La lettre juridique n°683 du 12 janvier 2017

La lettre juridique - Édition n°683

Accident du travail - Maladies professionnelles (AT/MP)

[Brèves] Désignation de la cour d'appel d'Amiens comme cour d'appel spécialisée pour connaître du contentieux de la tarification de l'assurance des accidents du travail

Réf. : Décret n° 2017-13 du 5 janvier 2017 désignant une cour d'appel spécialisée pour connaître du contentieux de la tarification de l'assurance des accidents du travail (N° Lexbase : L4022LCX)

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N6116BWG

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Le 12 Janvier 2017

A été publié au Journal officiel du 7 janvier 2017, le décret n° 2017-13 du 5 janvier 2017 désignant une cour d'appel spécialisée pour connaître du contentieux de la tarification de l'assurance des accidents du travail (N° Lexbase : L4022LCX). Pris pour l'application de l'article 12 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIème siècle (N° Lexbase : L1605LB3), organisant la spécialisation d'une cour d'appel pour connaître des litiges mentionnés au 4° de l'article L. 142-2 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L2655IZD) en lieu et place de la Cour nationale de l'incapacité et de la tarification de l'assurance des accidents du travail, le décret désigne la cour d'appel d'Amiens comme cour d'appel spécialisée pour connaître du contentieux de la tarification de l'assurance des accidents du travail. Cette cour d'appel spécialement désignée aura compétence exclusive en premier et dernier ressort pour connaître de ces litiges sur l'ensemble du territoire national. Cette mesure entrera en vigueur le 1er janvier 2019 (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E6388A84).

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Autorité parentale

[Brèves] Assistance éducative et délégation exceptionnelle d'un acte relevant de l'autorité parentale : la délégation doit nécessairement être limitée dans le temps

Réf. : Cass. civ. 1, 4 janvier 2017, n° 15-28.935, F+P+B+I (N° Lexbase : A4296SYR)

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N6093BWL

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Le 12 Janvier 2017

Il résulte de l'article 375-7, alinéa 2, du Code civil (N° Lexbase : L4935K8B) que, sauf acte usuel, le juge des enfants ne peut autoriser la personne, le service ou l'établissement à qui est confié l'enfant à accomplir un acte relevant de l'autorité parentale qu'à titre exceptionnel, lorsque l'intérêt de l'enfant le justifie, et en cas de refus abusif ou injustifié ou en cas de négligence des détenteurs de l'autorité parentale ; l'autorisation ainsi accordée sur le fondement de ces dispositions ne peut alors être que limitée dans le temps. Telle est la solution qui se dégage d'un arrêt rendu le 4 janvier 2017 par la première chambre civile de la Cour de cassation (Cass. civ. 1, 4 janvier 2017, n° 15-28.935, F+P+B+I N° Lexbase : A4296SYR). En l'espèce, par décisions renouvelées depuis le 20 mai 2003, le juge des enfants a ordonné le placement à l'aide sociale à l'enfance d'Audrey X. L'arrêt attaqué avait confirmé une ordonnance transférant à l'aide sociale à l'enfance le droit d'effectuer des démarches liées à la scolarité et aux loisirs de la mineure en lieu et place des détenteurs de l'autorité parentale et disant qu'il serait rendu compte de son exécution au juge. La décision est censurée par la Cour suprême qui retient qu'en statuant ainsi, par une décision qui n'était pas limitée dans le temps, la cour d'appel a violé l'article 375-7, alinéa 2, du Code civil, ensemble l'article 1202 du Code de procédure civile (cf. l’Ouvrage "L'autorité parentale" N° Lexbase : E5840EYX).

newsid:456093

Bancaire

[Brèves] Prêt destiné à financer l'acquisition d'un terrain et la construction d'une maison individuelle : non-application des conditions spécifiques du CCH à la portion du prêt destinée à l'achat du terrain

Réf. : Cass. civ. 3, 5 janvier 2017, n° 15-27.290, FS-P+B (N° Lexbase : A4799S37)

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N6171BWH

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Le 13 Janvier 2017

Ne manque pas à son devoir de vérification, lors de l'émission de l'offre de prêt destiné à financer l'acquisition d'un terrain et à la construction d'une maison individuelle, et n'a pas commis de faute engageant sa responsabilité, le banquier qui a débloqué la portion du prêt destinée à l'achat du terrain avant la réception de l'attestation de garantie de livraison. Tel est le sens d'un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation le 5 janvier 2017 (Cass. civ. 3, 5 janvier 2017, n° 15-27.290, FS-P+B N° Lexbase : A4799S37). En l'espèce, un emprunteur a souscrit un prêt destiné à financer l'acquisition d'un terrain et la construction d'une maison individuelle et a, parallèlement, conclu un contrat soumis aux dispositions des articles L. 231-1 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L7276AB4). La banque a débloqué les fonds qui ont servi à l'acquisition du terrain. N'ayant pu obtenir une garantie "dommages ouvrage", le constructeur a, par la suite, avisé l'emprunteur de la caducité du contrat de construction. En l'absence d'obtention d'une garantie de livraison, la banque s'est opposée à la remise des fonds destinés aux travaux de construction. L'emprunteur a alors assigné la banque responsabilité. Débouté par la cour d'appel (CA Nîmes, 1er octobre 2015, n° 14/03189 N° Lexbase : A9095NRB), il a formé un pourvoi en cassation. L'emprunteur reprochait à la banque d'avoir débloqué une partie des fonds -destinée à l'acquisition du terrain nu- alors que, dans un contrat de construction d'une maison individuelle avec fourniture de plan, aucun prêteur ne peut formuler d'offre sans garantie dommages-ouvrage, ni débloquer des fonds s'il n'a pas communication de l'attestation de garantie de livraison (CCH, art. L. 231-10 N° Lexbase : L7285ABG). La Cour de cassation rejette le pourvoi : le contrat de construction de maison individuelle avec fourniture de plan avait été conclu sous la condition suspensive d'obtention de l'assurance dommages-ouvrage et de la garantie de livraison et les seuls fonds débloqués étaient destinés à l'acquisition du terrain sur lequel devait être édifiée la construction, de sorte que la cour d'appel a exactement retenu qu'aucun manquement au devoir de vérification, lors de l'émission de l'offre de prêt, ne pouvait être reproché à la banque et que le déblocage de la portion du prêt destinée à l'achat du terrain pouvait intervenir avant la réception de l'attestation de garantie de livraison (cf. l’Ouvrage "Droit bancaire" N° Lexbase : E1427A4M).

newsid:456171

Baux commerciaux

[Brèves] Cession globale d'un immeuble comprenant un local commercial : pas de droit de préférence du locataire

Réf. : QE n° 98594 de M. Didier Quentin, JOANQ 30 août 2016, réponse publ. 6 décembre 2016 p. 10078, 14ème législature (N° Lexbase : L7101LBM)

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N6167BWC

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Le 17 Janvier 2017

L'article L. 145-46-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L4978I3R), issu de l'article 14 de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, relative à l'artisanat, au commerce et aux très petites entreprises (N° Lexbase : L4967I3D), a instauré un droit de préférence au profit du locataire en cas de vente du local commercial ou artisanal dans lequel il exerce son activité. En conséquence, tout propriétaire d'un tel local qui envisage de le vendre doit en informer le locataire. Cette notification vaut offre de vente au profit du locataire qui dispose alors d'un délai d'un mois pour se prononcer. Interrogé par un parlementaire sur la question de savoir si ce droit s'applique également à la cession globale d'un immeuble ne comprenant qu'un seul local commercial, le ministre de l'Economie a apporté une réponse le 6 décembre 2016 (QE n° 98594 de M. Didier Quentin, JOANQ 30 août 2016, réponse publ. 6 décembre 2016 p. 10078, 14ème législature N° Lexbase : L7101LBM). Ainsi, selon ce dernier, le dernier alinéa de l'article L. 145-46-1 exclut l'application de ce dispositif en cas de cession globale d'un immeuble comprenant un ou des locaux commerciaux. En effet, imposer un droit de préférence sur la vente du local commercial impliquerait de contraindre le propriétaire à vendre ce local indépendamment du reste, ce qui constituerait une atteinte à son droit de propriété. En outre, le droit de préférence constitue une limitation du droit de propriété et doit donc être interprété restrictivement. Permettre au locataire d'exercer son droit de préférence sur l'ensemble immobilier vendu constituerait une extension de ce droit, limité par la loi au seul local commercial où il exerce son activité. En conséquence, dans le cas évoqué d'une cession globale d'un immeuble ne comprenant qu'un seul local commercial, le droit de préférence ne s'appliquera pas, sous réserve de l'interprétation contraire des tribunaux (cf. l’Ouvrage "baux commerciaux" N° Lexbase : E4282E7Q).

newsid:456167

Collectivités territoriales

[Brèves] Illégalité de l'ordre préfectoral de réquisition contraignant EDF à s'approvisionner en fuel lourd auprès d'une société

Réf. : CE 9° et 10° ch.-r., 28 décembre 2016, n° 397422, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A4888S3G)

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N6145BWI

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Le 13 Janvier 2017

Est illégal l'ordre préfectoral de réquisition contraignant EDF à s'approvisionner en fuel lourd auprès d'une société. Telle est la solution d'un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 28 décembre 2016 (CE 9° et 10° ch.-r., 28 décembre 2016, n° 397422, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A4888S3G, sur la légalité des réquisitions de salariés de raffineries voir CE référé, 27 octobre 2010, n° 343966 N° Lexbase : A8011GCP). L'ordre de réquisition du 28 mars 2013 du préfet de la région Martinique contraignant EDF à s'approvisionner en fuel lourd auprès de la société X faisait suite à un ensemble d'ordres identiques pris par le préfet depuis le 15 septembre 2009 pour contraindre EDF à s'approvisionner en fuel lourd auprès de cette société au prix maximum fixé par ses arrêtés de réglementation des prix des produits pétroliers. En déduisant notamment de cet élément, au terme d'une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que l'urgence n'était pas justifiée et que, par suite, l'ordre de réquisition du préfet n'était pas légal au regard des dispositions du 4° de l'article L. 2215-1 du Code général des collectivités territoriales (N° Lexbase : L8592HW7), le juge du fond n'a pas donné aux faits de l'espèce une qualification juridique erronée.

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Cotisations sociales

[Textes] CICE, ZRD, actions gratuites, JEI, minima sociaux : les réformes éclectiques

Réf. : Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 (N° Lexbase : L0759LC4)

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N6113BWC

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par Christophe Willmann, Professeur à l'Université de Rouen et Directeur scientifique de l'Encyclopédie "Droit de la protection sociale"

Le 14 Janvier 2017

La loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 (1) comprend, dans le champ de l'emploi, de la protection sociale et du droit du travail, plusieurs dispositions d'un intérêt inégal : augmentation du taux du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE, art. 72) ; augmentation de la période d'implantation d'activités permettant de bénéficier des exonérations applicables dans les zones de restructuration de la défense (ZRD, art. 76) ; réforme du régime fiscal et social applicable aux attributions d'actions gratuites (art. 61) ; prorogation du dispositif de soutien aux jeunes entreprises innovantes (JEI, art. 73) ; réforme des minima sociaux (art. 87) ; enfin, augmentation du versement de transport en Ile-de-France. Le traitement médiatique de la LF 2017 n'a pas réservé beaucoup de place à ce volet "Mesures générales de soutien à l'emploi/activité économique", s'intéressant plutôt au prélèvement à la source de l'impôt au 1er janvier 2018 (2). Les revenus imposables à l'impôt sur le revenu donneront lieu, l'année au cours de laquelle le contribuable en a la disposition, à un prélèvement qui prendra la forme d'une retenue à la source effectuée par le débiteur (c'est-à-dire, pour les salariés, l'employeur) lors du paiement de ces revenus. Dans le champ des rapports de travail, cette nouvelle disposition fiscale est loin d'être neutre ou indifférente. En effet, la collecte et le versement de la retenue à la source constituent une nouvelle obligation à la charge de l'employeur, obligation générant un certain nombre de sanctions (fondées sur le retard de paiement ou non-versement de la retenue à la source par l'employeur, de violation du secret professionnel, de non déclaration ou de non-réalisation des retenues qui auraient dû être effectuées). Le Conseil constitutionnel (décision n° 2016-744 DC du 29 décembre 2016 N° Lexbase : A9172SXY) ne s'est prononcé que sur deux dispositifs intéressant le droit social/droit de l'emploi/droit de la protection sociale : l'article 61, modifiant le régime des prélèvements fiscaux et sociaux auquel sont soumises les distributions d'actions gratuites ; l'article 60 instaurant, à compter des revenus de l'année 2018 un prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu. Le Conseil constitutionnel n'a pas prononcé de censure, dans les deux cas (cons. 56 à 66 pour l'article 60, prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu et cons. 67 à 70 pour l'article 61, distributions d'actions gratuites).
CICE, ZRD, actions gratuites, JEI, minima sociaux : la LF 2017 couvre donc tous les champs du travail, emploi et protection sociale, sans logique, fil directeur ou cohérence. Certaines mesures s'inscrivent dans la continuité d'une réforme (ex., CICE, dans le prolongement du Pacte de responsabilité et de solidarité), de réflexions et travaux parlementaires (ex., réforme des minima sociaux, dans le prolongement du rapport de Christophe Sirugue (3)) ; d'autres n'ont pas de filiation avouée (ex., réforme des ZRD ou des JEI) ; d'autres sont réformées alors mêmes que les réformes antérieures sont à peine rentrées en vigueur (ex., attributions d'actions gratuites).

