au bailleur, d'une contravention aux obligations dont le preneur est tenu en application de l'article L. 411-37.

Divergence CA Rennes/CA Paris. Alors que dans la première affaire (pourvoi n° 21-20.212), la cour d’appel de Rennes (CA Rennes, 27 mai 2021, n° 19/02171 N° Lexbase : A03144TS) avait rejeté la demande du bailleur au motif que celui-ci n’établissait pas avoir subi un préjudice, et que la cession prohibée n’était pas établie, la cour d’appel de Paris (CA Paris, 4, 3, 18 juin 2021, n° 20/18559 N° Lexbase : A54694WH), dans la seconde affaire (pourvoi n° 21-22.101) avait admis l’existence d’un raccourci entre le manquement constitué et la cession prohibée, et donc la demande de résiliation sans nécessité d’établir un préjudice.

Réponse de la Cour de cassation. C’est la position de la cour d’appel de Paris qui est validée par la Cour régulatrice : « le preneur ou, en cas de cotitularité, tous les preneurs, qui, après avoir mis le bien loué à la disposition d'une société, ne participent plus aux travaux de façon effective et permanente, selon les usages de la région et en fonction de l'importance de l'exploitation, abandonnent la jouissance du bien loué à cette société et procèdent ainsi à une cession prohibée du droit au bail à son profit. »

Selon la Haute juridiction, il en résulte que, dans ce cas, le bailleur peut solliciter la résiliation du bail sur le fondement de l'article L. 411-31, II, 1°, sans être tenu de démontrer un préjudice.

Dans le même sens, on relèvera qu’un autre cas de cession prohibée, justifiant une résiliation de plein droit par le bailleur, se cache derrière le non-respect d’une des conditions de mise à disposition d’une société : le cas de mise à disposition d’une société tierce (la mise à disposition par un preneur à ferme des terres qu'il loue au bénéfice d'une société dont il n'est pas membre s'analyse en une cession prohibée entraînant la résiliation du bail à ses torts exclusifs : Cass. civ. 3, 16 mai 2007, n° 06-14.521, FS-P+B N° Lexbase : A2573DW9).

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