I - Mesures générale de soutien à l'emploi/activité économique

La LF 2017 comprend deux ensembles, un premier portant sur les mesures générales de soutien à l'emploi/activité économique (le CICE) et un second, les mesures sectorielles de soutien à l'emploi/activité économique (ZRD, JEI).

A - Mesures générale de soutien à l'emploi/activité économique : le CICE

Pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2017, le taux du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) passe de 6 % à 7 % de la masse salariale éligible (LF 2017, art. 72) (4).

1 - Genèse

Le CICE a été créé à la suite du rapport "Pacte pour la compétitivité de l'industrie française" remis au Premier ministre le 5 novembre 2012 par Louis Gallois (loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificatives pour 2012, entrée en vigueur le 1er janvier 2013 N° Lexbase : L7970IUQ, art. 66). Les objectifs assignés au CICE sont plutôt larges : amélioration de la compétitivité des entreprises à travers notamment des efforts en matière d'investissement, de recherche, d'innovation, de formation, de recrutement, de prospection de nouveaux marchés, de transition écologique et énergétique et de reconstitution de leur fonds de roulement.

Le crédit d'impôt porte sur la masse salariale des salariés dont les rémunérations brutes n'excèdent pas 2,5 fois le montant annuel du SMIC. Il bénéficie à toutes les entreprises relevant de l'impôt sur les sociétés (IS) ou de l'impôt sur le revenu d'après leur bénéfice réel. Le taux du CICE s'élevait à 4 % en 2013 et est passé à 6 % depuis 2014 en France métropolitaine. Les établissements localisés dans les DOM bénéficient d'un taux majoré à 9 % depuis 2015.

Peuvent bénéficier du CICE :

- les entreprises employant des salariés et soumises à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur le revenu d'après leur bénéfice réel ;

- les entreprises dont le bénéfice est exonéré transitoirement, en vertu de certains dispositifs d'aménagement du territoire ou d'encouragement à la création et à l'innovation ;

- les organismes partiellement soumis à l'IS comme les coopératives ou les organismes HLM, uniquement au titre de leurs salariés affectés à une activité soumise à l'IS.

2 - Evaluation

Le CICE a représenté pour les entreprises une baisse du coût du travail de 11,4 milliards d'euros en 2013 et de 17,6 milliards d'euros en 2014. Au 31 juillet 2016, plus de 44 milliards d'euros de CICE ont été alloués aux entreprises au titre des salaires versés en 2013, 2014 et 2015, dont 9,9 milliards d'euros ont été payés directement aux entreprises (restitutions), 17,8 milliards d'euros ont été imputés par les entreprises sur leur impôt (imputations) et enfin 17 milliards d'euros ont été reportés et sont inscrits à l'actif au bilan des entreprises (reports).

Selon le Comité de suivi de France Stratégie (5), le dispositif aurait permis de créer ou sauvegarder entre 50 000 et 100 000 emplois sur la période 2013-2014. S'appuyant sur les simulations effectuées par la Direction générale du Trésor, France Stratégie a avancé qu'à l'horizon 2020, le CICE conduirait à une activité supérieure de 0,1 point de PIB, à des exportations supérieures de l'ordre de 1 % et à un surcroît de 210 000 emplois par rapport à une situation où le dispositif n'aurait pas été mis en place.

Mais France Stratégie reconnaît qu'il est délicat d'attribuer les effets positifs du CICE en les distinguant des effets induits par des mesures pour l'emploi qui lui sont antérieures/contemporaines : en 2011, annualisation du calcul des exonérations "Fillon" (loi n° 2010-1594 du 20 décembre 2010 de financement de la Sécurité sociale pour 2011 N° Lexbase : L9761INT, LFSS 2011) ; en 2012, réintégration des heures supplémentaires dans les exonérations "Fillon" (loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011 de financement de la Sécurité sociale pour 2012 N° Lexbase : L4309IRZ, LFSS 2012), suppression des exonérations de cotisations sur les heures supplémentaires (loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 N° Lexbase : L9357ITQ), majoration du forfait social sur certains revenus et enfin, toujours en 2012, augmentation du taux de cotisation vieillesse (décret n° 2012-847 du 2 juillet 2012, relatif à l'âge d'ouverture du droit à pension de vieillesse N° Lexbase : L5309ITS).

3 - Augmentation du taux

La LF 2017 augmente le taux du CICE d'un point, qui passe de 6 % à 7 % de la masse salariale éligible pour les rémunérations versées à compter du 1er janvier 2017. Cette augmentation du taux du CICE est issue de la réorientation du pacte de responsabilité et de solidarité engagée le 30 juin 2016, qui substitue à la suppression définitive de la contribution sociale de solidarité des sociétés (dont les entreprises dont le chiffre d'affaires n'excède pas 19 millions d'euros étaient déjà exonérées), une hausse du taux du CICE.

Selon les travaux parlementaires (6), l'impact budgétaire de la hausse d'un point du taux du CICE serait nul pour l'exercice 2017, mais croissant pour s'établir, de façon pérenne, à 3,1 milliards d'euros par an à compter de 2021.

B - Mesures sectorielles de soutien à l'emploi/activité économique : ZRD, JEI

1 - Zones de restructuration de la défense

La loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 (art. 76) (7) augmente la période d'implantation d'activités permettant de bénéficier des exonérations applicables dans les zones de restructuration de la défense.

Les entreprises qui s'implantaient dans une ZRD dans les trois ans de la publication de l'arrêté classant un territoire en ZRD ont pu bénéficier de différentes aides fiscales et exonérations de charges sociales (8) :

- exemption pendant cinq ans de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés (CGI, art. 44 terdecies, al. 1er, I N° Lexbase : L3940KWT) ;

- exemption pendant cinq ans de la cotisation foncière des entreprises (CGI, art. 1466 A, I quinquies N° Lexbase : L6569K8S) ;

- exonération de cotisations patronales au titre des assurances sociales et des allocations familiales (loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 N° Lexbase : L3784IC7, art. 34, 1° du VI).

Seules deux ZRD rentrent dans les prévisions de la LF 2017 (période de trois ans prise en compte pour l'implantation des entreprises pas encore arrivée à terme) : zone d'emploi et à la commune de Châlons-en-Champagne, dans le département de la Marne (arrêté du 28 mai 2015, relatif à la délimitation des zones de restructuration de la défense N° Lexbase : L6983I87) ; communes de la Côte d'Or, de la Haute-Saône, de l'Oise, ainsi que Châteaudun dans l'Eure-et-Loir (arrêté du 8 février 2016, relatif à la délimitation des zones de restructuration de la défense N° Lexbase : L1557KZP).

Cette limite de trois ans n'est plus adaptée et se révèle trop courte pour permettre utilement l'implantation d'activités d'envergure dont les délais de préparation et de conception sont longs. Cette augmentation de trois ans concerne les ZRD reconnues à compter du 1er janvier 2015, et s'appliquera donc aux deux ZRD précédemment mentionnées ainsi qu'à toute nouvelle ZRD qui serait reconnue à l'avenir.

Le législateur n'a donc pas suivi les recommandations de l'IGAS (9) ni de la Cour des comptes (10), très critiques, mettant en avant : l'accès très inégal aux avantages fiscaux et exonérations sociales mises en place en raison de leur complexité ; la redondance avec d'autres dispositifs territoriaux (CER, ZRR) ; un dispositif concernant seulement 1955 salariés, pour un coût s'élevant à 8,6 millions d'euros, soit 4 400 euros par équivalent temps plein ; l'absence d'évaluation de l'efficacité du dispositif en termes de création d'emplois ; enfin, dispositif mal ciblé.

2 - Prorogation du dispositif de soutien aux jeunes entreprises innovantes (JEI)

La loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 (art. 73) (11) proroge pour trois ans le dispositif de soutien fiscal aux jeunes entreprises innovantes (JEI), permettant aux entreprises créées entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2019 d'en bénéficier.

Le dispositif a pour objectif de soutenir le développement de la recherche privée, en valorisant la recherche des organismes de formation supérieure et de recherche, en encourageant les transferts et la valorisation des résultats de la recherche des universités et en favorisant la création et la croissance des entreprises innovantes.

L'avantage consiste en une exonération des cotisations patronales de Sécurité sociale (à l'exclusion des cotisations AT/MP), pendant sept ans, pour les rémunérations inférieures à 4,5 SMIC ; le montant global de l'exonération est plafonné à hauteur de cinq fois le plafond de la Sécurité sociale.

La mission IGAS-IGF (12) ainsi que la Direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS) ont porté une évaluation positive sur le dispositif JEI (13). L'effet du dispositif sur l'emploi s'élèverait à 16 400 emplois de 2004 à 2009, soit 12 000 emplois supplémentaires créés grâce au dispositif JEI (par rapport à la trajectoire qu'auraient suivi ces entreprises en dehors du dispositif JEI) et 4 600 emplois préservés au sein des JEI du fait d'une mortalité plus faible que les entreprises et un surplus de 7 200 salariés de plus que leurs homologues permis par des embauches plus importantes.

II - Régime des prélèvements fiscaux et sociaux auquel sont soumises les distributions d'actions gratuites

A - Genèse

Le régime social favorable des attributions gratuites d'actions vise deux objectifs : maintenir des niveaux de rémunération compétitifs au niveau international, permettant ainsi de lutter contre l'expatriation des salariés et des dirigeants les plus qualifiés, tout en garantissant la contributivité de ces avantages ; développer un actionnariat salarié.

1 - Modalités

Mis en place par la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004, de finances pour 2005 (N° Lexbase : L5203GUA, art. 83), le dispositif comprend plusieurs aspects (CSS, art. L. 136-2 N° Lexbase : L0434LC3, L. 136-6 N° Lexbase : L3812KW4, L. 137-13 N° Lexbase : L1896KGC, L. 137-14 N° Lexbase : L1895KGB et L. 242-1 N° Lexbase : L1234LCP ; CGI, art. 80 quaterdecies N° Lexbase : L1893KG9, 150 0-A N° Lexbase : L4916I3H, 200 A N° Lexbase : L1890KG4) (14) :

- les actions sont exclues de l'assiette des cotisations de Sécurité sociale et de celle du forfait social, entraînant également une exclusion d'assiette d'autres cotisations et contributions (versement transport, retraite complémentaire, apprentissage, etc.) ;

- les gains d'acquisition et de cession sont assujettis aux prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine au taux global de 15,5 % à la charge du bénéficiaire. Sur un plan fiscal, l'ensemble des gains est imposé, avec le bénéfice de l'abattement pour la durée de détention prévu pour les plus-values mobilières, au moment de la cession des titres ;

- une contribution patronale spécifique au taux de 20 % est due. Elle est assise sur la valeur des actions à la date d'acquisition par le bénéficiaire. Les PME qui n'ont procédé à aucune distribution de dividendes depuis leur création sont exonérées de cette contribution dans la limite, par salarié, du plafond annuel de la Sécurité sociale (38 616 euros en 2016).

Les entreprises éligibles (C. com., art. L. 225-197-1 N° Lexbase : L1899KGG) sont les sociétés par actions (sociétés anonymes, sociétés par actions simplifiées et sociétés en commandite par actions), y compris lorsque les titres de la société ne sont pas cotés.

Sont susceptibles de bénéficier d'une attribution gratuite d'actions, les mandataires sociaux (président du conseil d'administration, directeur général, directeurs généraux délégués, membres du directoire ou le gérant de la société) et les membres du personnel salarié.

Pour les bénéficiaires, l'attribution gratuite d'actions peut donner lieu à deux principaux types de gains : le gain d'acquisition (valeur des actions attribuées à la date de leur acquisition) et la plus-value de cession (différence entre la valeur des titres au moment de leur cession et le prix d'acquisition). Le régime fiscal applicable dans les deux cas est aligné sur celui des plus-values mobilières, prévu à l'article 150-0 A du Code général des impôts (CGI, art. 80 quaterdecies et 200 A). Les gains réalisés sont donc soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu, après application des abattements pour la durée de détention, soit 50 % pour les titres détenus depuis deux ans et moins de huit ans ; 65 % pour les titres détenus depuis au moins huit ans.

Sur le plan social, les actions sont exclues de l'assiette des cotisations de Sécurité sociale et de celle du forfait social, mais les bénéficiaires sont redevables de prélèvements sociaux sur les revenus du patrimoine, au taux de 15,5 %, au titre de la CSG (8,2 %), de la CRDS (0,5 %), du prélèvement social (4,5 %), de la contribution additionnelle au prélèvement social (0,3 %) et enfin, au prélèvement de solidarité (2 %).

Il faut relever, au passage, que le taux de 15,5 % résulte de la loi du 6 août 2015 (loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques N° Lexbase : L4876KEC), puisque les gains d'acquisition d'actions gratuites n'étaient plus soumis à la CSG pesant sur les revenus d'activité et de remplacement mais à celle pesant sur les revenus du patrimoine. Le basculement vers les prélèvements sociaux pesant sur les revenus du patrimoine (et non sur les revenus d'activité) a eu pour effet de faire passer le total de ces prélèvements sociaux de 8 % à 15,5 %.

2 - Conditions

Un certain nombre de conditions doivent être remplies :

- l'employeur doit notifier à l'organisme de recouvrement l'identité des bénéficiaires (salariés ou mandataires sociaux) au cours de l'année civile précédente, ainsi que le nombre et la valeur des actions attribuées à chacun d'entre eux ;

- le délai pendant lequel le conseil d'administration est autorisé par l'Assemblée générale extraordinaire à procéder à des attributions gratuites d'actions ne peut excéder trente-huit mois ;

- le pourcentage maximal d'actions pouvant être attribué gratuitement ne peut excéder 10 % du capital social ou 15 % pour les petites et moyennes entreprises dont les titres ne sont pas cotés (15) ;

- la période d'acquisition au terme de laquelle l'attribution des actions à leurs bénéficiaires est définitive ne peut être inférieure à un an ;

- la durée minimale de l'obligation de conservation des actions par leurs bénéficiaires ne peut être inférieure à un an et court à compter de l'attribution définitive des actions.

Pour la Cour de cassation (Cass. QPC, 8 octobre 2014, n° 14-40.035, F-P+B N° Lexbase : A2033MYX) (16), en fixant les conditions auxquelles est subordonné le bénéfice de l'exonération de cotisations de Sécurité sociale, le régime mis en place par le législateur (CSS, art. L. 242-1) n'institue pas une "sanction" à caractère de punition et ne ressortit pas au champ d'application de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen du 26 août 1789 (N° Lexbase : L1372A9P).

3 - Réformes

Afin de prévenir les abus et les optimisations, le législateur a restreint progressivement le champ des avantages fiscaux procurés par les modalités d'assiette.

Jusqu'en 2015, l'avantage en matière d'assujettissement social lié aux attributions d'actions gratuites a été sensiblement réduit par :

- la LFSS pour 2008 (loi n° 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la Sécurité sociale pour 2008 N° Lexbase : L5482H3G, art. 13) (17) et la création d'une contribution patronale (CSS, art. L. 137-13) au taux de 10 % et contribution salariale (CSS, art. L. 137-14) au taux de 2,5% ;

- la LFSS pour 2011 (art. 11) (18) et l'augmentation de la contribution patronale (CSS, art. L. 137-13), comprenant un taux 1 de 14 % et un taux 2 de 10 % si les attributions d'actions sont supérieures à un demi PASS ; et de la contribution salariale (CSS, art. L. 137-14 N° Lexbase : L1895KGB), comprenant un taux 1 de 8 % et un taux 2 de 2,5 % si les attributions d'actions sont supérieures à un demi PASS ;

- la seconde LFR pour 2012 (loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012 N° Lexbase : L7970IUQ, art. 31) et la contribution patronale (CSS, art. L. 137-13) au taux de 30 % et contribution salariale (CSS, art. L. 137-14) au taux de 10 %.

La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (dite loi "Macron", art. 135) (19) a modifié le régime social applicable aux attributions gratuites, que l'on peut synthétiser ainsi :

- dans le domaine fiscal, application au "gain d'attribution" du cadre fiscal des plus-values mobilières, et non plus celui des traitements et salaires ;

- suppression de la contribution salariale de 10 % (auparavant à la charge des bénéficiaires) ;

- abaissement du taux de la contribution patronale de 30 % à 20 % ;

- exonération des PME n'ayant jamais distribué de dividendes, dans la limite du plafond de la Sécurité sociale ;

- assouplissement de la procédure d'attribution.

Cette réforme du régime des actions gratuites poursuivait un double objectif : répondre aux problématiques de recrutement des PME et limiter les risques de délocalisation des centres de décision des grands groupes (20).

B - Réforme de la LF 2017

1 - Périmètre de la réforme (LF 2017)

La LF 2017 (art. 61) (21) durcit le régime fiscal et social applicable aux actions gratuites en soumettant le gain d'attribution au régime de droit commun des traitements et salaires et en portant de 20 % à 30 % le taux de la contribution patronale, sauf lorsque la distribution est réalisée par une petite et moyenne entreprise n'ayant jamais versé de dividendes.

Le "gain d'acquisition" continue à bénéficier du régime fiscal des plus-values mobilières, mais seulement jusqu'à 300 000 euros : au-delà, le gain d'acquisition est imposé comme un salaire. L'application du "gain d'acquisition" initial lié aux actions gratuites au régime de l'impôt sur le revenu de la catégorie des traitements et salaires et non plus dans la catégorie des plus-values mobilières (comme le prévoyait la loi du 6 août 2015) a une réelle incidence (22).

Pour que la restriction ne pénalise, quelle que soit l'entreprise dans laquelle ils travaillent, l'ensemble des salariés que les plans d'attribution d'actions gratuites ont vocation à concerner, la LF 2017 a retenu le principe selon lequel le bénéficiaire du gain d'acquisition continue à bénéficier des abattements pour la durée de détention, dans une limite annuelle fixée à 300 000 euros (23).

Enfin, cette réforme, en son volet "fiscal" et "social", s'applique aux actions gratuites dont l'attribution a été autorisée par une décision de l'assemblée générale extraordinaire postérieure à la publication de la LF 2017. En d'autres termes, dans un souci de stabilité fiscale, ces nouvelles dispositions ne sont applicables qu'aux actions gratuites dont l'attribution a été autorisée par une décision de l'assemblée générale extraordinaire postérieure à la publication de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.

2 - Validation constitutionnelle

Le Conseil constitutionnel (décision n° 2016-744 DC du 29 décembre 2016) (24) n'a pas prononcé de censure sollicitée par les requérants, lesquels contestaient la procédure d'adoption de l'article 61 (introduit à l'occasion de la nouvelle lecture du texte par l'Assemblée nationale, en violation de l'article 45 de la Constitution). En effet, si l'article 61 résulte de l'adoption, en nouvelle lecture, à l'Assemblée nationale, d'un amendement portant article additionnel, cet amendement était, à ce stade de la procédure, en relation directe avec l'article 4 bis figurant dans la première partie de la loi déférée (dont il visait à transférer le contenu, modifié, en seconde partie de la même loi).


(1) F. Dal Vecchio, Chronique de fiscalité des entreprises - Janvier 2017 (spéciale loi de finances pour 2017 et loi de finances rectificative pour 2016), Lexbase, éd. fisc., n° 682, 2017 (N° Lexbase : N6079BW3) ; LSQ, n° 17236 du 4 janvier 2017. Travaux parlementaires : V. Rabault, Rapport Assemblée nationale, n° 4125, Tome II, Examen de la première partie, Conditions générales de l'équilibre financier, Volume 1, Examen des articles, 13 octobre 2016 ; V. Rabault, Rapport Assemblée nationale, Tome I, n° 4314, 14 décembre 2016.
(2) A. Grevet, Loi de finances pour 2017 et loi de finances rectificative pour 2016 : focus sur les mesures relatives à la fiscalité des personnes physiques, Lexbase, éd. fisc., n° 682 du 5 janvier 2017 (N° Lexbase : N6080BW4).
(3) Ch. Sirugue, Repenser les minima sociaux Vers une couverture socle commune, Rapport au Premier Ministre, 18 avril 2016, Rapporteurs, C. Cadoret et S. Grobon.
(4) V. Rabault, Rapport Assemblée nationale n° 4125, Tome II, Vol. 1, 13 octobre 2016, préc..
(5) Comité de suivi du CICE, Rapport, 29 septembre 2016 ; v. aussi Comité de suivi du CICE, Rapport 2013 ; Rapport 2014 ; Rapport 2015 ; M. Plane, Evaluation de l'impact économique du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE), Revue de l'OFCE, n° 126, février 2012, p. 141-153.
(6) V. Rabault, Rapport Assemblée nationale, Tome I, n° 4314, 14 décembre 2016, préc..
(7) V. Rabault, Rapport Assemblée nationale, Tome I, n° 4314, 14 décembre 2016, préc..
(8) Etude d'impact, PLFSS 2017, Annexe 10 Fiches d'évaluation préalables des articles du projet de loi, Fiche n° 15, p. 96.
(9) R. Toussain, F. Schechter, D. Ientile, M. Morel, avec le concours de T. Frassinetti et S. Idrissi-machichi, Revue de dépenses sur les exonérations et exemptions de charges sociales spécifiques, Rapport, Inspection générale des finances n° 2015-M-016-01 et Inspection générale des affaires sociales n° 2015-029R, juin 2015, Annexe III, Fiches individuelles par dispositif, "3125 - Zones de restructuration de la défense (ZRD)", p. 57-60.
(10) Rapport de la Cour des comptes, novembre 2014, Les aides de l'Etat aux territoires concernés par les restructurations des armées. Recommandation n° 4.
(11) Etude d'impact, PLFSS 2017, Annexe 10, Fiches d'évaluation préalables des articles du projet de loi, Fiche n° 25, préc., p. 128 ; B. Le Brethon, Rapport, Examen de la loi n° 2003-1311 de finances pour 2004 à l'Assemblée nationale (séance du 14 novembre 2003), Favoriser le développement de la recherche privée par les entreprises innovantes.
(12) R. Toussain et alii, Revue de dépenses sur les exonérations et exemptions de charges sociales spécifiques, Rapport, juin 2015, préc., Annexe III, Fiches individuelles par dispositif, 4101 - Jeunes entreprises innovantes, p. 118.
(13) S. Hallépée et A. Houlou Garcia, Evaluation du dispositif Jeunes entreprises innovantes, Direction générale de la compétitivité, de l'industrie et des services (DGCIS), septembre 2012.
(14) J.-Ph. Lieutier, Le modèle de l'actionnariat salarié, thèse, 18 novembre 2011, PUAM, décembre 2012, § 154 ; Etude d'impact, PLFSS 2017, Annexe 10 Fiches d'évaluation préalables des articles du projet de loi, préc., Fiche n° 52, p. 203 ; circ. DSS, n° 2008/119, du 8 avril 2008, relative à la mise en oeuvre de la contribution patronale sur les attributions d'options de souscription ou d'achat d'actions et sur les attributions gratuites d'actions (N° Lexbase : L4155LCU) ; Guide de l'épargne salariale (Direction générale du travail, Direction de la Sécurité sociale, Direction générale du Trésor, Direction de la législation fiscale), 2014.
(15) Ce plafond de distribution est porté à 30 % lorsque l'attribution bénéficie à l'ensemble des membres du personnel salarié de la société. Au-delà de 10 % ou de 15 % du capital social distribué en actions, l'écart entre le nombre d'actions distribuées à chaque salarié ne peut être supérieur à un rapport de un à cinq lorsque les actions gratuites sont attribuées à l'ensemble du personnel.
(16) Nos obs., Lexbase, éd. soc., n° 588, 2014 (N° Lexbase : N4307BU3).
(17) J.-Ph. Lieutier, Le modèle de l'actionnariat salarié, préc., § 154 ; nos obs., Lexbase, éd. soc., n° 287, 2008 (N° Lexbase : N6093BDZ) ; mesure d'application réglementaire : circulaire DSS n° 2008/119 du 8 avril 2008, préc., LSQ, n° 144 du 20 juin 2008 et LSQ, n° 157 du 5 août 2011 ; R. Vatinet, LFSS pour 2008 : institution d'une contribution patronale et salariale sur les stock-options et les attributions d'actions gratuites, JCP éd. S, 2008, n° 1056.
(18) Loi de financement de la Sécurité sociale pour 2011 du 20 décembre 2010 (LSQ, n° 157 du 5 août 2011 ; nos obs., Lexbase, éd. soc., n° 425, 2011 N° Lexbase : N1792BRS ; circ. DGFIP 5F-11-11 du 25 mai 2011, BOI n° 49 du 3 juin 2011 (N° Lexbase : X9213AI3), (LSQ, n° 15876 du 14 juin 2011).
(19) B. Chaumet, Lexbase, éd. soc., n° 615, 2015 (N° Lexbase : N7655BU3).
(20) Arguments développés par A. de Montgolfier, dans son Rapport général n° 140, Sénat (2016-2017), Tome II, Fasc. 1, Vol. 1, 24 novembre 2016, p. 69.
(21) Amendements n° 580 (rect) présenté par V. Rabault, 14 octobre 2016 ; A. de Montgolfier, Rapport général n° 140, Sénat (2016-2017), Tome II, Fasc. 1, Vol. 1 (examen des articles), 24 novembre 2016, préc., p. 69 ; V. Rabault, Rapport Assemblée nationale, Tome I, n° 4314, 14 décembre 2016, préc., p. 35 ; Amendement n° CF252 présenté par V. Rabault le 13 décembre 2016 ; Amendement n° CF 110 présenté par M. Colas le 13 décembre 2016.
(22) V. Rabault, Rapport Assemblée nationale, Tome I, n° 4314, 14 décembre 2016, préc., p. 35, selon laquelle, un gain de 100 imposable au taux marginal de l'impôt sur le revenu sera prélevé à hauteur de 45 euros si le titre est cédé moins de deux ans après son acquisition. Dans le cadre de l'abattement de droit commun, il sera prélevé de 22,50 euros après deux ans de détention et de 15,75 euros après huit ans de détention, alors que ce prélèvement serait resté stable à 45 euros dans le régime des traitements et salaires.
(23) Amendement n° CF 110 Présenté par M. Colas le 13 décembre 2016, exposé des motifs.
(24) Question de la constitutionnalité de la réforme débattue par les sénateurs : en ce sens, A. de Montgolfier, dans son Rapport général n° 140, Sénat (2016-2017), Tome II, Fasc. 1, Vol. 1, 24 novembre 2016, préc., p. 69, pour lequel la constitutionnalité de la réforme n'est pas assurée, compte tenu de l'ampleur de l'atteinte aux situations acquises.

Annexe

Le régime fiscal des attributions gratuites d'actions

Régime antérieur à la loi du 6 août 2015 Régime prévu par la loi du 6 août 2015 Régime issu de la loi de finances 2017
Impôt sur le revenu et prélèvements sociaux Catégorie : traitements et salaires (barème de l'impôt sur le revenu sans abattement pour durée de détention et prélèvements sociaux de 8 % perçus en année N+1) Catégorie : plus-values mobilières (abattement pour durée de détention puis application du barème de l'impôt sur le revenu et prélèvements sociaux de 15,5 % en année N+1) Catégorie : traitements et salaires au-delà de à 300 000 euros, maintien du régime des plus-values mobilières pour les PME qui n'ont pas distribué de dividendes
Assiette : valeur de l'AGA à la date d'acquisition définitive en année N+2 Assiette : inchangée, mis à part le fait que la date d'acquisition définitive est en N+1 et non plus en N+2 Assiette : inchangée
Fait générateur : cession du titre Fait générateur : inchangé Fait générateur : inchangé
Contribution salariale spécifique Assiette : identique à l'impôt sur le revenu Suppression totale de la contribution salariale Suppression maintenue
Taux : 10 %
Fait générateur : cession du titre
Contribution patronale spécifique Assiette : valeur à la date d'attribution (en année N) Assiette : valeur à la date d'acquisition (en année N+1) Assiette : inchangée
Fait générateur : un mois après la décision d'attribution (en année N) Fait générateur : un mois après la date d'acquisition définitive (en année N+1) Fait générateur : inchangé
Taux : 30 % Taux : 20 % Taux : 30 %
- Exonération totale pour les PME qui n'ont distribué aucun dividende Maintien de cette exonération

Source : V. Rabault, Rapport Assemblée nationale, Tome I, n° 4314, 14 décembre 2016, préc., p. 35.

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Fiscalité des entreprises

[Brèves] Crédit d'impôt en faveur des métiers d'art : cas d'inéligibilité malgré des constats d'huissier

Réf. : CE 8° ch., 30 décembre 2016, n° 391877, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A4914S3E)

Lecture: 1 min

N6149BWN

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par Jules Bellaiche

Le 19 Janvier 2017

Le fait que des modèles de collections aient fait l'objet de constats d'huissier en vue de leur protection au titre du Code de la propriété intellectuelle ne suffit pas à faire regarder ces modèles comme des produits nouveaux permettant d'obtenir le crédit d'impôt en faveur des métiers d'art. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 30 décembre 2016 (CE 8° ch., 30 décembre 2016, n° 391877, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A4914S3E). En l'espèce, la société requérante a demandé la restitution d'un crédit d'impôt métiers d'art prévu à l'article 244 quater O du CGI (N° Lexbase : L0946I78). En principe, les opérations de conception de nouveaux produits ouvrant droit au crédit d'impôt prévu par cet article consistent en la mise en oeuvre de moyens visant à la production d'un travail de création original. Pour la Haute juridiction, cette société n'établissait pas, en faisant valoir qu'elle produisait deux collections annuelles composées de plusieurs dizaines de références différentes dont chaque pièce faisait l'objet d'un processus de fabrication et de dessins innovants, que ces collections, par leurs caractéristiques, procédaient d'un effort original de création qui les aurait distinguées des objets industriels ou artisanaux existants. Ainsi, les collections litigieuses ne constituaient pas des nouveaux produits ouvrant droit au crédit d'impôt, et ceci, malgré la circonstance que ces modèles auraient fait l'objet de constats d'huissier .

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Fiscalité du patrimoine

[Jurisprudence] De la réserve temporelle et du rapport fiscal en matière de droits de mutation à titre gratuit sur donations et successions

Réf. : Cons. const., 9 décembre 2016, n° 2016-603 QPC (N° Lexbase : A1551SP7)

Lecture: 8 min

N6161BW4

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par Franck Laffaille, Professeur de droit public, Faculté de droit (CERAP) - Université de Paris XIII (Sorbonne/Paris/Cité)

Le 12 Janvier 2017

Dans cette QPC n° 2016-603 en date du 9 décembre 2016, le Conseil constitutionnel refuse de censurer les dispositions de l'article 784 du CGI (N° Lexbase : L0669IUC) dans la rédaction issue de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012, de finances rectificative pour 2012 (N° Lexbase : L9357ITQ). Des donations entre vifs et des successions travaillées par l'application des droits de mutations à titre gratuit ; de la règle du "rapport fiscal" des donations antérieures et de la non application de cette règle : tel est l'enjeu, temporel et financier, de la présente affaire (Cons. const., 9 décembre 2016, n° 2016-603 QPC).
  • Substance de la décision

En présence de donations opérées il y a plus de 15 ans, donations ou successions sont réputées vierges et bénéficient d'un phénomène d'oubli : elles sont imposées sans qu'il soit tenu compte des donations de plus de 15 ans.

L'article 784 dispose :

"Les parties sont tenues de faire connaître, dans tout acte constatant une transmission entre vifs à titre gratuit et dans toute déclaration de succession, s'il existe ou non des donations antérieures consenties à un titre et sous une forme quelconque par le donateur ou le défunt aux donataires, héritiers ou légataires et, dans l'affirmative, le montant de ces donations ainsi que, le cas échéant, les noms, qualités et résidences des officiers ministériels qui ont reçu les actes de donation, et la date de l'enregistrement de ces actes.

La perception est effectuée en ajoutant à la valeur des biens compris dans la donation ou la déclaration de succession celle des biens qui ont fait l'objet de donations antérieures, à l'exception de celles passées depuis plus de quinze ans, et, lorsqu'il y a lieu à application d'un tarif progressif, en considérant ceux de ces biens dont la transmission n'a pas encore été assujettie au droit de mutation à titre gratuit comme inclus dans les tranches les plus élevées de l'actif imposable.

Pour le calcul des abattements et réductions édictés par les articles 779 (N° Lexbase : L6869IZG), 780 (N° Lexbase : L9249HZL), 790 B (N° Lexbase : L9408ITM), 790 D (N° Lexbase : L9407ITL), 790 E (N° Lexbase : L9406ITK) et 790 F (N° Lexbase : L9405ITI) il est tenu compte des abattements et des réductions effectués sur les donations antérieures visées au deuxième alinéa consenties par la même personne".

Il n'y a point censure dans la mesure où, selon le Conseil, les dispositions contestées ne méconnaissent ni le droit de propriété, ni aucun droit ou liberté que la Constitution garantit. Pour autant, le Conseil émet une réserve d'interprétation. Dès lors que chaque donation ou succession constitue un fait générateur particulier pour l'application des règles d'imposition, il s'ensuit que les dispositions contestées ne peuvent "avoir pour objet ou pour effet de conduire à appliquer des règles d'assiette ou de liquidation autres que celles qui étaient applicables à la date de chaque fait générateur d'imposition" (cons. 8). Si tel était le cas, il serait, à mauvais droit, porté atteinte aux situations légalement acquises.

  • Prétentions des requérants

Au coeur du litige, une donation-partage, effectuée en juin 2002 par une dame aux requérants. Celle-ci décède deux années plus tard, soit moins de 15 années après la donation-partage évoquée en amont. Elle est donc, sur le fondement de l'article 784-2 du CGI, rapportée à la succession de chacun des héritiers lorsqu'advient le moment de liquider les droits de mutation à titre gratuit. Saisi, le TGI de Toulouse transmet la QPC à la Cour de cassation qui l'adresse au Conseil constitutionnel (Cass. com., 4 octobre 2016, n° 16-40.234, FS-D N° Lexbase : A9350R43). Aux yeux des requérants, "les modifications successives du délai de rappel fiscal prévu par le deuxième alinéa de l'article 784 du CGI entre la date des donations et le jour du décès ont altéré, avec effet rétroactif, les droits qu'ils avaient acquis sous le régime du texte en vigueur au jour des donations" (1).

Il serait porté atteinte, en raison de l'instabilité normative et temporelle visant le délai de rappel fiscal, au principe de sécurité juridique et de confiance légitime. Immédiatement, il est loisible de rappeler que ce beau principe ne fait guère partie de l'humus culturel français, contrairement aux pays nordiques (plutôt de matrice protestante d'ailleurs) ayant une lecture un peu plus exigeante (au profit des citoyens-contribuables) de la notion d'Etat de droit. Les requérants invoquent plus précisément une violation de l'article 16 de la DDHC de 1789 (N° Lexbase : L1363A9D), article-bonne à tout faire : "Toute Société dans laquelle la garantie des Droits n'est pas assurée, ni la séparation des Pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution". Le législateur aurait porté atteinte, en portant à 15 longues années le délai à partir duquel donations et successions sont victimes d'imposition sans qu'il soit tenu compte des donations antérieures, aux situations légalement acquises ; il aurait remis en cause les effets que les saisissants pouvaient légitimement attendre desdites situations.

  • Truisme constitutionnel : de la puissance normative (contrôlée) du Parlement

Le Conseil constitutionnel rappelle (au considérant n° 5) un double truisme, tellement louable qu'il en devient parfois suspect. Tout d'abord, le législateur peut, à condition d'intervenir dans son domaine normatif de compétence, modifier ou abroger des textes antérieurs. Magnifique : le pouvoir législatif échoit au Parlement, composé des élus de la Nation. Secondement, le Parlement ne saurait priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ; il ne saurait porter atteinte aux situations légalement acquises, ni remettre en cause les effets légitimement attendus de ces situations. Magnifique (bis) : le Parlement est une entité connaissant des bornes juridictionnelles posées par le juge de la loi.

  • De la virginité en droit fiscal, ou du "régime dérogatoire favorable"

Le (long) considérant n° 6 est particulièrement intéressant. Tout d'abord, le Conseil constitutionnel opère, de manière didactique, une petite leçon de droit fiscal. Le propos mérite d'être remarqué, les décisions du Conseil constitutionnel relevant le plus souvent d'une pénible anorexie argumentative.

Après avoir rappelé que les droits de mutation à titre gratuit sont liquidés, en général, via un barème progressif, le Conseil souligne les dispositions législatives déférées prévoient, pour que l'impôt connaisse une juste et effective progressivité, la prise en compte des donations antérieures au moment de calculer l'imposition des donations ou successions. De plus (et par exception), cette imposition des donations ou successions fait l'objet d'un calcul qui élude les donations antérieures opérées depuis plus de 15 ans. Exact, vrai, non discutable ; cela s'appelle le droit positif français.

De tout cela, il convient ("Il résulte" nous dit le juge) de tirer la conséquence suivante, qui n'est pas loin de faire office de conclusion avant l'heure : nous sommes en présence d'une "règle dérogatoire favorable" qui conduit à ce qu'une donation ou une succession, qui survient après une donation vieille de plus de 15 années, est imposée selon des modalités spécifiques. Elle est imposée en bénéficiant, en quelque sorte, d'une fiction, "comme si" : "comme si" aucune donation n'avait été auparavant consentie. Dès lors, l'application de cette "règle dérogatoire favorable" permet à la donation ou succession présente de bénéficier de droits à abattement, d'un barème et de droits à réduction complètement reconstitués. "Favorable" ; il fallait oser. Comment ne pas constater que le juge regarde avec amour fiscal le législateur et en tire des conclusions politiques hautement subjectives ? Les dispositions contestées, en portant à 15 ans, voire 10 ans, voire 6 ans le délai du rapport fiscal, donneraient naissance à un régime "dérogatoire favorable"... Plaisanterie juridictionnelle. Comment une régression temporelle et fiscale peut-elle être qualifiée de "favorable" par le juge constitutionnel ? Si demain, le délai est porté à 30 ans, sans doute s'agira-t-il toujours d'un régime dérogatoire favorable... On a connu logique juridique fiscalement plus tranquille pour le contribuable.

  • Passé/présent... is/ought : de la "loi de Hume" bizarrement transposée en droit fiscal

Le Conseil constitutionnel adoube encore la politique fiscale du législateur dans le considérant suivant, le n° 7. Partant du principe que "Chaque donation ou succession constitue un fait générateur particulier pour l'application des règles d'imposition", il tire (au considérant n° 9) la conclusion suivante : le contribuable ne saurait attendre que les modalités d'imposition d'une donation passée produisent des effets légitimement attendus s'agissant des modalités d'imposition applicables aux donations ou aux successions futures.

En tordant quelque peu le bâton peu droit de la logique jurisprudentielle fiscale, le Conseil constitutionnel semble énoncer une version moderne de la "loi de Hume". Si le législateur a, un jour, usité l'indicatif, il ne saurait, pour l'avenir, être lié par les cordes de l'impératif. Il est vrai que la "loi de Hume" porte aussi le nom de guillotine en vertu de laquelle tout devoir-être (ought) est prohibé à partir d'un être (is). Et après, d'aucuns prétendent que le Conseil constitutionnel ne fait pas, contrairement à ses homologues italiens ou allemands, de la philosophie, de la sociologie, voire de la théorie du droit ! Puisque "Chaque donation ou succession constitue un fait générateur particulier pour l'application des règles d'imposition", il ne saurait y avoir gel, lors de l'imposition d'une donation première, des règles d'imposition applicables en matière de droits de mutation à titre gratuit. S'ensuit certes une évidente instabilité fiscale ; mais elle n'est que la conséquence logique du raisonnement récusant au contribuable un droit, celui qu'une imposition passée puisse produire des effets légitimement attendus. Puisqu'on n'est point en droit d'attendre légitimement d'effets de l'imposition de donations passées, il n'existe point d'obligation pour le législateur d'édicter des mesures transitoires. Disons que la notion de garantie temporelle, source première de sécurité juridique, a fortiori dans le domaine fiscal, est entrevue par le juge de manière étroite.

  • De la réserve, ou la sanctuarisation de l'interprétation de la doctrine administrative

"Chaque donation ou succession constitue un fait générateur particulier pour l'application des règles d'imposition". De cela, il découle ("Il en résulte") que le législateur ne peut produire une norme ayant pour objet ou pour effet d'entraîner la mise en oeuvre de "règles d'assiette ou de liquidation autres que celles qui étaient applicables à la date de chaque fait générateur d'imposition". La réserve d'interprétation posée par le Conseil constitutionnel ne se comprend qu'au regard de la possible lecture littérale de l'article 784 du CGI et de la position, jusqu'alors, de la doctrine administrative sur cette question.

Une interprétation littérale de l'article 784 du CGI pourrait conduire à retenir, lors d'une donation ou succession, le régime fiscal de la dernière transmission et à l'appliquer à l'ensemble des transmissions précédentes. L'intégration de donations antérieures visées par le rapport fiscal reviendrait à ne pas apprécier séparément chaque mutation à titre gratuit. Comme le rappelle le commentaire de la décision, telle n'est pas la position de l'administration : "les perceptions effectuées sur les donations successives consenties par une personne et sur la déclaration de sa succession sont donc reliées les unes aux autres non par les droits liquidés mais par l'actif imposable" (2). On peut encore mesurer la grande mansuétude de l'administration à l'aune de cette formule : "la somme des perceptions successives n'est pas toujours égale au montant de l'impôt qui aurait été exigible si la perception avait été effectuée globalement lors de la dernière mutation, car chaque transmission ne cesse pas d'être considérée comme un fait générateur particulier" (3).

Le Conseil constitutionnel opère ainsi, avec cette réserve, une lecture de la loi synonyme d'un renforcement de la sécurité juridique des contribuables. A double titre. Tout d'abord, dans le cadre du rapport dual abstrait "loi/Constitution", il détermine une lecture de la loi qui s'impose à toutes les juridictions. Secondement, dans le cadre du rapport ternaire concret "loi/doctrine administrative/Constitution", le Conseil constitutionnel appose des garanties au profit du contribuable. Il réceptionne la position de l'administration en assortissant cette lecture de la loi de garanties constitutionnelles. Il n'est jamais bon que la liberté herméneutique de la doctrine administrative se meuve sans linéaments clairs, sans bornes juridictionnelles minimales. Ce qui est intéressant dans cette QPC n'est pas seulement l'interprétation retenue par le juge. Mérite intérêt le fait qu'il a préféré sanctuariser une lecture de la loi déjà enracinée dans la glaise de l'interprétation doctrinale. L'administration avait raison de ne pas retenir une lecture littérale de l'article 784 du CGI nous dit le juge ; ce dernier a raison de réaliser cette opération de sanctuarisation juridictionnelle.


(1) In Commentaire de la QPC n° 2016-603, site du Conseil constitutionnel.
(2) BOI-ENR-DMTG-10-50-50, n° 70 (N° Lexbase : X5017ALE).
(3) BOI-ENR-DMTG-10-50-50, n° 100, préc..

newsid:456161

Habitat-Logement

[Brèves] Saisine du juge du DALO : absence d'obligation de joindre le document de notification de la décision de la commission de médiation contenant les mentions faisant courir les délais de recours

Réf. : CE 4° et 5° ch.-r., 30 décembre 2016, n° 395706, mentionné aux tables du recueil Lebon (N° Lexbase : A4887S3E)

Lecture: 1 min

N6141BWD

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Le 14 Janvier 2017

Si la juridiction saisie sur le fondement du I de l'article L. 441-2-3-1 du Code de la construction et de l'habitation (N° Lexbase : L3232KWM) peut exiger du demandeur qu'il régularise sa demande en produisant la décision de la commission de médiation et, en l'absence de régularisation, opposer l'irrecevabilité prévue au second alinéa de l'article R. 778-2 du Code de justice administrative (N° Lexbase : L8759IBZ), elle ne peut exiger à peine d'irrecevabilité la production du document de notification comportant les mentions prévues par le premier alinéa du même article. Telle est la solution d'un arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 30 décembre 2016 (CE 4° et 5° ch.-r., 30 décembre 2016, n° 395706, mentionné aux tables du recueil Lebon N° Lexbase : A4887S3E). M. X a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'ordonner, en application de l'article L. 441-2-3-1 précité, son logement par l'Etat dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de cette date. Par une ordonnance du 26 octobre 2015, le tribunal administratif a rejeté sa demande. S'appuyant sur le principe précité, la Haute juridiction estime qu'en opposant une irrecevabilité à la demande de M. X au motif que, malgré la demande qui lui avait été régulièrement adressée par le tribunal, il n'avait pas produit le verso de la décision du 20 septembre 2013, qui comportait les informations mentionnées au premier alinéa de l'article R. 778-2 du Code de justice administrative, le tribunal administratif a entaché son ordonnance d'une erreur de droit.

newsid:456141

Impôts locaux

[Brèves] Evaluation d'un immeuble par voie d'appréciation directe : la date de 1999 trop éloignée du 1er janvier 1970

Réf. : CE 8° ch., 6 janvier 2017, n° 389484, inédit au recueil Lebon (N° Lexbase : A4877S3Z)

Lecture: 2 min

N6154BWT

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Le 13 Janvier 2017

Afin d'évaluer un immeuble par voie d'appréciation directe, l'administration, si elle se réfère à un acte de cession, doit se fonder sur un acte aussi proche que possible de la date de référence du 1er janvier 1970 ; ainsi, des transactions effectuées en 1999 ne peuvent servir de références pour l'évaluation. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 6 janvier 2017 (CE 8° ch., 6 janvier 2017, n° 389484, inédit au recueil Lebon N° Lexbase : A4877S3Z). En l'espèce, la société requérante a demandé en vain à l'administration fiscale de réduire le montant des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties et de taxe spéciale d'équipement auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011 à raison de l'hôtel dont elle est propriétaire. En principe, en vertu des articles 324 AB (N° Lexbase : L3148HMK) et 324 AC (N° Lexbase : L3149HML) de l'annexe III au CGI, la valeur vénale des immeubles évalués par voie d'appréciation directe doit d'abord être déterminée en utilisant les données figurant dans les différents actes constituant l'origine de la propriété de l'immeuble si ces données, qui ont une date la plus proche possible de la date de référence du 1er janvier 1970. Si ces données ne peuvent être regardées comme pertinentes du fait qu'elles présenteraient une trop grande antériorité ou postériorité par rapport à cette date, il incombe à l'administration fiscale de proposer des évaluations fondées sur les deux autres méthodes prévues à l'article 324 AC, en retenant des transactions qui peuvent être postérieures ou antérieures aux actes ou au bilan mentionnés ci-dessus dès lors qu'elles ont été conclues à une date plus proche du 1er janvier 1970. Ce n'est que si l'administration n'est pas à même de proposer des éléments de calcul fondés sur l'une ou l'autre de ces méthodes et si le contribuable n'est pas davantage en mesure de fournir ces éléments de comparaison qu'il y a lieu de retenir, pour le calcul de la valeur locative, les données figurant dans les actes constituant l'origine de la propriété du bien ou, le cas échéant, dans son bilan. Pour la Haute juridiction, qui a donné raison à la société, en jugeant que les transactions retenues par l'administration fiscale pour l'évaluation de l'immeuble en litige, qui avaient eu lieu en 1999, devaient être regardées comme étant suffisamment proches du 1er janvier 1970, alors qu'elles ont eu lieu vingt-neuf ans après la date de référence, le tribunal administratif a fait une inexacte application des articles 324 AB et 324 AC de l'annexe III au CGI (TA Cergy-Pontoise, 12 février 2015, n° 1306257) .

newsid:456154

Pénal

[Brèves] Caractérisation de la complicité du délit d'escroquerie

Réf. : Cass. crim., 5 janvier2017, n° 15-86.362, FS-P+B (N° Lexbase : A4789S3R)

Lecture: 2 min

N6183BWW

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Le 14 Janvier 2017

Les instructions données aux directeurs d'hôtel, même par l'intermédiaire d'autres complices, que sont les directeurs régionaux, constituent la complicité d'escroquerie pour avoir, en produisant des dossiers d'indemnisation comportant de fausses attestations de formation, trompé le fonds d'assurance de la formation dans l'industrie hôtelière. En outre, le soutien juridique et administratif frauduleusement financé par le fonds d'assurance ayant bénéficié aux directeurs salariés des hôtels est constitutif de recel d'escroquerie. Et, ces deux délits ne procédant pas de manière indissociable d'une action unique caractérisée par une seule intention coupable, ils peuvent donner lieu cumulativement à une déclaration de culpabilité. Tels sont les enseignements d'un arrêt de la Chambre criminelle rendu le 5 janvier 2017 (Cass. crim., 5 janvier2017, n° 15-86.362, FS-P+B N° Lexbase : A4789S3R). En l'espèce, Mme T., gérante de la société F., et cette société ont été poursuivies et condamnées du chef d'escroquerie pour avoir, en produisant des dossiers d'indemnisation comportant de fausses attestations de formation, trompé le fonds d'assurance de la formation dans l'industrie hôtelière (FAFIH) le déterminant à remettre des fonds, soit des indemnités de formation. La société X, groupe contrôlant cinquante-cinq hôtels constitués en société dont les directeurs sont salariés, sa présidente, Mme D., l'adjoint de la présidente et ses directeurs régionaux ont été poursuivis du chef de complicité de l'escroquerie précitée au préjudice du FAFIH pour avoir donné instruction aux directeurs d'hôtels relevant de la société de remplir de fausses attestations de formation, la société X et Mme D. étant également poursuivies du chef de recel pour avoir fait bénéficier la société d'un soutien juridique et administratif frauduleusement financé par le fonds d'assurance. Pour déclarer les prévenues coupables des faits de complicité d'escroquerie et recel, l'arrêt a retenu, notamment, que les auteurs de l'escroquerie reconnaissent l'intégralité des faits reprochés, soit la présentation de fausses feuilles de présence à des formations, que Mme D. jouait un rôle central dans la société X, que ses qualités professionnelles en matière d'expertise comptable et sa longue expérience lui avaient permis d'apprécier les propositions faites par Mme T. lorsqu'elles ont négocié en tête à tête les modalités financières de la formation continue envisagée et la distinction de celle-ci avec les audits sociaux et les consultations juridiques non éligibles au financement par le FAFIH, que les courriels, échangés entre les différents protagonistes ne laissaient aucune ambiguïté sur le contenu des audits sociaux et prétendues formations indûment pris en charge par le fonds et la connaissance par Mme D. du processus mis en place. Enonçant la solution précitée, la Chambre criminelle rejette les pourvois formés par la société X et Mme D. (cf. l’Ouvrage "Droit pénal spécial" N° Lexbase : E0648E9U).

newsid:456183

Sécurité sociale

[Brèves] Rejet de la demande d'annulation d'un arrêté relatif à la prise en charge des frais des activités de soins de suite et de réadaptation et des activités de soins de psychiatrie des établissements de santé privés

Réf. : CE 1° et 6° s-s-r., 28 décembre 2016, n° 391358, mentionné au recueil Lebon (N° Lexbase : A4882S39)

Lecture: 2 min

N6132BWZ

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Le 14 Mai 2018

Dès lors que les taux d'évolution des tarifs journaliers des établissements de santé privés ayant conclu un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens avec l'agence régionale de santé mentionnés au d de l'article L. 162-22-6 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L9834KXI) doivent être fixés, aux termes de l'article R. 162-41-1 (N° Lexbase : L1264IN7) du même code, dans le respect de l'objectif quantifié national relatif aux activités de ces établissements, fixé en application des articles L. 162-22-2 (N° Lexbase : L9578IN3) et R. 162-41 (N° Lexbase : L1265IN8) du code, assurant ainsi sa mise en oeuvre, l'arrêté fixant les taux d'évolution doit être regardé comme pris pour l'application de l'arrêté fixant pour l'objectif quantifié national. Par suite, l'illégalité de cet arrêté peut être utilement invoquée, par voie d'exception, à l'appui d'un recours tendant à l'annulation de l'arrêté fixant les taux d'évolution. Telle est la solution retenue par le Conseil d'Etat dans un arrêt rendu le 28 décembre 2016 (CE 1° et 6° s-s-r., 28 décembre 2016, n° 391358, mentionné au recueil Lebon N° Lexbase : A4882S39).
Dans cette affaire, la Fédération de l'hospitalisation privée et le Syndicat des soins de suite et de réadaptation ont demandé au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du ministre des Finances et des Comptes publics et du ministre des Affaires sociales et de la Santé du 25 mars 2016 fixant pour l'année 2016 les éléments tarifaires mentionnés aux 1° à 3° du I de l'article L. 162-22-3 du Code de la Sécurité sociale (N° Lexbase : L1354I7B) des établissements de santé mentionnés au d de l'article L. 162-22-6 du Code de la Sécurité sociale. En vertu des dispositions des articles L. 162-22 (N° Lexbase : L8881KUH), L. 162-22-1 (N° Lexbase : L6267IG9) et R. 162-29-1 (N° Lexbase : L1287INY) du Code de la Sécurité sociale, les frais des activités de soins de suite et de réadaptation et des activités de soins de psychiatrie des établissements de santé privés ayant conclu un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens avec l'agence régionale de santé mentionnés au d) de l'article L. 162-22-6 du même code sont pris en charge, en tout ou partie, par les régimes obligatoires de sécurité sociale sur la base de tarifs journaliers fixés pour chaque établissement par le directeur général de l'agence régionale de santé.
Enonçant la solution précitée, le Conseil d'Etat rejette la demande de la Fédération et du Syndicat (cf. l’Ouvrage "Droit de la protection sociale" N° Lexbase : E9464AB7).

newsid:456132

Sociétés

[Textes] Les modifications apportées par la loi "Sapin II" au droit des sociétés

Réf. : Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique (N° Lexbase : L6482LBP)

Lecture: 19 min

N6105BWZ

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par Bastien Brignon, Maître de conférences - HDR à l'Université d'Aix-Marseille, Membre du Centre de droit économique (EA 4224) et de l'Institut de droit des affaires (IDA), Directeur du Master professionnel Ingénierie des sociétés

Le 12 Janvier 2017

1. La loi du 9 décembre 2016, relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite loi "Sapin II", a été publiée au Journal officiel du 10 décembre 2016, après avoir été partiellement censurée par le Conseil constitutionnel (1).
2. Cette loi contient diverses mesures, dans des domaines très variés : fiscalité, droit bancaire et financier, droit boursier, droit des assurances, droit social, droit de la concurrence, etc. Le droit des sociétés est également concerné. Mais il est de deux manières : d'une façon très forte, avec des dispositions phares ; il s'agit des dispositions relatives aux lanceurs d'alerte et à la lutte contre la corruption, que l'on résumera à la "compliance" (2) et à l'intégration dans la loi du "Say on Pay" qui était déjà prévu par le code Afep-Medef depuis 2013 (3). On aura compris que seules les grandes sociétés sont concernées par ces mesures, en particulier celles cotées en bourse. Et d'une façon moins importante où le droit des sociétés se trouve une nouvelle fois modifié à la marge. C'est cette seconde série de dispositions que nous étudierons ici, étant rappelé qu'elles ne sont pas fondamentales, mais qu'elles doivent tout de même être connues ne serait-ce que pour maîtriser le quotidien, le juridique des sociétés de taille moindre. 3. Les mesures en droit des sociétés issues de la loi "Sapin II" peuvent être présentées selon qu'elles sont communes à toutes les sociétés commerciales (I) ou qu'elles intéressent plus particulièrement telle ou telle forme de société (II). On évoquera également l'entrée en vigueur de ces nouveaux textes (III) ainsi que d'autres dispositions relatives au droit des sociétés ou au droit des affaires en général issues d'autres législations que la loi "Sapin II" (IV).

I - Dispositions communes à toutes les sociétés commerciales

  • Suppression du visa de la comptabilité lors des apports de fonds de commerce

4. En cas d'apport d'un fonds de commerce, l'apporteur et le représentant qualifié de la société bénéficiaire de l'apport doivent viser tous les livres de comptabilité qui ont été tenus par l'apporteur durant les trois exercices comptables précédant celui de la vente. L'article 129 de la loi supprime cette obligation (C. com., art. L. 141-2, al. 1er, mod. N° Lexbase : L7633LBC). L'obligation de viser un document présentant les chiffres d'affaires mensuels réalisés entre la clôture du dernier exercice comptable et le mois précédant celui de l'apport est en revanche maintenue. En outre, l'apporteur demeure tenu de mettre à la disposition de la société bénéficiaire, sur demande de celle-ci et pendant un délai de trois ans à compter de son entrée en jouissance du fonds, tous les livres de comptabilité tenus durant les trois exercices comptables précédant celui de l'apport.

5. Les modifications apportées par l'article 129 de la loi s'appliquent à toute cession de fonds de commerce, dont les apports. La loi crée, par ailleurs, des allégements propres aux apports de fonds de commerce à des sociétés unipersonnelles (cf. infra).

  • Suppression de la solidarité du loueur de fonds après publication du contrat de location-gérance

6. Avant promulgation de la loi, le loueur d'un fonds de commerce était solidairement responsable des dettes de son locataire-gérant jusqu'à la publication du contrat de location-gérance et pendant un délai de six mois à compter de cette publication. Cette règle est assouplie. Ainsi, l'article 144 de la loi prévoit que le loueur de fonds n'est solidaire des dettes contractées par le locataire-gérant à l'occasion de l'exploitation du fonds que jusqu'à la publication du contrat de location-gérance (C. com., art. L. 144-7 N° Lexbase : L7678LBY).

7. De plus, l'article 1684 du Code général des impôts (N° Lexbase : L3267HMX) prévoyait une solidarité fiscale du loueur de fonds avec le locataire-gérant, et ce pendant toute la durée du contrat, pour les impôts directs établis à raison de l'exploitation du fonds. Dorénavant, la solidarité fiscale prend également fin au jour de la publication du contrat de location-gérance (CGI, art. 1684, mod. N° Lexbase : L7673LBS). Néanmoins, le loueur reste tenu solidairement des dettes nées avant la publication du contrat de location-gérance. Surtout, il est institué une exception assez forte à la cessation de la solidarité fiscale entre propriétaire et exploitant du fonds de commerce à la date de publication du contrat de location-gérance en cas de retard ou fraude. Ainsi, le propriétaire du fonds reste solidairement responsable des impôts directs avec l'exploitant, au-delà de la date de publication du contrat de location-gérance, lorsqu'il a connaissance ou aurait dû connaître :

- le défaut de production, dans les délais, de la déclaration indiquant les éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt et qui entraîne l'application d'une majoration de 40% lorsque l'exploitant n'a pas déposé la déclaration dans les 30 jours qui suivent la mise en demeure notifiée par pli recommandé (CGI, art. 1728, 1, b N° Lexbase : L9544IY7) et de 80% en cas de découverte d'une activité occulte (CGI, art. 1728, 1, c) ;

- les inexactitudes ou omissions dans une déclaration de revenus comportant les éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt et qui entraînent l'application d'une majoration de 40 % en cas de manquement délibéré (CGI, art. 1729, a N° Lexbase : L4733ICB) et de 80% en cas d'abus de droit ou de manoeuvres frauduleuses (CGI, art. 1729, b et c), et 1684, 3, mod. par "LFR" 2016, art. 26 N° Lexbase : L0859LCS).

Cette mesure s'applique aux impositions mises en recouvrement à compter du 1er janvier 2017.

  • Ratification de l'ordonnance n° 2016-315 du 17 mars 2016, portant réforme du commissariat aux comptes (N° Lexbase : L1882K7T)

8. L'article 140 de la loi vient ratifier l'ordonnance n° 2016-315 du 17 mars 2016 (4), venant elle-même adapter le droit français à deux textes européens, à savoir la Directive 2014/56 du 16 avril 2014, modifiant la Directive 2006/43/CE concernant les contrôles légaux des comptes annuels et des comptes consolidés (N° Lexbase : L3258I33) et le Règlement n° 537/2014 (N° Lexbase : L2938I7X), de la même date, qui prescrit des exigences spécifiques pour les entités d'intérêt public.

9. La loi nouvelle (art. 140) ajoute diverses mesures à cette ordonnance, dont notamment la possibilité pour les personnes et structures détenues par une entité d'intérêt public de se doter d'un comité d'audit spécialisé chargé d'assurer les services autres que la certification des comptes (ce service relevant de la compétence des CAC) au sein de leur conseil d'administration ou de surveillance. A ce titre, l'entité d'intérêt public est également tenue de se doter d'un tel comité d'audit spécialisé. Ainsi, un comité peut être constitué au sein de la filiale, et devra rendre compte régulièrement des décisions adoptées à l'organe chargé de l'administration ou à l'organe de surveillance de la société qui la contrôle.

10. En matière de sanction des CAC, la loi vient également introduire un délai de prescription de six ans qui s'applique aux faits pour lesquels il n'a été fait pendant ce délai aucun acte tendant à leur recherche, à leur constatation ou à leur sanction (C. com., art. L. 824-4 N° Lexbase : L7646LBS).

  • Restriction de la responsabilité du dirigeant pour insuffisance d'actif

11. En l'état du droit antérieur, l'article L. 651-2 du Code de commerce (N° Lexbase : L7679LBZ), relatif à la responsabilité du dirigeant en cas d'insuffisance d'actif, prévoyait, en cas de faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif, que le ou les dirigeants responsables puissent être condamnés à supporter, en tout ou en partie, le montant de cette insuffisance d'actif. Ceux-ci pouvaient, en outre, être condamnés au titre de leur faute de gestion à des sanctions telles qu'une interdiction de gérer. L'article 146 de la loi, dans un objectif d'encouragement de l'entreprenariat et de rebond des dirigeants de bonne foi, vient assouplir les modalités de l'engagement de la responsabilité du dirigeant en ajoutant qu'"en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée". Une telle précision n'est pas neutre.

II - Dispositions particulières aux sociétés commerciales

A - Dispositions communes aux sociétés par actions

  • Transformation d'une société en société par actions

12. Selon l'article L. 224-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L7676LBW), lorsqu'une société qui n'a pas de commissaire aux comptes se transforme en société par actions, un ou plusieurs commissaires à la transformation doivent être désignés afin d'apprécier la valeur des biens composant l'actif social et les avantages particuliers. Ce même article précisait, par ailleurs : "Le commissaire aux comptes de la société peut être nommé commissaire à la transformation". Le comité de coordination du RCS déduit de cette précision une obligation, pour les sociétés dotées d'un commissaire aux comptes, de faire établir par ce dernier le rapport sur la valeur des biens composant l'actif social qu'un commissaire à la transformation est tenu d'établir en l'absence de CAC (CCRCS, avis n° 2012-038, 25 octobre 2012 N° Lexbase : X9599ARX). Cette obligation est sujette à discussion. La loi supprime la phrase énonçant la précision litigieuse (art. 144, I, 3°), de sorte qu'il est acquis, désormais, qu'une société dotée d'un CAC se transformant en société par actions est dispensée de faire évaluer les biens composant son actif social (5).

  • Cumul de missions des commissaires aux comptes dans une même société

13. Sont modifiés certains articles du Code de commerce afin d'expliciter la possibilité pour un commissaire aux comptes de cumuler certaines missions légales ponctuelles au sein d'une même SA ou d'une même SAS -certaines de ces missions ne concernent, toutefois, que les SA- (C. com., art. L. 225-8 N° Lexbase : L7669LBN, L. 225-101 N° Lexbase : L7663LBG et L. 225-147 N° Lexbase : L7662LBE, mod. par la loi "Sapin II", art. 142). Il s'agit des missions relatives aux apports en nature et stipulations d'avantages particuliers lors de la constitution de la société et en cours de vie sociale, à l'acquisition par la société d'un bien appartenant à un actionnaire dans les deux ans de son immatriculation, aux augmentations de capital avec offre au public dans les deux ans de la constitution de la société, à la création d'actions de préférence soumise à la procédure des avantages particuliers et à l'émission d'obligations par une société n'ayant pas établi deux bilans régulièrement approuvés.

B - Dispositions relatives aux SA

  • Alignement du régime des SA dualistes sur celui des SA monistes en matière d'autorisations préalables

14. Dans les SA à conseil d'administration (CA), la cession d'immeubles par nature, la cession totale ou partielle de participations ainsi que la constitution de sûretés, ne sont soumises à aucune autorisation préalable. En revanche, dans les SA à directoire et à conseil de surveillance (CS), ces mêmes opérations étaient jusqu'ici soumises à l'autorisation du CS (C. com., art. L. 225-68, anc. N° Lexbase : L3636IPD). L'article 142 de la loi harmonise le régime des sociétés monistes et dualistes en supprimant l'autorisation qui était exigée dans les secondes (C. com., art. L. 225-68, nouv. N° Lexbase : L7664LBH). Dorénavant, dans les deux types de SA, seuls les cautions, avals et garanties (sauf dans les sociétés exploitant un établissement bancaire ou financier) continueront de faire l'objet d'une autorisation du CA ou du CS.

  • Renforcement des pouvoirs du CA ou CS : possibilité de déplacer le siège social sur l'ensemble du territoire français

15. Avant la loi "Sapin II", le CA ou le CS était habilité à déplacer le siège de la société uniquement dans le même département ou dans un département limitrophe, et ce, sous réserve de la ratification de cette décision par la prochaine assemblée générale ordinaire. L'article 142, 2° et 4° de la loi étend cette prérogative à l'ensemble du territoire français, sous réserve, toujours, de soumettre cette décision à une délibération ultérieure des actionnaires (C. com., art. L. 225-36, mod. N° Lexbase : L7668LBM et L. 225-65, mod. N° Lexbase : L7665LBI).

16. A cet égard, le CA ou CS aura la possibilité d'apporter "les modifications nécessaires aux statuts pour les mettre en conformité avec les dispositions législatives et réglementaires". Ces modifications supposeront toutefois une délégation préalable de l'assemblée générale, et devront ensuite être ratifiées par l'assemblée générale extraordinaire suivant leur adoption (C. com., art. L. 225-36, mod. et L. 225-65, mod.).

  • Obligation d'information du CAC sur les conventions réglementées autorisées et conclues

17. Jusqu'alors, la procédure des conventions réglementées imposait au CA ou CS de donner une autorisation préalable à la signature d'une convention entre la société et son directeur général, l'un de ses directeurs généraux délégués, l'un de ses administrateurs, l'un des membres du directoire ou du CS, l'un de ses actionnaires disposant d'une fraction des droits de vote supérieure à 10 % ou, s'il s'agit d'une société actionnaire, la société contrôlant celle-ci. En cas d'autorisation préalable du conseil, le commissaire aux comptes devait ensuite donner un avis sur la convention conclue. Enfin, l'assemblée générale était appelée à approuver la convention.

18. Dans un souci de clarification de cette procédure, l'article 142, 3° de la loi précise que l'obligation d'informer le CAC, qui incombe au président du CA ou CS, ne concerne que les conventions réglementées autorisées et conclues (C. com., art. L. 225-40, mod. N° Lexbase : L7667LBL et L. 225-88, mod. N° Lexbase : L7666LBK). Dit autrement, l'avis des commissaires aux comptes et l'approbation de l'assemblée générale ne sont pas requis pour les conventions réglementées qui ont été autorisées mais qui ne sont finalement pas conclues. On pouvait déjà le penser au regard de l'article R. 225-30 du Code de commerce (N° Lexbase : L7369I8G), qui précise que l'information doit intervenir "dans le délai d'un mois à compter de la conclusion de ces conventions et engagements".

  • Demande amiable de retrait des souscripteurs d'actions d'une SA non créée

19. L'article L. 225-11 du Code de commerce (N° Lexbase : L5882AIP) permettait aux souscripteurs des actions d'une SA nouvelle d'obtenir la restitution de leurs fonds s'il advenait que la société n'était pas créée dans les six mois suivants le dépôt du projet de statuts au greffe. Tout souscripteur pouvait alors demander en justice la nomination d'un mandataire chargé de retirer les fonds pour les restituer aux souscripteurs, sous déduction des frais de répartition.

20. Désormais, comme en matière de SARL, les souscripteurs peuvent agir si la société n'est pas constituée dans le délai de six mois à compter du "premier dépôt de fonds ou si elle n'est pas immatriculée au registre du commerce et des sociétés dans le même délai". Surtout, les souscripteurs n'ont plus à passer par la voie judiciaire : ils peuvent désormais demander directement le retrait des fonds au dépositaire par un mandataire représentant l'ensemble des souscripteurs (C. com., art. L. 225-11, mod. N° Lexbase : L7675LBU ; loi "Sapin II", art. 144, I, 4°).

C - Dispositions relatives aux SAS

  • Dérogation au principe de désignation d'un commissaire aux apports en cas d'apports en nature

21. L'article 130, 2° de la loi modifie le régime de la SAS en matière d'apports en nature, auparavant identique à celui de la SA, en le rapprochant de celui de la SARL. A la constitution de la SAS, les associés pourront ainsi décider à l'unanimité que le recours à un commissaire aux apports ne sera pas obligatoire, lorsque la valeur d'aucun apport en nature n'excède un montant fixé par décret -ce montant est fixé à 30 000 euros pour les SARL- et si la valeur totale de l'ensemble des apports en nature non soumis à l'évaluation d'un commissaire aux apports n'excède pas la moitié du capital (C. com., art. L. 227-1, al. 5, nouv. N° Lexbase : L7635LBE).

22. La loi crée cependant un mécanisme de responsabilité des associés à l'égard des tiers dans cette hypothèse. Il est en effet prévu que, lorsqu'il n'y a pas eu de commissaire aux apports ou lorsque la valeur retenue est différente de celle proposée par le commissaire aux apports, les associés seront solidairement responsables pendant cinq ans, à l'égard des tiers, de la valeur attribuée aux apports en nature lors de la constitution de la société (C. com., art. L. 227-1, al. 7, nouv.).

23. Ces dispositions s'appliquent également aux fondateurs de SASU qui bénéficient, par ailleurs, d'un cas de dispense spécifique (cf. infra).

  • Modifications applicables par renvoi aux dispositions sur les SA

24. Les dispositions relatives au retrait des fonds en cas de défaut d'immatriculation de la société applicable à la SA s'appliquent par renvoi aux SAS.

D - Dispositions relatives aux SARL

  • Extension des dérogations au principe de désignation d'un commissaire aux apports aux apports en nature effectués en cours de vie sociale

25. L'article L. 223-9 du Code de commerce (N° Lexbase : L7636LBG) laisse la possibilité aux associés, lors de la création d'une SARL, de "décider à l'unanimité que le recours à un commissaire aux apports ne sera pas obligatoire, lorsque la valeur d'aucun apport en nature n'excède un montant fixé par décret et si la valeur totale de l'ensemble des apports en nature non soumis à l'évaluation d'un commissaire aux apports n'excède pas la moitié du capital", étant rappelé que ladite valeur est fixée actuellement à 30 000 euros. Dans le cas où un commissaire aux apports ne serait pas intervenu, les associés sont solidairement responsables vis-à-vis des tiers de la valeur des apports retenue à la constitution de la société, et ce pour une durée de cinq ans. L'article 144, I, 2° de la loi étend aux apports en nature réalisés en cours de vie sociale cette dérogation à la désignation obligatoire d'un commissaire aux apports (C. com., art. L. 223-33, al. 1er, nouv. N° Lexbase : L7677LBX).

E - Dispositions communes aux EURL et SASU

  • Simplification des formalités d'apport de fonds de commerce à une EURL ou à une SASU

26. L'article 129 de la loi simplifie les modalités de l'apport d'un fonds de commerce à une société unipersonnelle en limitant les mentions obligatoires de l'acte d'apport, prévues à l'article L. 141-1 du Code de commerce (N° Lexbase : L7634LBD), dont la méconnaissance peut entraîner la nullité de l'apport, mais qui ne sont a priori pas utiles en cas d'apport à une société détenue entièrement par le propriétaire (et vendeur) du fonds. Se trouve ainsi dispensé de ces exigences formelles le contrat d'apport d'un fonds de commerce à une EURL ou à une SASU dont l'apporteur est l'associé unique.

  • Suppression de l'obligation de désigner un commissaire aux apports en cas de transformation d'une entreprise individuelle en EURL ou en SASU

27. L'article 130, 1° et 2° de la loi introduit la possibilité pour l'associé unique d'une SASU ou d'une EURL qui exerçait son activité professionnelle en son nom propre avant la constitution de la société, de ne pas faire appel à un commissaire aux apports s'il apporte à cette société des éléments qui figuraient dans le bilan de son dernier exercice (C. com., art. L. 223-9, al. 3, nouv., pour l'EURL, et art. L. 227-1, al. 6, nouv., pour la SASU).

  • Allégements en faveur des apports de fonds de commerce à une société unipersonnelle

28. L'apporteur d'un fonds de commerce est tenu d'indiquer, dans l'acte d'apport, certaines informations relatives au fonds (origine de la propriété, état des privilèges et nantissements, énonciation des chiffres d'affaires des trois derniers exercices comptables, etc.). Par ailleurs, l'apport d'un fonds de commerce doit faire l'objet d'une publication dans un JAL et d'un avis au BODACC. La loi supprime ces obligations lorsque l'apport du fonds de commerce est effectué au profit d'une société détenue en totalité par l'apporteur (C. com., art. L. 141-1, mod. et L. 141-21, mod. N° Lexbase : L7632LBB par l'article 129 de la loi "Sapin II"). Cette disposition a pour objet de faciliter le passage de l'entreprise individuelle en EURL ou SASU, les obligations en cause étant inutiles en pareille hypothèse.

F - Dispositions relatives aux entreprises individuelles

29. Bien qu'ils ne soient absolument pas des sociétés, on mentionnera tout de même des dispositions relatives aux EIRL destinées à simplifier le passage du régime de l'entrepreneur individuel à celui de l'EIRL.

30. Plusieurs mesures viennent simplifier les formalités liées au passage du régime d'entrepreneur individuel à celui d'EIRL, à savoir :

- le possibilité pour l'entrepreneur de déclarer soit les valeurs nettes comptables figurant dans les comptes du dernier exercice clos s'il est tenu à une comptabilité commerciale, soit la valeur d'origine de ces éléments telle qu'elle figure au registre des immobilisations du dernier exercice clos, diminuée des amortissements déjà pratiqués, s'il n'est pas tenu à une telle comptabilité (C. com., art. L. 526-8, nouv. N° Lexbase : L7631LBA) ;

- la suppression de l'obligation d'évaluation des biens d'une valeur supérieure à 30 000 euros pour les entrepreneurs individuels qui n'ont pas opté pour l'assimilation à une EURL ou à une EARL, au sens de l'article 1655 sexies du Code général des impôts (N° Lexbase : L3841KW8 C. com., art. L. 526-10, nouv. N° Lexbase : L1994IPK) ;

- la suppression de la possibilité de rendre opposable une déclaration d'affectation professionnelle aux créanciers dont les droits sont nés antérieurement à son dépôt et suppression en conséquence de leur droit d'opposition (C. com., art. L. 526-12, nouv. N° Lexbase : L1993IPI) ;

- la suppression de la disposition selon laquelle " l'opposition formée par un créancier n'a pas pour effet d'interdire la constitution du patrimoine affecté ". Cette suppression est la conséquence de celle qui précède : dès lors que l'entrepreneur ne peut plus rendre l'affectation opposable aux créanciers antérieurs, cette mention n'est plus utile (C. com., art. L. 526-12, nouv.) ;

- l'allégement des formalités liées à la publication des documents comptables par les EIRL (C. com., art. L. 526-14, nouv. N° Lexbase : L1991IPG).

III - Entrées en vigueur

31. Toutes les dispositions précitées sont entrées en vigueur le lendemain du jour de la publication au Journal officiel de la loi Sapin "II", soit le 11 décembre 2016.

32. Il faut savoir que certaines dispositions de la loi Sapin II entreront en vigueur le 1er avril 2017. Tel est le cas de la création d'un registre public des bénéficiaires effectifs des personnes morales (art. 139). Il faut savoir également que certaines dispositions entreront en vigueur a priori courant 2017. Tel est le cas du "Say on Pay" (C. com., art. L. 225-37-2 N° Lexbase : L7433LBW) à propos duquel la loi renvoie à un décret à venir le soin de déterminer les conditions d'application de ce nouveau dispositif qui sera "applicable à compter de l'assemblée générale ordinaire statuant sur le premier exercice clos après la promulgation de la présente loi". Une telle formulation semble indiquer une entrée en vigueur dès 2017, lors des assemblées générales statuant sur l'exercice 2016. En outre, d'autres dispositions encore entreront en vigueur dans un délai de six mois à compter de la publication de la loi, soit à compter du 10 juin 2017. Tel est le cas du maintien des droits de vote double au profit de l'absorbante ou du bénéficiaire de la scission. En effet, l'article 144 de la loi a complété l'article L. 225-124 du Code de commerce (N° Lexbase : L7674LBT), son dernier alinéa disposant désormais que lorsqu'une société qui détient des droits de vote double dans une société tierce est absorbée ou scindée, ces droits de vote double sont maintenus au profit de la société absorbante, la société bénéficiaire de la scission ou la société nouvelle résultant e l'opération de fusion ou de scission.

33. Par ailleurs, la loi "Sapin II" habilite le Gouvernement à légiférer par voie d'ordonnance sur les points suivants :

- suppression de l'exigence d'unanimité pour l'adoption ou la modification des clauses d'agrément dans les SAS (art. 141 de la loi et C. com., art. L. 227-10 N° Lexbase : L2556IBB) ;

- redéfinition du périmètre des conventions réglementées dans les SASU (art. 141 de la loi et C. com., art. L. 227-19 N° Lexbase : L6174AII) ;

- dépôt de projets de résolution ou de points à l'ordre du jour par les associés des SARL (art. 141) ;

- tenue des assemblées générales par recours exclusif aux moyens de visioconférence ou de télécommunication (art. 141)

- rationalisation des obligations de reporting d'information dans les sociétés par actions (art. 136), dont la dématérialisation du dépôt des comptes annuels et l'allégement du rapport de gestion des petites entreprises.

Compte tenu de l'échéance prochaine des présidentielles, et donc de tout l'aléa qui entoure ces mesures, nous nous permettons de ne pas les développer.

IV - Mesures à connaître en droit des sociétés issues d'autres législations récentes

34. Il nous paraît utile de mentionner des modifications récentes pour les praticiens du droit des affaires.

35. D'abord, l'obligation de publier l'acte de cession ou celui d'apport d'un fonds de commerce dans un JAL avait été supprimée par l'article 107 de la loi "Macron" du 6 août 2015 (loi n° 2015-990 N° Lexbase : L4876KEC). Seule subsistait, depuis le 8 août 2015, l'obligation de publier l'acte au BODACC. L'article 21 de la loi n° 2016-1524 du 14 novembre 2016, visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias (N° Lexbase : L1043LBA), réintroduit l'obligation de publier l'acte de cession et celui d'apport d'un fonds de commerce dans un JAL dans l'arrondissement ou le département dans lequel le fonds est exploité, dans les 15 jours de l'opération (C. com., art. L. 141-12, mod. N° Lexbase : L1129LBG et L. 141-21, mod. N° Lexbase : L7632LBB). Cette obligation s'applique aux opérations intervenues depuis le 16 novembre 2016. Toutefois, cette formalité ne s'applique pas aux transmissions de fonds de commerce intervenant dans le cadre d'une opération de fusion ou de scission concernant des sociétés par actions et/ou des SARL (C. com., art. L. 141-21).

36. Ensuite, la loi de finances rectificative pur 2016 indique qu'en cas de cession d'un fonds de commerce, la durée de la solidarité fiscale entre cessionnaire et cédant, et donc de la mise des fonds sous séquestre, est réduite de 90 à 30 jours à certaines conditions. En effet, en cas de cession d'une entreprise industrielle, commerciale, artisanal ou minière (à titre onéreux ou gratuit) le cessionnaire est responsable solidairement avec le cédant du paiement de la taxe d'apprentissage, de l'impôt sur le revenu (IR) ou de l'impôt sur les sociétés (IS) afférents aux bénéfices réalisés par le cédant :
- au cours de l'exercice de la cession jusqu'au jour de cette dernière ou ;
- de l'exercice précédent lorsque la cession est intervenue dans le délai normal de déclaration et qu'ils n'ont pas été déclarés par le cédant avant la date de la cession (CGI, art. 1684, 1, al. 1er N° Lexbase : L7673LBS).

En pratique, le prix de cession fait l'objet d'un séquestre, chez un avocat ou notaire, en garantie du paiement des impôts dus à échoir.

Le délai de cette solidarité, actuellement fixé à 90 jours, peut désormais être réduit à 30 jours lorsque trois conditions sont cumulativement remplies :
- l'administration fiscale est avisée de la cession par le dépôt de la déclaration de cession dans le délai légal de 45 jours (CGI, art. 201, 1 N° Lexbase : L1131LBI) ;
- le cédant a déposé sa déclaration de résultats, qu'il relève du régime réel ou micro, dans le délai légal de 60 jours (CGI, art. 201, 3 et 3 bis) ;
- le cédant respecte, au dernier jour du mois qui précède la vente ou la cession du fonds, ses obligations déclaratives et de paiement en matière fiscale.

L'objectif est d'accélérer le déblocage du prix de vente pour permettre au cédant de réinvestir plus rapidement. Toutefois, si l'une de ces conditions n'est pas remplie, le délai durant lequel le cessionnaire est solidairement responsable demeure de 90 jours.

Le point de départ du délai (de 30 ou 90 jours) est également modifié. Il commence à courir au jour du dépôt de la déclaration de résultats et non de la déclaration de cession (CGI, art 1684, 1 mod. par "LFR 2016", art. 25, I).

Cette mesure s'applique aux cessions de fonds de commerce réalisées à compter du 1er janvier 2017 ("LFR 2016", art. 25, II).

37. On rappellera enfin que la loi "Justice XXIème siècle" (loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 N° Lexbase : L1605LB3), outre de modifier un peu le droit des entreprises en difficulté, ratifie l'ordonnance sur le gage de stocks et réécrit les articles 2061 du Code civil (N° Lexbase : L2433LBQ) concernant la clause compromissoire (6) et l'article L. 721-3 du Code de commerce (N° Lexbase : L2718LBB) posant les trois chefs de compétence ratione materiae du tribunal de commerce (7).

38. Bref, il faut un certain courage à tous ceux qui enseignent et/ou pratiquent le droit des affaires !


(1) Cons const., décision n° 2016-741 DC, du 8 décembre 2016 (N° Lexbase : A1548SPZ), Dalloz Actualité, 13 décembre 2016, obs. M.-C. de Montecler.
(2) Cf. not., V. Téchené, Loi "Sapin II" : création d'une obligation de prévention et de détection des risques de corruption visant le grandes sociétés, Lexbase, éd. aff., 2016, n° 494 (N° Lexbase : N6135BW7).
(3) V., H. Le Nabasque, Le Say on Pay contraignant, Bull. Joly Sociétés, septembre 2016, p. 461 ; T. de Ravel d'Esclapon, Loi Sapin 2 : modifications concernant les sociétés par actions, Dalloz Actualité, 5 janvier 2017.
(4) Sur ce texte v., B. Lecourt, Premiers regards sur l'ordonnance n° 2016-315 du 17 mars 2016 relative au commissariat aux comptes, adaptant le droit français au droit européen, Rev. sociétés, 2016, p. 332 ; J.-F. Barbièri, L'audit légal réformé par ordonnance (Ord. n° 2016-315, 17 mars 2016), Bull. Joly Sociétés, mai 2016, n° 114y6, p. 294. V. égal. La modification du régime du commissariat aux comptes, BRDA, 8/2016, p. 18, spéc. n° 12 ; J.-L. Navarro, Réforme de l'audit (Ord. n° 2016-315, 17 mars 2016 ; D. n° 2016-1026, 26 juill. 2016), JCP éd. E, 2016, 1546, spéc. n° 26 et s. ; M. Roussille, Dr. sociétés, 2016, comm. 102.
(5) En ce sens, Cass. com., 8 avril 2008, n° 06-15.193, FS-P+B+R+I (N° Lexbase : A8042D7Y).
(6) M. Danis et M. Valentini, L'impact de la réforme de la clause d'arbitrage dans la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle, JCP éd. E, 2016, 1003 ; L. Thibierge, Les conventions relatives aux litiges dans la loi J21, AJ contrats, décembre 2016, p. 523 ; D. Vidal, Justice du XXIème siècle : l'impact de l'article 11 alinéa 3 de la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 dans le domaine de l'arbitrage, Lexbase, éd. priv., 2016, n° 681 (N° Lexbase : N5777BWU).
(7) La nouvelle mouture de l'article L. 721-3 du Code de commerce n'entrera en vigueur que le 1er janvier 2022.

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